Date : 20140722
Dossier : IMM-7-13
Référence : 2014 CF 729
[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]
Ottawa (Ontario), le 22 juillet 2014
En présence de monsieur le juge Phelan
ENTRE : |
CHRISTINE TJIKARI KAMAHEKE |
CLAUDIA KAZAKU |
demanderesses |
et |
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION |
défendeur |
JUGEMENT ET MOTIFS
I. Introduction
[1] La Cour est saisie de la demande de contrôle judiciaire de la décision rendue par la Section de la protection des réfugiés [SPR] par laquelle la SPR a décidé que la demanderesse et sa fille n’avaient ni la qualité de réfugié au sens de la Convention ni celle de personne à protéger.
II. Le contexte
[2] La demanderesse est une citoyenne de la Namibie. Son époux est au Zimbabwe, deux de ses enfants sont quelque part à l’extérieur de la Namibie, une autre est en Namibie et la plus jeune est au Canada avec la demanderesse.
[3] La demanderesse est séropositive au VIH et elle suit un traitement depuis 2010.
[4] Le cœur de la demande de la demanderesse est que son oncle est en colère contre elle parce qu’elle n’a pas épousé son cousin. Il la menace depuis 1993. Son époux a prétendument été arrêté sur la base de fausses accusations, et ses autres filles et lui ont quitté la Namibie.
[5] La demanderesse affirme aussi qu’elle subira de la discrimination parce qu’elle est séropositive au VIH.
[6] La décision de la SPR est centrée sur l’absence de caractère crédible de la demande d’asile de la demanderesse, laquelle est fondée sur 18 années d’efforts de son oncle afin qu’elle épouse le fils de ce dernier. La demanderesse n’a entrepris aucune mesure pour solliciter la protection de l’État. La demanderesse a aussi omis de faire mention, dans les notes au point d’entrée, de l’allégation tardive selon laquelle une de ses filles avait été enlevée.
[7] La SPR a rejeté le rapport psychologique du Dr Pilowsky, parce qu’on devrait accorder peu de poids à un rapport qui se contente de réitérer le récit du patient, duquel il ressort un diagnostic (syndrome de stress post-traumatique et trouble dépressif) et qui est rédigé sur la foi d’une conversation qui a duré seulement cinq minutes.
[8] Comme conclusion subsidiaire, la SPR a décidé que la protection de l’État était offerte. Elle en a conclu ainsi après un examen approfondi du droit de la Namibie, de l’offre de services médicaux et de l’efficacité de la protection de l’État dans le contexte de ce genre de demande.
[9] Le seul aspect dérangeant de cette analyse de la protection de l’État est le commentaire selon lequel « la Namibie fait des “efforts sérieux” pour protéger ses citoyens » (souligné par la Cour).
III. Analyse
[10] La norme de contrôle applicable à cette décision est la décision raisonnable (Hou c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 993, 417 FTR 19).
[11] La conclusion relative à la protection de l’État était raisonnable. Un examen de l’analyse effectuée établit que la SPR a, dans les faits, pris en compte les questions opérationnelles et l’efficacité. La contestation visant l’emploi de l’expression « efforts sérieux » par un tribunal est fondée sur l’hypothèse que le tribunal a seulement tenu compte des efforts et non pas de l’efficacité de toutes les mesures de protection de l’État.
[12] Lorsque, comme en l’espèce, un examen équitable de l’analyse établit que « l’efficacité » a été prise en compte, la contestation visant l’emploi d’une expression comme « efforts sérieux » perd de son importance.
[13] Les conclusions relatives à la crédibilité, en particulier parce qu’elles commandent un degré élevé de retenue, étaient raisonnables. Au paragraphe 68 de la décision Rios c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 276, 214 ACWS (3d) 240, le juge O’Keefe a résumé les principes applicables pour le contrôle des conclusions en matière de crédibilité :
Il est bien établi que les conclusions en matière de crédibilité commandent un degré élevé de retenue judiciaire et elles ne devraient être infirmées que dans les cas les plus patents (voir Khan c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 1330, [2011] ACF no 1633, au paragraphe 30). C’est pourquoi, en règle générale, la Cour ne devrait pas substituer son opinion à celle de la Commission à moins de conclure que la décision était fondée sur des conclusions de fait erronées tirées de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont elle disposait (voir Bobic c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 1488, [2004] ACF no 1869, au paragraphe 3). Lorsqu’elle examine la décision d’une commission, la Cour ne doit pas scruter à la loupe des sections isolées de celle-ci. La Cour doit plutôt examiner si la décision dans son ensemble appuie une conclusion défavorable sur la crédibilité (voir Caicedo c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 1092, [2010] ACF no 1365, au paragraphe 30).
[14] La conclusion de la SPR selon laquelle la discrimination fondée l’état de santé de séropositive au VIH ne s’élève pas au niveau de la persécution est raisonnable. Il était raisonnablement loisible à la SPR de tirer cette conclusion.
[15] Les autres questions soulevées étaient accessoires. Toutefois, la Cour fait remarquer que la SPR a bien agi dans les limites de son mandat lorsqu’elle a accordé peu de poids au rapport psychologique, pour les motifs qu’elle a donnés.
IV. Conclusion
[16] En conséquence, la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée. Il n’y a pas de question à certifier.
JUGEMENT
LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée.
« Michael L. Phelan »
Juge
Traduction certifiée conforme
L. Endale
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : |
IMM-7-13
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INTITULÉ : |
CHRISTINE TJIKARI KAMAHEKE, CLAUDIA KAZAKU c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
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LIEU DE L’AUDIENCE : |
Toronto (Ontario)
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DATE DE L’AUDIENCE : |
Le 5 février 2014
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JUGEMENT ET MOTIFS : |
LE JUGE PHELAN
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DATE du jugement et DES MOTIFS : |
Le 22 juillet 2014 |
COMPARUTIONS :
John Norquay
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POUR LES DEMANDERESSES
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Nimanthika Kaneira
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POUR LE DÉFENDEUR
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
HIV & AIDS Legal Clinic (Ontario) (Clinique d’aide juridique sur le VIH et le sida de l’Ontario) Toronto (Ontario)
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POUR LES DEMANDERESSES
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William F. Pentney Sous-procureur général du Canada Toronto (Ontario)
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POUR LE DÉFENDEUR
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