Date : 20131113
Dossier : T‑1625‑12
Référence : 2013 CF 899
[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]
Vancouver (Colombie‑Britannique), le 13 novembre 2013
En présence de maître Roger R. Lafrenière, protonotaire
ACTION RÉELLE ET PERSONNELLE EN MATIÈRE D’AMIRAUTÉ
INTENTÉE CONTRE LE NAVIRE À VOILES « AESTIVAL »
ENTRE :
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0871768 B.C. LTD.
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demanderesse |
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et
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LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE NAVIRE À VOILES « AESTIVAL », LE NAVIRE « AESTIVAL », ISLAND‑SEA MARINE LTD., KENNETH W. HIGGS, EXECUTIVE YACHT SERVICES LTD. ET MICHAEL GUY COLBECK, FAISANT AFFAIRE SOUS LE NOM EXECUTIVE YACHT SERVICES ET/OU EXECUTIVE YACHT SERVICES LTD.
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défendeurs |
MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE
[1] La Cour est saisie d’une requête, présentée pour le compte d’Island‑Sea Marine Ltd. (Island‑Sea), de son président, Kenneth W. Higgs, et du navire à voiles « Aestival » (collectivement « les défendeurs-requérants »), sollicitant une ordonnance en vertu de l’article 488 des Règles des Cours fédérales (Règles) afin d’annuler la saisie du navire à voiles « Aestival », au motif que l’action de la demanderesse ne révèle pas une cause d’action réelle. Subsidiairement, les défendeurs-requérants sollicitent une ordonnance en vertu de l’article 485 des Règles fixant le montant nominal de la garantie d’exécution à verser pour obtenir la mainlevée de la saisie du navire.
[2] La demanderesse, 0871768 B.C. Ltd., affirme que l’« Aestival » a été saisi de façon conforme et régulière et que la saisie ne devrait pas être annulée. La demanderesse affirme aussi que si la Cour décide de fixer le montant de la garantie d’exécution à verser pour obtenir la mainlevée de la saisie du navire, cette garantie d’exécution devrait être fixée à un montant non inférieur à 58 000 $. Les défendeurs Executive Yacht Services Ltd. (Executive Yacht) et Michael Guy Colbeck ne prennent pas position à l’égard de la requête.
Action contre les défendeurs
[3] La demanderesse est la propriétaire du navire à voiles « Ain’t Life Grand ». En juillet 2012, le navire de la demanderesse a été halé hors de l’eau à des fins d’entretien au port Lynnwood de North Vancouver, en Colombie‑Britannique.
[4] Selon les allégations faites dans la déclaration et dans l’affidavit portant demande de mandat, le 27 juillet 2012, ou vers cette date, des travaux de meulage ont été effectués sur l’« Aestival » pendant que l’« Aestival » était situé près du navire de la demanderesse. Les travaux ont causé l’émanation, à partir de l’« Aestival », de particules de matières, notamment des particules de métaux, de peinture et de rouille qui se sont déposées sur le navire de la demanderesse. La demanderesse affirme que le navire a subi des dommages à la suite de la négligence des défendeurs, notamment les coûts se rattachant au nettoyage de la coque, du pont et de la voilure ainsi que la perte de l’utilisation de son navire.
[5] Le 31 août 2012, la demanderesse a déposé sa déclaration, dans laquelle elle demande des dommages‑intérêts d’un montant de 50 000 $. L’« Aestival » a été saisi en septembre 2012. Aucun des défendeurs n’a versé de cautionnement et l’« Aestival » est toujours saisi.
[6] Le 2 août 2013, les défendeurs-requérants ont présenté la présente requête en vue d’obtenir une ordonnance visant à faire annuler la saisie de l’« Aestival ».
Éléments de preuve à l’appui de la requête
[7] Les défendeurs-requérants ont déposé en preuve l’affidavit de M. Higgs pour appuyer leur requête visant à faire annuler la saisie de l’« Aestival ». Selon M. Higgs, l’« Aestival » a été conduit au port de plaisance de Lynnwood afin que des travaux y soient effectués par M. Colbeck d’Executive Yacht pour remettre en état la coque extérieure du navire. Monsieur Higgs est monté à bord de l’« Aestival » le 26 juillet 2012. Pendant que M. Colbeck était appelé ailleurs pour une autre affaire, M. Higgs a utilisé une meuleuse manuelle [traduction] « pendant 11 minutes » afin de procéder à un meulage adéquat de la coque. Monsieur Higgs nie qu’il y ait eu des dommages au navire de la demanderesse à la suite des travaux de meulage. Il affirme que si le navire de demanderesse a subi des dommages, c’est à cause des actions de M. Colbeck, qui a omis d’ériger la structure requise pour abriter la zone de travail sur l’« Aestival » ou de maintenir cette zone sous bâche.
[8] La demanderesse soutient que certaines parties de l’affidavit de M. Higgs devraient être radiées au motif qu’elles représentent une opinion personnelle. À titre d’exemple, au paragraphe 7 de son affidavit, M. Higgs affirme ce qui suit : [traduction] « Je crois sincèrement que les dommages allégués au navire de la demanderesse ne se sont pas produits. » De plus, au paragraphe 11, faisant référence à l’allégation de la demanderesse selon laquelle la détérioration par rouille ait été aperçue à la poupe du navire de la demanderesse presque deux mois après l’exécution des travaux de meulage, M. Higgs déclare : [traduction] « Je crois sincèrement qu’il est impossible qu’il y ait un lien quelconque avec cette allégation. »
[9] L’avocat des défendeurs-requérants a admis lors de l’instruction de la requête que les déclarations de M. Higgs constituent une opinion inadmissible en preuve et qu’elles devraient être ignorées. Je suis d’accord. Les déclarations en cause manquent clairement d’objectivité et d’impartialité.
[10] La demanderesse a déposé trois affidavits en réponse à la requête des défendeurs-requérants. L’auteur du premier affidavit est M. Philip O’Donoghue, copropriétaire et administrateur de Fraser Fibreglass Ltd. (Fraser). Celui du deuxième, M. F.I. Hopkinson, est un expert maritime. Celui du troisième, M. Matt Neilson, est un administrateur de la demanderesse.
[11] Monsieur O’Donoghue déclare qu’en juillet 2012, Fraser a effectué des travaux de réparation sur le navire de la demanderesse. Le 26 juillet 2012, le navire de la demanderesse était propre, poli et en parfaite condition, prêt à être mis à l’eau.
[12] Dans l’après‑midi du 26 juillet 2012, M. O’Donoghue a été informé par son contremaître que des travaux de meulage d’acier avaient lieu près du navire de la demanderesse et qu’on pouvait voir des débris et des étincelles se déposer sur le navire de la demanderesse. Monsieur O’Donoghue s’est rendu sur le chantier des travaux et a observé M. Colbeck qui se tenait à bâbord avant de l’« Aestival » et qui supervisait certains travaux effectués par M. Higgs à l’aide d’une petite meule.
[13] Monsieur O’Donoghue a vu un nuage de poussière et de débris qui s’étalait sur le navire de la demanderesse; il a remarqué qu’il n’y avait ni plastique ni bâche ou d’autres précautions prises pour contenir les débris de meulage. Il a demandé à M. Colbeck d’arrêter les travaux, mais celui-ci a ignoré sa demande. Il a alors offert à M. Colbeck un rouleau de feuille de plastique pour protéger le navire de la demanderesse. Monsieur Colbeck a continué à ignorer M. O’Donoghue. Monsieur Higgs a alors répondu qu’il nettoierait le navire de la demanderesse à l’aide d’un jet d’eau. Malgré les protestations de M. O’Donoghue, selon qui cela ne ferait qu’empirer le problème, M. Higgs a poursuivi le meulage.
[14] Monsieur O’Donoghue a quitté le chantier et s’est rendu à son bureau pour y prendre un appareil photo. À son retour, il a constaté que les travaux de meulage se poursuivaient toujours sur l’« Aestival ». Il pouvait aussi voir que la poussière et les débris continuaient de se déposer sur le navire de la demanderesse. Monsieur O’Donoghue a entendu M. Colbeck dire : [traduction] « Le trou d’cul a un appareil photo. » Apparemment imperturbables, M. Higgs et M. Colbeck ont continué le travail de meulage pendant que M. O’Donoghue prenait quelques photographies.
[15] Le lendemain, M. O’Donoghue a vu des employés de la société Executive Yacht qui sablaient les côtés supérieurs de la coque de l’« Aestival »; il a observé que de la poussière et des débris émanant de l’« Aestival » se déposaient sur le navire de la demanderesse.
[16] Le 28 juillet 2012, M. O’Donoghue a mené une inspection approfondie de la coque et du pont du navire de la demanderesse. Il a découvert des dommages à l’enduit gélifié du pont du navire, de même que d’autres dommages provenant des débris de meulage. Il a par la suite recommandé à M. Matt Neilson, administrateur de la société demanderesse, de faire nettoyer le navire de fond en comble.
[17] Les services de M. F.I. Hopkinson ont été retenus par le cabinet Navis Marine Insurance Brokers pour la préparation d’un rapport sur la contamination des ponts, des œuvres mortes et de la voilure du navire de la demanderesse. Dans une lettre datée du 31 juillet 2012, M. Hopkinson a informé M. Higgs qu’il avait recommandé la mise œuvre de mesures correctives dans les meilleurs délais afin de réduire au minimum les dommages causés par la limaille et les autres débris mis en contact avec le navire de la demanderesse lors des travaux effectués sur l’« Aestival ». À la deuxième page de sa lettre, M. Hopkinson écrit ce qui suit : [traduction] « Nous nous attendons à ce que les assureurs de la coque et des machines que nous représentons vous tiennent entièrement responsable des coûts associés au nettoyage. » Une copie du rapport d’inspection du 15 septembre 2012 de M. Hopkinson établissant les coûts approuvés de réparation du navire de la demanderesse est jointe à son affidavit.
[18] Monsieur Neilson indique que les réparations et le nettoyage du navire de la demanderesse ont été finalement achevés par Fraser le 6 octobre 2012 ou vers cette date, et que le navire a été alors remis à l’eau. Des copies des factures touchant les réparations, l’inspection et l’entreposage du navire totalisant 42 765,74 $ sont jointes à l’affidavit de M. Neilson. La demanderesse sollicite également des dommages‑intérêts pour la perte de l’utilisation de son navire durant la réparation.
[19] Il n’y a eu aucun contre‑interrogatoire des auteurs des affidavits déposés par les parties.
Les arguments et l’analyse
[20] Le mandat de saisie a été délivré sur la base des faits allégués dans l’affidavit portant demande de mandat, lequel vise à introduire une réclamation in rem en vertu de l’alinéa 22(2)d) de la Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, ch. F‑7 [la Loi], qui dispose :
22.(2) Il demeure entendu que, sans préjudice de la portée générale du paragraphe (1), elle a compétence dans les cas suivants :
[. . .]
d) une demande d’indemnisation pour décès, dommages corporels ou matériels causés par un navire, notamment par collision;
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22.(2) Without limiting the generality of subsection (1), for greater certainty, the Federal Court has jurisdiction with respect to all of the following:
[. . .]
(d) any claim for damage or for loss of life or personal injury caused by a ship other in collision or otherwise; |
[21] Les défendeurs-requérants font observer que l’action de la demanderesse est peut-être régie par le droit maritime canadien, mais qu’elle n’est pas de nature à donner lieu à un droit d’action en matière réelle. Pour soutenir leur thèse, ils invoquent un jugement prononcé récemment par le juge Roger T. Hughes dans l’affaire Wells Fargo Equipment Finance Company c Barge « MLT‑3 », 2012 CF 738 [Wells Fargo]. Pour trancher la question de savoir s’il y avait un droit d’action réelle contre la barge du défendeur, le juge Hughes a statué que l’expression « dommages causés par un navire » est un terme technique utilisé en droit maritime. Au paragraphe 65 de sa décision, le juge Hughes conclut, citant un passage des motifs du juge Lord Diplock dans l’arrêt The Eschersheim, 1 [1976] WLR 430, de la Chambre des Lords, que le dommage « doit être le résultat direct ou la conséquence naturelle de quelque chose qui a été fait par ceux qui se livrent à la navigation du navire, et l’instrument réel du dommage doit être le navire lui‑même ».
[22] Les défendeurs-requérants font valoir que l’alinéa 22(2)d) exige qu’une demande d’indemnisation pour des dommages suppose un certain contact physique ou une certaine action causée par la navigation du navire. Comme il n’y a pas de lien direct quelconque ou un lien causal entre l’« Aestival » et les dommages qu’aurait subis le navire de la demanderesse, il ne peut y avoir d’action réelle. Je ne suis pas d’accord.
[23] Dans le jugement Wells Fargo, le juge Hughes ne prétendait pas circonscrire, limiter ou restreindre la portée des actions réelles qui peuvent être intentées devant notre Cour. Il a simplement conclu, dans les circonstances particulières de l’affaire dont il était saisi, qu’aucune action réelle n’était générée contre la barge MLT‑3.
[24] Le paragraphe 22(2) de la Loi énonce certains chefs de droit maritime qui relèvent de la compétence de la Cour fédérale en droit maritime. L’action de la demanderesse dans la présente instance semble relever de l’alinéa 22(2)d) – une demande d’indemnisation pour décès, dommages corporels ou matériels causés par un navire, notamment par collision. Le mot « notamment » se prête à une interprétation plus large du moment où le dommage est causé et de la manière dont il est causé, plutôt que de se limiter à la navigation comme telle du navire.
[25] Dans le jugement Newterm Ltd c Mys Budyonnogo (The) [1992] 3 CF 255, ACF no 454 (CF 1re inst), l’équipage du navire travaillait à la peinture par pulvérisation pendant que le navire était amarré, et des dommages ont été causés par des éclaboussures de peinture qui se sont déposées sur environ 400 véhicules automobiles à proximité. Les défenderesses ont allégué que la réclamation de la demanderesse ne relevait pas de la compétence de la Cour en matière maritime, telle qu’elle est définie à l’article 22 de la Loi sur les Cours fédérales.
[26] L’argument avancé par les défenderesses dans cette affaire est le même que celui qu’avancent les défendeurs-requérants dans la présente instance, à savoir que les dommages causés par les éclaboussures de peinture ne sont pas des dommages « causés par un navire ». L’avocat a également fait observer que pour qu’il y ait des « dommages causés par un navire », le navire doit être l’instrument des dommages et un acte ou une manœuvre de navigation doit entrer en jeu.
[27] Madame la juge Barbara Reed a rejeté ces arguments et jugé que l’action de la partie demanderesse relevait effectivement de l’article 22. Elle écrit ce qui suit aux pages 8 et 9 :
L’affaire ITO mettait en cause la négligence dont aurait fait preuve un manutentionnaire acconier dans l’entreposage à court terme de marchandises à l’intérieur de la zone portuaire, en attendant leur livraison au destinataire. On a jugé que la manutention était partie intégrante des transports maritimes et qu’elle avait un « rapport étroit » avec l’exécution du « contrat de transport ». De même en l’espèce, l’activité qui aurait donné lieu au dommage fait partie intégrante des transports maritimes et a un rapport étroit avec la conduite du navire et le transport maritime.
[28] De plus, s’agissant de l’évaluation des réclamations fondées sur l’article 22, la juge Reed écrit :
Quoi qu’il en soit, il me semble que l’avocat de la demanderesse ou celui de la seconde défenderesse ont raison de préconiser l’adoption d’un critère fonctionnel afin de décider si des dommages ont été, aux fins du droit maritime, « causés par un navire ». Lorsqu’un navire est sur l’eau et que le dommage résulte du fait de l’équipage agissant sur les instructions du capitaine, lesquels agissements sont entièrement liés au fonctionnement du navire, le dommage doit alors être considéré comme ayant été « causé [...] par un navire ». Voilà une formulation intéressante de la distinction qu’il convient d’établir.
[29] La Cour a également retenu cette approche, la jugeant appropriée, dans le jugement Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires c Colombie‑Britannique (Ministre des Finances) [2012] ACF no 1590, au paragraphe 34.
[30] Les défendeurs-requérants soutiennent qu’il n’y a pas de droit d’action réelle au motif que l’« Aestival » n’était pas en cours de navigation lorsque les dommages qu’il aurait causés se sont produits. Qui plus est, ils prétendent que le navire lui‑même n’était pas l’instrument actuel par lequel le dommage a été fait. Or, cette prétention contredit le critère fonctionnel adopté dans le jugement Newterm et elle va directement à l’encontre des jugements dans lesquels la compétence de la Cour en matière réelle a été reconnue, malgré le fait que le navire n’était pas en cours de navigation : voir The Minerva [1933] P. 224, affaire dans laquelle du fret est tombé du palan du Minerva et a causé des dommages à un navire adjacent, et Outhouse c Thorshavn [1935] Ex CR 120 [Outhouse], affaire dans laquelle du pétrole pompé par‑dessus bord a causé des dommages. De plus, dans le jugement Outhouse, la Cour a statué que les « dommages causés par un navire » incluent les dommages causés par les personnes aux commandes du navire, le navire étant l’instrument nocif.
[31] L’entretien d’un navire fait partie intégrante du déroulement de l’activité du transport maritime. Il n’est pas pertinent de savoir si cet entretien se fait pendant que le navire est amarré dans l’eau, en cale sèche, ou sur blocs en dehors de l’eau. Le texte très général de l’alinéa 22(2)d) suffit à couvrir un dommage causé à tout endroit où le navire se situe, pourvu que le dommage soit fait par les personnes aux commandes du navire à l’encontre d’un bien ou d’une tierce partie.
[32] En l’espèce, il est allégué que l’« Aestival » lui‑même est l’instrument nocif des dommages, au motif que des parties de l’« Aestival » faisaient l’objet d’un sablage et d’un meulage, et que ces particules solides (des matières faisant partie de l’« Aestival » lui‑même) qu’on a laissées s’échapper sont la cause des dommages au navire de la demanderesse. Après avoir utilisé le critère fonctionnel et tenu compte des faits allégués en l’espèce, je conclus que l’action de la demanderesse relève de l’alinéa 22(2)d) de la Loi.
[33] Le paragraphe 43(2) de la Loi prévoit que la Cour peut exercer la compétence en matière réelle prévue à l’article 22 contre le navire contrevenant. De plus, l’action de la demanderesse fondée sur l’alinéa 22(2)d) n’est pas exclue de l’application de la Loi en matière réelle fondée sur le paragraphe 43(3).
[34] Bien que les défendeurs-requérants puissent, au bout du compte, être confortés dans leur thèse selon laquelle aucun dommage ne s’est produit, il n’en demeure pas moins que la présente requête n’est pas le recours indiqué pour demander à la Cour de se prononcer sur le bien-fondé de l’action de la demanderesse. Les témoignages par affidavit des parties sur les questions touchant la responsabilité n’ont guère de valeur pour les besoins de la présente requête, puisque je me vois obligé de tenir pour avérés les faits énoncés dans l’affidavit portant demande de mandat, de même que les allégations formulées dans la déclaration.
[35] Tenant ces faits pour véridiques, j’estime que l’action de la demanderesse est de celles qui relèvent du droit maritime canadien et de la compétence que le paragraphe 22(1) confère à notre Cour. En intentant une action réelle valide contre l’« Aestival », la demanderesse avait le droit de le saisir en vertu du paragraphe 43(8). La saisie devrait donc être maintenue.
Le montant de la garantie d’exécution
[36] Conformément à l’article 485 des Règles, la Cour peut fixer le montant de la garantie d’exécution à fournir pour obtenir la mainlevée de la saisie des biens. Selon la règle générale touchant le montant de cautionnement à déposer pour obtenir la mainlevée de la saisie d’un navire ou pour en empêcher la saisie, ce montant doit suffire à assurer le demandeur de l’indemnité la plus élevée qu’il puisse raisonnablement solliciter, intérêts et dépens compris, mais ne doit pas dépasser la valeur du navire en question : voir le jugement Calogeras & Master Supplies Inc c Ceres Hellenic Shipping Enterprises Ltd [2006] ACF no 952, 2006 CF 764, au paragraphe 3.
[37] La demanderesse réclame la somme de 42 765,74 $, dommages‑intérêts en sus pour la perte de l’utilisation du navire, de même que les intérêts et les dépens. Les défendeurs-requérants ont admis avec raison à l’audience que si la Cour décide de fixer un cautionnement, celui‑ci devrait être établi à 58 000 $.
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE ce qui suit :
1. Le cautionnement pour obtenir la mainlevée du navire à voiles « Aestival » est par la présente fixé à un montant de 58 000 $, consigné à la Cour ou versé en fiducie à Bernard LLP.
2. La requête est à tous autres égards rejetée.
3. Les dépens afférents à la requête sont fixés à 750 $, y compris les débours et les taxes; ils devront être payés aux défendeurs Island‑Sea Marine Ltd., Kenneth W. Higgs, et au navire à voiles « Aestival », quelle que soit l’issue de la cause.
« M. Roger R. Lafrenière »
protonotaire
Traduction certifiée conforme
Linda Brisebois, LL.B.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : T‑1625‑12
INTITULÉ : 0871768
B.C. LTD. c
LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE NAVIRE À
VOILES « AESTIVAL » ET AUTRES
LIEU DE L’AUDIENCE : Vancouver (Colombie‑Britannique)
DATE DE L’AUDIENCE : Le 13 août 2013
MOTIFS DE L’ORDONNANCE
ET ORDONNANCE : LE PROTONOTAIRE LAFRENIÈRE
DATE DES MOTIFS : Le 13 novembre 2013
COMPARUTIONS :
PAUL D. MOONEY
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POUR LA DEMANDERESSE
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JOSEPH SPEARS
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POUR LES DÉFENDEURS LE NAVIRE « AESTIVAL », ISLAND‑SEA MARINE LTD. KENNETH W. HIGGS
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
BERNARD LLP Vancouver (Colombie‑Britannique)
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POUR LA DEMANDERESSE
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STRAITH LITIGATION CHAMBERS West Vancouver (Colombie‑Britannique)
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POUR LES DÉFENDEURS LE NAVIRE « AESTIVAL », ISLAND‑SEA MARINE LTD. KENNETH W. HIGGS
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