Date : 20130702
Dossier : IMM-8488-12
Référence : 2013 CF 734
[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]
Ottawa (Ontario), le 2 juillet 2013
En présence de monsieur le juge O’Reilly
Entre :
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DEZSO MOCZO, KATALIN MOCZO, DEZSONE MOCZO, ZSOLT MOCZO (mineur), DEZSO MOCZO, ANDREA JUHASZ, JANOSNE MOLNAR, JOZSEF MOLNAR
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et
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ET DE L’IMMIGRATION
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MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT
I. Aperçu
[1] Les demandeurs sont une famille élargie de la Hongrie. En 2010, ils ont demandé l'asile au Canada en raison de la discrimination et de la persécution qu'ils avaient subies à titre de membres de la collectivité rome. En particulier, ils soutiennent que leur maison a été attaquée par un groupe qui a poussé un mur de béton sur leur toit. Plus tard, une personne a lancé des briques vers la maison.
[2] Un tribunal de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a rejeté la demande des demandeurs en raison de sa conclusion selon laquelle la collectivité rome peut se prévaloir de la protection de l'État en Hongrie. Les demandeurs soutiennent que la conclusion de la Commission n'était pas raisonnable parce que la Commission n'a pas reconnu le fait que les diverses mesures prises afin d'améliorer la situation des Roms en Hongrie n'avaient pas eu d'effets concrets. Ils me demandent d'annuler la décision de la Commission et d'ordonner à un tribunal différent de la Commission de procéder à un nouvel examen de leur demande d'asile.
[3] Je conviens avec les demandeurs que la décision de la Commission était déraisonnable parce qu'elle n'a pas tenu compte d'éléments de preuve qui montraient que les autorités étaient incapables de protéger les Roms en Hongrie. Elle a aussi omis de reconnaître la preuve des demandeurs au sujet de la façon dont les policiers avaient répondu à leurs plaintes. Je dois donc accueillir la présente demande de contrôle judiciaire et ordonner la tenue d’une nouvelle audience.
II. La décision de la Commission
[4] La Commission a discuté du témoignage du demandeur principal, M. Deszo Moczo, dans lequel il expliquait pourquoi il croyait que les policiers ne l'aideraient pas et n'aideraient pas sa famille. Il avait déjà eu l'expérience de leur comportement négatif envers les Roms. Par exemple, les policiers avaient déjà demandé au demandeur et à son beau-frère de présenter leurs cartes d'identité, ils les avaient insultés, puis ils les avaient chassés.
[5] La Commission a conclu que ce témoignage n'était pas persuasif, parce qu'il était contredit par la preuve documentaire. De plus, la réticence subjective d'un demandeur à approcher la police n'établit pas un manque de protection de l'État.
[6] Selon la Commission, la preuve documentaire montre que, bien qu'il existe encore des problèmes de discrimination, de corruption policière et d'utilisation de force excessive envers les Roms, la Hongrie déploie des efforts importants pour rectifier la situation. Par exemple, la Commission indépendante des plaintes contre la police reçoit des plaintes au sujet du comportement des policiers. D'autres organismes et programmes aident aussi la collectivité rome. De plus, la Hongrie essaie de satisfaire aux normes en matière de droits de la personne de l'Union européenne.
III. La décision de la Commission était-elle déraisonnable?
[7] Le ministre soutient que la décision de la Commission était raisonnable compte tenu du fait que les demandeurs n'avaient pas déployé des efforts raisonnables afin d'obtenir la protection de l'État. De plus, la preuve documentaire soutenait la conclusion de la Commission selon laquelle les demandeurs pouvaient se prévaloir de la protection de l'État.
[8] Je ne suis pas d’accord.
[9] La Commission a omis de tenir compte de la preuve montrant que deux des demandeurs avaient approché les policiers, à différentes occasions, afin de se plaindre du fait que des gens lançaient des briques vers leur maison. Les policiers n'avaient fait aucun rapport, ils avaient simplement déclaré qu'ils ne pouvaient rien faire.
[10] En ce qui a trait à la preuve documentaire, la Commission s'est concentrée sur les descriptions des efforts de l'État visant à améliorer la situation en Hongrie et sur les activités des intervenants non-gouvernementaux visant à aider l'État. Cependant, la preuve au sujet des efforts de l'État n'aide pas à répondre à la question principale soulevée dans les cas de protection de l'État — c'est-à-dire, si l'on examine la preuve dans son ensemble, y compris la preuve au sujet de la capacité de l'État de protéger ses citoyens, le demandeur a-t-il montré qu'il existe un risque raisonnable qu'il soit exposé à de la persécution dans son pays d'origine? Pour répondre à cette question, la Commission doit déterminer si la preuve portant sur les ressources de l'État dont les demandeurs peuvent se prévaloir montre qu'il n'existe probablement pas de risque raisonnable de persécution s'ils retournaient en Hongrie (voir Muvangua c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2013 CF 542, aux paragraphes 7 et 9).
[11] À mon avis, la Commission s'est concentrée sur des éléments de preuve qui portaient sur des améliorations qui n'avaient pas encore été concrétisées, en excluant la preuve documentaire qui montrait que les policiers hongrois font souvent preuve de discrimination envers les Roms et n'enquêtent pas au sujet des crimes violents contre les Roms.
[12] Par conséquent, je dois conclure, compte tenu de la preuve dont la Commission était saisie, que la décision n'appartenait pas aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit. Elle était déraisonnable.
IV. Conclusion et décision
[13] La Commission n'a pas tenu compte des éléments de preuve qui appuyaient la réticence des demandeurs à demander la protection de l'État, ni des preuves documentaires au sujet du manque de protection de l'État en Hongrie. Par conséquent, la conclusion de la Commission était déraisonnable et je dois accueillir la demande de contrôle judiciaire. Aucune des parties n’a proposé de question de portée générale à certifier et aucune n’est certifiée.
JUGEMENT
LA COUR STATUE que :
1. La demande de contrôle judiciaire est accueillie. L’affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué de la Commission pour qu’il tienne une nouvelle audience;
2. Aucune question de portée générale n’est certifiée.
Traduction certifiée conforme,
Evelyne Swenne, traductrice‑conseil
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-8488-12
INTITULÉ : DEZSO MOCZO, ET AL
c
MCI
LIEU DE L’AUDIENCE : Toronto (Ontario)
DATE DE L'AUDIENCE : Le 12 juin 2013
MOTIFS DU JUGEMENT
ET JUGEMENT : Le juge O’Reilly
DATE DES MOTIFS : Le 2 juillet 2013
COMPARUTIONS :
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POUR LES DEMANDEURS |
Suranjana Bhattacharyya
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POUR LE DÉFENDEUR |
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Avocats
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POUR LES DEMANDEURS |
William F. Pentney Sous-procureur général du Canada Toronto (Ontario) |
POUR LE DÉFENDEUR
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