Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20120605

Dossier : IMM‑5979‑11

Référence : 2012 CF 686

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 5 juin 2012

En présence de monsieur le juge Shore

 

 

ENTRE :

 

MINESHKUMAR RAM PATEL

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I. Introduction

[1]               La présente affaire porte sur le pouvoir discrétionnaire du juge des faits de prendre des mesures spéciales et sur l’analyse à laquelle il s’est livré en vue de déterminer si ces mesures étaient justifiées. Le juge Simon Noël, dans Iamkhong c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 355, 386 FTR 297, a déclaré ce qui suit sur le rôle de la Cour à cet égard :

[47]      Tel qu’il a été mentionné dans l’arrêt Khosa, précité, au paragraphe 57, le pouvoir de la SAI de prendre des mesures en vertu de l’alinéa 67(1)c) doit être exercé en tenant compte des circonstances de l’affaire, y compris les difficultés. Ces mesures sont considérées comme « exceptionnelles » par la Cour suprême (arrêt Khosa, précité, paragraphe 57). Partant de cette assertion, il faut procéder à l’examen de la question de savoir si les motifs d’ordre humanitaire et les circonstances de l’affaire justifient la prise de mesures spéciales en tenant compte des facteurs énoncés dans Ribic, tel qu’il en a été discuté dans les arrêts Chieu, précité, et Al Sagban, précité, ainsi que dans les autres décisions pertinentes de notre Cour et d’autres cours. Comme il a été indiqué précédemment, la norme de contrôle applicable à cette partie de la demande est la norme de la décision raisonnable. Il est établi que le rôle de la Cour n’est pas d’apprécier à nouveau la preuve, mais plutôt de déterminer si la décision fait partie des issues acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (arrêt Dunsmuir, précité, au paragraphe 47).

 

II. Procédure judiciaire

[2]               La Cour est saisie d’une demande fondée sur le paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, ch 27 [la LIPR], visant à obtenir le contrôle judiciaire de la décision, en date du 9 août 2011, par laquelle la Section d’appel de l’immigration [la SAI] a rejeté l’appel interjeté par le demandeur à l’encontre d’une mesure de renvoi et a refusé de prendre des mesures spéciales.

 

III. Contexte

[3]               Le demandeur, M. Mineshkumar Ram Patel, est un citoyen de l’Inde. En 1993, il a déménagé aux États‑Unis. Il avait obtenu un permis de travail pour une certaine période de temps et il y est demeuré sans statut jusqu’en 2003.

 

[4]               En 2001, à New York, le demandeur a épousé sa première femme qui l’a parrainé pour immigrer au Canada. En janvier 2003, le demandeur a obtenu le statut de résident permanent et il est entré au Canada. Environ deux semaines plus tard, le demandeur a quitté sa première femme. Il est retourné aux États‑Unis la même année.

 

[5]               En septembre 2004, aux États‑Unis, le demandeur a épousé sa seconde femme, leur union ayant été consacrée par une cérémonie religieuse. Deux enfants sont issus de ce mariage; un garçon né aux États‑Unis en 2007 et une fille née au Canada en août 2010. Son divorce d’avec sa première épouse a été prononcé en décembre 2006.

 

[6]               Entre 2007 et 2008, le demandeur est venu plusieurs fois au Canada pour rendre visite à son frère immigré au Canada.

 

[7]               En février 2008, le demandeur a passé environ deux semaines au Canada, où il a demandé une nouvelle carte de résident permanent. Pour faire en sorte que son statut de résident permanent soit maintenu, le demandeur a déclaré qu’il s’était absenté du Canada pendant 163 jours, alors qu’en fait, il avait vécu aux États‑Unis de décembre 2003 à août 2007.

 

[8]               En août 2007, le demandeur a donné des renseignements inexacts dans sa demande de citoyenneté canadienne relativement à son absence du Canada.

 

[9]               Le demandeur allègue que, à son entrée au Canada, en mai 2008, il a été questionné au sujet du temps qu’il avait passé aux États‑Unis. Il a déclaré ses périodes de résidence exactes. Le demandeur allègue également que l’agent d’immigration lui a dit qu’aucune mesure ne serait prise contre lui s’il restait au Canada.

 

[10]           En 2008, le demandeur a aidé son épouse à entrer au Canada illégalement.

 

[11]           En août 2009, au moment où il tentait de parrainer sa seconde épouse au Canada, un rapport circonstancié a été établi en vertu de l’article 44 de la LIPR et une procédure de renvoi a été enclenchée.

 

IV. Décision visée par le contrôle

[12]           La seule question soulevée devant la SAI était de savoir si le demandeur avait établi des motifs pour justifier la prise de mesures spéciales, puisqu’il reconnaissait que la mesure de renvoi était valide.

 

[13]           Néanmoins, la SAI a résumé les fausses déclarations afin de constater la validité de la mesure de renvoi.

 

[14]           La SAI a jugé que les fausses déclarations étaient graves et que le demandeur n’avait démontré aucun regret véritable même s’il avait admis avoir fait les fausses déclarations contenues dans sa demande de résidence permanente et dans sa demande de citoyenneté. La SAI était d’avis que le demandeur et son épouse avaient fait fi des règles d’immigration du Canada et des États‑Unis.

 

[15]           Dans son analyse de l’établissement au Canada et des difficultés occasionnées par le renvoi, la SAI a conclu que le demandeur avait été présent au Canada pendant un nombre de jours qui ne totalisaient pas la période de trois ans nécessaire, ce qui jouait en sa défaveur. S’appuyant sur le témoignage du demandeur et la preuve documentaire, la SAI a constaté que le demandeur est un travailleur vaillant qui exploite une franchise de restauration rapide à Barrie. Il a un frère au Canada qui est marié et a également deux enfants et il leur rend visite régulièrement. La SAI a mis l’accent sur la famille du demandeur en Inde et ses activités au Canada pour conclure qu’il n’aurait pas de difficultés s’il était renvoyé en Inde. La SAI a constaté que l’épouse du demandeur et ses deux enfants parlaient le gujarati. Dans son analyse de l’intérêt supérieur des enfants du demandeur, la SAI a conclu que, compte tenu du fait qu’ils sont jeunes et ne vont pas encore à l’école, le renvoi du demandeur ne leur porterait pas préjudice.

 

V. Question en litige

[16]           La décision de la SAI est‑elle déraisonnable?

 

VI. Dispositions législatives et réglementaires pertinentes

[17]           Les dispositions pertinentes de la LIPR sont rédigées comme suit :

Obligation du demandeur

 

16.      (1) L’auteur d’une demande au titre de la présente loi doit répondre véridiquement aux questions qui lui sont posées lors du contrôle, donner les renseignements et tous éléments de preuve pertinents et présenter les visa et documents requis.

 

Fausses déclarations

 

40.      (1) Emportent interdiction de territoire pour fausses déclarations les faits suivants :

 

a) directement ou indirectement, faire une présentation erronée sur un fait important quant à un objet pertinent, ou une réticence sur ce fait, ce qui entraîne ou risque d’entraîner une erreur dans l’application de la présente loi;

 

b) être ou avoir été parrainé par un répondant dont il a été statué qu’il est interdit de territoire pour fausses déclarations;

 

c) l’annulation en dernier ressort de la décision ayant accueilli la demande d’asile;

 

 

 

 

d) la perte de la citoyenneté au titre de l’alinéa 10(1)a) de la Loi sur la citoyenneté dans le cas visé au paragraphe 10(2) de cette loi.

 

Fondement de l’appel

 

67.      (1) Il est fait droit à l’appel sur preuve qu’au moment où il en est disposé :

 

 

 

a) la décision attaquée est erronée en droit, en fait ou en droit et en fait;

 

b) il y a eu manquement à un principe de justice naturelle;

 

c) sauf dans le cas de l’appel du ministre, il y a – compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant directement touché – des motifs d’ordre humanitaire justifiant, vu les autres circonstances de l’affaire, la prise de mesures spéciales.

Obligation — answer truthfully

 

16.      (1) A person who makes an application must answer truthfully all questions put to them for the purpose of the examination and must produce a visa and all relevant evidence and documents that the officer reasonably requires.

 

 

Misrepresentation

 

40.      (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible for misrepresentation

 

(a) for directly or indirectly misrepresenting or withholding material facts relating to a relevant matter that induces or could induce an error in the administration of this Act;

 

 

 

 

(b) for being or having been sponsored by a person who is determined to be inadmissible for misrepresentation;

 

(c) on a final determination to vacate a decision to allow the claim for refugee protection by the permanent resident or the foreign national; or

 

(d) on ceasing to be a citizen under paragraph 10(1)(a) of the Citizenship Act, in the circumstances set out in subsection 10(2) of that Act.

 

 

Appeal allowed

 

67.      (1) To allow an appeal, the Immigration Appeal Division must be satisfied that, at the time that the appeal is disposed of,

 

(a) the decision appealed is wrong in law or fact or mixed law and fact;

 

(b) a principle of natural justice has not been observed; or

 

(c) other than in the case of an appeal by the Minister, taking into account the best interests of a child directly affected by the decision, sufficient humanitarian and compassionate considerations warrant special relief in light of all the circumstances of the case.

 

[18]           Les dispositions pertinentes du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227, sont rédigées comme suit :

Contrôle : résident permanent

 

51. L’étranger titulaire d’un visa de résident permanent qui cherche à devenir un résident permanent doit, lors du contrôle:

 

a) le cas échéant, faire part à l’agent de ce qui suit :

 

(i) il est devenu un époux ou conjoint de fait ou il a cessé d’être un époux, un conjoint de fait ou un partenaire conjugal après la délivrance du visa,

 

 

(ii) tout fait important influant sur la délivrance du visa qui a changé depuis la délivrance ou n’a pas été révélé au moment de celle‑ci;

 

b) établir que lui et les membres de sa famille, qu’ils l’accompagnent ou non, satisfont aux exigences de la Loi et du présent règlement.

Examination — permanent residents

 

51. A foreign national who holds a permanent resident visa and is seeking to become a permanent resident must, at the time of their examination,

 

(a) inform the officer if

 

 

(i) the foreign national has become a spouse or common‑law partner or has ceased to be a spouse, common‑law partner or conjugal partner after the visa was issued, or

 

(ii) material facts relevant to the issuance of the visa have changed since the visa was issued or were not divulged when it was issued; and

 

(b) establish that they and their family members, whether accompanying or not, meet the requirements of the Act and these Regulations.

 

VII. Thèses des parties

[19]           Le demandeur soutient que la SAI a commis une erreur de droit lorsqu’elle a conclu que la mesure de renvoi avait été prise en partie parce que le demandeur avait fait des fausses déclarations dans sa demande de citoyenneté canadienne, étant donné que l’alinéa 40(1)a) se rapporte aux fausses déclarations faites sous le régime de la LIPR seulement.

 

[20]           Le demandeur allègue que les fausses déclarations faites dans sa demande de carte de résidence permanente pour demeurer au Canada, et non pour y entrer, ne peuvent servir de fondement à une mesure de renvoi.

 

[21]           Le demandeur soutient que la SAI a commis une erreur de droit en maintenant la mesure de renvoi prise contre lui malgré son attente légitime, car il croyait qu’aucun rapport ne serait établi comme le lui avait promis un agent d’immigration au point d’entrée en 2008.

 

[22]           Le demandeur soutient que la décision de la SAI de refuser de prendre des mesures spéciales est déraisonnable. À l’appui de cette assertion, le demandeur fait valoir que la SAI a écarté les facteurs probants.

 

[23]           En réponse, le défendeur soutient que les arguments du demandeur concernant la validité de la mesure de renvoi ne devraient pas être examinés compte tenu du fait qu’il a admis, au cours de l’audience devant la SAI, que la mesure de renvoi le visant était valide.

 

[24]           Néanmoins, le défendeur avance que les fausses déclarations faites dans la demande de citoyenneté canadienne pouvaient être considérées comme des questions d’immigration antérieures pour décider si des mesures spéciales devaient être prises.

 

[25]           Le défendeur soutient que la SAI a bien soupesé la preuve avant de conclure qu’il n’y avait pas lieu de prendre des mesures spéciales.

 

VII. Analyse

[26]           La Cour suprême du Canada a affirmé, dans Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 RCS 339, que le contrôle d’une décision de la SAI commande un degré élevé de déférence. Elle a déclaré ce qui suit :

[58]      L’intimé n’a soulevé aucune question de pratique ou de procédure. Il a reconnu que la mesure de renvoi avait été validement prise contre lui en application du par. 36(1) de la LIPR. Sa contestation visait directement le refus de la SAI de lui accorder un « privilège discrétionnaire ». La décision de la SAI de ne pas prendre de mesure reposait sur une évaluation des faits au dossier. La SAI a eu l’avantage de tenir les audiences et d’évaluer la preuve, y compris le témoignage de l’intimé lui‑même. Les membres de la SAI possèdent une expertise considérable pour trancher les appels sous le régime de la LIPR. Considérés ensemble, ces facteurs font clairement ressortir que la norme de contrôle de la raisonnabilité s’applique. Aucun motif ne permettrait d’aboutir à un résultat différent. Le paragraphe 18.1(4) ne comporte aucun élément qui s’opposerait à l’adoption de la norme de contrôle de la « raisonnabilité » à l’égard des décisions rendues en vertu de l’al. 67(1)c). Par conséquent, je conclus que la norme de contrôle applicable est celle de la « raisonnabilité ». [Non souligné dans l’original.]

 

[27]           La Cour doit tenir compte du fait que le demandeur n’a pas contesté la validité de la mesure de renvoi. En fait, l’appel à la SAI se fondait uniquement sur des motifs d’ordre humanitaire. À la lecture de la transcription, on constate nettement que la validité de la mesure de renvoi n’était pas une question en litige devant la SAI, comme l’a admis l’avocat du demandeur au début de l’audience devant la SAI (dossier du tribunal, à la page 223). De surcroît, le demandeur a reconnu plusieurs fois au cours de l’audience qu’il avait fait de fausses déclarations. Voici des extraits pertinents :

[traduction]

DEMANDEUR D’ASILE : Donc […] étant donné que je ne veux pas perdre le statut de résident canadien et que j’aime tellement ma femme et mes enfants que je ne veux pas non plus les quitter, j’ai effectivement menti, et j’en suis tout à fait désolé, pour la demande de résidence permanente et la demande de citoyenneté également. À l’aéroport, j’ai admis que j’avais menti dans les deux demandes, je ne suis pas resté au Canada, lorsque l’agent m’a intercepté et (inaudible) tout ce que je venais de dire était vrai, […] au sujet des deux demandes.

 

[…]

 

AVOCAT DU MINISTRE : Vous avez également mentionné avoir fait des fausses (inaudible) résident dans votre demande de citoyenneté.

 

DEMANDEUR D’ASILE : Oui.

 

[…]

 

AVOCAT DU MINISTRE : Bien, pourquoi devriez‑vous pouvoir demander la citoyenneté sans avoir vécu au Canada ou sans avoir passé suffisamment de temps au Canada.

 

DEMANDEUR D’ASILE : Ouais! Je sais, pour la raison que je l’ai fait (inaudible) et j’en suis désolé; […] j’ai effectivement fait une fausse déclaration pour celle‑là, la citoyenneté et la résidence permanente.

 

(Dossier du tribunal, aux pages 223 et 224).

 

[28]           La SAI a résumé seulement les fausses déclarations que le demandeur avait admis avoir faites, pour constater la validité de la mesure de renvoi avant d’analyser la question de savoir si la prise de mesures spéciales était justifiée. Le demandeur soulève maintenant plusieurs arguments qui exigent que la Cour s’interroge sur la validité de la mesure de renvoi. Dans Jones c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 84, 383 FTR 98, le juge Yves de Montigny a déclaré ce qui suit concernant les nouveaux arguments :

[22]      Par ailleurs, il semble que cet argument soumis à la Cour n’a pas été présenté à la SAI dans le cadre de la requête en réouverture. En effet, dans les documents joints à sa requête, le demandeur expose divers faits qui, selon lui, justifiaient la réouverture de l’appel, mais il a reconnu qu’il était lui‑même en faute puisqu’il n’avait pas informé la SAI de son changement d’adresse. Il tente maintenant de présenter les choses sous un autre angle en reprochant à la SAI d’être responsable de la situation fâcheuse dans laquelle il se trouve. En soulevant ce nouvel argument, qui repose sur les exigences relevant de la justice naturelle, dans le cadre de la présente affaire, le demandeur se trouve à ajouter au dossier dont était saisie la SAI et il tente ainsi de remplacer l’objet sous‑jacent de sa contestation (le refus de rouvrir l’appel) par une contestation de la décision originale sur le désistement. Il n’est pas permis de procéder ainsi dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire de la décision de ne pas rouvrir l’appel. Il est bien établi que le caractère raisonnable de la décision d’un tribunal doit être apprécié en fonction des arguments qui lui ont été présentés. On ne peut pas reprocher au commissaire d’avoir omis de conclure à l’existence d’un manquement à la justice naturelle pour les motifs avancés par le demandeur alors que l’argument susceptible d’étayer cette conclusion n’a pas été présenté à la SAI. [Non souligné dans l’original.]

 

(Voir également Guajardo‑Espinoza c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] ACF no 797 (QL/Lexis) (CAF)).

 

[29]           Dans la présente affaire, la Cour conclut que la validité de la mesure de renvoi n’a pas été contestée devant la SAI et n’est pas une question qui peut être examinée dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire. À la lecture de la décision, il ressort que la SAI a fondé sa conclusion concernant la validité de la mesure de renvoi sur les nombreuses admissions faites par le demandeur au cours de l’audience.

 

[30]           Quoi qu’il en soit, le fait que la SAI a fait état des fausses déclarations du demandeur relevées dans sa demande de citoyenneté, qui n’ont effectivement pas été faites sous le régime de la LIPR, n’a aucune incidence sur la validité de la mesure de renvoi qui se fonde sur les fausses déclarations faites sous le régime de la LIPR. En fait, la SAI pouvait tenir compte des fausses déclarations concernant la citoyenneté dans son analyse distincte pour déterminer la suffisance des considérations d’ordre humanitaire (Khosa, précité, au paragraphe 57).

 

[31]           Ainsi, la SAI a examiné les facteurs établis dans Ribic c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1985] D.S.A.I. no 4 (QL/Lexis), et confirmés dans Chieu c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CSC 3, [2002] 1 RCS 84, pour déterminer si elle devait exercer son pouvoir discrétionnaire de prendre des mesures spéciales. À cet égard, la Cour ne peut tout simplement pas soupeser de nouveau la preuve déjà examinée par la SAI (Sharma c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 277).

 

[32]           En ce qui a trait à la gravité des fausses déclarations, le demandeur avance que le fait qu’un agent d’immigration lui a dit au point d’entrée en mai 2008 qu’il ne serait pas renvoyé tant qu’il resterait au Canada démontre que ses fausses déclarations n’étaient pas graves. La Cour doit rejeter cet argument. La SAI a examiné cet argument et elle ne l’a pas considéré comme un facteur atténuant; la SAI s’est plutôt appuyée sur le comportement ultérieur du demandeur. En fait, le demandeur a par la suite aidé sa seconde épouse à entrer au Canada illégalement.

 

[33]           Concernant la question de son établissement au Canada, le demandeur allègue essentiellement que la SAI n’a pas tenu compte de son établissement économique en Amérique du Nord, où il vit depuis 1993. Il est évident que la SAI a tenu compte de la situation économique du demandeur (décision de la SAI, aux paragraphes 22 à 24). Le demandeur n’a pas démontré que la conclusion de la SAI était déraisonnable ou qu’elle avait été tirée sans égard à la preuve soumise.

 

[34]           Enfin, en ce qui a trait à l’intérêt supérieur des enfants du demandeur, la SAI a tenu compte de cette question, mais elle a jugé que le renvoi de leur père ne leur porterait pas préjudice.

 

VI. Conclusion

[35]           La SAI a fourni de nombreux motifs pour étayer la conclusion selon laquelle, « [b]ien qu’il existe certains motifs d’ordre humanitaire, vu l’ensemble des circonstances de l’affaire, ces motifs ne sont pas suffisants pour que le tribunal tranche en faveur de l’appelant ». (Décision de la SAI, au paragraphe 32).

 

[36]           Par conséquent, la décision de la SAI est raisonnable.

 

[37]           Pour les motifs exposés précédemment, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée.

 


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée. Aucune question de portée générale n’est certifiée.

 

 

« Michel M.J. Shore »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Édith Malo, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    IMM‑5979‑11

 

 

INTITULÉ :                                                  MINESHKUMAR RAM PATEL c
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                          Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                         Le 30 mai 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                       LE JUGE SHORE

 

DATE DES MOTIFS :                                 Le 5 juin 2012

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Daniel Kingwell

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Monmi Goswami

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Mamann Sandaluk

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Myles J. Kirvan

Sous‑procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.