Montréal (Québec), le 4 avril 2012
En présence de madame la juge Tremblay-Lamer
ENTRE :
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ET DE L’IMMIGRATION
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MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT
[1] Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, ch 27 (la Loi) à l’encontre d’une décision rendue le 19 juillet 2011 par un agent d’immigration du Centre de traitement des demandes à Vegreville, Alberta (l’agent) qui rejetait la demande de travail postdiplôme de la demanderesse.
[2] La demanderesse est citoyenne de la Côte d’Ivoire. Le 27 décembre 2007, elle est arrivée au Canada pour obtenir un baccalauréat en comptabilité de l’Université du Québec à Montréal, ayant un permis d’études. Son permis qui prenait initialement fin en octobre 2010 avait été prorogé jusqu’au 31 décembre 2010. À partir de cette date, la demanderesse n’avait plus le statut de résident temporaire au Canada. Ce n’est que le 5 mai 2011 que la demanderesse a formulé sa demande de permis de travail postdiplôme : elle a demandé le rétablissement de son statut et de proroger son séjour au Canada pour obtenir de l’expérience de travail en comptabilité. Ce sont les seuls renseignements qui étaient devant l’agent lorsqu’il a rendu sa décision négative le 19 juillet 2011.
[3] Dans sa décision datée du 19 juillet 2011, l’agent indique ce qui suit :
Votre demande, telle que présentée, a été refusée.
Une demande de rétablissement doit être présentée dans les 90 jours suivant la perte du statut de résident temporaire. Votre statut de résident temporaire ne peut être rétabli puisque vous avez présenté votre demande après la période réglementée de 90 jours. Comme vous ne détenez plus le statut de résident temporaire au Canada, votre demande de permis de travail ne peut être approuvée.
[4] Il est accepté que la demanderesse devait obtenir le rétablissement de son statut de résident temporaire et détenir un permis d’études valide pour que la demande de permis de travail postdiplôme soit accordée. Si un demandeur ne possède pas le statut de résident temporaire au Canada, l’agent n’a aucune discrétion : il doit refuser la demande de permis de travail.
[5] La loi concernant le rétablissement du statut d’un résident temporaire est claire. Conformément à l’article 47a) de la Loi, le statut de résident temporaire est perdu à l’expiration de la période de séjour autorisée :
47. Emportent perte du statut de résident temporaire les faits suivants :
a) l’expiration de la période de séjour autorisé.
[6] L’article 182 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le Règlement) précise que :
182. Sur demande faite par le visiteur, le travailleur ou l’étudiant dans les quatre-vingt-dix jours suivant la perte de son statut de résident temporaire parce qu’il ne s’est pas conformé à l’une des conditions prévues à l’alinéa 185a), aux sous-alinéas 185b)(i) à (iii) ou à l’alinéa 185c), l’agent rétablit ce statut si, à l’issue d’un contrôle, il est établi que l’intéressé satisfait aux exigences initiales de sa période de séjour et qu’il s’est conformé à toute autre condition imposée à cette occasion. [Je souligne.]
[7] Comme le souligne la juge Gauthier dans l’affaire Sui c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2006 CF 1314, [2006] ACF no 1659 aux paragraphes 33-34 [Sui]:
Pour demander le rétablissement, le visiteur, le travailleur ou l’étudiant ne doit pas avoir perdu son statut de résident temporaire pendant plus de 90 jours […] Aucun pouvoir discrétionnaire n’est conféré à l’agent saisi d’une demande de prolongation. Il doit rétablir le statut [de la demanderesse] si, à l’issue d’un contrôle, il est convaincu que [cette dernière] satisfait aux exigences initiales de son séjour.
[8] La demanderesse a omis de présenter sa demande de rétablissement de son statut de résident temporaire dans le délai imparti. Je note de plus que malgré le fait que la demanderesse affirme qu’elle était dans l’impossibilité d’obtenir son passeport à temps, l’ayant reçu en mars, elle pouvait néanmoins déposer sa demande à l’intérieur du délai prescrit par la loi.
[9] Le libellé de l’article 182 du Règlement n’est pas discrétionnaire : si la demande de rétablissement est faite à l’extérieur du délai de 90 jours prescrit par la loi, l’agent doit refuser la demande (Novak c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 243 au para 30).
[10] Bien qu’un objectif de la loi est de « faciliter l’entrée des visiteurs, étudiants et travailleurs temporaires qui viennent au Canada dans le cadre d’activités commerciales, touristiques, culturelles, éducatives, scientifiques ou autres » (alinéa 3(1)g) de la Loi), tel qu’expliqué par la juge Gauthier dans Sui, ci-dessus, « [c]et objectif doit évidemment être équilibré par la nécessité de protéger l’intégrité des programmes de CIC et de promouvoir le respect des diverses obligations prévues par la [loi] » (au para 51).
[11] En résumé, la demanderesse a contrevenu aux obligations que les lois canadiennes lui imposaient en vue de conserver son statut légal dans ce pays ; l’agent n’avait pas d’autre choix que de refuser la demande de permis de travail postdiplôme de la demanderesse puisque celle-ci n’avait plus le statut de résident temporaire.
[12] En conséquence, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.
[13] La demanderesse a proposé la question suivante aux fins de certification :
Est-ce que le statut de résident temporaire est tributaire du changement de circonstances (guerre civile) dans le pays d’origine du demandeur ? En d’autres mots, le délai pour une demande de rétablissement reste inchangé même en cas de crise dans le pays d’origine.
[14] Je conclus que cette question n’est pas soulevée dans les circonstances du présent dossier. En conséquence, aucune question ne sera certifiée.
JUGEMENT
LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée. Aucune question n’est certifiée.
« Danièle Tremblay-Lamer »
Juge
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-5720-11
INTITULÉ : MARIE STÉPHANIE AVI ADROH et MCI
LIEU DE L’AUDIENCE : Montréal (Québec)
DATE DE L’AUDIENCE : le 3 avril 2012
ET JUGEMENT : LA JUGE TREMBLAY-LAMER
DATE DES MOTIFS : le 4 avril 2012
COMPARUTIONS :
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Daniel Latulippe |
POUR LE DÉFENDEUR |
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
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Myles J. Kirvan Sous-procureur général du Canada Montréal (Québec) |
POUR LE DÉFENDEUR |