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Date : 20111107


Dossier : T-1790-11

Référence : 2011 CF 1270

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Vancouver (Colombie-Britannique), le 7 novembre 2011

En présence de monsieur le juge Shore

 

AFFAIRE INTÉRESSANT FRIENDS OF GOOGOLPLEXION FOR

HUMAN RIGHTS INC. (FAISANT PARFOIS AFFAIRE SOUS LE NOM DE NELSON’S INTERNATIONAL HOME AUTO DEPOT INC.)

 

ENTRE :

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

 

 

demandeur

 

 

et

 

 

 

FRIENDS OF GOOGOLPLEXION FOR HUMAN RIGHTS INC. (FAISANT PARFOIS AFFAIRE SOUS LE NOM DE NELSON’S INTERNATIONAL HOME AUTO DEPOT INC.)

 

 

 

défenderesse

 

 

 

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I. Introduction

[1]               Robert Hannes Nelson a actuellement envers le ministre du Revenu national (le ministre) une dette d’impôt de 64 601,80 $ sur son revenu personnel pour les années d’imposition 1987 et 1990 à 1993. Les nouvelles cotisations ont d’abord été établies en raison de revenus non déclarés pour les années d’imposition 1986, 1987, 1990, 1991, 1992 et 1993. L’Agence du revenu du Canada (l’ARC) a pris des mesures de recouvrement pour obtenir le paiement des arriérés d’impôt pour 1986, notamment une saisie-arrêt au moyen des compensations prévues par la loi.

 

[2]               Dans Ministre du Revenu national c Cormier-Imbeault, 2009 CF 499, [2009] 6 CTC 45, la Cour (paragraphe 7) énonce les facteurs qui peuvent justifier une ordonnance conservatoire :

a)     il existe des motifs raisonnables de croire que le contribuable a agi frauduleusement;

b)      le contribuable procède à la liquidation ou au transfert de ses actifs;

c)      le contribuable élude ses obligations fiscales;

d)      le contribuable détient des actifs qui sont susceptibles de diminuer en valeur par l’effet du temps, de se détériorer ou d’être périssables;

e)      l’importance du montant de la dette par rapport aux revenus et aux dépenses.

 

[3]               Les éléments de preuve dont dispose la Cour en l’espèce suffisent, selon la norme de preuve applicable, à démontrer que l’octroi d’un délai compromettrait le recouvrement de la créance.

 

[4]               Les antécédents de M. Nelson, de Mme Nelson et de la société, en ce qui a trait au paiement des impôts, sont en outre peu orthodoxes. Au fil des ans, en de nombreuses occasions, M. Nelson a fait campagne contre le gouvernement du Canada, notamment contre le ministre et l’ARC, dans différentes publications, dont ses dossiers médicaux, affichés sur ses sites Web. M. Nelson a aussi menacé l’ARC de se suicider si cette dernière ne se pliait pas à ses exigences.

 

[5]               De plus, M. Nelson a eu de nombreux démêlés avec la justice. Il a intenté d’innombrables actions devant la Cour suprême et la Cour d’appel de la Colombie-Britannique. Il a tenté de débattre à nouveau des questions semblables en Ontario. Il a également engagé des procédures devant la Cour fédérale et la Cour d’appel fédérale. Il a sans succès interjeté appel de ces affaires à la Cour suprême du Canada.

 

[6]               Par suite de ces diverses actions, la Cour suprême de la Colombie-Britannique a déclaré, en 1981, que M. Nelson avait agi de façon vexatoire, la Cour d’appel de la Colombie-Britannique a fait de même en 2006, ainsi que la Cour fédérale en 2002, et la Cour d’appel fédérale en 2003. Il lui est interdit d’intenter des actions devant ces juridictions sans autorisation d’un juge de la cour concernée.

 

 

[7]               En 2004, M. Nelson a soumis ses préoccupations concernant l’ARC à la Cour pénale internationale qui a refusé d’entendre l’affaire, les plaintes ne relevant pas de sa compétence.

 

[8]               Ces comportements illustrent que M. Nelson, Mme Nelson et la société dirigée par M. Nelson ont tenté par tous les moyens possibles de déjouer les efforts de recouvrement du ministre.

 

II. Contexte factuel

[9]               Robert Hannes Nelson (M. Nelson) est le seul administrateur de la défenderesse, Friends of Googolplexian for Human Rights Inc. (la société). Il habite actuellement au 3460, chemin McCulloch, à Kelowna, en Colombie-Britannique (le bien du chemin McCulloch).

 

[10]           Mme Nelson Merle Nelson (Mme Nelson) est la conjointe de M. Nelson. Elle est, selon les renseignements disponibles, comptable à la retraite. Elle habite également le bien du chemin McCulloch.

 

 

[11]           La société défenderesse a été constituée en personne morale selon les lois provinciales, et son siège social est situé à la résidence du chemin McCulloch. Comme je l’ai dit précédemment, M. Nelson est le seul administrateur de la société. Mme Nelson et lui en sont, croit-on, les actionnaires, mais ces faits ne sont pas avérés, car M. Nelson a refusé, au nom de la société, d’accorder à l’ARC l’accès aux registres et aux dossiers de la société.  

 

[12]           La société a été constituée en personne morale la première fois le 27 février 1959, sous le numéro de société 0044013. Depuis ce temps, sa dénomination sociale a changé onze (11) fois.

 

[13]           La dette elle-même de M. Nelson n’a jamais été ni attestée, ni enregistrée sur le titre d’un bien lui appartenant, dont le bien du chemin McCulloch. Par contre, celle de Mme Nelson, liée à l’une des cotisations établies à son nom en vertu du paragraphe 160(1) (laquelle a trait à la dette de M. Nelson, le paragraphe 160(1) prévoyant une responsabilité conjointe et solidaire de la part de Mme Nelson à l’égard de la dette de M. Nelson), est attestée et enregistrée sur le titre du bien du chemin McCulloch.

 

[14]           Mme Nelson a actuellement envers le ministre une dette d’impôt sur le revenu personnel s’élevant à 203 927,64 $ pour les années d’imposition 1991 à 1994. Les nouvelles cotisations établies en raison de revenus non déclarés pour les années d’imposition 1989 à 1994 expliquaient initialement cette dette. L’ARC a eu recours à des mesures de recouvrement pour obtenir le paiement des arriérés d’impôt de Mme Nelson pour 1989 et 1990. Cette dette (liée à ses cotisations de T1) n’a pas été attestée ni enregistrée sur le titre de quelque propriété appartenant ou ayant appartenu à Mme Nelson, dont le bien du chemin McCulloch.

 

[15]           Mme Nelson a reçu un avis de cotisation en vertu du paragraphe 160(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (LIR) au montant de 26 036,50 $ en raison du transfert à son nom de la participation de M. Nelson dans un bien immobilier situé 11753 croissant Alderwood, à Delta, en Colombie‑Britannique (le bien du croissant Alderwood), le 31 juillet 1995. Cette cotisation a trait à un transfert entre personnes ayant entre elles un lien de dépendance, sans contrepartie ou avec une contrepartie insuffisante lorsque l’auteur du transfert est débiteur du ministre. Une ordonnance conservatoire et un certificat concernant cette dette ont été obtenus à l’égard de cette cotisation, et la dette a été enregistrée sur le titre du bien du croissant d’Alderwood. Ce jugement a ensuite été payé par tous les produits de la vente de ce bien.

 

[16]           De plus, le 1er août 1996, Mme Nelson a reçu une cotisation en vertu du paragraphe 160(1) au montant de 23 251,25 $ en raison du transfert à son nom, par M. Nelson, du bien du chemin McCulloch. Conformément à l’ordonnance conservatoire susmentionnée, la dette a été attestée et enregistrée sur le titre du bien du chemin McCulloch. Elle demeure en vigueur. Seule cette dette de Mme Nelson est enregistrée sur ce titre.

 

[17]           Ni M. Nelson ni Mme Nelson n’ont volontairement payé ces dettes. Mme Nelson a récemment communiqué avec l’ARC à cet égard, mais aucune entente n’est intervenue pour le paiement de ces dettes.

 

[18]           La société est actuellement redevable envers le ministre d’une créance s’élevant à 50 147,85 $ (la créance). Des cotisations ont été établies à cet égard en vertu du paragraphe 160(1) de la LIR en raison du transfert à la société de la participation de Mme Nelson dans le bien du chemin McCulloch et de certains versements faits par elle à la société.

 

[19]           La société n’a pas encore déposé d’avis d’opposition au sujet de ces cotisations. Elle n’a pas non plus fait de paiement pour rembourser cette créance.  

 

[20]           Des mesures de recouvrement ont précédemment été prises, outre les compensations prévues par la loi, en ce qui concerne les dettes de M. et Mme Nelson. Seule la compensation concernant la dette de Mme Nelson demeure en vigueur.

 

A. Affaires financières de la défenderesse

            (1) Actifs

[21]           Selon l’enquête de l’ARC et à la suite de plusieurs demandes de renseignements, il est établi que la société défenderesse possède les actifs suivants :

            a.    le bien du chemin McCulloch, soit la résidence familiale de M. et Mme Nelson, actuellement enregistré au nom de la société;

            b.    un compte bancaire à la Banque impériale canadienne de commerce (CIBC). La CIBC a confirmé en septembre 2011 que le solde du compte bancaire de la société s’élevait à 95,22 $ le 31 juillet 2011.

 

(2) Transfert d’actifs

[22]           Le propriétaire enregistré du bien du chemin McCulloch était initialement M. Nelson. Comme je le dis ci-dessus, celui-ci a transféré à Mme Nelson sa participation dans le bien du chemin McCulloch et celle au bien d’Alderwood sans contrepartie suffisante (affidavit de Michael Sundstrom, paragraphes16-17).

 

[23]           Puis, le 13 août 1997 ou aux environs de cette date, Mme Nelson a transféré à la société sa participation dans le bien du chemin McCulloch pour la somme déclarée de 230 000 $; la valeur du bien, constatée par des experts, s’élevait toutefois à l’époque à 275 000 $. Comme la société n’a pas versé à Mme Nelson une contrepartie suffisante pour l’acquisition du titre de propriété, la société a reçu un avis de cotisation au montant de 28 022,48 $ (affidavit de Michael Sundstrom, paragraphes 25-26).

 

[24]           En plus du transfert du bien du chemin McCulloch, Mme Nelson (et M. Nelson) ont aussi fait d’autres transferts à la société, sans contrepartie, soit :

            a)    le 27 octobre 2003 ou aux environs de cette date, M. et Mme Nelson ont transféré la somme de 33 485 $ à la société, sans contrepartie apparente. Ces fonds avaient trait au produit d’une assurance. Pour cette raison, la société a reçu un avis de cotisation au montant de 16 742,50 $, qui était lié à la part du produit de l’assurance de Mme Nelson, en vertu du paragraphe 160(1) de la LIR. Aucun avis de cotisation n’a été envoyé concernant la part du produit de l’assurance de M. Nelson étant donné que sa dette est déjà garantie en ce qui concerne le bien du chemin McCulloch (par suite du certificat lié à la cotisation émise en vertu du paragraphe 160(1) de Mme Nelson);

            b)    entre décembre 2001 et avril 2006, Mme Nelson a transféré 5 382,87 $ à la société; ce montant a trait à des prestations de la Sécurité de la vieillesse et du Régime de pensions du Canada (RPC) qu’elle a reçues et à différents chèques personnels établis à son nom. Par conséquent, la société a reçu un avis de cotisation en vertu du paragraphe 160(1) de la LIR concernant les transferts.

 

(3) Revenus de la société

[25]           La nature exacte des affaires de la société est inconnue. Celle-ci a précédemment agi comme locateur du bien du chemin McCulloch, mais elle ne semble plus agir à ce titre.

 

(4) Passif de la société

[26]           Comme il n’a pas été possible de consulter les registres de la société, on ne connaît pas son passif, à l’exception des hypothèques enregistrées sur le titre du bien du chemin McCulloch.

 

[27]           Le bien du chemin McCulloch est actuellement évalué à 622 000 $. Les hypothèques suivantes sont enregistrées sur le titre de ce bien :

            a)    une hypothèque en faveur de la CIBC est enregistrée sur le bien du chemin McCulloch. Le solde à payer sur cette hypothèque s’élevait à 136 177,67 $ le 15 août 2011;

            b)    une hypothèque en faveur du fils décédé des Nelson, monsieur Nelson John Garth Nelson (Garth) est également enregistrée sur le titre du bien du chemin McCulloch. Elle n’est cependant pas considérée comme légitime en raison de l’état des documents hypothécaires. Si l’hypothèque s’avérait légitime, on considère qu’il ne reste plus rien à payer sur cette hypothèque. Cette dernière, qui semble avoir été obtenue pour une somme de 40 000 $ à un taux d’intérêt de 10 %, devait être remboursée par des versements mensuels de 400 $ et le solde à payer devenait exigible 13 mois plus tard, soit le 1er novembre 1997. Le 24 mai 2007, l’ARC a envoyé une demande de renseignements à Garth (avant son décès) au sujet du montant dû sur cette hypothèque. M. Nelson, supposément agent de Garth, a répondu et indiqué que le solde était « nul » en date du 1er mai 2007;

            c)    une hypothèque en faveur de RBC est également enregistrée sur le titre du bien du chemin McCulloch à la valeur nominale de 25 000 $, mais le montant a fluctué au fil des années et il a atteint des sommes qui ont dépassé 181 000 $. Même si l’hypothèque de RBC a été enregistrée le même jour que celle de Garth et légalisée par le même notaire public, l’hypothèque de RBC a préséance sur celle de Garth. Le 27 septembre 2010 ou aux environs de cette date, une demande de renseignements a été envoyée à la RBC. Le 26 octobre 2010, la RBC a répondu qu’elle n’avait aucun compte hypothécaire inscrit au nom de Mme Nelson, de M. Nelson ou de la société. Il semble que cette hypothèque ait été entièrement remboursée, mais que la société n’en ait pas obtenue la quittance (affidavit de Michael Sundstrom, paragraphe 32).

 

[28]           Pour cette raison, on estime que la participation de la société dans le bien du chemin McCulloch s’élève à 485 000 $ environ.

 

B. Analyse du comportement relatif aux opérations commerciales

[29]           M. Nelson, Mme Nelson et la société ont mené leurs affaires de façon peu orthodoxe. Cette observation est fondée sur leurs tractations concernant le bien du chemin McCulloch, qui a fait l’objet de plusieurs transferts entre personnes ayant entre elles un lien de dépendance, sans contrepartie aucune ou insuffisante. De plus, l’hypothèque de Garth enregistrée sur le titre de ce bien n’est pas, croit-on, une hypothèque légitime. Il est donc raisonnable de présumer, en particulier en raison des récentes cotisations établies à l’encontre de la société, que M. Nelson, au nom de cette dernière, prendra des mesures liées au bien du chemin McCulloch pour déjouer les efforts de recouvrement du ministre, sauf si l’ordonnance conservatoire demandée est accordée.

 

[30]           Cette situation est tout particulièrement probable si l’on considère que M. Nelson est administrateur de trois (3) autres sociétés et que Mme Nelson est administratrice de deux (2) sociétés. Il est donc assez facile pour M. Nelson de transférer le bien du chemin McCulloch à une autre société de la famille.

 

[31]           De plus, les cotisations elles-mêmes, de par leur nature, sont peu orthodoxes.

 

C. Mesures de recouvrement

[32]           L’ARC a l’intention, après l’obtention d’une ordonnance de la Cour, de signifier l’ordonnance conservatoire à la société en la remettant personnellement à son seul administrateur, M. Nelson; ou d’en laisser un exemplaire au nom de la société et à celui de M. Nelson à un adulte au bien du chemin McCulloch; ou de l’afficher sur la porte de la résidence et d’en envoyer un exemplaire par courrier ordinaire au nom de la société et à celui de M. Nelson, au bien du chemin McCulloch. Comme je le dis ci-dessus, le siège social de la société y est situé.

 

[33]            L’ARC a aussi l’intention d’obtenir, en plus d’une ordonnance de la Cour, l’attestation des montants dus par la société et d’enregistrer le jugement correspondant sur le titre du bien du chemin McCulloch. L’ARC souhaiterait toutefois se prévaloir des mesures de recouvrement prévues à l’article 225.1 de la LIR, si elle y est autorisée.

 

III. Question en litige

[34]           Y a-t-il des motifs raisonnables de croire que le recouvrement de tout ou partie des 50 147,85 $ en impôt sur le revenu à verser par la société serait compromis par un retard dans ce recouvrement?

 

IV. Analyses

[35]           La Cour accepte la position du demandeur selon laquelle le recouvrement du montant précité est compromis si le recouvrement du montant total précisé est retardé.

A. Au sujet du recouvrement

[36]           L’article 225.1 de la LIR limite, en précisant quelques exceptions, le droit du ministre de recouvrer des impôts impayés lorsque le contribuable conteste les montants dont il est redevable et qu’une audience impartiale n’est pas arrivée à une conclusion différente.

 

[37]           Le paragraphe 225.1(1) de la LIR prévoit, en précisant quelques exceptions, que le ministre ne peut prendre aucune des mesures de recouvrement énumérées contre un contribuable avant le lendemain, soit 90 jours de la date de mise à la poste de l’avis de cotisation (ou d’une nouvelle cotisation) au contribuable, si ce dernier signifie un avis d’opposition ou interjette appel d’une cotisation, tant qu’une décision définitive n’a pas été rendue concernant cette opposition ou cet appel.  

 

B. Autorisation de prendre des mesures

[38]           L’article 225.2 de la LIR prévoit que malgré l’article 225.1, un juge de la Cour, sur requête ex parte du ministre, peut accorder une ordonnance (ordonnance conservatoire) l’autorisant à prendre immédiatement des mesures « s’il est convaincu qu’il existe des motifs raisonnables de croire que l’octroi à ce contribuable d’un délai pour payer le montant compromettrait le recouvrement de tout ou partie de ce montant ».

 

[39]           La décision du juge Paul Rouleau de la Section de première instance de la Cour fédérale, rendue dans 1853-9049 Québec Inc. c la Reine (1986), 87 DTC 5093 (CFPI), passe utilement en revue l’intention du législateur et l’historique connexe. À la page 5095, le juge Rouleau fait mention des extraits suivants d’un discours à la Chambre des communes du secrétaire parlementaire du ministre des Finances. Les extraits sont tirés des débats de la Chambre des communes, le 24 septembre 1985 :  

Le projet de la loi aujourd’hui proposé renferme, en outre, des mesures de prévention contre les abus de ce nouveau système. En effet, dans le cas où il est raisonnable de croire que l’octroi du délai qui précède les mesures de recouvrement de sommes en litige en compromettrait le recouvrement, le projet de loi permet à Revenu Canada d’entamer des mesures de recouvrement sans délai. En revanche, le contribuable a le droit de demander à un juge de réviser la décision de Revenu Canada portant sur le fait que le recouvrement éventuel de l’impôt serait compromis.

 

[40]           Dans Laframboise c La Reine (1986), 86 DTC 6396 (CFPI), à la page 6398, le juge Joyal de la Cour a commenté le libellé précis du paragraphe 225.2(1) de la LIR [soit le passage « […] des motifs raisonnables de croire que l’octroi à ce contribuable d’un délai pour payer le montant compromettrait le recouvrement de tout ou partie de ce montant »] et déclaré (page 6398) :

Les conditions que comporte cette expression sont suffisamment souples pour lui conférer, me semble-t-il, une portée plus étendue que celle qui existe dans les injonctions Mareva. Lorsqu’ils sont lus en corrélation, le mot « may » (peut) et l’expression « raisonnable de croire » donnent une très grande latitude au ministre, latitude qui, selon moi, n’existe pas lorsqu’il s’agit d’une saisie avant jugement.  

 

[41]           En 1988, les dispositions de la LIR ont de nouveau fait l’objet d’un examen et l’article 225.2 a été modifié pour exiger l’autorisation préalable d’une cour avant que des mesures de recouvrement liées à une ordonnance conservatoire ne puissent être prises. C’est en raison de cette modification que le ministre doit se prévaloir de mesures de recouvrement particulières, prévues à l’article 225.2 de la LIR.

 

C. Critère de l’octroi d’une ordonnance en vertu de l’article 225.2

[42]           La Cour statue que le critère applicable à une requête du ministre en vertu de l’article 225.2 de la LIR (requête d’ordonnance conservatoire) consiste à déterminer si la preuve dont elle dispose, selon la prépondérance des probabilités, ou une « norme de preuve » qui « sans être une prépondérance des probabilités, suggère néanmoins la croyance légitime à une possibilité sérieuse en raison de preuves dignes de foi » (la norme de preuve), est suffisante pour mener à la conclusion que le recouvrement est compromis par un retard. La Cour statue en outre que la question en litige ne consiste pas à déterminer si le recouvrement lui-même est compromis, mais plutôt s’il est en fait compromis en raison du retard probable de son exécution (Canada (Ministre du Revenu national – M.R.N.) c 514659 B.C. Ltd., [2003] ACF no 207 (PI), paragraphe 6 [514659 BC Ltd]; Danielson c Canada (Ministre du Revenu national), [1986] 86 DTC 6518 (CFPI) [Danielson]).

 

[43]           Par conséquent, pour qu’une demande conservatoire soit accueillie, il incombe au ministre de prouver que le recouvrement sera compromis s’il tarde à prendre les mesures de recouvrement.  Le juge McNair dans Danielson précité, a statué (page 6519) :

À mon avis, le litige porte sur la question de savoir si le délai qui découle normalement du processus d’appel compromet le recouvrement. Il semble ressortir du libellé du paragraphe 225.1(1) qu’il est nécessaire de montrer qu’en raison du délai que comporte l’appel, le contribuable sera moins capable de verser le montant de la cotisation.

[…]

[…] le simple soupçon ou la simple crainte que l’octroi d’un délai puisse compromettre le recouvrement n’est pas suffisant en soi. On peut raisonnablement conclure que le critère qui consiste à se demander si "il est raisonnable de croire" que le recouvrement sera compromis équivaut en fait à déterminer si, selon toute probabilité, la preuve est suffisante pour permettre de conclure qu’il est plus probable qu’autrement que l’octroi d’un délai compromettra le recouvrement. […] À mon avis, il ne s’agit pas de déterminer si le recouvrement lui-même est compromis, mais plutôt s’il est en fait compromis en raison du délai à la suite duquel il sera vraisemblablement effectué.

 

 

[44]           En soumettant sa requête d’ordonnance conservatoire, le ministre a l’obligation de faire une divulgation franche et complète et de faire preuve d’une extrême bonne foi en ce qui concerne à la fois les faits pertinents et la jurisprudence applicable. Canada (Ministre du Revenu national) c Robarts, 2010 CF 875, paragraphes 33-35 [Robarts].

 

[45]           Une absence de revenu n’est pas en soi une justification suffisante pour accorder une ordonnance conservatoire. Le fait que les actifs du contribuable soient entièrement liquides et qu’ils puissent être facilement dilapidés, liquidés ou transférés ne constitue pas non plus une justification. Robarts précité, paragraphes 72-73.

 

[46]           Une ordonnance conservatoire n’est pas justifiée non plus lorsque le ministre dispose de mesures de recouvrement additionnelles qui permettraient le recouvrement de la dette malgré la période des restrictions imposées au recouvrement (Steele (Re) [1995] SJ no 784 (SKQB) [QL], paragraphe 12).

 

 

[47]           La requête du ministre est convaincante s’il établit de façon probante que le contribuable dissipe ses actifs ou que ces derniers seront transférés hors de son ressort et de celui d’autres créanciers éventuels. À ce sujet de la preuve que le ministre doit présenter, le juge McNair déclare ce qui suit dans Danielson, précité (page 6519) :

De solides éléments de preuve fournis par le ministre indiquant que le contribuable dissipe ses avoirs ou qu’il les soustrait à la juridiction du ministère du Revenu national et à ses autres créanciers éventuels pourraient être très convaincants. Ce serait un cas limite plus difficile à trancher lorsque les biens du contribuable sont périssables ou que leur valeur risque vraisemblablement de diminuer avec le temps.

 

 

[48]           Un comportement peu orthodoxe qui fait raisonnablement craindre qu’il soit difficile de suivre les fonds ou de les recouvrer pour acquitter la dette d’impôt peut constituer un motif raisonnable pour justifier de rendre une ordonnance conservatoire (Deputy Minister of National Revenue c Quesnel, 2001 BCSC 267 [Quesnel]).

 

[49]           Le juge Martineau, de la Cour, dans Robarts, précité (paragraphe 61) expose que la jurisprudence, sans définir l’expression « comportement peu orthodoxe », en donne de nombreux exemples. En voici quelques-uns :

a.    conserver une importante somme d’argent liquide à des endroits comme son appartement, un coffre-fort et un entrepôt frigorifique (Ministre du Revenu national c Rouleau) [1995], 95 DTC 5597 (CFPI) [Rouleau]);

b.    conserver dans le coffre de son automobile une somme d’argent liquide importante dont on ne peut retracer l’origine par le truchement des registres bancaires habituels (Ministre du Revenu national c Arab, 2005 CF 264, [2005] 2 CTC. 107, paragraphe 20);

c.    tenir une double comptabilité pour un restaurant, la première pour les inscriptions dans le journal des ventes, le grand livre et les déclarations fiscales, la seconde pour les ventes additionnelles non déclarées par la société propriétaire du restaurant (Delaunière (Re), 2007 CF 636, 2008 DTC 6274 (angl.) paragraphe 4);  

d.    conserver une somme d’argent liquide importante dans un coffre-fort, un classeur de sa maison et dans la poche d’un peignoir (Mann c Ministre du Revenu national, 2006 CF 1358, [2007] 1 CTC 243, paragraphe 43);

e.    avancer des fonds à une société sur le point d’être dissoute pour éluder l’impôt sur le revenu (Laquerre, re, 2008 CF 459, 2009 DTC 5596 (angl.), paragraphe 11 [Laquerre, re]).

 

[50]           Aussi, dans Laquerre, re, précité, paragraphe 38, la Cour a examiné le comportement peu orthodoxe du défendeur, outre celui de ses sociétés liées et des fiducies familiales.

 

[51]           De même, dans Canada (Ministre du Revenu national) c Services ML Marengère, [1999] Can LII 9004 (CAN LL) [Marengère], la Cour a tenu compte du comportement peu orthodoxe du défendeur, de ses sociétés affiliées et de l’administrateur pour rendre sa décision sur la pertinence de l’ordonnance conservatoire.

 

[52]           La présence d’autres créanciers qui pourraient recouvrer leurs créances avant le ministre si ce dernier n’obtenait pas l’ordonnance conservatoire demandée peut aussi justifier de rendre une ordonnance (514659 BC Ltd, précité, paragraphe 10; Marengère précité, paragraphe 63).

 

[53]           Dans Ministre du Revenu national c Cormier-Imbeault, 2009 CF 499, [2009] 6 CTC 45, la Cour (paragraphe 7) a cité des facteurs qui peuvent justifier une ordonnance conservatoire :

a)      il existe des motifs raisonnables de croire que le contribuable a agi frauduleusement;

b)      le contribuable procède à la liquidation ou au transfert de ses actifs;

c)      le contribuable élude ses obligations fiscales;

d)      le contribuable détient des actifs qui sont susceptibles de diminuer en valeur par l’effet du temps, de se détériorer ou d’être périssables;

e)      l’importance du montant de la dette par rapport aux revenus et aux dépenses.

 

 

[54]           L’augmentation des cotisations peut en elle-même soulever des appréhensions raisonnables et faire craindre que le contribuable n’ait pas mené ses affaires de manière orthodoxe. Dans Rouleau, précité, le juge Gibson déclare (page 5598) :

Ces redressements se fondent sur les relevés de la valeur nette du patrimoine qui, selon le requérant, sont inexacts. Ces relevés ont été en partie établis à partir de renseignements recueillis grâce à des mandats de perquisition obtenus par le ministre du Revenu national le 3 mai 1994 et à une date ultérieure, également en mai 1994. Au cours des perquisitions, il a été découvert que le requérant avait 25 000 $ comptant dans son appartement, environ 92 000 $ comptant dans des coffres à la banque et plus de 96 000 $ comptant dans un coffre situé dans un entrepôt frigorifique qu’il exploitait.

 

[…]

Comme je l’ai indiqué ci-dessus, je ne suis pas convaincu que le requérant s’est acquitté du fardeau initial qui lui incombe de démontrer qu’il y a des motifs raisonnables de douter que le critère à utiliser pour délivrer une ordonnance de recouvrement de protection a été respecté. Dans l’arrêt Laframboise c La Reine3, le juge Joyal indique ceci à la page 524 :

 

J’en viens à la conclusion que la nature même de la cotisation soulève des doutes raisonnables selon lesquels le contribuable n’aurait pas géré ses affaires d’une façon que nous pourrions qualifier d’orthodoxe. Il est à craindre qu’à la suite du transfert de fonds excédentaires à des fins d’investissement, par l’entremise d’un tiers plutôt que directement, il serait difficile de retrouver ces fonds ou de les récupérer.

J’estime que la citation qui précède s’applique aux circonstances dont je suis saisi. Certainement, la nature des redressements établis relativement au requérant révèle des revenus qui sont tout à fait hors de proportion avec les revenus mentionnés dans les déclarations annuelles produites au ministre du Revenu national. La façon dont il conserve ses biens dénote très certainement qu’il conduit ses affaires d’une manière que l’on pourrait qualifier de peu orthodoxe. Elle révèle également des pratiques qui permettraient très facilement au requérant de soustraire des biens considérables s’il était enclin à le faire de sorte qu’il pourrait être difficile de retrouver les biens et de les récupérer.

 

 

[55]           Un résumé des principes pertinents à l’établissement d’une ordonnance conservatoire, donné par le juge Clancy de la Cour suprême de la Colombie-Britannique dans l’arrêt Deputy Minister of National Revenue c Quesnel précité, paragraphe 27 :

[TRADUCTION] Les ordonnances conservatoires ont été envisagées dans divers documents faisant autorité. L’avocat de Mme Quesnel fait un résumé utile des principes qui se dégagent de ces documents. Les principes pertinents dans les circonstances qui m’occupent sont les suivants :

                                                  i.      les faits doivent donner des motifs raisonnables de croire que le contribuable dilapidera, liquidera ou transférera autrement les biens pour qu’ils soient hors de la portée du ministre : Canada c Golbeck (1990), 90 DTC 6575 (CA.F.);

                                                ii.      il doit être plus que probable qu’autrement que le recouvrement sera compromis par le délai : Danielson c Ministre du Revenu national (1986), 86 DTC 6495 (CFPI); Satellite Earth Station, précité;

                                              iii.      le simple soupçon ou la simple crainte ne suffit pas à établir l’existence de motifs raisonnables : Danielson, précité, Satellite Earth Station, précité;

                                              iv.      dans les cas où le contribuable n’a jamais pris de mesure pour entraver les procédures de recouvrement, cela donne à penser que le recouvrement ne sera pas compromis : Danielson, précité;

                                                v.      lorsqu’un contribuable a vendu un immeuble qui représente le seul bien pour régler la dette et que le comptant reçu pour la vente est toujours disponible pour régler celle-ci, la vente elle‑même ne constitue pas un motif pour prononcer une ordonnance conservatoire : Canada (Minister of National Revenue) c Landru, [1993] 1 C.T.C. 93 (Sask. Q.B.);

                                              vi.      un comportement peu orthodoxe qui permet raisonnablement de craindre qu’il serait difficile de retrouver ces fonds ou de les récupérer pour acquitter la dette fiscale : Laframboise, précité; Rouleau, précité.

 

Voir également Ministre du Revenu national c Thériault-Sabourin, CarswellNat 172, 2003 CFPI 124, aux paragraphes 13 et 14.

 

[56]           Dans Canada (Ministre du Revenu national) c MacIver  [1999] 99 DCT 5524 (CFPI), à la page 5525, la juge Sharlow a entendu la requête des défendeurs concernant un examen des ordonnances conservatoires établies en vertu du paragraphe 225.2(2) de la LIR et déclaré :

Le litige fiscal sera tranché par une autre juridiction. Je n’ai pas compétence pour décider si les cotisations en question sont correctes. Dans le cadre de cette requête, je dois appliquer le paragraphe 152(8), aux termes duquel toute cotisation est réputée être valide et exécutoire sauf modification sur opposition ou appel

 

[57]           De même, dans Marengère, précité (aux paragraphes 67 et 72 (alinéa 4)), le juge Lemieux déclare :

[67] […] Les faits de la présente espèce constituent un exemple classique du genre de situation prévue par le législateur aux fins de l’octroi d’une ordonnance de protection; je le dis sans qu’il soit nécessaire de tirer une conclusion ou d’attribuer un but quelconque à Services MLM ou à M. Marengère. Il ne s’agit pas ici d’une affaire d’intention ou de planification fiscale; il faut régler l’affaire d’une façon objective et réaliste. En d’autres termes, c’est l’effet ou le résultat des mesures que le contribuable a prises à l’égard de ses actifs qui est important et pertinent lorsqu’il s’agit d’apprécier le bien-fondé de l’ordonnance de recouvrement de protection. L’obligation fiscale n’est pas ici en cause.

 

[74](4)  Le ministre n’a pas à prouver la fraude ou la tromperie ou un mauvais motif.

 

 

 

D. Preuve

[58]           En l’espèce, les éléments de preuve soumis à la Cour, conformément à la norme de preuve, sont suffisants, c’est-à-dire qu’ils montrent que le recouvrement de la dette serait compromis par le délai.

 

[59]           La Cour dispose en l’espèce de preuves convaincantes que le recouvrement est compromis, soit :

a.     le seul actif connu exigible de la société pour rembourser la dette est le bien du chemin McCulloch;

b.    en ce qui concerne les dettes sous-jacentes (celles de M. et de Mme Nelson), seule la dette de Mme Nelson liée à la cotisation établie en vertu du paragraphe 160(1) par suite du transfert à son nom, par M. Nelson, du bien du chemin McCulloch est attestée et enregistrée sur le titre du bien du chemin McCulloch. Le reste de sa dette n’est ni attesté ni enregistré sur le titre de quelque bien que ce soit, de sorte que sans l’ordonnance demandée, l’ARC n’est toujours pas en mesure de recouvrer cette dette ou de la garantir d’une manière ou d’une autre;

c.     par conséquent, le ministre souhaiterait attester la dette de la société et enregistrer le certificat correspondant sur le titre du bien du chemin McCulloch;

d.    on craint en effet que si le ministre ne parvient pas à le faire immédiatement, les Nelson feront en sorte que la société grèvera le bien ou le transférera pendant la période des restrictions relatives au recouvrement pour empêcher le ministre de recourir à ces mesures. La période applicable à la dette ne se terminera pas avant le 28 janvier 2011 ou ultérieurement, si la société s’oppose aux cotisations ou interjette appel;

e.     la société a fait preuve d’un comportement peu orthodoxe par le passé afin d’entraver les efforts de recouvrement du ministre concernant les Nelson;

f.     la société est gérée par M. Nelson et l’on croit qu’elle appartient à M. et à Mme Nelson;

g.    M. et Mme Nelson ont également eu un comportement peu orthodoxe afin d’entraver les efforts de recouvrement du ministre et de se soustraire à leurs responsabilités fiscales. Mme Nelson a déjà fait l’objet d’une ordonnance conservatoire;

h.    les cotisations elles-mêmes concernant à la fois Mme Nelson, M. Nelson et la société sont, de par leur nature même, peu orthodoxes;

i.     M. et Mme Nelson ont tous deux refusé de divulguer des renseignements financiers à l’ARC et depuis vingt (20) ans, se sont en général montrés peu coopératifs en ce qui a trait à leurs questions fiscales;

j.     la Cour suprême de la Colombie-Britannique, la Cour d’appel de la Colombie‑Britannique et la Cour fédérale ont déclaré que M. Nelson a agi de façon vexatoire dans diverses actions intentées contre l’administration fédérale, dont le ministre, l’ARC, des fonctionnaires fédéraux, dont des avocats. M. Nelson a également entamé des actions en justice semblables en Ontario. Il a sans succès interjeté appel de nombreuses de ces décisions à la Cour suprême du Canada. De plus, il a entamé des poursuites devant la Cour pénale internationale à La Haye, aux Pays-Bas, sans succès;

k.    le bien du chemin McCulloch a fait l’objet de plusieurs transferts entre personnes ayant entre elles un lien de dépendance, sans contrepartie aucune ou suffisante. Récemment, Mme Nelson a transféré le bien du chemin McCulloch à la société. Tous ces transferts ont été gérés et dirigés par les Nelson;

l.     de plus, une hypothèque en faveur du fils décédé des Nelson, Garth, est enregistrée sur le titre du bien du chemin McCulloch. On ne croit pas que cette hypothèque soit légitime. Il existe aussi une hypothèque en faveur de RBC enregistrée sur le titre du bien du chemin McCulloch. Même si selon RBC, le compte hypothécaire n’existe plus, les Nelson n’ont pas pris de mesure pour lever l’hypothèque sur le titre du bien;

m.   M. et Mme Nelson sont les administrateurs de plusieurs autres sociétés liées et pourraient, n’importe quand, transférer le bien à une autre société liée, y compris pendant la période au cours de laquelle le ministre se voit imposer des restrictions au recouvrement. Le bien du chemin McCulloch pourrait en outre être transférée à un autre membre de la famille, comme cela s’est produit par le passé;

n.    même si le ministre dispose de mesures de recouvrement concernant ces transferts, il est probable qu’il s’ensuive, compte tenu de la conduite antérieure des Nelson et de la société, un jeu interminable « du chat et de la souris ».

 

[60]           Pour ces raisons, il y a des motifs raisonnables de croire que s’il est retardé, le recouvrement de tout ou partie de la créance pour laquelle une cotisation a été établie au nom de la société sera compromis.

 

V. Conclusion

[61]           La Cour accepte d’accueillir la requête du ministre concernant ce qui suit :

            (1)   une ordonnance (l’ordonnance conservatoire) en vertu du paragraphe 225.2(2) de la LIR qui autorise le ministre à prendre immédiatement les mesures énoncées aux alinéas 225.1(1) a) à g) au sujet des montants à recouvrer établis à l’égard de la société, dont le droit d’attester les montants dus par la société relativement à la créance et à enregistrer le jugement correspondant sur le titre du bien du chemin McCulloch.

            (2)   Une ordonnance autorisant le ministre à signifier l’ordonnance conservatoire à la société en la remettant personnellement à son seul administrateur, Robert, ou en laissant copie de l’ordonnance directement à la société, à son nom et à celui de Robert, à un adulte au bien du chemin McCulloch, ou en affichant l’ordonnance sur la porte de la résidence et en en adressant un exemplaire par courrier ordinaire au nom de la société et à celui de Robert au bien du chemin McCulloch. Comme je l’ai dit ci‑dessus, le siège social de la société y est situé.

 

 


 

JUGEMENT

            VU la requête ex parte du ministre du Revenu national (le ministre);

            APRÈS avoir examiné des pièces déposées par le ministre, y compris l’affidavit de Michael Sundstrom assermenté le 1er novembre 2011, et après avoir entendu les représentations de l’avocate du ministre, Nicole S. Johnston;

            ET étant convaincue qu’il existe des motifs raisonnables de croire que le recouvrement du montant établi dans une cotisation fiscale par le ministre contre la défenderesse serait compromis par un délai;

            LA COUR ORDONNE, en vertu du paragraphe 225.2(2) de la Loi de l’impôt sur le revenu, que le ministre soit autorisé à prendre immédiatement les mesures énoncées aux alinéas 225.1(1)a) à g) en ce qui concerne les cotisations établies concernant la défenderesse (l’ordonnance conservatoire);

            LA COUR ORDONNE ÉGALEMENT que le ministre signifie l’ordonnance conservatoire à la défenderesse en la remettant directement à son seul administrateur, Robert Hannes Nelson (M. Nelson), ou en remettant une copie de l’ordonnance à la défenderesse, à son nom et à celui de M. Nelson, à un adulte à l’adresse de son siège social, soit le 3460, chemin McCulloch, Kelowna (Colombie-Britannique) (le bien du chemin McCulloch), qui est également l’adresse de la résidence personnelle de M. Nelson, ou en l’affichant sur la porte de la résidence et en en adressant un exemplaire par courrier ordinaire au nom de la société et à celui de M. Nelson à la résidence du chemin McCulloch.

 

            LA COUR ORDONNE ÉGALEMENT à la défenderesse de :

PRENDRE NOTE qu’une requête ex parte, classée sous le numéro de greffe T-1790-11, a été prise contre elle en vue d’obtenir une ordonnance conservatoire conformément au paragraphe 225.2 de la Loi de l’impôt sur le revenu. L’ordonnance de la Cour autorise le ministre du Revenu national à prendre immédiatement toute mesure énoncée aux alinéas 225.1(1)a) à g) de la Loi de l’impôt sur le revenu en ce qui concerne sa dette fiscale qui a fait l’objet d’une cotisation.  

Selon le paragraphe 225.2(8), la défenderesse peut, après avis de six (6) jours francs au sous-procureur général du Canada, demander à un juge de la Cour fédérale de réviser la présente ordonnance.

Selon le paragraphe 225.2(9), la requête de la défenderesse doit être présentée dans les trente (30) jours suivant la date où l’ordonnance de la Cour lui a été signifiée ou dans le délai supplémentaire que le juge peut accorder s’il est convaincu qu’elle a présenté la requête dès que possible.

(Des exemplaires des Règles des Cours fédérales ainsi que les renseignements concernant les bureaux locaux de la Cour fédérale et autres renseignements utiles peuvent être obtenus, sur demande, auprès de l’administrateur de la Cour, à Ottawa, au 613–992–4238, ou à tout autre bureau local, dont celui de Vancouver, au 604–666–3232. 

« Michel M.J. Shore »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

 

avocats inscrits au dossier

 

 

DOSSIER :                                        T-1790-11

 

INTITULÉ :                                      MRN c FRIENDS OF GOOGOLPLEXION FOR HUMAN RIGHTS INC. (FAISANT PARFOIS AFFAIRE SOUS LE NOM DE NELSON’S INTERNATIONAL HOME AUTO DEPOT INC.)

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Vancouver (Colombie-Britannique)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 7 novembre 2011

 

 

MOTIFS DE JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            LE JUGE SHORE

 

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 7 novembre 2011

 

 

COMPARUTIONS :

 

Nicole S. Johnston

POUR LE DEMANDEUR

 

Aucune comparution

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Vancouver (C.-B.)

 

POUR LE DEMANDEUR

s. o.

POUR LA DÉFENDERESSE

 

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