Cour fédérale |
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Federal Court |
Ottawa (Ontario), ce 29e jour de juin 2011
En présence de l’honorable juge Lemieux
ENTRE :
Dora Noemi Arev PRADO
Gabriel Alejand PRADO
Demandeurs
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT
[1] Il s’agit ici d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision d’un membre de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (le tribunal) présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. (2001), ch. 27 (la Loi).
[2] Les demandeurs sont membres de la même famille; le père, Maynor Rene Jua Hernandez et la mère, Dora Noemi Arev Prado, sont citoyens du Guatemala, leur fils Gabriel Alejand Prado est aussi citoyen des États-Unis. Ils craignent une bande criminelle, les Maras Salvatrucha, qui avaient volé et extorqué leur famille sachant qu’elle était riche et pouvait payer. Les demandeurs ont reçu des menaces de mort et la demanderesse a été sérieusement blessée par des membres de cette bande avant qu’ils ne quittent leur pays natal le 17 juin 2007 pour réclamer l’asile au Canada, une demande refusée le 17 juin 2010.
[3] Le tribunal a décidé que l’article 96 de la Loi ne s’appliquait pas au motif que le demandeur principal ne pouvait pas faire partie d’un groupe social particulier au sens de la Convention.
[4] Le tribunal a aussi décidé que les membres de la famille n’étaient pas des personnes à protéger selon l’alinéa 97(1)b) de la Loi au motif que le risque encouru par eux en est « un de nature généralisé et auquel font face généralement d’autres citoyens du Guatemala et, en conséquence, le demandeur n’a pas démontré qu’il serait sujet à un risque différent des autres citoyens de Guatemala. »
[5] L’article 97 de la Loi exige que l’État du Guatemala puisse les protéger. Les demandeurs avaient déposé des plaintes après le vol dans leur commerce de vêtements en décembre 2007 et l’extorsion dont ils ont été victimes depuis janvier 2007.
[6] Sur ce point déterminant, le tribunal a écrit :
. . . Dans le cas présent, le demandeur a été demandé par les autorités policières de collaborer dans l’identification de ses agresseurs, ce qu’il aurait refusé. Dans ce contexte, le tribunal est d’avis que le demandeur n’exploite pas toutes les possibilités offertes par les autorités de son pays en lien avec la protection offerte avant de demander la protection du Canada.
[7] Toute l’analyse du tribunal sur la protection disponible au Guatemala face aux Maras repose sur ce présumé refus. Dans cette circonstance, les dispositions de l’alinéa 18.1(4)d) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7, s’appliquent. Cet alinéa édicte que la Cour peut annuler une décision si le tribunal « a rendu une décision ou une ordonnance fondée sur une conclusion de fait erronée », ce qui est le cas en l’espèce.
[8] J’ai lu plusieurs fois les notes sténographiques de l’audience. J’estime que le demandeur principal n’a jamais affirmé avoir refusé d’identifier ses agresseurs. La preuve documentaire est à l’opposé de cette affirmation. La pièce P-14 est une déclaration de Monsieur Hernandez devant le procureur de la ville de Guatemala où il affirme avoir examiné les albums de photos mais qu’il n’a pu identifier personne. La pièce P-15 est la décision du procureur que le dossier est classé, faute d’identification.
[9] La demande de contrôle judiciaire sera donc accueillie. Aucune question d’importance n’a été soulevée.
JUGEMENT
La demande de contrôle judiciaire est accueillie. La décision rendue le 17 juin 2010 par un membre de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié est annulée et l’affaire est retournée à la Commission pour reconsidération par un tribunal différemment constitué.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-4051-10
INTITULÉ : Maynor Rene Jua HERNANDEZ, Dora Noemi Arev PRADO, Gabriel Alejand PRADO c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
LIEU DE L’AUDIENCE : Montréal (Québec)
DATE DE L’AUDIENCE : Le 15 mars 2011
ET JUGEMENT : Le juge Lemieux
DATE DES MOTIFS : Le 29 juin 2011
COMPARUTIONS :
Me Manuel Centurion POUR LES DEMANDEURS
Me Catherine Brisebois POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Manuel Antonio Centurion POUR LES DEMANDEURS
Montréal (Québec)
Myles J. Kirvan POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada