Cour fédérale
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Federal Court
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[TRADUCTION FRANÇAISE]
Vancouver (Colombie-Britannique), le 5 mai 2011
En présence de monsieur le juge Pinard
ENTRE :
et
ET DE L’IMMIGRATION DU CANADA et
LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE
ET DE LA PROTECTION CIVILE
MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE
[1] Il s’agit d’une requête présentée pour le compte du demandeur visant à obtenir une ordonnance pour surseoir à l’exécution d’une mesure d’expulsion valide à l’encontre de celui-ci en attendant qu’une décision soit rendue au sujet de la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire d’une décision négative rendue le 29 mars 2011 concernant son troisième examen des risques avant renvoi (ERAR). Son expulsion est prévue le 5 mai 2011, dans la soirée.
[2] Les arguments du demandeur pour déterminer s’il existe une question sérieuse à trancher en l’espèce portent essentiellement sur le caractère raisonnable de la décision contestée. À cette étape, j’ai de sérieux doutes quant à l’existence d’un motif valable quelconque permettant de substituer ma propre appréciation des faits à celle de l’agent d’ERAR. Quoi qu’il en soit, sans déterminer s’il existe une question sérieuse à trancher par la Cour, la requête en sursis est rejetée au motif que le demandeur n’a pas réussi à établir qu’il subira un préjudice irréparable s’il est renvoyé au Liban, et à démontrer que la prépondérance des inconvénients milite en sa faveur (voir Toth c. Ministre de l’Emploi et de l’Immigration (1988), 86 NR 302 (CAF) et RJR MacDonald Inc c. Canada (Procureur général), [1994] 1 RCS 311).
[3] En ce qui concerne la question de préjudice irréparable, il n’y a aucun fondement à l’affirmation du demandeur voulant que sa deuxième demande s’appuyant sur des motifs d’ordre humanitaire, qu’il a déposée il y a deux semaines seulement et qui est basée principalement sur son établissement au Canada, deviendrait théorique s’il était renvoyé du Canada. Il est acquis en matière jurisprudentielle que ni une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire ni une demande de contrôle judiciaire ne deviennent théoriques du simple fait qu’une personne a fait l’objet d’une mesure d’expulsion (voir Palka c. Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, 2008 CAF 165, aux paragraphes 15, 17 et 19).
[4] En fait, le demandeur a par le passé déjà déposé une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire qui a examiné son établissement au Canada. Cette demande a été rejetée. De plus, il a également bénéficié d’une demande de parrainage des époux ou conjoints de fait avec sa conjointe de l’époque, laquelle demande a également été rejetée pour absence de bonne foi.
[5] Pour ce qui est de l’allégation que la partenaire du demandeur, les enfants de celle-ci, ainsi que les entrepreneurs payés par le demandeur subiraient un préjudice, la Cour suprême du Canada a établi dans l’affaire RJR MacDonald Inc. précité, au paragraphe 58, qu’un préjudice causé à un tiers, plutôt qu’au demandeur, ne répond pas à l’exigence minimale de « préjudice irréparable » aux fins d’une requête en sursis (voir également Sittampalam c. Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2010 CF 562).
[6] De plus, un préjudice irréparable doit dépasser en gravité les conséquences habituelles d’une expulsion. Dans l’affaire Melo c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), (2000), 188 FTR 39, au paragraphe 21, le juge Denis Pelletier a déclaré :
[... pour que l’expression « préjudice irréparable » conserve un peu de sens, elle doit correspondre à un préjudice au-delà de ce qui est inhérent à la notion même d’expulsion. Être expulsé veut dire perdre son emploi, être séparé des gens et des endroits connus. L’expulsion s’accompagne de séparations forcées et de cœurs brisés...]
[7] L’argument du demandeur voulant qu’une perte commerciale cause un préjudice irréparable est également sans fondement. Tel que l’a affirmé la Cour dans Kasi c. Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (2 mars 2009), IMM-396-09, au Canada, des perturbations liées à l’industrie ou au succès ne correspondent pas à un préjudice irréparable.
[8] Enfin, aucun nouvel élément de preuve ne m’a été présenté pour démontrer que le demandeur, qui a bénéficié d’une évaluation de sa demande d’asile, de trois évaluations des risques et de contrôles de la présente Cour, est exposé à un risque pour sa vie s’il est renvoyé dans son pays. Dans les circonstances, j’estime que la prépondérance des inconvénients est en faveur du défendeur, car l’article 48 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 dispose qu’une mesure de renvoi doit être appliquée dès que les circonstances le permettent.
ORDONNANCE
Pour les motifs susmentionnés, la requête du demandeur visant à obtenir une ordonnance pour surseoir à l’exécution d’une mesure d’expulsion est rejetée.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : T-2618-11
INTITULÉ : KHDOR IBRAHIM c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
LIEU DE L’AUDIENCE : Vancouver (Colombie-Britannique)
DATE DE L’AUDIENCE : Le 2 mai 2011
MOTIFS DE L’ORDONNANCE
ET ORDONNANCE : LE JUGE PINARD
DATE DES MOTIFS : Le 5 mai 2011
COMPARUTIONS :
Sawsan A. Habbal POUR LE DEMANDEUR
Banafsheh Sokhansanj POUR LES DÉFENDEURS
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Sawsan A. Habbal POUR LE DEMANDEUR
Avocats
Vancouver (Colombie-Britannique)
Myles J. Kirvan POUR LES DÉFENDEURS
Sous-procureur général du Canada
Vancouver (Colombie-Britannique)