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Cour fédérale

 

Federal Court

 


Date : 20110111

Dossier : IMM-1426-10

Référence : 2011 CF 22

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 11 janvier 2011

En présence de monsieur le juge Russell

 

 

ENTRE :

 

MAJID HASSAN CHAUHDRY

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

      MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire fondée sur le paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi), qui vise la décision par laquelle l’agente d’immigration désignée (l’agente des visas) du Centre régional de programmes de l’Immigration situé à Buffalo (New York) a refusé, le 31 décembre 2009, de délivrer un visa de résident permanent au demandeur parce que son état de santé [traduction] « risque d’entraîner un fardeau excessif pour les services sociaux ou de santé » du Canada.

 

LE CONTEXTE

 

[2]               Le demandeur est un étudiant à temps plein au doctorat en génie électrique et informatique, à l’Université du Connecticut. De plus, il travaille pour une entreprise privée et souscrit au régime d’assurance‑maladie mis en place par cette dernière. Bien qu’il réside actuellement aux États‑Unis, le demandeur a présenté une demande de résidence permanente au Canada au titre de la catégorie des travailleurs qualifiés (fédéral) en décembre 2007.

 

[3]               Le demandeur a subi une transplantation rénale en 2004. Il doit prendre chaque jour des médicaments immunosuppresseurs. Il se dit néanmoins en excellente santé et s’attend à le demeurer pendant de nombreuses années, déclaration qui est appuyée par les lettres de deux médecins des États‑Unis. Le demandeur affirme également que son état de santé ne fait aucunement obstacle à sa participation aux cours et aux travaux de recherche à l’université ni à son emploi au sein de l’entreprise privée; des lettres provenant de son directeur de thèse et de son employeur corroborent ces affirmations. Le demandeur se décrit comme étant financièrement stable. Il possède des économies et une propriété au Pakistan, et bénéficie aussi du soutien financier de son père et d’un frère, tous deux vétérinaires. Il a l’intention de souscrire une assurance‑maladie complète s’il obtient la résidence permanente au Canada.

 

[4]               L’agente des visas a envoyé au demandeur une « lettre relative à l’équité procédurale » datée du 20 février 2009 dans laquelle elle reconnaît le problème de santé du demandeur et avise ce dernier qu’il doit établir un plan raisonnable et viable afin d’atténuer le fardeau excessif que son état de santé entraînerait autrement pour les services sociaux et de santé du Canada. La réponse du demandeur, datée du 20 mars 2009, contient les faits énoncés plus haut, soit que son état de santé est stable et qu’il n’a pas besoin de services sociaux ni d’aucune aide. Il a également transmis à l’agente des visas les lettres d’appui susmentionnées fournies par l’université, son employeur et ses médecins, des détails au sujet de ses propres ressources financières et de celles de sa famille ainsi qu’une déclaration de capacité et d’intention signée, dans laquelle il promettait de ne pas tenir les autorités fédérales, provinciales ou territoriales responsables des coûts occasionnés par son problème de santé. Les deux dernières pièces ont été produites à l’appui du plan établi par le demandeur en vue d’atténuer le fardeau excessif que pourrait entraîner son état de santé pour les services sociaux ou de santé.

 

[5]               La demande de visa a été rejetée dans une lettre (la lettre de refus) datée du 31 décembre 2009 au motif que l’état de santé du demandeur pourrait nécessiter des services et que le coût de ces services dépasserait probablement la moyenne, par habitant au Canada, des dépenses pour les services de santé sur une période de cinq années. Il s’agit de la décision qui fait l’objet du présent contrôle judiciaire.

 

LA DÉCISION VISÉE PAR LE CONTRÔLE JUDICIAIRE

 

[6]               La décision est composée d’une lettre relative à l’équité procédurale, des notes entrées par l’agente des visas dans le Système de traitement informatisé des dossiers d’immigration (les notes du STIDI) et d’un extrait des définitions réglementaires pertinentes en l’espèce. La lettre avise le demandeur qu’il ne satisfait pas aux conditions d’immigration au Canada parce que son problème de santé – insuffisance rénale chronique post‑transplantation – pourrait nécessiter des services sociaux ou de santé dont le coût prévisible dépasserait la moyenne par habitant au Canada des dépenses pour les services de santé sur une période de cinq années. Autrement dit, le coût serait excessif. Un fardeau excessif s’entend actuellement d’un montant supérieur à 4 806 $ par année.

[7]               La lettre reconnaît que le demandeur a présenté des renseignements supplémentaires le 20 mars 2009, que ceux‑ci ont tous été examinés avec soin, mais qu’ils n’ont pas modifié la première appréciation présentée dans la lettre relative à l’équité procédurale du 20 février 2009. L’agente des visas précise que la décision est définitive et lui paraît raisonnable.

 

[8]               Les notes du STIDI réitèrent la conclusion de l’agente des visas, à savoir que les observations présentées par le demandeur le 20 mars 2009 ne l’ont pas convaincue que ce dernier serait en mesure d’atténuer le coût des soins médicaux.

 

LES QUESTIONS EN LITIGE

 

[9]               Le demandeur soulève les questions suivantes :

1.         L’agente des visas a‑t‑elle omis de fournir des motifs suffisants à l’appui de sa décision et a‑t‑elle, ainsi, violé les principes d’équité procédurale?

2.         L’agente des visas a‑t‑elle commis une erreur en n’effectuant pas une appréciation individualisée pour déterminer si l’état de santé du demandeur risque d’entraîner un fardeau excessif pour les services sociaux ou de santé du Canada?

 

LES DISPOSITIONS LÉGALES ET RÉGLEMENTAIRES

 

[10]           Les dispositions suivantes de la Loi s’appliquent en l’espèce :

Visas et documents

 

 

11. (1) L’étranger doit, préalablement à son entrée au Canada, demander à l’agent les visa et autres documents requis par règlement. L’agent peut les délivrer sur preuve, à la suite d’un contrôle, que l’étranger n’est pas interdit de territoire et se conforme à la présente loi.

 

[…]

 

Motifs sanitaires

 

38. (1) Emporte, sauf pour le résident permanent, interdiction de territoire pour motifs sanitaires l’état de santé de l’étranger constituant vraisemblablement un danger pour la santé ou la sécurité publiques ou risquant d’entraîner un fardeau excessif pour les services sociaux ou de santé.

Application before entering Canada

 

11. (1) A foreign national must, before entering Canada, apply to an officer for a visa or for any other document required by the regulations. The visa or document may be issued if, following an examination, the officer is satisfied that the foreign national is not inadmissible and meets the requirements of this Act.

 

Health grounds

 

38. (1) A foreign national is inadmissible on health grounds if their health condition

(a) is likely to be a danger to public health;

(b) is likely to be a danger to public safety; or

(c) might reasonably be expected to cause excessive demand on health or social services.

 



[11]           Les dispositions suivantes du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227, s’appliquent en l’espèce :

Définitions

 

1. (1) Les définitions qui suivent s’appliquent à la Loi et au présent règlement.

 

[…]

« fardeau excessif »

“ excessive demand ”

 

« fardeau excessif » Se dit :

 

a) de toute charge pour les services sociaux ou les services de santé dont le coût prévisible dépasse la moyenne, par habitant au Canada, des dépenses pour les services de santé et pour les services sociaux sur une période de cinq années consécutives suivant la plus récente visite médicale exigée par le présent règlement ou, s’il y a lieu de croire que des dépenses importantes devront probablement être faites après cette période, sur une période d’au plus dix années consécutives;

 

b) de toute charge pour les services sociaux ou les services de santé qui viendrait allonger les listes d’attente actuelles et qui augmenterait le taux de mortalité et de morbidité au Canada vu l’impossibilité d’offrir en temps voulu ces services aux citoyens canadiens ou aux résidents permanents.

 

[…]

 

« services de santé »

“ health services ”

 

« services de santé » Les services de santé dont la majeure partie sont financés par l’État, notamment les services des généralistes, des spécialistes, des infirmiers, des chiropraticiens et des physiothérapeutes, les services de laboratoire, la fourniture de médicaments et la prestation de soins hospitaliers.

 

 

« services sociaux »

“ social services ”

 

« services sociaux » Les services sociaux — tels que les services à domicile, les services d’hébergement et services en résidence spécialisés, les services d’éducation spécialisés, les services de réadaptation sociale et professionnelle, les services de soutien personnel, ainsi que la fourniture des appareils liés à ces services :

 

a) qui, d’une part, sont destinés à aider la personne sur les plans physique, émotif, social, psychologique ou professionnel;

 

b) dont, d’autre part, la majeure partie sont financés par l’État directement ou par l’intermédiaire d’organismes qu’il finance, notamment au moyen d’un soutien financier direct ou indirect fourni aux particuliers.

Definitions

 

1. (1) The definitions in this subsection apply in the Act and in these Regulations.

 

[…]

“excessive demand”

« fardeau excessif »

 

“excessive demand” means

 

(a) a demand on health services or social services for which the anticipated costs would likely exceed average Canadian per capita health services and social services costs over a period of five consecutive years immediately following the most recent medical examination required by these Regulations, unless there is evidence that significant costs are likely to be incurred beyond that period, in which case the period is no more than 10 consecutive years; or

 

 

 

(b) a demand on health services or social services that would add to existing waiting lists and would increase the rate of mortality and morbidity in Canada as a result of an inability to provide timely services to Canadian citizens or permanent residents.

 

 

[…]

 

 

“health services”

« services de santé »

 

“health services” means any health services for which the majority of the funds are contributed by governments, including the services of family physicians, medical specialists, nurses, chiropractors and physiotherapists, laboratory services and the supply of pharmaceutical or hospital care.

 

 

 

“social services”

« services sociaux »

 

“social services” means any social services, such as home care, specialized residence and residential services, special education services, social and vocational rehabilitation services, personal support services and the provision of devices related to those services,

 

 

 

(a) that are intended to assist a person in functioning physically, emotionally, socially, psychologically or vocationally; and

 

(b) for which the majority of the funding, including funding that provides direct or indirect financial support to an assisted person, is contributed by governments, either directly or through publicly-funded agencies.

LA NORME DE CONTRÔLE

 

[12]           Dans l’affaire Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, la Cour suprême du Canada a statué qu’il n’est pas toujours nécessaire de se livrer à une analyse exhaustive pour arrêter la bonne norme de contrôle. Quand la norme applicable à la question dont est saisi le tribunal est établie de manière satisfaisante par la jurisprudence, la cour de révision peut l’adopter. C’est seulement quand cette recherche se révèle infructueuse que la cour de révision entreprend l’examen des quatre facteurs qui permettent de décider de la norme de contrôle appropriée.

 

[13]           La première question soulevée par le demandeur concerne le caractère suffisant des motifs. Il a été établi dans Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Charles, 2007 CF 1146, paragraphe 24, où la Cour cite l’arrêt S.C.F.P. c. Ontario (Ministre du Travail), 2003 CSC 29, que la question de savoir si la décision est suffisamment motivée relève de l’équité procédurale et est susceptible de contrôle selon la norme de la décision correcte.

 

[14]           La deuxième question consiste à déterminer si l’agente des visas a effectué une appréciation individualisée. Dans Hilewitz c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CSC 57, paragraphe 57 (Hilewitz), la juge Rosalie Abella fait remarquer que « [l]a Loi requiert des appréciations individuelles ». Dans le jugement Sapru c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 240, paragraphe 16, le juge Richard Mosley de la Cour fédérale, s’appuyant sur Hilewitz, a déclaré que « la médecin a omis de remplir les obligations énoncées dans l’arrêt Hilewitz. Il s’agit d’une question de droit qui doit être examinée selon la décision correcte. » Les conclusions de fait tirées par l’agente des visas à l’égard de l’appréciation sont soumises à la norme de la décision raisonnable. Voir Mazhari c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 467, paragraphe 9; Barnash c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 842, paragraphe 20; Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) c. Jiwanpuri (1990), 109 N.R. 293 (C.A.F.).

 

[15]           Lors du contrôle d’une décision à la lumière de la norme de la décision raisonnable, l’analyse du caractère raisonnable « tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ». Voir Dunsmuir, précité, paragraphe 47. Autrement dit, la Cour ne devrait intervenir que si la décision est déraisonnable en ce sens qu’elle n’appartient pas « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ».

 

LES ARGUMENTS

            Le demandeur

                        La décision a violé le principe de l’équité procédurale

 

[16]           Dans sa lettre relative à l’équité procédurale, l’agente des visas précise qu’elle a consulté la Direction générale de la gestion de la santé à Citoyenneté et Immigration Canada, et a déterminé, au sujet des services sociaux, que le demandeur aurait besoin de médicaments immunosuppresseurs quotidiennement. La lettre de refus mentionne que l’état de santé du demandeur risque d’entraîner un fardeau excessif pour les services sociaux ou de santé.

 

[17]           Le demandeur fait valoir que les deux lettres concluent que la demande doit être rejetée, mais n’expliquent pas le raisonnement ayant mené à cette conclusion. Elles ne renferment aucune analyse illustrant en quoi les médicaments d’ordonnance risquent d’entraîner un fardeau pour les services, ne justifient aucunement la conclusion relative à la nature « excessive » de ce fardeau et n’expliquent pas pourquoi les lettres des médecins des États‑Unis et le plan établi par le demandeur en vue d’atténuer le coût des médicaments n’ont pas répondu aux réserves de l’agente des visas. Le seul fait de déclarer que le demandeur a besoin de médicaments ne suffit pas à expliquer en quoi le coût de ces médicaments dépasserait la moyenne des dépenses par habitant.

[18]           Dans l’arrêt Via Rail Canada Inc. c. Canada (Office national des transports), [2001] 2 C.F. 25 (C.A.F.), paragraphe 22, la Cour d’appel fédérale précise que « le décideur doit plutôt exposer ses conclusions de fait et les principaux éléments de preuve sur lesquels reposent ses conclusions ». Les motifs doivent contenir des explications suffisantes qui permettent au demandeur de comprendre clairement pourquoi sa demande est rejetée. Voir Ladouceur c. Canada (Procureur général), 2006 CF 1438, paragraphes 22 à 27; Ogunfowora c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CF 471, paragraphe 58.

 

[19]           La communication de motifs suffisants est un volet important de la pleine participation au processus décisionnel. Elle renseigne le demandeur sur les éléments invoqués contre lui. Selon le Bulletin opérationnel 063B publié par Citoyenneté et Immigration Canada (29 juillet 2009, section B), l’agent « s’assurera que la lettre relative à l’équité procédurale informe explicitement le demandeur des services de soins de santé et sociaux nécessaires, qui sont essentiels à la personne jugée interdite de territoire pour des raisons médicales ».

 

[20]           En l’espèce, la lettre relative à l’équité procédurale et la lettre de refus ne précisent pas les services sociaux dont le demandeur aurait supposément besoin, et elles n’évaluent pas en quoi les médicaments sur ordonnance entraîneraient un fardeau excessif pour le système de soins de santé. En ne donnant pas de motifs suffisants, l’agente des visas a manqué à son devoir d’agir équitablement.

 

L’agente des visas n’a pas fait une appréciation individualisée du fardeau excessif

 

[21]           Aux termes de l’alinéa 38(1)c) de la Loi, l’agent doit déterminer si l’état de santé du demandeur risque d’entraîner un fardeau excessif pour les services sociaux ou de santé. Il ne suffit pas que l’agent énonce simplement que le demandeur présente un problème de santé. Il doit effectuer une appréciation individualisée en se penchant sur les « répercussions » qu’aura le problème de santé particulier du demandeur sur ces services. Voir Brahim c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 1313, paragraphe 13.

 

[22]           Le fardeau n’est pas toujours excessif et le « médecin agréé n’a pas le droit de présumer qu’un état de santé particulier ou une incapacité particulière doit nécessairement entraîner un fardeau excessif ». Voir Rabang c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] A.C.F. no 1934, paragraphes 17 et 18. La Cour suprême du Canada a déclaré dans l’arrêt Hilewitz, précité, paragraphe 56, qu’une appréciation doit être effectuée pour chaque personne :

Si le médecin agréé s’interroge sur les services susceptibles d’être requis en se fondant uniquement sur la classification de la maladie ou de l’invalidité, et non sur la façon précise dont elle se manifeste, l’appréciation devient générique plutôt qu’individuelle. L’évaluation des coûts est alors faite en fonction de la déficience plutôt qu’en fonction de l’individu. Toutes les personnes atteintes d’une déficience donnée sont alors automatiquement exclues, même celles dont l’admission n’entraînerait pas, ou ne risquerait pas d’entraîner, un fardeau excessif pour les fonds publics.

 

 

[23]           L’appréciation individualisée consiste à déterminer le coût prévu des médicaments du demandeur en tenant compte de « sa situation unique et de ses besoins particuliers ». Voir Fallahi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 906, paragraphe 7. L’agent doit déterminer « le fardeau probable pour les services sociaux, et non la simple admissibilité à ces services ». Voir l’arrêt Hilewitz, précité, paragraphe 54. Voir également Tong c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), Commission de l’immigration et du statut de réfugié (Section d’appel), 29 septembre 2009, TA7-12458, paragraphes 24 et 33; Ashraf c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), Commission de l’immigration et du statut de réfugié (Section d’appel), 19 mai 2009, TA7-05863, paragraphe 32.

 

[24]           Il importe tout autant que l’appréciation individualisée tienne compte de « la volonté et de la capacité du demandeur ou de sa famille de payer pour les services concernés ». Voir Hilewitz, précité, paragraphes 55 et 61. Les agents des visas doivent tenir compte de ce facteur. Voir Hossain c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2006 CF 475, paragraphe 23. L’agent qui ne vérifie pas si le demandeur a un plan viable pour couvrir le coût des médicaments commet une erreur. Voir Companioni c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 1315 (Companioni), paragraphe 10.

 

[25]           En l’espèce, l’agente des visas n’a pas établi si le coût des médicaments du demandeur dépasserait le coût par habitant sur une période de cinq ans et s’il entraînerait un fardeau pour les services financés par l’État. Au Canada, il n’existe aucun régime public universel de médicaments pour patients non hospitalisés, de sorte que l’agente n’aurait pas dû tenir pour acquis que les médicaments requis seraient remboursés par un régime public d’assurance‑médicaments auquel le demandeur serait admissible. En outre, l’agente n’a pas tenu compte du plan financier du demandeur selon lequel il adhérerait à un régime privé d’assurance‑maladie afin d’atténuer tout fardeau excessif pour les services de santé du Canada.

 

[26]           Le demandeur soutient qu’en n’effectuant pas l’évaluation appropriée, l’agente des visas a commis une erreur de droit susceptible de contrôle selon la norme de la décision correcte.

 

Le défendeur

            Les motifs de l’agente des visas étaient suffisants

 

[27]           Le défendeur soutient que les motifs de l’agente des visas étaient suffisants dans les circonstances. Si le demandeur les estimait insuffisants, toutefois, il lui incombait de demander des éclaircissements et des renseignements supplémentaires. Dans Hayama c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 1305, paragraphe 15 (Hayama), le juge Edmond Blanchard s’est appuyé sur l’arrêt rendu par la Cour d’appel fédérale dans Marine Atlantic Inc. c. Guilde de la marine marchande du Canada, 2000 CanLII 15517 (Marine Atlantic), pour tirer la conclusion suivante :

Si le demandeur n’était pas convaincu par la lettre de décision et estimait qu’elle n’expliquait pas suffisamment la décision, il aurait dû faire une demande pour d’autres éclaircissements. Il n’existe aucun élément de preuve qu’une telle demande aurait été refusée. En conséquence, je conclus que, dans les circonstances de la présente affaire, il n’y a aucun manquement à l’obligation d’équité, manquement qui serait dû à une absence de motifs ou à l’insuffisance des motifs.

 

[28]           Subsidiairement, si le demandeur n’était pas tenu de demander des éclaircissements au sujet des motifs, le défendeur soutient que les motifs de l’agente des visas étaient suffisants en ce qu’ils soulignaient la source de ses réserves (une insuffisance rénale chronique post‑transplantation) et leur nature (le fardeau excessif pour les services de santé). Voir Hersi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2000 CanLII 16671 (C.F.), paragraphe 21.

 

[29]           Bien que le demandeur affirme avoir été privé d’explications valables quant au raisonnement ayant amené l’agente des visas à poser une évaluation et des conclusions défavorables au sujet des lettres de soutien et du plan de paiement des médicaments, le défendeur maintient qu’il serait excessif d’exiger qu’un agent administratif rende des décisions si détaillées vu qu’il ne s’agit pas d’un tribunal administratif. Voir Cupid c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CF 176, paragraphe 12. Par ailleurs, un demandeur peut contester le caractère suffisant des motifs seulement si l’insuffisance a porté atteinte à son droit de solliciter un contrôle judiciaire. Cet argument ne s’applique pas en l’espèce. Voir Za’rour c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CF 1281.

 

[30]           Le défendeur affirme que le demandeur a obtenu des détails au sujet des services sociaux qui lui seraient nécessaires selon l’agente des visas; une copie des dispositions législatives définissant les termes « fardeau excessif », « services de santé » et « services sociaux » était jointe aux motifs de l’agente des visas. Voir Yogeswaran c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 1997 CanLII 5080 (C.F. 1re inst.), paragraphe 7.

 

[31]           Le défendeur soutient que la lettre relative à l’équité procédurale et la lettre de refus apportent des réponses aux questions en litige en l’espèce. Un appel fondé sur l’insuffisance des motifs n’est accueilli que si les lacunes des motifs font obstacle à un examen valable en appel. Ce n’est pas le cas ici.

 

L’agente des visas a effectué une appréciation individualisée

 

[32]           Le défendeur affirme que, contrairement aux allégations du demandeur, l’agente des visas a bien effectué une appréciation individualisée de l’état de santé du demandeur. Dans son affidavit daté du 26 mai 2010, l’agente des visas mentionne la déclaration médicale présentée par le docteur Jason Creaghan, le médecin qui a constaté l’interdiction de territoire du demandeur. La déclaration note la maladie du demandeur, les médicaments qu’il prend et la posologie, ainsi que le coût par année et l’ensemble de la protection qui lui serait offerte par le régime d’assurance‑médicaments de l’Île‑du‑Prince‑Édouard, province où le demandeur prévoyait s’établir. Les détails de cette évaluation sont confirmés et expliqués dans l’affidavit du docteur Creaghan, daté du 25 mai 2010.

 

[33]           L’agente des visas a également tenu compte du plan établi par le demandeur pour couvrir le coût des médicaments et a constaté que ce plan reposait sur une promesse de payer du demandeur. La Cour a déjà établi qu’il est impossible de faire respecter une telle promesse. Dans ses plaidoiries sur ce point, le demandeur a mal interprété la décision rendue par le juge Sean Harrington dans la décision Companioni, précitée. Dans cette affaire, où les faits sont similaires à ceux qui nous concernent ici, la Cour a statué qu’« [o]n ne peut tout simplement pas faire respecter les promesses de ne pas se prévaloir de ce programme [régime d’assurance‑médicaments de l’Ontario] ». Voir Companioni, précitée, paragraphe 10, et Rashid c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 157, paragraphe 23.

La réponse du demandeur

 

[34]           Les affidavits de l’agente des visas et du médecin donnent, pour la première fois, les renseignements susmentionnés concernant les médicaments particuliers, la posologie et les coûts afférents, et expliquent, aussi pour la première fois, comment l’agente et le médecin en sont arrivés à la conclusion que le coût des médicaments du demandeur risque d’entraîner un fardeau excessif pour les fonds publics.

 

[35]           Le demandeur souhaite que, dans les circonstances, la Cour accorde très peu de poids, voire aucun, à ces affidavits. Dans la décision Sklyar c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 1226, paragraphe 11, le juge Michael Phelan recommande d’examiner avec prudence la preuve par affidavit produite après le fait, car elle peut servir à étayer des motifs insuffisants :

Bien qu’il puisse exister des cas où les motifs de la décision sont correctement exposés non seulement dans la lettre de décision et les notes du STIDI, mais également dans un affidavit (voir Hayama c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 1305), la Cour a des réserves lorsque la preuve qui est présentée après le dépôt de la demande de contrôle judiciaire vise à combler les lacunes du dossier de la décision précisément sur les questions en litige et que cela est fait par l’ajout d’éléments importants au dossier. La tentative d’étayer le dossier doit être abordée avec prudence, qu’elle soit le fait du demandeur ou du défendeur. Si elle est admissible, la Cour doit soupeser son poids.

 

[36]           Citant à l’appui les décisions Hayama et Marine Atlantic, précitées, le défendeur fait valoir que le demandeur aurait dû demander des éclaircissements s’il estimait que les motifs de l’agente des visas étaient insuffisants. Cependant, le demandeur allègue que ces décisions ne s’appliquent pas à la situation présente : l’obligation d’un demandeur d’obtenir des éclaircissements n’est pas absolue et dépend des circonstances. Voir Kidd c. Autorité aéroportuaire du Grand Toronto, 2004 CF 703, paragraphes 29 à 32, confirmé par 2005 CAF 81; Marine Atlantic, précité, paragraphe 7. Dans un cas d’interdiction de territoire pour motifs sanitaires fondée sur le fardeau excessif, comme en l’espèce, les agents des visas doivent fournir des motifs suffisants pour que les demandeurs puissent y répondre de manière efficace.

 

[37]           L’affidavit du médecin comporte des lacunes. En ce qui concerne le régime d’assurance‑médicaments de l’Île-du-Prince-Édouard, l’affidavit ne révèle pas à quel moment les renseignements ont été obtenus, le régime auquel le demandeur est supposément admissible et les critères d’admissibilité. L’admissibilité à un régime public d’assurance‑médicaments n’est pas automatique. De plus, les deux affidavits n’abordent pas l’intention du demandeur de souscrire une assurance‑maladie privée au Canada comme il l’a fait aux États‑Unis.

Le mémoire supplémentaire du défendeur

 

[38]           Le défendeur conteste les observations du demandeur quant à la recevabilité des affidavits de l’agente des visas et du médecin. Contrairement aux affidavits contestés dans les causes citées par le demandeur, les deux affidavits en l’espèce ne servent pas à étayer la décision de l’agente des visas ni à introduire un [traduction] « raisonnement entièrement nouveau dont on ne trouve aucune trace dans ses notes ».

 

[39]           L’agente des visas a simplement joint à son affidavit la déclaration médicale produite par le médecin, laquelle se trouvait dans le dossier du tribunal et corroborait la décision de l’agente des visas.

 

[40]           L’affidavit du médecin reprend le contenu de la déclaration médicale, qui porte sur la maladie du demandeur, le traitement requis et les coûts projetés, ainsi que le remboursement des coûts par le régime d’assurance‑maladie de l’Île‑du‑Prince‑Édouard. L’affidavit confirme que le médecin a tenu compte de l’avis des médecins du demandeur aux États‑Unis, mais qu’il n’est pas revenu sur sa première conclusion quant à l’interdiction de territoire.

 

[41]           La réponse du demandeur ne relève aucune erreur dans l’affidavit du médecin. Le demandeur laisse entendre que le médecin n’a peut‑être pas confirmé que le régime provincial d’assurance‑médicaments couvrirait le coût des médicaments avant la délivrance de la lettre de refus. Cette allégation n’est pas fondée. En outre, si le demandeur doutait des conclusions du médecin quant au remboursement du coût des médicaments, il aurait pu le contre‑interroger au sujet de son affidavit.

 

ANALYSE

 

[42]           J’ai examiné toutes les questions soulevées par le demandeur. Il me paraît évident qu’une appréciation individualisée a bien été effectuée. La seule question pertinente a trait à l’équité procédurale.

 

[43]           L’agente a communiqué les motifs de sa décision au demandeur. Néanmoins, le demandeur affirme maintenant qu’ils étaient insuffisants. Selon lui, [traduction] « la lettre de refus de l’agente conclut, en des termes très généraux, que le demandeur risque d’entraîner un fardeau excessif pour les services sociaux ou de santé, et elle ne donne aucun détail quant aux services dont le demandeur aura réellement besoin, de l’avis de l’agente ». Le demandeur reproche aussi le fait que [traduction] « la lettre de refus ne précise pas non plus en quoi les services requis entraîneraient probablement un coût supérieur au coût moyen par habitant sur une période de cinq ans ».

 

[44]           Le demandeur se plaint aussi de la lettre relative à l’équité procédurale : [traduction] « Comme la lettre de refus, la lettre relative à l’équité procédurale énonce des conclusions, dont certaines semblent être des phrases types copiées et répétées plus d’une fois. »

 

[45]           Au sujet des notes du STIDI, le demandeur soutient [traduction] «  [qu’]elles n’expliquent pas vraiment comment les lettres des médecins, le plan proposé et la capacité financière du demandeur ont été pris en considération, ni pourquoi ces éléments n’étaient pas suffisants pour annuler le constat d’interdiction de territoire pour motifs sanitaires ».

 

[46]           Il est clair, donc, que le demandeur croit qu’on aurait dû lui fournir plus de détails à l’appui des motifs et des conclusions. Il s’agit, selon lui, d’un manquement à l’équité procédurale.

 

[47]           J’ai examiné la lettre relative à l’équité procédurale et la réponse du demandeur. Il ressort clairement de ces documents que le demandeur connaissait très bien la question déterminante : le coût des médicaments et le fardeau excessif pour le système de santé public du Canada. Il était au fait de cette question parce que, dans sa réponse, il affirmait que le problème peut être résolu et qu’il pouvait souscrire une assurance collective ou privée pour ne pas imposer un fardeau excessif aux fonds publics.

 

[48]           Comme l’avocat du demandeur l’a admis à l’audience, la vraie question dans la présente affaire consiste à déterminer s’il y a eu manquement à l’équité procédurale du fait que le demandeur n’a pas reçu d’information au sujet de l’Île‑du‑Prince‑Édouard, information qui faisait partie de l’évaluation du docteur Creaghan. Il soutient que, s’il avait obtenu les renseignements en question, il aurait pu présenter un plan viable comprenant une assurance‑médicaments ou il aurait pu choisir de présenter sa demande en Ontario, par exemple, plutôt qu’à l’Île‑du‑Prince‑Édouard.

 

[49]           À mon avis, il ne s’agit pas d’une question d’équité procédurale. À la lumière de la lettre relative à l’équité procédurale et de la réponse du demandeur, il est évident que la raison du refus a été expliquée au demandeur avec des détails suffisants pour lui permettre de comprendre pourquoi sa demande était rejetée. Il revenait alors au demandeur d’obtenir tous les conseils nécessaires et de proposer une solution afin d’éviter d’imposer un fardeau excessif au système public. Le demandeur montre, par sa réponse, qu’il savait qu’il aurait besoin d’une autre assurance, mais il ne précise pas comment ni où il entend l’obtenir. La solution qu’il propose est une proposition ou une déclaration d’intention. Il ne s’agit pas d’un plan. C’est incomplet. Voir Companioni, précitée, paragraphes 25, 30 et 31.

 

[50]           L’agente n’était pas obligée d’informer le demandeur qu’il pourrait envisager de s’établir ailleurs qu’à l’Île‑du‑Prince‑Édouard. Le demandeur aurait dû demander des conseils et fournir un plan clair proposant une solution au problème du fardeau excessif. L’agente ne pouvait pas deviner que le demandeur était disposé à s’établir en Ontario ou à tout autre endroit où sa situation ne donnerait pas lieu aux problèmes qui découleraient de son établissement à l’Île‑du‑Prince‑Édouard. Le demandeur avait la responsabilité d’examiner les options possibles et d’établir un plan contenant plus qu’une intention de souscrire une assurance collective ou privée.

 

[51]           Le demandeur a bien mentionné qu’il était disposé à adhérer à un régime privé d’assurance‑maladie au Canada, comme il l’a fait aux États‑Unis, mais ses plans étaient incomplets.

 

[52]           Comme la Cour l’a établi dans la décision Companioni, précitée, il n’est pas possible de faire respecter un engagement personnel de ne pas utiliser les programmes gouvernementaux.

 

[53]           Dans Rashid, précitée, le juge Mosley cite les propos du juge John Evans de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Deol c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CAF 271, paragraphe 46 :

[…] Ainsi qu’il a déjà été jugé dans plusieurs décisions, il n’est pas possible de faire respecter un engagement personnel de payer les services de santé qui peuvent être nécessaires après que l’intéressé a été admis au Canada en tant que résident permanent si les services peuvent être obtenus sans obligation de paiement.

 

[54]           Je ne vois pas de réelle différence entre un engagement personnel de payer ou de ne pas utiliser un régime public et une promesse de souscrire une assurance‑maladie privée. Le demandeur n’avait peut‑être pas d’autre choix, aux États‑Unis, que d’acheter ou de souscrire une telle assurance, mais au Canada, dans la mesure où il existe une alternative, soit le système subventionné par l’État, il n’est pas possible de faire respecter une promesse de ne pas avoir recours à ce système et d’obtenir une assurance privée. Il ressort clairement de sa réponse à la lettre relative à l’équité procédurale que le demandeur ne comprend pas le système de santé public du Canada. Son intention de se procurer une assurance collective ou privée à ses frais pourrait bien changer après son arrivée, lorsqu’il se rendra compte qu’il paie pour des services de santé alors que les autres Canadiens sont pris en charge par le système public.

 

[55]           Le demandeur est libre de présenter une nouvelle demande de résidence permanente. Il connaît désormais très bien les exigences auxquelles il doit satisfaire. Il aurait pu acquérir cette connaissance plus tôt s’il avait obtenu les conseils appropriés. La décision ne contient, à mon avis, aucune erreur susceptible de contrôle.

 


JUGEMENT

 

LA COUR ORDONNE CE QUI SUIT :

 

1.                  La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.                  Il n’y a aucune question à certifier.

 

     

« James Russell »

Juge

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

 

Jean-François Martin, LL.B., M.A.Trad.jur.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                                 IMM-1426-10

 

INTITULÉ :                                                                MAJID HASSAN CHAUHDRY

                                                                                     c.

                                                                                     MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

                                                                                                                                                                                                        

LIEU DE L’AUDIENCE :                                          Toronto (Ontario)      

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                        Le 25 novembre 2010

                             

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                                       LE JUGE RUSSELL

 

DATE DES MOTIFS :                                               Le 11 janvier 2011

 

 

COMPARUTIONS

 

Ali M. Amini                                                                  POUR LE DEMANDEUR

                                                                                    

Michael Butterfield                                                         POUR LE DÉFENDEUR

               

                                                                                                                                                                                                                                    AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :   

 

Ali M. Amini                                                                  POUR LE DEMANDEUR

Avocat

Toronto (Ontario)

                                             

Myles J. Kirvan                                                             POUR LE DÉFENDEUR

Sous‑procureur général du Canada

 

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