Federal Court |
|
Cour fédérale |
[TRADUCTION CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]
Ottawa (Ontario), le 18 novembre 2010
En présence de madame la juge Heneghan
ENTRE :
|
|
|
|
|
|
et
|
|
|
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
|
|
|
|
|
|
|
|
|
MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE
[1] M. Juan Francisco Cortes Ruz (le demandeur) sollicite le contrôle judiciaire d’une décision rendue par un agent des visas à l’Ambassade du Canada au Mexique, par laquelle le demandeur s’est vu refuser sa demande de visa de résident permanent en tant que membre appartenant à la catégorie du regroupement familial. La décision en litige a été rendue le 29 septembre 2009.
[2] Le demandeur est un citoyen du Mexique. En juin 1998, il est arrivé au Canada à titre de visiteur. En mars 2001, il a demandé l’asile. Dans son Formulaire de renseignements personnels (le FRP) qu’il a produit sous serment, il allègue une crainte fondée sur son appartenance passée à des gangs de rue au Mexique. Il ne s’est pas présenté à l’audience relative à sa demande d’asile et, par conséquent, le désistement de sa demande a été prononcé.
[3] Le 20 novembre 2004, le demandeur a rencontré sa future épouse. Il l’a demandée en mariage le 14 février 2005, avant d’être expulsé du Canada le 28 février 2005. Le demandeur a épousé sa conjointe au Mexique, le 21 mai 2005. En juin 2005, il a présenté une demande de visa de résident permanent. Le demandeur a été déclaré interdit de territoire en application de l’alinéa 37(1)a) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi), en raison de son appartenance à une organisation criminelle, c’est-à-dire les gangs de rue dont il a fait mention dans son FRP. Dans le cadre de cette demande, le demandeur n’a pas modifié son FRP. Il a seulement tenté de contredire son contenu lorsque l’agent des visas au Mexique l’a questionné sur celui-ci.
[4] Le demandeur a été autorisé à présenter une demande de contrôle judiciaire de la décision rendue par l’agent des visas par laquelle sa demande de visa de résident permanent a été refusée. Dans un jugement rendu le 12 avril 2007, la demande a été rejetée par le juge Phelan; voir Cortes Ruz c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CF 380. Quant aux conclusions de l’agent des visas relativement à la crédibilité, le juge Phelan soutient que le « moment choisi par le demandeur pour changer son histoire a joué un rôle critique dans la conclusion quant à la crédibilité »; Ruz, paragraphe 9. En d’autres mots, la Cour a conclu qu’une modification du récit, lorsque cela est possible, constitue un motif raisonnable pour mettre en doute la crédibilité du demandeur.
[5] Le demandeur a présenté une deuxième demande de visa de résident permanent en août 2007. Il a été interrogé à propos des conclusions d’interdiction de territoire antérieures et il a à nouveau été déclaré interdit de territoire en application de l’alinéa 37(1)a) de la Loi.
[6] Le demandeur a joint à sa demande de résidence permanente de nouveaux éléments de preuve visant à démontrer que son FRP n’était pas juste. Il a fourni des dossiers scolaires et des documents d’emploi afin de démontrer que, au moment de sa prétendue appartenance à des gangs de rue, il n’aurait pas pu se trouver à l’endroit où, selon son FRP, se déroulaient les activités des gangs de rue.
[7] Dans la présente demande de contrôle judiciaire, le demandeur a soulevé une seule question :
L’Ambassade canadienne a-t-elle commis des erreurs de droit susceptibles de contrôle en ne tenant pas compte des observations et de la preuve qui démontraient que les déclarations figurant dans le FRP étaient fausses, et en déclarant que rien n’indiquait que ce qui était écrit dans le FRP était faux?
[8] Dans l’arrêt Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190, au paragraphe 43, la Cour suprême du Canada a déclaré que les décisions des décideurs administratifs sont susceptibles de contrôle selon l’une des deux normes suivantes : la décision correcte ou la décision raisonnable. La norme de la décision raisonnable s’applique également au processus qui a mené à la décision, c’est-à-dire que le « caractère raisonnable tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel »; Dunsmuir, au paragraphe 47.
[9] De plus, dans Dunsmuir, la Cour suprême affirme que lorsque la jurisprudence a établi la norme de contrôle applicable à un type de décision particulier, cette norme de contrôle devrait être adoptée. Il est établi que les décisions des agents des visas sont susceptible de contrôle judiciaire selon la norme de la décision raisonnable : voir Thomas c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2009), 85 Imm. L.R. (3d) 133 (CF). Par conséquent, la décision de l’agent des visas en l’espèce sera contrôlée selon la norme de la décision raisonnable.
[10] Le demandeur a été déclaré interdit de territoire en application de l’alinéa 37(1)a) de la Loi qui prévoit ce qui suit :
Activités de criminalité organisée
37. (1) Emportent interdiction de territoire pour criminalité organisée les faits suivants :
a) être membre d’une organisation dont il y a des motifs raisonnables de croire qu’elle se livre ou s’est livrée à des activités faisant partie d’un plan d’activités criminelles organisées par plusieurs personnes agissant de concert en vue de la perpétration d’une infraction à une loi fédérale punissable par mise en accusation ou de la perpétration, hors du Canada, d’une infraction qui, commise au Canada, constituerait une telle infraction, ou se livrer à des activités faisant partie d’un tel plan; |
Organized criminality
37. (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible on grounds of organized criminality for
(a) being a member of an organization that is believed on reasonable grounds to be or to have been engaged in activity that is part of a pattern of criminal activity planned and organized by a number of persons acting in concert in furtherance of the commission of an offence punishable under an Act of Parliament by way of indictment, or in furtherance of the commission of an offence outside Canada that, if committed in Canada, would constitute such an offence, or engaging in activity that is part of such a pattern; or |
[11] Aux fins de l’alinéa 37(1)a) de la Loi, une opinion fondée sur des motifs raisonnables doit reposer sur une preuve crédible. Je souscris à cette observation du demandeur. Il a également allégué que son FRP n’était pas crédible et que, par conséquent, il ne pouvait pas constituer le fondement des [traduction] « motifs raisonnables » dont parle l’alinéa 37(1)a) de la Loi.
[12] À mon avis, tant qu’il tient compte du reste de la preuve, un agent des visas ne devrait pas être empêché de se fonder sur un FRP. Un FRP est un document fait sous serment auquel on devrait accorder la même importance que tout autre document fait sous serment. En présence d’un élément de preuve qui contredit le FRP, l’agent doit examiner les autres éléments de preuve qui contredisent le FRP.
[13] Le demandeur a de plus allégué que l’agent a commis une erreur en affirmant que [traduction] « rien ne permettait de mettre en doute l’authenticité des déclarations figurant dans le FRP ». Cette déclaration figure dans les notes du Système de traitement informatisé des dossiers d’immigration (STIDI).
[14] Lorsqu’il a présenté sa plus récente demande de visa de résident permanent, le demandeur a soumis une preuve documentaire supplémentaire qui contredit son FRP. Lorsqu’on l’a invité à se présenter à son entrevue le 20 mars 2009, on a demandé au demandeur d’apporter [traduction] « des documents faisant état de l’ensemble de ses activités pendant la période au cours de laquelle il a censément étudié ou travaillé ». Il n’a cependant apporté aucun élément de preuve supplémentaire à l’entrevue.
[15] Il est raisonnable de conclure, à l’examen des notes du STIDI, que, dans le contexte de la chronologie des événements, les commentaires de l’agent portaient sur ce qui s’était passé à l’entrevue. Le demandeur n’a pas soumis d’autres documents à l’entrevue. Je rejette l’observation du demandeur selon laquelle cette brève mention dans les notes du STIDI signifie que l’agent n’a pas tenu compte de [traduction] « 59 pages d’observations ». Compte tenu de l’ensemble des circonstances, il est raisonnable de conclure que cette déclaration s’inscrit dans le contexte de l’entrevue.
[16] Les notes du STIDI contiennent la déclaration suivante de l’agent des visas : [traduction] « J’ai fait part de mes préoccupations au sujet pendant l’entrevue, mais celui-ci a été incapable de donner des renseignements supplémentaires ». Cette mention indique que le demandeur a été informé, à l’entrevue, des préoccupations de l’agent. Compte tenu des notes du STIDI, du FPR fait sous serment du demandeur et du résultat de sa demande initiale de visa de résident permanent, j’estime que le demandeur a reçu une explication intelligible quant au rejet de sa demande de visa.
[17] L’agent des visas n’a commis aucune erreur susceptible de contrôle et rien ne justifie que la Cour intervienne pour modifier sa décision. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.
ORDONNANCE
LA COUR STATUE :
1. La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.
2. Aucune question à certifier n’est soulevée.
Traduction certifiée conforme
Claude Leclerc, LL.B.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-5599-09
INTITULÉ : JUAN FRANCISCO CORTES RUZ c.
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
LIEU DE L’AUDIENCE : Toronto (Ontario)
DATE DE L’AUDIENCE : Le 13 juillet 2010
ET ORDONNANCE : LA JUGE HENEGHAN
DATE DES MOTIFS
ET DE L’ORDONNANCE : Le 18 novembre 2010
COMPARUTIONS :
Paul VanderVennen
|
|
Manuel Mendelzon |
|
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
VanderVennen Lehrer Avocats Toronto (Ontario)
|
POUR LE DEMANDEUR |
Myles J. Kirvan Sous-procureur général du Canada Toronto (Ontario) |
POUR LE DÉFENDEUR
|