Cour fédérale |
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Federal Court |
Ottawa (Ontario), le 29 juin 2010
En présence de monsieur le juge Mainville
ENTRE :
demanderesse
et
ET DE L'IMMIGRATION
MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT
Introduction
[1] La Cour est saisie d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, Section d’appel de l’immigration, portant le numéro MA8-01194 et rendue le 15 juin 2009; elle est déposée en vertu des articles 72 et suivants de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi), par Nora Marina Guevara Villatoro (la demanderesse). Le présent jugement est rendu par le soussigné à titre de juge d’office de la Cour fédérale tel que le prévoit le paragraphe 5.1(4) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7.
[2] La demande de contrôle judiciaire sera rejetée pour inobservation des délais.
Faits et procédures
[3] La demanderesse, citoyenne du Honduras, est née le 24 avril 1964. Elle a plusieurs enfants issus de trois unions différentes. De sa première union, elle a un fils majeur qui réside à Montréal. De sa deuxième union, elle a sept enfants qui habitent avec leur grand-mère paternelle au Honduras. Et de sa troisième union, elle a trois enfants mineurs tous nés au Canada et citoyens canadiens.
[4] La demanderesse est arrivée au Canada en 1995 avec son troisième conjoint. La demande d’asile de celui-ci a été acceptée, et c'est ainsi qu'elle a obtenu son statut de résidente permanente au Canada.
[5] Cependant, elle a quitté le Canada en 2001 afin de séjourner aux États-Unis pendant quelques années afin, selon ses dires, de se faire traiter pour un cancer et aussi y rejoindre son conjoint qui y avait obtenu un emploi. La relation conjugale avec son troisième conjoint s’est cependant détériorée et, en 2003, la demanderesse décide de retourner au Honduras via le Mexique.
[6] En 2006, la demanderesse a sollicité des documents de voyage de l’ambassade canadienne du Guatemala, laquelle desservait le Honduras en la matière. Cette demande a été refusée, ce qui n'a donné lieu à aucune contestation.
[7] La demanderesse a alors résidé au Mexique de septembre 2006 à juin 2007 et tenté sans succès de se rendre aux États-Unis. Elle est retournée au Honduras en juin 2007.
[8] Le 19 décembre 2007, elle se présente à l’ambassade du Canada au Honduras afin d’y présenter une nouvelle demande de documents de voyage à titre de résidente permanente du Canada. Cette demande est à nouveau refusée par lettre datée du 14 janvier, 2008, au motif principal que la demanderesse n’a pas respecté l’obligation de résidence imposée par l’article 28 de la Loi; plus précisément, elle n’a pas été effectivement présente au Canada pendant au moins 730 jours dans la période quinquennale précédant le contrôle. Les titres de voyage lui ont donc été de nouveau refusés en application du paragraphe 31(3) de la Loi.
[9] Le 25 janvier 2008, la demanderesse forme un appel devant la Section d’appel de l’immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, comme le lui permet le paragraphe 64(4) de la Loi. Cet appel est rejeté par décision rendue le 15 juin 2009 dont les motifs sont transmis le 13 juillet 2009. La demanderesse présente le 7 décembre 2009 une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de cette décision.
[10] Notons qu’en décembre 2009 la demanderesse est entrée au Canada et y séjourne depuis. Les circonstances qui ont permis à celle-ci d’ainsi entrer au Canada n’ont pas été expliquées à la Cour. Notons également qu’une procédure en révocation du statut de réfugiée ou de personne à protéger a été également récemment engagée contre elle, mais aucune décision formelle à cet égard n’a encore été rendue.
La décision de la Section d’appel de l’immigration
[11] L’audition de l’appel formé par la demanderesse est tenue devant la Section d’appel de l’immigration le 15 juin 2009. La demanderesse y est représentée par avocat et elle y participe par voie téléphonique avec l’aide d’un interprète.
[12] La demanderesse ne conteste pas la légalité de la décision constatant qu’elle n’a pas respecté l’obligation de résidence imposée par l’article 28 de la Loi. Des motifs humanitaires constituent le seul moyen qu’elle invoque en appel; elle exerce ainsi le recours que lui ouvre l’alinéa 67(1)c) de la Loi.
[13] La Section d’appel de l’immigration conclut que le témoignage de la demanderesse est « plus ou moins crédible » (au paragraphe 4 de la décision). Elle conclut que le degré d’établissement de la demanderesse au Canada est faible, qu’elle a quitté le Canada il y a de nombreuses années, et que l'intérêt supérieur des enfants appelle la présence de leur parents et de leur famille élargie au Honduras. Elle accorde peu de foi aux allégations de la demanderesse selon lesquelles ses enfants ont récemment fait l’objet d’une tentative d’enlèvement.
La demande de prorogation du délai et l’objection quant au caractère tardif de la demande
[14] Le 7 décembre 2009 la demanderesse présente une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de cette décision invoquant divers moyens, dont l’inobservation des règles de justice naturelle et d’équité procédurale et des erreurs de droit et de fait.
[15] Dans cette demande, la demanderesse sollicite une prorogation du délai en vertu de l’alinéa 72(2)c) de la Loi. Les motifs qu’elle invoque à cet égard dans sa demande sont les suivants :
La partie demanderesse a reçu les motifs écrits du tribunal administratif le ou vers le 5 décembre 2009 lors de son arrivée au Canada.
Compte tenu des circonstances, la partie demanderesse demande en outre à la Cour d’accorder une prorogation de délai, en vertu du paragraphe 72(2)c) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, pour le motif suivant :
« Motif… « Le (sic) demanderesse a été entendue par communication téléphonique devant la Section d’appel le 15 juin 2009. Lors du rendu de la décision, le même jour, la demanderesse n’était plus en communication téléphonique et n’a pas entendue le rendu de la décision. La décision écrite a été envoyée à un parent qui l’a réexpédiée au Honduras dans les meilleurs délais. Toutefois lorsque l’envoi a été reçu au Honduras, la demanderesse et ses 3 enfants avaient déjà quitté le Honduras pour le Canada de telle sorte que ce n’est que le ou vers le 5 décembre 2009, après son arrivée au Canada, que la demanderesse a pris connaissance des termes de la décision négative lui refusant l’octroi de la résidence permanente.
C’est en prenant connaissance de ces termes que la demanderesse a consulté un conseil le 6 décembre 2009 et qu’elle a entrepris la présente demande le jour même tenant en compte que c’est à ce moment que la demanderesse a pris conscience que le tribunal n’avait pas réfuté l’allégation de tentative d’enlèvement de sa fille, née au Canada, ni n’avait nié qu’un certain risque peut exister au Honduras, mais a quand même tiré la conclusion qu’il « est dans le meilleur intérêt des enfants qu’ils bénéficient de la présence de leurs deux parents qui peuvent être assurée au Honduras ».
[16] Lors des débats sur la question de l’autorisation, le défendeur fait valoir que la demanderesse n’a pas présenté sa demande d’autorisation et de contrôle judiciaire dans les délais prescrits, et il invoque à cet égard les alinéas 72(2)b) et 169f) de la Loi et les articles 13 et 36 des Règles de la Section d’appel de l’immigration, DORS/2002-230. Selon le défendeur, la demanderesse n’a pas démontré que la cause de son retard était hors de son contrôle comme elle était tenue de le faire et que, en l’occurrence, sa demande de prorogation du délai doit être rejetée.
[17] Toujours dans le cadre des débats sur la question de l’autorisation, la demanderesse répond à ces arguments et demande que la question de la prorogation du délai, laquelle soulève quant à elle plusieurs points de droit, soit examinée au stade du contrôle judiciaire plutôt qu’à celui de l’autorisation de la demande de contrôle.
[18] Le 24 mars 2010, le juge Shore autorise l’introduction de la demande de contrôle judiciaire, et tel que requis par la demanderesse, ne se prononce pas sur la question de la prorogation du délai.
Dispositions législatives pertinentes concernant la prorogation du délai et l’objection
quant au dépôt tardif de la demande
[19] Les textes pertinents de la Loi sont les articles 72 et169 qui prévoient ce qui suit :
72. (1) Le contrôle judiciaire par la Cour fédérale de toute mesure — décision, ordonnance, question ou affaire — prise dans le cadre de la présente loi est subordonné au dépôt d’une demande d’autorisation.
(2) Les dispositions suivantes s’appliquent à la demande d’autorisation :
a) elle ne peut être présentée tant que les voies d’appel ne sont pas épuisées;
b) elle doit être signifiée à l’autre partie puis déposée au greffe de la Cour fédérale — la Cour — dans les quinze ou soixante jours, selon que la mesure attaquée a été rendue au Canada ou non, suivant, sous réserve de l’alinéa 169f), la date où le demandeur en est avisé ou en a eu connaissance;
c) le délai peut toutefois être prorogé, pour motifs valables, par un juge de la Cour;
d) il est statué sur la demande à bref délai et selon la procédure sommaire et, sauf autorisation d’un juge de la Cour, sans comparution en personne;
e) le jugement sur la demande et toute décision interlocutoire ne sont pas susceptibles d’appel.
169. Les dispositions qui suivent s’appliquent aux décisions, autres qu’interlocutoires, des sections :
a) elles prennent effet conformément aux règles;
b) elles sont motivées;
c) elles sont rendues oralement ou par écrit, celles de la Section d’appel des réfugiés devant toutefois être rendues par écrit;
d) le rejet de la demande d’asile par la Section de la protection des réfugiés est motivé par écrit et les motifs sont transmis au demandeur et au ministre;
e) les motifs écrits sont transmis à la personne en cause et au ministre sur demande faite dans les dix jours suivant la notification ou dans les cas prévus par les règles de la Commission;
f) les délais de contrôle judiciaire courent à compter du dernier en date des faits suivants : notification de la décision et transmission des motifs écrits.
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72. (1) Judicial review by the Federal Court with respect to any matter — a decision, determination or order made, a measure taken or a question raised — under this Act is commenced by making an application for leave to the Court.
(2) The following provisions govern an application under subsection (1):
(a) the application may not be made until any right of appeal that may be provided by this Act is exhausted;
(b) subject to paragraph 169(f), notice of the application shall be served on the other party and the application shall be filed in the Registry of the Federal Court (“the Court”) within 15 days, in the case of a matter arising in Canada, or within 60 days, in the case of a matter arising outside Canada, after the day on which the applicant is notified of or otherwise becomes aware of the matter;
(c) a judge of the Court may, for special reasons, allow an extended time for filing and serving the application or notice;
(d) a judge of the Court shall dispose of the application without delay and in a summary way and, unless a judge of the Court directs otherwise, without personal appearance; and
(e) no appeal lies from the decision of the Court with respect to the application or with respect to an interlocutory judgment.
169. In the case of a decision of a Division, other than an interlocutory decision:
(a) the decision takes effect in accordance with the rules;
(b) reasons for the decision must be given;
(c) the decision may be rendered orally or in writing, except a decision of the Refugee Appeal Division, which must be rendered in writing;
(d) if the Refugee Protection Division rejects a claim, written reasons must be provided to the claimant and the Minister;
(e) if the person who is the subject of proceedings before the Board or the Minister requests reasons for a decision within 10 days of notification of the decision, or in circumstances set out in the rules of the Board, the Division must provide written reasons; and
(f) the period in which to apply for judicial review with respect to a decision of the Board is calculated from the giving of notice of the decision or from the sending of written reasons, whichever is later |
[20] Les textes pertinents des Règles des Cours fédérales en matière d’immigration et de protection des réfugiés, DORS/93-22 figurent à l’article 6 :
6. (1) Toute demande visant la prorogation du délai au titre de l’alinéa 72(2)c) de la Loi, se fait dans la demande d’autorisation même, selon la formule IR-1 figurant à l’annexe.
(2) Il est statué sur la demande de prorogation de délai en même temps que la demande d’autorisation et à la lumière des mêmes documents versés au dossier. |
6. (1) A request for an extension of time referred to in paragraph 72(2)(c) of the Act shall be made in the application for leave in accordance with Form IR-1 set out in the schedule.
(2) A request for an extension of time shall be determined at the same time, and on the same materials, as the application for leave. |
[21] Enfin, les textes pertinents des Règles de la Section d’appel de l’immigration sont les articles 13 et 53, le paragraphe 54(1) et l’article 55:
13. (1) La personne en cause transmet ses coordonnées par écrit à la Section et au ministre.
(2) Les coordonnées doivent être reçues par la Section et le ministre :
a) avec l’avis d’appel, dans le cas où c’est la personne en cause qui interjette appel;
b) au plus tard vingt jours suivant la date à laquelle la personne reçoit l’avis d’appel du ministre, dans le cas où c’est le ministre qui interjette appel.
(3) Dès qu’elle retient les services d’un conseil, la personne en cause transmet les coordonnées de celui-ci par écrit à la Section et au ministre.
(4) Dès que les coordonnées de la personne en cause ou celles de son conseil, le cas échéant, changent, la personne en cause transmet les nouvelles coordonnées par écrit à la Section et au ministre.
53. Lorsqu’elle rend une décision autre qu’interlocutoire, la Section transmet par écrit un avis de décision aux parties.
54. (1) La Section transmet aux parties, avec l’avis de décision, les motifs écrits de la décision portant sur un appel interjeté par un répondant ou prononçant le sursis d’une mesure de renvoi.
55. La décision de la Section rendue de vive voix à l’audience par un tribunal constitué d’un commissaire unique prend effet au moment où le commissaire prononce la décision. Celle rendue par écrit prend effet au moment où le commissaire signe et date la décision. |
13. (1) A person who is the subject of an appeal must provide their contact information in writing to the Division and the Minister.
(2) The contact information must be received by the Division and the Minister
(a) with the notice of appeal, if the person is the appellant; and
(b) no later than 20 days after the person received a notice of appeal, if the Minister is the appellant.
(3) A person who is represented by counsel must, on obtaining counsel, provide without delay the counsel’s contact information in writing to the Division and the Minister.
(4) If the contact information of the person or their counsel changes, the person must without delay provide the changes in writing to the Division and the Minister.
53. When the Division makes a decision, other than an interlocutory decision, it must provide a notice of decision to the parties.
54. (1) The Division must provide to the parties, together with the notice of decision, written reasons for a decision on an appeal by a sponsor or for a decision that stays a removal order.
55. A decision of the Division made orally by one Division member at a proceeding takes effect when the member states the decision. A decision made in writing takes effect when the member signs and dates the decision. |
Analyse de la question de la demande de prorogation du délai et de l’objection quant au caractère tardif de la demande
[22] Le paragraphe 6(2) des Règles des Cours fédérales en matière d’immigration et de protection des réfugiés dispose qu’il est statué sur la demande de prorogation de délai en même temps que la demande d’autorisation et à la lumière des mêmes documents versés au dossier. La première question qui se pose donc en l’occurrence est celle de la compétence du juge saisi d’une demande de contrôle judiciaire sur la prorogation de délai lorsque cette question n'a pas été décidée au stade de la demande d'autorisation.
[23] La Cour d’appel fédérale a récemment donné une réponse favorable à ce sujet dans l'arrêt Succession Deng c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CAF 59, [2009] A.C.F. no 243 (QL), aux paragraphes 17 et 18 (demande d’autorisation d’appel à la Cour suprême du Canada refusée le 9 juillet 2009, numéro 33142). Selon cette jurisprudence, j’ai donc compétence pour me prononcer sur la question de la prorogation du délai.
[24] L’alinéa 169f) de la Loi reproduit ci-haut dispose expressément que les délais de contrôle judiciaire des décisions des sections de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié courent à compter de la transmission des motifs écrits (dans la version anglaise « from the sending of written reasons »). De plus, aux termes du paragraphe 72(2)b) de la Loi, le délai de 15 ou de 60 jours concernant le dépôt de la demande d’autorisation ne court pas à partir de la date de l’avis ou de la connaissance de la décision lorsqu’il s’agit de décisions d’une section de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié; en effet, ce texte dispose expressément que cette méthode de calcul est suivie « sous réserve de l’aliéna 169f) ».
[25] En l’occurrence, en ce qui concerne la décision en cause, vu l’alinéa 169f) de la Loi, le délai de signification et de dépôt de la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire a commencé à courir à compter de la date de la transmission des motifs de la décision, soit à compter du 13 juillet 2009.
[26] Aux fins de la présente procédure, la Cour n'est pas appelée à rechercher si le délai applicable en l’espèce est celui de 15 jours, vu que la décision a été rendue au Canada, ou celui de 60 jours, vu que la mesure ayant donné naissance à l’appel devant la Section d’appel de l’immigration a été prononcée au Honduras. En effet, dans l’un ou l’autre cas, la demanderesse est largement hors délai.
[27] Plusieurs considérations peuvent justifier la prorogation de délai, mais la partie qui sollicite la prorogation doit primordialement justifier le délai encouru pour l’ensemble de la période concernée.
[28] Je dois donc rechercher si la demanderesse a justifié son inobservation des délais ou a autrement fait état de motifs valables justifiant la prorogation. Or, le principal moyen invoqué par la demanderesse à l’appui de sa demande de prorogation de délai est qu’elle ne connaissait pas la teneur de la décision avant son arrivé Canada et ne pouvait donc agir plus tôt.
[29] Il ressort clairement du procès-verbal de l’audience tenue devant la Section d’appel de l’immigration le 15 juin 2009 que la décision concernant la demanderesse fut rendue ce jour-là avec les motifs donnés séance tenante en présence de l'avocat de celle-ci, qui a participé aux débats en personne, et de la demanderesse elle-même, qui a participé aux débats par conférence téléphonique. Quoiqu’un interprète fût présent à cette audition, les motifs énoncés par le tribunal n’ont pas été traduits simultanément en espagnol. L'avocat de la demanderesse s’est plutôt engagé à expliquer lui-même ces motifs à sa cliente par voie téléphonique.
[30] La décision écrite avec motifs fut transmise par la Section d’appel de l’immigration le 13 juillet 2009 par courrier régulier prépayé en trois plis.
[31] Le premier pli fut expédié au nom de la demanderesse à l’adresse qu'elle avait indiquée au Honduras dans le formulaire destiné à cette fin par la Section d’appel de l’immigration qu'elle avait rempli et signé.
[32] Le second pli fut aussi expédié au nom de la demanderesse, mais adressé aux soins de Thomas Armando Guevara Villatoro à Montréal. Il s’agissait de la personne au Canada que la demanderesse avait expressément désignée par écrit dans son formulaire d’avis d’appel comme étant celle par l'intermédiaire de laquelle on pouvait la rejoindre.
[33] Le troisième pli fut expédié à l'avocat que la demanderesse avait également expressément désigné par écrit à cette fin.
[34] Malgré ces courriers, la demanderesse déclare dans son affidavit qu’elle a quitté le Honduras le 30 juillet 2009 sans avoir reçu la décision écrite, et que ce n’est que lors de son arrivée au Canada le 5 décembre 2009 qu’elle a pu en prendre connaissance et constater les erreurs susceptibles de contrôle commises à son égard par la Section d’appel de l’immigration. Aucun détail n’est fourni dans son affidavit concernant ses allées et venues pendant la période de près de cinq mois entre juillet et décembre 2009, ni sur les communications avec son avocat ou avec la personne qu’elle avait désignée au Canada. De surcroît, la demanderesse ne nie pas avoir été au courant de la décision en cause, mais allègue plutôt simplement qu’elle n’en a pas reçu elle-même les motifs écrits pendant cette période de cinq mois.
[35] Il est tout à fait invraisemblable que la demanderesse ne connaissait pas la teneur de la décision de la Section d’appel de l’immigration avant le 6 décembre 2009, et ce pour plusieurs motifs.
[36] Premièrement, la demanderesse était en communication téléphonique avec le tribunal lorsque la décision fut rendue. Deuxièmement, elle était représentée par avocat et il s’était engagé à conférer sur les motifs de la décision avec elle par téléphone. Troisièmement, la décision écrite fut expédiée tant à son avocat qu’à la personne au Canada que la demanderesse avait désignée pour la rejoindre. Finalement, la demanderesse a pu défendre sans difficultés indues sa cause en appel devant la Section d’appel de l’immigration à partir du Honduras. Elle a même retenu les services d’un avocat à cette fin et reçu les avis de cette Section d’appel; elle a donc été mesure de se faire entendre en appel et de participer à l’audition.
[37] Au regard de ces faits, force est de conclure que la demanderesse pouvait déposer une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de cette décision dans les jours qui ont suivi le prononcé de celle-ci, ou dans les jours qui ont suivi la transmission des motifs. La demanderesse a pu mener à bien sa procédure d’appel à partir du Honduras, et il n’y a aucune raison sérieuse de croire qu’elle ne pouvait faire de même à l’égard du contrôle judiciaire de la décision résultant de cet appel.
[38] La prorogation de délai n’est donc pas accordée. En conséquence, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.
[39] Le défendeur n’a soulevé aucune question susceptible de à certification aux fins de l’alinéa 74d) de la Loi. La demanderesse a demandé à la Cour de lui accorder la possibilité de formuler des questions relatives au fond de la procédure. Cependant, vu que, en l'espèce, je n'ai examiné aucune question de fond, et vu que la demande de prorogation ne soulève aucune question grave de portée générale, aucune question ne sera certifiée en vertu de l’alinéa 74d) de la Loi.
JUGEMENT
LA COUR DÉCIDE:
La demande de prorogation des délais applicables au dépôt et à la signification de la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire est refusée; par conséquent, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-6202-09
INTITULÉ : NORA MARINA GUEVARA VILLATORO c. MCI
LIEU DE L’AUDIENCE : Montréal (Québec)
DATE DE L’AUDIENCE : le 16 juin 2010
MOTIFS DU JUGEMENT MAINVILLE J.
ET JUGEMENT :
DATE DES MOTIFS : le 29 juin, 2010
COMPARUTIONS :
Me Michel LeBrun
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POUR LA DEMANDERESSE |
Me Michel Pépin
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POUR LA DÉFENDERESSE |
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Me Michel LeBrun AVOCAT Lasalle (Québec)
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POUR LA DEMANDERESSE |
Myles J. Kirvan Sous-procureur général du Canada
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POUR LA DÉFENDERESSE |