Cour fédérale |
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Federal Court |
Toronto (Ontario), le 12 mai 2010
En présence de monsieur le juge Campbell
ENTRE :
demandeur
et
ET DE L’IMMIGRATION
MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE
[1] La présente demande de contrôle judiciaire est relative au rejet d’une demande d’asile présentée au motif que le demandeur craignait de retourner en Chine en tant que catholique.
[2] Dans sa décision, la Section de la protection des réfugiés (la SPR) a relevé des contradictions entre le FRP du demandeur et son témoignage. L’élément principal de la demande du demandeur était son appartenance à une église catholique romaine clandestine. Les contradictions sont apparues durant l’analyse des détails dans la preuve du demandeur : par exemple, quand il s’agissait de savoir si les offices religieux avaient lieu à l’intérieur ou à l’extérieur; si le demandeur connaissait le véritable nom du prêtre; à quelle fréquence le prêtre était-il présent; si le demandeur savait, au moment de joindre l’église, qu’elle était illégale. À la lumière de ces contradictions, la SPR a déclaré ce qui suit :
[6] […] Je n’ai pas été en mesure de clarifier adéquatement ces contradictions à l’audience du fait que le demandeur d’asile ne se sentait pas bien et ne pouvait pas continuer. L’audience a été ajournée à une date ultérieure. Toutefois, ce jour‑là, même si le demandeur d’asile s’est présenté, il ne répondait pas du tout aux questions et était incapable de témoigner. Sa fille, Guixia Zhong, a été nommée comme sa représentante désignée à ce moment-là.
[7] J’ai pris en compte les contradictions susmentionnées dans le témoignage du demandeur d’asile et le fait qu’il n’a pas fourni d’explications raisonnables pour aucune d’entre elles en raison de son état de santé, dont il est question dans deux rapports médicaux produits. Je prends également acte du fait que le demandeur d’asile a déposé un certificat de baptême délivré par le révérend Paul Son à son église en Chine. J’ai examiné ce certificat de baptême et trouve invraisemblable qu’une église clandestine ou qu’un prêtre responsable d’une église clandestine fournissent des documents écrits en ce qui concerne les activités de cette église, compte tenu des conséquences graves qu’aurait leur découverte. Compte tenu de cette invraisemblance, de la déclaration du demandeur d’asile à l’audience selon laquelle les membres de l’église se réunissaient à l’extérieur, dans une cour, et du fait qu’il ignorait que l’église était une organisation illégale lorsqu’il la fréquentait, je conclus, selon la prépondérance des probabilités, que l’église qu’il fréquentait en Chine n’était pas une église catholique romaine clandestine illégale. Je conclus également, selon la prépondérance des probabilités, que l’église du demandeur d’asile en Chine était une organisation légale et que, par conséquent, elle n’a pas fait l’objet d’une descente par les autorités chinoises.
[3] Hormis la question de l’application régulière de la loi relativement à l’incapacité du demandeur à « clarifier adéquatement » les contradictions en raison de son état de santé, la SPR a conclu que « le demandeur d’asile n’était pas un témoin crédible » (paragraphe 5 de la décision). En ce qui a trait à la conclusion générale, et en tenant aussi compte de la conclusion d’invraisemblance, je suis d’avis qu’il était illogique pour la SPR de juger que le demandeur était un catholique, membre d’une église légale n’ayant pas fait l’objet d’une descente par les autorités chinoises. L’importance de cette conclusion influe grandement sur la décision qui fait l’objet du présent contrôle et entraîne, à mon avis, une injustice :
[10] J’ai tenu compte de la question de savoir si le demandeur d’asile peut retourner en Chine et pratiquer sa foi là-bas. J’ai conclu que l’église qu’il fréquentait en Chine n’était pas une organisation illégale et qu’elle n’a pas fait l’objet d’une descente par les autorités comme l’allègue le demandeur d’asile. Je conclus également, selon la prépondérance des probabilités, qu’il pourrait pratiquer légalement sa religion dans cette église s’il devait retourner en Chine.
[4] Les conclusions défavorables de la SPR quant à la crédibilité ne sont pas conformes à la règle de droit, qui est bien établie : la SPR se trouvait dans l'obligation de justifier, en termes clairs et explicites, pourquoi elle doutait de la crédibilité de l'appelant avec des références claires à la preuve (Hilo c. Canada (M.E.I.) (1991), 15 Imm.L.R. (2e) 199 (C.A.F.), et Leung c. Canada (M.E.I.) (1994), 81 F.T.R. 303 au paragraphe 14). À mon avis, la SPR n’a pas respecté cette norme dans la décision qu’elle a rendue et, par conséquent, je conclus que la décision est entachée d'une erreur susceptible de contrôle.
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE :
La décision faisant l'objet du présent contrôle est annulé et l'affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué pour une nouvelle décision.
Il n’y a aucune question à certifier.
Traduction certifiée conforme
Christian Laroche LL.B.
Réviseur
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-5052-09
INTITULÉ : LIANYUE ZHONG c. LE MINISTRE DE LA
CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
LIEU DE L’AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L’AUDIENCE : LE 12 MAI 2010
MOTIFS DE L’ORDONNANCE
ET ORDONNANCE : LE JUGE CAMPBELL
DATE DE L’ORDONNANCE
ET ORDONNANCE : LE 12 MAI 2010
COMPARUTIONS :
Kumar Sriskanda |
POUR LE DEMANDEUR |
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Prathima Prashad |
POUR LE DÉFENDEUR |
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Kumar Sriskanda Avocat Toronto (Ontario)
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POUR LE DEMANDEUR |
Myles J. Kirvan Sous-procureur général du Canada
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POUR LE RÉPONDEUR |