Cour fédérale |
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Federal Court |
Ottawa (Ontario), le 9 avril 2010
En présence de monsieur le juge O'Reilly
ENTRE :
et
ET DE L’IMMIGRATION
MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT
I. Aperçu
[1] M. Ti-Beb Fe-Tari Harris est arrivé au Canada en 1990. Il était alors âgé de 7 ans. Une mesure d’expulsion a été prise à son égard en 2006 après qu’il eut été déclaré coupable d’une série d’infractions criminelles. M. Harris a interjeté appel de cette mesure sur le fondement de motifs d’ordre humanitaire auprès de la Section d’appel de l’immigration (la SAI), laquelle a rejeté l’appel en 2009.
[2] M. Harris soutient que la SAI a commis trois erreurs graves dans sa décision. Il demande que celle-ci soit annulée et que l’affaire soit renvoyée à un tribunal différemment constitué en vue d’un réexamen. Cependant, je ne puis trouver aucun motif justifiant l’annulation de la décision de la SAI et devrai, par conséquent, rejeter la présente demande de contrôle judiciaire.
[3] La question en l’espèce est de savoir si la SAI a commis des erreurs de fait qui rendent sa décision déraisonnable.
II. Analyse
(a) La décision de la SAI
[4] M. Harris ne conteste pas le fondement juridique de la mesure d’expulsion prise à son égard. Il a toutefois demandé à la SAI de l’annuler pour des motifs d’ordre humanitaire. La SAI a pris en considération les divers facteurs énoncés dans la décision Ribic c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1985] D.S.A.I. no 4 (QL).
[5] La SAI a souligné que M. Harris a été déclaré coupable de plusieurs infractions au Code criminel, ainsi que d’une infraction au Code de la route, L.R.O. 1990, ch. H.8. Les infractions criminelles étaient liées au trafic de stupéfiants et aux armes à feu et la contravention au code de la route, à la conduite pendant une suspension.
[6] Dans ses motifs, la SAI a affirmé :
• que le fait que M. Harris n’ait été déclaré coupable d’aucune infraction criminelle depuis février 2008 lui était favorable;
• que M. Harris s’était vu accorder le statut de réfugié au Canada;
• qu’elle n’était pas en mesure d’évaluer le risque de récidive de M. Harris.
[7] De ces énoncés, M. Harris soutient que les deux premiers sont erronés et que le troisième constitue une omission, pour la SAI, d’exercer ses fonctions. Il soutient que ces erreurs justifient l’annulation de la décision de la SAI.
(b) Les erreurs
qu’aurait commises la SAI
(i) Les
antécédents criminels
[8] La SAI a précisé que M. Harris n’avait été déclaré coupable d’aucun acte criminel depuis février 2008 alors qu’en vérité, il n’avait fait l’objet d’aucune accusation depuis 2005. Cette erreur s’est glissée dans le passage de la décision de la SAI traitant du risque que M. Harris récidive.
[9] Bien qu’il reconnaisse que d’autres passages de la décision de la SAI traçaient correctement l’historique de ses antécédents criminels, M. Harris soutient que l’erreur est grave puisqu’elle pourrait avoir eu une incidence sur l’examen du risque de récidive, lequel constitue sans doute, dans un tel contexte, le facteur le plus important dans l’analyse des motifs d’ordre humanitaire.
[10] À mon avis, il ressort clairement de l’ensemble de la décision de la SAI que cette dernière avait pris connaissance des antécédents criminels de M. Harris, dont elle a même souligné les détails dans ses motifs. L’unique référence inexacte au mois de février 2008 constituait manifestement une erreur sans conséquence qui n’avait pu influer sur la décision de la SAI.
(ii) Le statut de réfugié
[11] Dans sa description des antécédents de M. Harris, au début de sa décision, la SAI a fait une remarque incidente à l’égard du fait qu’il avait obtenu, en 1993, le statut de réfugié au Canada. Il s’agissait manifestement d’une erreur, puisque M. Harris ne pourrait être renvoyé en Jamaïque si l’asile lui avait été conféré. La SAI savait, de toute évidence, que M. Harris pouvait faire l’objet d’un tel renvoi, ayant traité en détail des difficultés qui pourraient en résulter. Cette erreur semble ainsi n’avoir eu aucune incidence sur l’analyse de la SAI.
(c) L’omission de mesurer le risque de récidive
[12] Contrairement à ce que soutient M. Harris, la SAI n’a pas omis de mesurer le risque de récidive. En fait, la SAI a affirmé qu’il ressortait de l’examen de son casier judiciaire qu’il était probable que M. Harris commette d’autres infractions criminelles. Elle a toutefois enchaîné avec des observations à l’égard de ses liens familiaux, ajoutant que compte tenu de l’incertitude quant à l’importance qu’il donnait à ces liens l’unissant aux membres de sa famille au Canada, elle pouvait difficilement se prononcer sur la probabilité qu’il récidive.
[13] Je reconnais que la décision de la SAI est quelque peu décousue, mais il me paraît évident que la SAI n’a pas omis de tenir compte du risque de récidive de M. Harris. La SAI semble avoir conclu que certains facteurs indiquaient qu’il était probable que M. Harris commette d’autres infractions criminelles alors que l’influence d’un autre facteur demeurait incertaine. Elle n’a pas omis d’examiner cette question.
III. Conclusion et décision
[14] La SAI a manifestement commis des erreurs dans ses motifs, lesquels auraient pu, de surcroît, être formulés plus clairement. Il s’agissait toutefois d’erreurs mineures qui n’ont eu aucune incidence sur son analyse et ses conclusions. Je ne puis dès lors conclure à la déraisonnabilité de la décision de la SAI dans son ensemble ni au caractère inadéquat de ses motifs. Je devrai donc rejeter la présente demande de contrôle judiciaire. Ni l’une ni l’autre des parties n’a proposé que soit certifiée une question de portée générale et aucune ne sera énoncée.
JUGEMENT
1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.
2. Aucune question de portée générale n’est énoncée.
Traduction certifiée conforme
Jacques Deschênes, LL.B.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-2614-09
INTITULÉ : TI-BEB FE-TARI HARRIS c. MCI
LIEU DE L’AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L’AUDIENCE : LE 18 JANVIER 2010
ET JUGEMENT : LE JUGE O’REILLY
DATE DES MOTIFS : LE 9 AVRIL 2010
COMPARUTIONS :
Joel Sandaluk
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Marina Stefanovic
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
MAMANN SANDALUK Toronto (Ontario)
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JOHN H. SIMS, c.r. Sous-procureur général du Canada Toronto (Ontario)
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