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[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE NON-RÉVISÉE]
St. John’s (Terre-Neuve-et-Labrador), le 5 mars 2010
En présence de madame la juge Heneghan
ENTRE :
et
MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT
Introduction
[1] Mme R. Maxine Collins (la demanderesse) a engagé la présente action par dépôt d’une déclaration le 22 juin 2009. Dans cette déclaration, elle alléguait divers actes illégitimes censément commis dans l’application de la Loi de l'impôt sur le revenu, L.R.C. 1985 (5e suppl.), ch. 1, et de la Loi sur la protection des renseignements personnels, L.R.C. 1985, ch. P-21. Elle alléguait la violation de droits garantis par la Charte canadienne des droits et libertés, qui est la partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, constituant l’annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.). Elle affirmait que le redressement qu’elle cherchait à obtenir dans sa déclaration avait pour fondement la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F-7, les Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 (les Règles), et la Loi sur la responsabilité civile de l'État et le contentieux administratif, L.R.C. 1985, ch. C-50.
[2] Par ordonnance du protonotaire Milczynski rendue le 14 septembre 2009, l’action a été suspendue en attendant la nomination d’un avocat pour la demanderesse, au motif que la déclaration initiale laissait voir un recours collectif envisagé. Conformément aux Règles, le demandeur, dans une action en représentation conjointe, doit être représenté par un avocat.
[3] Par ordonnance rendue le 21 septembre 2009, M. le juge Campbell a autorisé la demanderesse à modifier la déclaration pour montrer qu’elle introduit l’instance en son propre nom et non en tant que représentante demanderesse.
[4] Par avis de requête modifié en date du 22 octobre 2009, la défenderesse cherche à faire radier la déclaration modifiée de la demanderesse.
Les faits
[5] Pour les besoins d’une requête en radiation, les allégations contenues dans la déclaration sont présumées vraies.
[6] La demanderesse travaillait pour l’Agence du revenu du Canada (l’ARC), au Bureau des services fiscaux de Toronto Ouest, entre novembre 2005 et novembre 2007. Elle était employée stagiaire pour une période d’un an à compter de la date de son embauche, et elle travaillait avec d’autres employés stagiaires que l’on appelait l’« équipe des stagiaires ». À la fin de février ou au début de mars 2006, elle a eu connaissance de propos tenus par les membres de l’équipe des stagiaires concernant une faillite personnelle. Comme elle avait déjà vécu une faillite personnelle, elle a présumé que quelqu’un avait eu un accès abusif à ses renseignements fiscaux personnels.
[7] En juillet 2006, la demanderesse, invoquant la Loi sur la protection des renseignements personnels, à prié la Direction de l’ARC chargée de l’accès à l’information et de la protection des renseignements personnels (la Direction de l’AIPRP) de lui communiquer l’identité de tous les employés qui avaient eu accès à son dossier d’impôt sur le revenu entre le 1er janvier 2005 et la date de sa demande. L’information qu’elle a obtenue montrait que son dossier d’impôt sur le revenu avait été consulté par un collègue de travail, M. Perry Zanetti, du Bureau des services fiscaux de Toronto Ouest, et par un gestionnaire, M. Edwin D. Williams, de la Section des systèmes de traitement, à l’Administration centrale. L’information communiquée à la demanderesse n’indiquait pas le nom de l’un ou l’autre membre de l’équipe des stagiaires.
[8] La demanderesse a demandé qu’une enquête soit faite au Bureau des services fiscaux de Toronto Ouest. Apprenant qu’une enquête avait eu lieu, elle a voulu en connaître les résultats. Ils ne lui ont pas été communiqués, prétendument parce que la protection de la confidentialité faisait obstacle à l’examen des conclusions de l’enquête.
[9] Au début de 2007, M. Zanetti a été congédié par l’ARC [traduction] « prétendument pour avoir eu un accès non autorisé à des milliers de dossiers fiscaux ».
[10] La demanderesse affirme qu’elle n’a connaissance d’aucune autre mesure qu’aurait prise l’ARC pour [traduction] « empêcher tout accès non autorisé » à son dossier fiscal. Elle a sollicité l’aide du Syndicat des employé(e)s de l’impôt (SEI), une section de l’Alliance de la fonction publique du Canada (AFPC). L’aide lui a été refusée, prétendument parce que le SEI représentait les employés qui avaient eu un accès non autorisé.
[11] En janvier 2007, la demanderesse a prié le Commissariat à la protection de la vie privée (CPVP) de mener une enquête indépendante. Sa requête a été refusée.
[12] En mai 2007, la demanderesse a prié le commissaire adjoint de la Région du sud de l’Ontario de l’ARC de la transférer à un autre ministère ou organisme fédéral. Sa requête a été refusée et la demanderesse a été renvoyée au directeur du Bureau des services fiscaux de Toronto Ouest pour l’ouverture d’une enquête.
[13] En mai 2007, la demanderesse s’est adressée au président de l’AFPC pour qu’il l’aide à obtenir sa mutation à un autre ministère ou organisme. Elle n’a pas obtenu de réponse et aucune aide ne lui a été accordée.
[14] Également en mai 2007, la demanderesse a sollicité l’aide de l’Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada. Cet organisme l’a dirigée vers M. Hillier, commissaire adjoint de la Région du sud de l’Ontario de l’ARC.
[15] En juin 2007, la demanderesse a [traduction] « sollicité la protection » du Commissariat à l’intégrité de la fonction publique, conformément à la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles, L.C. 2005, ch. 46. Sa demande a été refusée par écrit le 22 novembre 2007.
[16] En septembre 2007, la demanderesse a voulu déposer une plainte concernant le milieu de travail, conformément à la partie II du Code canadien du travail, L.R.C. 1985, ch. L-2. Elle dit que cette démarche a été « contrecarrée » parce que le représentant du SEI l’a informée que le directeur du Bureau des services fiscaux de Toronto Ouest n’avait pas nommé de représentant de la direction comme l’exige le Code canadien du travail.
[17] En septembre 2007, la demanderesse a déposé une plainte auprès de la Gendarmerie royale du Canada (la GRC) conformément au paragraphe 244(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu. Selon cette disposition, commet une infraction quiconque accède à des renseignements confidentiels recueillis en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu.
[18] La demanderesse affirme que l’ARC a délibérément refusé de lui communiquer l’information sur l’existence d’un autre mécanisme de plainte prévu par le paragraphe 239(2.2) de la Loi de l’impôt sur le revenu. Elle prétend que les employés de l’ARC ne sont pas informés que la violation du paragraphe 241(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu constitue une infraction au paragraphe 239(2.2) de la Loi de l’impôt sur le revenu.
[19] La demanderesse affirme aussi que le paragraphe 126(1) du Code criminel, L.R.C. 1985, ch. C-46, fait de la contravention à une loi fédérale un acte criminel.
[20] En octobre 2007, la demanderesse a voulu connaître les conclusions de l’enquête et, selon le paragraphe 70 de sa déclaration modifiée, la GRC [traduction] « a nié qu’une enquête avait eu lieu ».
[21] En novembre 2007, la demanderesse a démissionné de l’ARC.
[22] En janvier 2008, elle a présenté une demande en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels à la Direction de l’AIPRP de l’ARC, pour obtenir communication des noms de tous les employés de l’ARC qui avaient accédé à son dossier fiscal sans y être autorisés.
[23] Également en janvier 2008, la demanderesse a prié la Direction de l’AIPRP de l’ARC, conformément à la Loi sur l'accès à l'information, L.R.C. 1985, ch. A-1, de lui communiquer tous les comptes rendus d’enquêtes menées par l’ARC sur les cas où des employés de l’ARC avaient accédé à son dossier fiscal sans y être autorisés.
[24] En février 2008, la demanderesse a reçu une réponse à sa demande d’accès. Elle consistait en un rapport considérablement expurgé de l’ARC. L’ARC s’était fondée semble-t-il sur le paragraphe 19(1) de la Loi sur l'accès à l'information pour justifier les coupures.
[25] En janvier 2008, la demanderesse a prié également la GRC, conformément à la Loi sur l'accès à l'information, de lui communiquer des copies de tous les rapports d’enquête concernant les cas où des employés de l’ARC avaient accédé à son dossier fiscal sans y être autorisés. Elle a reçu quelques documents écrits de la GRC en février 2008, notamment des copies de notes internes [traduction] « censées confirmer la position de la GRC selon laquelle celle-ci n’avait mené aucune enquête ». La GRC avait également coupé certains passages de ces notes internes en se fondant sur le paragraphe 19(1) de la Loi sur l'accès à l'information.
[26] La demanderesse avait également, en janvier 2008 et conformément à la Loi sur la protection des renseignements personnels, prié la GRC à nouveau de lui communiquer les noms de tous les employés de l’ARC qui avaient accédé à son dossier fiscal sans y être autorisés.
[27] Selon sa déclaration modifiée, la GRC a finalement répondu à sa demande en lui communiquant les mêmes documents que ceux qu’elle lui avait communiqués à la suite de sa demande faite en vertu de la Loi sur l'accès à l’information.
[28] En février 2008, la demanderesse a déposé une plainte contre la GRC auprès du CPVP. Elle dit que le CPVP l’avait informée oralement qu’aucun dossier ne serait ouvert.
[29] Ce même mois, c’est-à-dire février 2008, la demanderesse a déposé auprès du CPVP une plainte contre l’ARC, dans laquelle elle affirmait que l’ARC ne lui avait pas communiqué intégralement les noms des employés de l’ARC qui avaient accédé à son dossier fiscal sans y être autorisés. Elle a été informée par le CPVP en octobre 2008 que sa plainte n’était pas fondée.
[30] En février 2008, la demanderesse a déposé, auprès du Commissaire à l’information, des plaintes à la fois contre l’ARC et contre la GRC. À la date du dépôt de sa déclaration modifiée, elle n’avait pas reçu de rapport concernant l’« enquête proposée ».
[31] Le 22 février 2008, la demanderesse a écrit au Commissaire à l’information pour le prier d’examiner toutes ses plaintes comme si elles n’en faisaient qu’une.
[32] En janvier 2009, la demanderesse a introduit devant la Cour, en alléguant une violation de la Loi sur la protection des renseignements personnels, une demande de contrôle judiciaire à l’encontre des « actes » du Commissaire à la protection de la vie privée dans le traitement des plaintes qu’elle avait déposées contre l’ARC et la GRC.
[33] La demanderesse se fonde sur l’historique susmentionné des événements pour réclamer contre la défenderesse les mesures de redressement suivantes :
a. la somme de 500 000 $ en dommages-intérêts généraux pour :
i. faute dans l’exercice d’une charge publique;
ii. inertie fautive et délibérée à faire appliquer des dispositions légales;
iii. infractions à la Charte canadienne des droits et libertés.
b. la somme de 1 000 000 $ en dommages-intérêts exemplaires;
c. les intérêts conformément à la Loi sur les Cours fédérales;
d. les dépens avocat-client relatifs à la présente action;
e. tout autre redressement que la Cour pourra juger à propos.
Examen et décision
[34] La présente requête en radiation de la déclaration modifiée de la demanderesse est régie par les alinéas 221(1)a) et c) des Règles, ainsi rédigés :
221. (1) À tout moment, la Cour peut, sur requête, ordonner la radiation de tout ou partie d’un acte de procédure, avec ou sans autorisation de le modifier, au motif, selon le cas : a) qu’il ne révèle aucune cause d’action ou de défense valable;
[…]
c) qu’il est scandaleux, frivole ou vexatoire; |
221. (1) On motion, the Court may, at any time, order that a pleading, or anything contained therein, be struck out, with or without leave to amend, on the ground that it (a) discloses no reasonable cause of action or defence, as the case may be,
…
(c) is scandalous, frivolous or vexatious, |
[35] En vertu du paragraphe 221(2) des Règles, aucune preuve n’est admissible au soutien d’une requête en radiation lorsque cette requête est fondée sur l’alinéa 221(1)a).
[36] Le critère juridique applicable à une requête en radiation d’un acte de procédure est énoncé dans un arrêt de la Cour suprême du Canada, Hunt c. Carey Canada Inc., [1990] 2 R.C.S. 959 : un acte de procédure sera radié s’il ne laisse apparaître aucune cause d’action valable.
[37] En l’espèce, la demanderesse prétend avoir droit à réparation pour la non-application des dispositions de la Loi de l’impôt sur le revenu punissant l’accès non autorisé à des renseignements confidentiels, pour l’inertie de la défenderesse à introduire une instance en application du Code criminel, pour l’inertie du CPVC à ouvrir une enquête, pour l’inertie du Commissaire à l’intégrité de la fonction publique à agir et pour l’inertie du Commissaire à l’information à agir.
[38] Dans la mesure où la demanderesse entend fonder son action sur la violation d’une loi, ses allégations ne sont pas recevables. Il n’existe pas un droit d’action pour violation d’une loi, ainsi que l’expliquait la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Canada c. Saskatchewan Wheat Pool, [1983] 1 R.C.S. 205, à la page 225 :
Pour tous ces motifs, je serais opposé à ce qu'on reconnaisse au Canada l'existence d'un délit civil spécial de manquement à une obligation légale. La violation d'une loi, lorsqu'elle a une incidence sur la responsabilité civile, doit être considérée dans le contexte du droit général de la responsabilité pour négligence. La notion de négligence et celle d'obligation de diligence qui s'y rattache en common law sont assez fortes pour servir aux fins invoquées à l'appui de l'existence de l'action fondée sur l'infraction à une loi.
[39] Afin d’obtenir réparation pour la prétendue violation d’une loi, la demanderesse doit établir qu’il y a eu manquement à l’obligation de diligence de common law. Dans ses conclusions orales en réponse à la requête de la défenderesse, la demanderesse affirmait pouvoir se fonder sur le critère de l’arrêt Anns c. Merton London Borough Council, [1978] A.C. 728, pour dire que l’obligation de diligence avait depuis pris une forme nouvelle. Le critère qui permet de poursuivre la défenderesse pour négligence a été examiné par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Childs et al c. Desormeaux, [2006] 1 R.C.S. 643, où elle exposait ainsi l’interprétation canadienne du critère de l’arrêt Anns :
(1) y a‑t‑il un lien « suffisamment étroi[t] entre les parties » ou un rapport de « proximité » justifiant l’imposition d’une obligation, et dans l’affirmative,
(2) existe‑t‑il des considérations de politique générale exigeant de restreindre ou de rejeter la portée de l’obligation, la catégorie de personnes qui en bénéficient ou les dommages auxquels un manquement à l’obligation peut donner lieu?
[40] La déclaration modifiée de la demanderesse montre clairement que, selon elle, la défenderesse a l’obligation formelle de porter des accusations et d’engager des poursuites en vertu du paragraphe 239(2.2) de la Loi de l’impôt sur le revenu. Cette disposition est ainsi rédigée :
(2.2) Commet une infraction et encourt, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, une amende maximale de 5 000 $ et un emprisonnement maximal de 12 mois, ou l’une de ces peines, toute personne :
a) soit qui contrevient au paragraphe 241(1);
b) soit qui, sciemment, contrevient à une ordonnance rendue en application du paragraphe 241(4.1). |
(2.2) Every person who
(a) contravenes subsection 241(1), or
(b) knowingly contravenes an order made under subsection 241(4.1)
is guilty of an offence and liable on summary conviction to a fine not exceeding $5,000 or to imprisonment for a term not exceeding 12 months, or to both. |
[41] Je n’ai pas connaissance d’une telle obligation formelle. Les responsables de l’application de la loi et les procureurs sont investis depuis longtemps du pouvoir discrétionnaire de déposer ou non des accusations et d’engager ou non des poursuites. Je me réfère sur ce point à l’arrêt R. c. Beaudry, [2007] 1 R.C.S. 190, et à l’arrêt Krieger c. Law Society of Alberta, [2002] 3 R.C.S. 372.
[42] La demanderesse ici ne prétend pas qu’il y a eu enquête fautive, notion admise par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Hill c. Hamilton-Wentworth Regional Police Services Board, [2007] 3 R.C.S. 129. Elle dit plutôt qu’il y a eu faute pour refus d’enquêter, ou faute pour refus de poursuivre, mais ces causes d’action sont inconnues en droit canadien. Ce n’est pas parce qu’une cause d’action est nouvelle qu’elle est valable; voir l’arrêt Prentice c. Canada (Procureur général), [2006] 3 R.C.F. 135 (C.A.).
[43] Le paragraphe 239(2.2) de la Loi de l’impôt sur le revenu est une disposition quasi criminelle assortie de conséquences pénales.
[44] Selon moi, les principes du pouvoir discrétionnaire de la police et du pouvoir discrétionnaire de poursuivre s’appliquent à la décision d’agir et de donner effet au paragraphe 239(2.2) de la Loi de l’impôt sur le revenu. Ce pouvoir discrétionnaire est diamétralement opposé, dans le cadre du critère de l’arrêt Anns, à la reconnaissance d’une obligation dont la violation pourrait fonder une action en responsabilité civile pour refus d’ouvrir une enquête ou d’engager des poursuites.
[45] S’il n’y a pas d’obligation de diligence, alors la décision de l’ARC ou de la GRC de ne pas porter d’accusations en vertu du paragraphe 239(2.2) de la Loi de l’impôt sur le revenu ne saurait constituer une cause d’action valable en responsabilité civile.
[46] La demanderesse a aussi allégué une faute dans l’exercice d’une charge publique. Dans l’arrêt Succession Odhavji c. Woodhouse, [2003] 3 R.C.S. 263, M. le juge Iacobucci définissait ainsi les éléments essentiels du délit de faute dans l’exercice d’une charge publique :
Il existe à mon avis deux éléments communs. Premièrement, le fonctionnaire public doit avoir agi en cette qualité de manière illégitime et délibérée. Deuxièmement, le fonctionnaire public doit avoir été conscient du caractère non seulement illégitime de sa conduite, mais aussi de la probabilité de préjudice à l’égard du demandeur […]
[47] Il ressort clairement de la déclaration modifiée que, selon la demanderesse, le fait pour l’ARC et la GRC de ne pas avoir déposé d’accusations et engagé de poursuites en vertu du paragraphe 239(2.2) constitue en lui-même une faute dans l’exercice d’une charge publique.
[48] Pour les motifs exposés plus haut, je suis d’avis que le fait que des accusations n’ont pas été déposées, dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire de ceux qui sont autorisés à prendre la décision de déposer ou non des accusations, ne saurait constituer l’« acte illégitime » requis pour établir le délit de faute dans l’exercice d’une charge publique.
[49] La demanderesse n’a d’ailleurs pas allégué de faits importants le moindrement susceptibles de montrer qu’il y a eu acte illégitime ou que les fonctionnaires publics savaient que leurs actes étaient illégitimes ou qu’ils avaient l’intention de lui causer personnellement un préjudice. Cela étant, la demanderesse n’a pas établi l’existence d’une cause d’action valable en ce qui concerne le délit de faute dans l’exercice d’une charge publique : voir Chavali c. Canada (2002), 291 N.R. 311 (C.A.F.).
[50] La demanderesse affirme aussi qu’il a été porté atteinte à ses droits garantis par la Charte. Cependant, elle ne dit pas de quels droits il s’agit, ni n’avance les faits importants qui pourraient appuyer cette prétention.
[51] Une infraction à la Charte ne peut être alléguée dans un vide factuel; elle doit être confirmée par la preuve et les faits; voir l’arrêt MacKay c. Manitoba, [1989] 2 R.C.S. 357, et l’arrêt Danson c. Ontario (Attorney General) (1987), 60 O.R. (2d) 676 (C.A.).
[52] Il n’y a donc aucune cause d’action valable dans la déclaration modifiée de la demanderesse en ce qui concerne une infraction à la Charte.
Possibilité d’engager une procédure de contrôle judiciaire
[53] J’examinerai maintenant les allégations de la demanderesse concernant les divers offices fédéraux, à savoir le CPVP, le Commissaire à l’information et le Commissariat à l’intégrité de la fonction publique.
[54] À mon avis, toutes les allégations de la demanderesse se rapportant à ces offices fédéraux donneraient ouverture à un contrôle judiciaire selon l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, l’article 41 de la Loi sur la protection des renseignements personnels ou l’article 41 de la Loi sur l'accès à l'information.
[55] Au cours de l’audience tenue le 9 novembre 2009, la demanderesse a fait valoir que les plaintes à l’encontre du CPVP et du Commissaire à l’information ne sont pas susceptibles de contrôle judiciaire. Au soutien de ses arguments, elle s’est référée à la décision Murdoch c. Canada (Gendarmerie royale du Canada), [2005] 4 R.C.F. 340 (C.F.).
[56] Selon moi, la demanderesse fait erreur dans sa manière d’interpréter ce précédent. Je crois que ce que dit le jugement Murdoch, c’est que les recommandations faites par le CPVP et le Commissaire à l’information ne sont pas susceptibles de contrôle.
[57] Il n’y a rien de nouveau dans cette affirmation. Le paragraphe 18.1(3) de la Loi sur les Cours fédérales dispose que les décisions des offices fédéraux peuvent être revues par la Cour. Une recommandation n’est pas une décision; voir Pieters c. Canada (Procureur général), [2008] 2 R.C.F. 421 (C.F.).
[58] Les alinéas 29(1)a) et b) de la Loi sur la protection des renseignements personnels disent que le Commissaire à la protection de la vie privée reçoit les plaintes et fait enquête sur les plaintes où il est allégué qu’il y a eu communication fautive de renseignements personnels :
29. (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente loi, le Commissaire à la protection de la vie privée reçoit les plaintes et fait enquête sur les plaintes:
a) déposées par des individus qui prétendent que des renseignements personnels les concernant et détenus par une institution fédérale ont été utilisés ou communiqués contrairement aux articles 7 ou 8;
b) déposées par des individus qui se sont vu refuser la communication de renseignements personnels, demandés en vertu du paragraphe 12(1);
[…]
|
29. (1) Subject to this Act, the Privacy Commissioner shall receive and investigate complaints
(a) from individuals who allege that personal information about themselves held by a government institution has been used or disclosed otherwise than in accordance with section 7 or 8;
(b) from individuals who have been refused access to personal information requested under subsection 12(1);
… |
[59] L’article 30 de la Loi sur l'accès à l'information est formulé de la même manière :
30. (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente loi, le Commissaire à l’information reçoit les plaintes et fait enquête sur les plaintes :
a) déposées par des personnes qui se sont vu refuser la communication totale ou partielle d’un document qu’elles ont demandé en vertu de la présente loi;
[…] |
30. (1) Subject to this Act, the Information Commissioner shall receive and investigate complaints
(a) from persons who have been refused access to a record requested under this Act or a part thereof;
… |
[60] Si la demanderesse s’estimait lésée par le refus du CPVP et du Commissaire à l’information de donner suite à ses plaintes, elle disposait d’un autre recours, à savoir le dépôt d’une demande de contrôle judiciaire devant la Cour fédérale.
[61] Mon opinion sur ce point est confirmée par l’article 41 de la Loi sur la protection des renseignements personnels et l’article 41 de la Loi sur l'accès à l'information. L’article 41 de la Loi sur la protection des renseignements personnels prévoit ce qui suit :
41. L’individu qui s’est vu refuser communication de renseignements personnels demandés en vertu du paragraphe 12(1) et qui a déposé ou fait déposer une plainte à ce sujet devant le Commissaire à la protection de la vie privée peut, dans un délai de quarante cinq jours suivant le compte rendu du Commissaire prévu au paragraphe 35(2), exercer un recours en révision de la décision de refus devant la Cour. La Cour peut, avant ou après l’expiration du délai, le proroger ou en autoriser la prorogation. |
41. Any individual who has been refused access to personal information requested under subsection 12(1) may, if a complaint has been made to the Privacy Commissioner in respect of the refusal, apply to the Court for a review of the matter within forty-five days after the time the results of an investigation of the complaint by the Privacy Commissioner are reported to the complainant under subsection 35(2) or within such further time as the Court may, either before or after the expiration of those forty-five days, fix or allow. |
[62] L’article 41 de la Loi sur l'accès à l'information est formulé de la même façon :
41. La personne qui s’est vu refuser communication totale ou partielle d’un document demandé en vertu de la présente loi et qui a déposé ou fait déposer une plainte à ce sujet devant le Commissaire à l’information peut, dans un délai de quarante-cinq jours suivant le compte rendu du Commissaire prévu au paragraphe 37(2), exercer un recours en révision de la décision de refus devant la Cour. La Cour peut, avant ou après l’expiration du délai, le proroger ou en autoriser la prorogation. |
41. Any person who has been refused access to a record requested under this Act or a part thereof may, if a complaint has been made to the Information Commissioner in respect of the refusal, apply to the Court for a review of the matter within forty-five days after the time the results of an investigation of the complaint by the Information Commissioner are reported to the complainant under subsection 37(2) or within such further time as the Court may, either before or after the expiration of those forty-five days, fix or allow. |
[63] La demanderesse prétend qu’elle n’a pas obtenu de réponse satisfaisante à sa demande d’aide adressée au Commissariat à l’intégrité de la fonction publique. La Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles a pour objet d’apporter une protection contre les représailles en milieu de travail. Cette loi définit ainsi le mot « représailles », au paragraphe 2(1) :
« représailles » L’une ou l’autre des mesures ci-après prises à l’encontre d’un fonctionnaire pour le motif qu’il a fait une divulgation protégée ou pour le motif qu’il a collaboré de bonne foi à une enquête menée sur une divulgation ou commencée au titre de l’article 33 :
a) toute sanction disciplinaire;
b) la rétrogradation du fonctionnaire;
c) son licenciement et, s’agissant d’un membre de la Gendarmerie royale du Canada, son renvoi ou congédiement;
d) toute mesure portant atteinte à son emploi ou à ses conditions de travail;
e) toute menace à cet égard. |
“reprisal” means any of the following measures taken against a public servant because the public servant has made a protected disclosure or has, in good faith, cooperated in an investigation into a disclosure or an investigation commenced under section 33:
(a) a disciplinary measure;
(b) the demotion of the public servant;
(c) the termination of employment of the public servant, including, in the case of a member of the Royal Canadian Mounted Police, a discharge or dismissal;
(d) any measure that adversely affects the employment or working conditions of the public servant; and
(e) a threat to take any of the measures referred to in any of paragraphs (a) to (d).
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[64] À mon avis, les plaintes de la demanderesse concernant le milieu de travail n’entrent pas dans cette définition et, par conséquent, ne relevaient pas du mandat du Commissariat à l’intégrité de la fonction publique.
[65] En tout état de cause, la demanderesse avait déposé une plainte auprès du commissaire à l’intégrité du secteur public, vraisemblablement en vertu de l’article 19.1 de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles. Les paragraphes 19.1(1) et (4) sont ainsi formulés :
19.1 (1) Le fonctionnaire ou l’ancien fonctionnaire qui a des motifs raisonnables de croire qu’il a été victime de représailles peut déposer une plainte auprès du commissaire en une forme acceptable pour ce dernier; la plainte peut également être déposée par la personne qu’il désigne à cette fin. […]
(4) Sous réserve du paragraphe 19.4(4), s’il dépose une plainte au titre du paragraphe (1), le fonctionnaire ou l’ancien fonctionnaire ne peut intenter de recours au titre de toute autre loi fédérale ou de toute convention collective à l’égard des prétendues représailles. |
19.1 (1) A public servant or a former public servant who has reasonable grounds for believing that a reprisal has been taken against him or her may file with the Commissioner a complaint in a form acceptable to the Commissioner. The complaint may also be filed by a person designated by the public servant or former public servant for the purpose. …
(4) Subject to subsection 19.4(4), the filing of a complaint under subsection (1) precludes the complainant from commencing any procedure under any other Act of Parliament or collective agreement in respect of the measure alleged to constitute the reprisal.
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[66] L’article 19.4 oblige le commissaire à l’intégrité à se prononcer sur la recevabilité d’une plainte. Les paragraphes 19.4(1) et (3) et les alinéas 19.4(4)a) et b) sont ici pertinents. Ils prévoient ce qui suit :
19.4 (1) Le commissaire statue sur la recevabilité de la plainte dans les quinze jours suivant son dépôt.
[…]
(3) Dans le cas où il décide que la plainte est irrecevable, le commissaire envoie par écrit sa décision motivée au plaignant.
(4) Dans le cas prévu au paragraphe (3) :
a) le paragraphe 19.1(4) cesse de s’appliquer;
b) la période qui commence le jour où la plainte a été déposée et qui se termine le jour où la décision motivée est envoyée au plaignant n’est pas prise en compte dans le calcul du délai dont dispose le plaignant pour intenter tout recours prévu par toute autre loi fédérale ou toute convention collective à l’égard des prétendues représailles. […] |
19.4 (1) The Commissioner must decide whether or not to deal with a complaint within 15 days after it is filed.
…
(3) If the Commissioner decides not to deal with a complaint, he or she must send a written notice of his or her decision to the complainant and set out the reasons for the decision.
(4) If the Commissioner decides not to deal with a complaint and sends the complainant a written notice setting out the reasons for that decision,
(a) subsection 19.1(4) ceases to apply; and
(b) the period of time that begins on the day on which the complaint was filed and ends on the day on which the notice is sent is not to be included in the calculation of any time the complainant has to avail himself or herself of any procedure under any other Act of Parliament or collective agreement in respect of the measure alleged to constitute the reprisal. … |
[67] Le commissaire à l’intégrité a informé par écrit la demanderesse qu’il n’examinerait pas sa plainte. La demanderesse avait alors le choix de déposer une demande de contrôle judiciaire contre cette décision du commissaire à l’intégrité si elle souhaitait contester la légitimité de la conduite du décideur administratif : voir Detorakis c. Canada (Procureur général), 2010 CF 39.
[68] La demanderesse a aussi prétendu que l’ARC avait ignoré ses plaintes concernant le milieu de travail. Elle fondait cette allégation sur le Code canadien du travail. Cette plainte n’a pas eu de suite parce que l’ARC n’avait pas nommé de représentant de la direction.
[69] Le paragraphe 127.1(1) du Code canadien du travail impose à l’employeur et à l’employé l’obligation de tenter de régler à l’amiable les questions de santé et de sécurité en milieu de travail. Cette disposition est ainsi rédigée :
127.1 (1) Avant de pouvoir exercer les recours prévus par la présente partie — à l’exclusion des droits prévus aux articles 128, 129 et 132 — , l’employé qui croit, pour des motifs raisonnables, à l’existence d’une situation constituant une contravention à la présente partie ou dont sont susceptibles de résulter un accident ou une maladie liés à l’occupation d’un emploi doit adresser une plainte à cet égard à son supérieur hiérarchique. (2) L’employé et son supérieur hiérarchique doivent tenter de régler la plainte à l’amiable dans les meilleurs délais. |
127.1 (1) An employee who believes on reasonable grounds that there has been a contravention of this Part or that there is likely to be an accident or injury to health arising out of, linked with or occurring in the course of employment shall, before exercising any other recourse available under this Part, except the rights conferred by sections 128, 129 and 132, make a complaint to the employee’s supervisor.
(2) The employee and the supervisor shall try to resolve the complaint between themselves as soon as possible.
|
[70] Si l’employeur et l’employé ne sont pas en mesure de régler la plainte, celle-ci peut alors faire l’objet d’une enquête. Le paragraphe 127.1(3) prévoit ce qui suit :
(3) En l’absence de règlement, la plainte peut être renvoyée à l’un des présidents du comité local ou au représentant par l’une ou l’autre des parties. Elle fait alors l’objet d’une enquête tenue conjointement, selon le cas :
a) par deux membres du comité local, l’un ayant été désigné par les employés — ou en leur nom — et l’autre par l’employeur;
b) par le représentant et une personne désignée par l’employeur. |
(3) The employee or the supervisor may refer an unresolved complaint to a chairperson of the work place committee or to the health and safety representative to be investigated jointly
(a) by an employee member and an employer member of the work place committee; or
(b) by the health and safety representative and a person designated by the employer.
|
[71] La demanderesse affirme que cette enquête n’a jamais eu lieu parce que l’ARC n’avait pas nommé un membre du comité représentant l’employeur.
[72] Là encore, la demanderesse avait la possibilité d’exercer un recours de droit administratif, par demande de contrôle judiciaire, pour l’inertie de l’ARC à faciliter la tenue d’une enquête.
[73] La demanderesse aurait pu emprunter une autre voie. Elle aurait pu refuser de travailler, ainsi que l’envisage le paragraphe 128(1) du Code canadien du travail, qui prévoit ce qui suit :
128. (1) Sous réserve des autres dispositions du présent article, l’employé au travail peut refuser d’utiliser ou de faire fonctionner une machine ou une chose, de travailler dans un lieu ou d’accomplir une tâche s’il a des motifs raisonnables de croire que, selon le cas :
a) l’utilisation ou le fonctionnement de la machine ou de la chose constitue un danger pour lui-même ou un autre employé;
b) il est dangereux pour lui de travailler dans le lieu;
c) l’accomplissement de la tâche constitue un danger pour lui-même ou un autre employé. |
128. (1) Subject to this section, an employee may refuse to use or operate a machine or thing, to work in a place or to perform an activity, if the employee while at work has reasonable cause to believe that
(a) the use or operation of the machine or thing constitutes a danger to the employee or to another employee;
(b) a condition exists in the place that constitutes a danger to the employee; or
(c) the performance of the activity constitutes a danger to the employee or to another employee. |
[74] Un refus de travailler aurait pu conduire à l’ouverture d’une enquête conformément aux articles 128 et 129 du Code canadien du travail. Les conclusions d’une telle enquête auraient donné ouverture à un appel devant un agent d’appel. Finalement, l’issue d’un tel appel aurait pu faire l’objet d’une procédure de contrôle judiciaire en vertu de la Loi sur les Cours fédérales; voir l’arrêt Martin c. Canada (Procureur général), [2005] 4 R.C.F. 637 (C.A.F.).
[75] Il est clair que la légitimité de l’exercice d’un pouvoir conféré par une loi ne peut être contestée que par demande de contrôle judiciaire : voir l’arrêt Grenier c. Canada, [2006] 2 R.C.F. 287 (C.A.). Selon sa déclaration modifiée, la demanderesse a sollicité en janvier 2009 le contrôle judiciaire de la décision du commissaire à la protection de la vie privée. Cependant, elle s’est désistée de cette procédure en avril 2009. Elle n’a pas dit si elle avait déposé d’autres demandes de contrôle judiciaire. En voulant contester par la présente action la conduite du CPVP, celle du Commissaire à l’information ou celle du commissaire à l’intégrité, elle se trouve à contester indirectement leurs décisions administratives. Cela n’est pas autorisé par le régime législatif actuel.
[76] Pour les motifs qui précèdent, la demanderesse n’a pas montré l’existence d’une cause d’action valable en ce qui concerne les divers agents et organismes qu’elle a désignés. La déclaration modifiée sera radiée. Les dépens sont accordés à la défenderesse.
JUGEMENT
LA COUR STATUE que la requête est accordée, la déclaration modifiée est radiée, et les dépens sont accordés à la défenderesse.
Les parties déposeront de brèves conclusions sur les dépens, comme il suit :
i) la défenderesse, d’ici le 10 mars 2010;
ii) la demanderesse, en réponse, d’ici le 17 mars 2010;
iii) la défenderesse, en réplique, le cas échéant, d’ici le 23 mars 2010.
Traduction certifiée conforme
David Aubry, LL.B.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : T-997-09
INTITULÉ : R. MAXINE COLLINS c.
SA MAJESTÉ LA REINE
LIEU DE L’AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L’AUDIENCE : LE 9 NOVEMBRE 2009
MOTIFS DU JUGEMENT
ET JUGEMENT : LA JUGE HENEGHAN
DATE DES MOTIFS
ET DU JUGEMENT : LE 5 MARS 2010
COMPARUTIONS :
R. Maxine Collins
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DEMANDERESSE (se représente elle-même)
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Tamara Sugunasiri |
POUR LA DÉFENDERESSE
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
s.o.
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DEMANDERESSE (se représente elle-même)
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John H. Sims, c.r. Sous-procureur général du Canada Toronto (Ontario) |
POUR LA DÉFENDERESSE
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