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Cour fédérale

 

Federal Court


Date : 20100211

Dossier : T-662-07

Référence : 2010 CF 141

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 11 février 2010

En présence de monsieur le juge Martineau

 

ENTRE :

NEELAM MAKHIJA

demandeur

et

 

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               À la suite d’une enquête administrative, Michael Nelson, directeur des lobbyistes (le directeur), a conclu que le demandeur, M. Neelam Makhija, avait contrevenu au paragraphe 5(1) de la Loi sur l’enregistrement des lobbyistes, L.R.C. 1985 (4e suppl.), ch. 44 (la Loi), ainsi qu’à la deuxième et à la troisième règles du Code de déontologie des lobbyistes (le Code). Le demandeur conteste la légalité de chacune des conclusions de contravention à la Loi et au Code contenues dans les quatre rapports d’enquête de février 2007 (les décisions) que le directeur a soumis au Parlement.


[2]               Pour les motifs ci-après exposés, la demande est accueillie en partie. La Cour déclare que les décisions sont illégales dans la mesure où elles concluent que le demandeur a contrevenu à la Loi. Par ailleurs, les conclusions de contravention aux règles du Code sont valides et légales, eu égard aux circonstances de l’espèce. La Cour refuse par conséquent d’accorder toutes les autres réparations réclamées par le demandeur dans la présente instance en contrôle judiciaire.

 

I           CONTEXTE

[3]               Le demandeur est ingénieur électronicien et président de NJM Initiatives Inc. (NJM), une société ontarienne basée à Oakville, qui fait la publicité de ses compétences en « technologie fédérale et qualification des investissements financiers » et en « promotion de propositions et représentation d’entreprise ». En octobre 2005, se fondant sur une information communiquée par des fonctionnaires d’Industrie Canada, le directeur a conclu qu’il avait des motifs raisonnables de croire que le demandeur avait contrevenu à la Loi et au Code dans le cadre des activités qu’il avait menées au nom de quatre sociétés de haute technologie de la Colombie‑Britannique, à savoir TIR Systems Inc. (TIR), Infowave Software Inc. (Infowave), Intrinsyc Software Inc. (Intrinsyc) et Wavemakers Inc. (Wavemakers) (les sociétés).

 

[4]               En application du paragraphe 10.4(1) de la Loi, la Direction des enquêtes du Bureau du directeur des lobbyistes (le BDL) a entrepris quatre enquêtes sur les activités que le demandeur avait menées au nom des sociétés. Le BDL a examiné ce qui suit : la correspondance échangée entre la société en cause, le demandeur et les fonctionnaires fédéraux, la correspondance interne de l’Administration fédérale, les accords conclus entre la société et le gouvernement fédéral, les contrats et accords conclus entre la société et le demandeur ou NJM, les sommes versées par la société au demandeur ou à NJM, les rapports annuels et trimestriels de la société, l’information gouvernementale se rapportant au programme de financement en cause, le registre des lobbyistes et l’information accessible au public sur Internet.

 

[5]               Au printemps de 2006, à l’issue des enquêtes en question, la Direction des enquêtes a soumis au directeur quatre rapports provisoires d’enquête, chacun concluant que le demandeur avait contrevenu au paragraphe 5(1) de la Loi parce qu’il s’était livré à des activités de lobbyiste sans s’être enregistré. Chacun des rapports d’enquête concluait également que le demandeur avait contrevenu à certains des principes et à certaines des règles du Code. Le 25 juillet 2006, le demandeur a reçu des exemplaires des rapports provisoires d’enquête et s’est vu offrir la possibilité de formuler des observations en réponse aux conclusions qu’ils contenaient. L’avocat du demandeur a déposé des observations écrites le 4 octobre 2006. Entre octobre et novembre 2006, l’avocat du demandeur a sollicité à deux reprises la possibilité d’être entendu par le directeur, qui a refusé d’entendre son témoignage de vive voix. Le demandeur a été informé qu’une fois achevés, les rapports d’enquête seraient déposés devant le Parlement.

 

[6]               Au début de décembre 2006, le demandeur a déposé une requête interlocutoire en vue de faire interdire au directeur d’envoyer les rapports finaux d’enquête au registraire général du Canada (le registraire général). La requête a été rejetée par la Cour le 18 décembre 2006.

 

[7]               Le registraire a rédigé quatre rapports finaux d’enquête, datés de février 2007 (les décisions). Comme les rapports provisoires d’enquête, les décisions concluaient que le demandeur avait contrevenu au paragraphe 5(1) de la Loi, à la troisième règle du Code et, dans un cas, à la deuxième règle du Code. Le directeur a soumis les décisions au président du Conseil du Trésor (qui agit à la place du registraire général aux fins de la Loi), et les décisions ont été déposées devant la Chambre des communes et devant le Sénat le 19 mars 2007 et le 20 mars 2007 respectivement. Les décisions ont été communiquées au demandeur le 21 mars 2007.

 

[8]               Le 20 avril 2007, le demandeur a déposé quatre demandes distinctes de contrôle judiciaire à l’encontre des décisions, affirmant que le directeur a commis une erreur de droit en disant qu’il avait transgressé la Loi et le Code. Il sollicite une ordonnance annulant les décisions et enjoignant au registraire général de les retirer du Parlement du Canada. Le demandeur voudrait aussi que soit rendu un jugement déclaratoire disant qu’il n’est pas un lobbyiste au sens de la Loi et qu’il n’a pas contrevenu à la Loi ou au Code. Le 14 mai 2007, la Cour a ordonné la réunion des quatre dossiers sous le présent numéro du greffe.

 

[9]               Le 25 mars 2008, la Cour a fait droit aux quatre demandes de contrôle judiciaire dans le jugement Makhija c. Canada (Procureur général), 2008 CF 327 (Makhija I), aux motifs que le directeur n’avait pas compétence pour enquêter sur la question de savoir si le demandeur avait transgressé la Loi et que « le directeur a tenté de justifier son enquête (qui en fait était une enquête sur une possible transgression de la Loi) sous le couvert d’une enquête portant sur une transgression présumée du code ». La Cour a par ailleurs estimé que « le demandeur, parce qu’il ne s’était pas enregistré, n’était pas soumis au code ». Ayant conclu que le directeur avait outrepassé sa compétence, la Cour a annulé les décisions et enjoint au directeur de prendre toutes les mesures nécessaires auprès du président du Conseil du Trésor pour faire enlever les quatre décisions qui avaient été déposées devant le Parlement.

 

[10]           Le 15 décembre 2008, le jugement de la Cour a été infirmé par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Makhija c. Canada (Procureur général), 2008 CAF 402, autorisation de pourvoi refusée [2009] C.S.C.R. n47 (Makhija II). La Cour d’appel fédérale a jugé qu’une personne est assujettie au Code si elle se livre aux activités de lobbyiste visées au paragraphe 5(1) de la Loi. Le directeur a donc compétence pour mener une enquête en vue de déterminer si cette personne a contrevenu au Code indépendamment de la question de savoir si cette personne s’est enregistrée conformément à la Loi. La Cour d’appel fédérale a par conséquent décidé de renvoyer l’affaire au juge de première instance « en lui donnant pour directive de statuer sur la demande de contrôle judiciaire en partant du principe que le directeur avait le pouvoir d’enquêter sur la question de savoir si une infraction au Code avait été commise ».

 

[11]           La question qui m’est soumise est celle de savoir si les conclusions que le demandeur a contrevenu au paragraphe 5(1) de la Loi, ainsi qu’à la troisième règle du Code et, dans un cas, à la deuxième règle du Code, devraient être annulées. J’ai invité les parties à formuler de nouvelles observations orales et écrites sur la question et c’est ce qu’elles ont fait. Les avocats ont accepté de restreindre les nouvelles observations aux questions qui n’avaient pas été examinées lors de la première audience. Une nouvelle audience a eu lieu à Montréal le 11 janvier 2010. J’ai examiné à la fois les nouvelles observations et les arguments présentés lors de la première audience pour rendre le présent jugement.

II          LE CADRE LÉGISLATIF ET LE CADRE ADMINISTRATIF

[12]           Avant de passer à l’examen des décisions, il vaut la peine d’examiner brièvement l’objet et le régime législatif de la Loi, qui a depuis été rebaptisée Loi sur le lobbying, ainsi que le Code. Il y a deux versions différentes de la Loi qui sont pertinentes en l’espèce : la Loi et le Code dans leur rédaction en vigueur au cours de la période où le demandeur a exercé ses activités pour le compte des sociétés régissent les obligations du demandeur. Les dispositions applicables de la Loi et du Code dans leur rédaction alors en vigueur sont reproduites à l’Annexe I. La Loi a par la suite été modifiée à plusieurs reprises. La Loi dans sa rédaction en vigueur à l’époque où le directeur a mené les enquêtes contestées régit la compétence du directeur; les dispositions applicables de cette version de la Loi, qui a été en vigueur entre le 20 juin 2005 et le 2 juillet  2008, sont reproduites à l’Annexe II.

 

[13]           Le préambule de la Loi consacre les quatre principes fondamentaux suivants : l’intérêt public que présente la liberté d’accès aux institutions de l’État, la légitimité du lobbyisme auprès des titulaires d’une charge publique, l’opportunité d’accorder aux titulaires d’une charge publique et au public la possibilité de savoir qui se livre à des activités de lobbyiste et le fait que l’enregistrement des lobbyistes rémunérés ne doit pas faire obstacle à cette liberté d’accès. La Loi ne définit pas les termes « lobbyisme » ou « lobbying ». Il prévoit toutefois l’enregistrement public de toute personne qui, moyennant paiement, s’engage à communiquer avec le « titulaire d’une charge publique » au sujet des mesures énumérées dans la Loi. Parmi ces mesures, signalons celle qui est prévue au sous-alinéa 5(1)a)(v), en l’occurrence « l’octroi de subventions, de contributions ou d’autres avantages financiers par Sa Majesté du chef du Canada ou en son nom ». Par ailleurs, le paragraphe 2(1) de la Loi donne la définition suivante du « titulaire d’une charge publique » : « Agent ou employé de Sa Majesté du chef du Canada. La présente définition s’applique notamment : a) aux sénateurs et députés fédéraux ainsi qu’à leur personnel, b) aux personnes nommées à des organismes par le gouverneur en conseil ou un ministre fédéral, ou avec son approbation, à l’exclusion des juges rémunérés sous le régime de la Loi sur les juges et des lieutenants-gouverneurs, c) aux administrateurs, dirigeants et employés de tout office fédéral, au sens de la Loi sur les Cours fédérales, d) aux membres des Forces armées canadiennes, e) aux membres de la Gendarmerie royale du Canada ».

 

[14]           Le Code vient compléter les exigences de la Loi en matière d’enregistrement. L’objet du Code est, ainsi qu’il est précisé dans son message introductif, de rassurer le public canadien au sujet des normes d’éthique élevées que doivent respecter les lobbyistes de façon à préserver et à faire croître la confiance du public dans l’intégrité, l’objectivité et l’impartialité de la prise de décisions du gouvernement. Le Code définit des normes de conduite que doivent impérativement respecter tous les lobbyistes qui communiquent avec des « titulaires de charge publique ».

 

[15]           Dans le jugement Démocratie en surveillance c. Canada (Procureur général), 2004 CF 969, au paragraphe 23 (Démocratie en surveillance I), le juge Gibson résume comme suit la nature du Code :

Le Code des lobbyistes, élaboré et adopté en vertu de l'article 10.2 de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes, est reproduit intégralement dans la version en vigueur à tous les moments pertinents à l'annexe III des présents motifs; cette annexe contient aussi un « message du conseiller en éthique ». La nature de ce code n'est pas bien définie. Il ne s'agit certainement pas d'un texte législatif, ni d'un texte réglementaire pour l'application de la Loi sur les textes réglementaires. Cela étant dit, après son élaboration par le conseiller en éthique – un exercice qui, d'après ce dernier, a nécessité « de nombreuses consultations auprès d'un large éventail de personnes et de groupes intéressés à accroître la confiance du public dans l'intégrité du processus décisionnel de l'État » –, le Code a été examiné par un comité permanent de la Chambre des communes et publié dans la Gazette du Canada du 8 février 1997. Les avocats du défendeur (le conseiller en éthique) ne considèrent pas le Code des lobbyistes comme un texte de loi, mais je ne suis pas convaincu qu'ils aient tout à fait raison.

 

Bien que la nature juridique du Code ne soit pas en cause en l’espèce, je souscris aux propos du juge Gibson lorsqu’il affirme qu’on ne saurait affirmer que le Code n’est pas un texte de loi.

 

[16]           Le directeur (désormais appelé commissaire au lobbying) est chargé de l’administration des dispositions de la Loi relatives à la divulgation de renseignements et à la tenue du registre public (le registre). Le BDL (désormais appelé Commissariat au lobbying) aide le directeur à s’acquitter de ses fonctions. Le contrôle d’application de la Loi et du Code relève de la Direction des enquêtes du BDL, qui a élaboré une série de mesures pour la conduite de ses activités. Une enquête administrative est ouverte sur réception d’une demande ou d’une plainte émanant du grand public, des médias, de députés ou d’organismes, ou lorsque les fonctionnaires du BDL estiment qu’une contravention à la Loi ou au Code a pu être commise. S’il ressort de l’enquête administrative qu’il existe des motifs raisonnables de croire qu’une contravention à la Loi ou au Code a été commise, le directeur en est informé.

 

[17]           Lorsqu’il existe des motifs raisonnables de croire qu’une contravention à la Loi a été commise dans le délai de prescription de deux ans prévu au paragraphe 14(3) de la Loi, le directeur renvoie le dossier à la Gendarmerie Royale du Canada (la GRC) pour qu’elle mène une enquête. Le directeur et le BDL ne mènent pas eux-mêmes l’enquête. D’ailleurs, à l’époque qui nous intéresse, le directeur n’avait pas compétence pour enquêter sur les infractions à la Loi (voir les paragraphes 10.4(7) à (9) de la Loi). Il convient de signaler que, depuis le prononcé du jugement Makhija I, le législateur a modifié la Loi pour conférer expressément au directeur le pouvoir de faire enquête sur toute infraction à la Loi. Le paragraphe 10.4(1) actuel de la Loi sur le lobbying, L.R.C. 1985 (4e suppl.), ch.44, qui est entré en vigueur le 2 juillet 2008, est ainsi libellé :

Le commissaire [anciennement, le directeur] fait enquête lorsqu’il a des raisons de croire, notamment sur le fondement de renseignements qui lui ont été transmis par un parlementaire, qu’une enquête est nécessaire au contrôle d’application du code ou de la présente loi.

 

À mon avis, cette disposition appuie ma conclusion que le directeur n’avait pas auparavant compétence pour faire enquête sur des contraventions à la Loi, sinon, il n’aurait pas été nécessaire de modifier la Loi.

 

[18]           En revanche, pour ce qui est du Code, lorsqu’il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction au Code a été commise, le directeur peut ordonner au BDL d’ouvrir une enquête. Il n’y a aucun délai de prescription en ce qui concerne la tenue d’une enquête relative à une contravention au Code. Aux termes de l’article 10.3 de la Loi, doivent notamment se conformer au Code les personnes tenues de fournir la déclaration prévue au paragraphe 5(1) de la Loi. En conséquence, lorsqu’il enquête pour déterminer si une personne a contrevenu au Code, le directeur doit d’abord déterminer si cette personne se livrait à des activités de lobbying qui l’obligeaient à s’enregistrer comme lobbyiste. Dans l’affirmative, cette personne est assujettie au Code, et le directeur peut ensuite décider si une contravention au Code a été commise. Cette interprétation va dans le sens de celle qu’a retenue la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Makhija II lorsqu’elle a conclu que le directeur avait le droit de faire enquête « pour vérifier si cette personne s’était conformée aux modalités du Code » et ce, peu importe que cette personne ait déposé ou non la déclaration réglementaire relativement aux « activités de lobbyiste » en question.

 

III        LA NORME DE CONTRÔLE

[19]           L’avocat du demandeur soutient que la présente demande de contrôle judiciaire soulève des questions d’interprétation législative qui débordent le cadre des compétences du directeur. L’avocat affirme que la norme de contrôle qui s’applique aux présentes décisions devrait donc être celle de la décision correcte. L’avocate du défendeur, pour sa part, soutient que la norme de contrôle appropriée est celle de la décision raisonnable.

 

[20]           Dans l’arrêt Démocratie en surveillance c. Campbell, 2009 CAF 79 (Démocratie en surveillance II), la Cour d’appel fédérale explique, au paragraphe 23, que l’interprétation du Code par le directeur, qui est chargé de son application, « illustre bien la situation où un tribunal interprète une loi ou un autre texte à caractère normatif dont il a une connaissance approfondie ». Ainsi, à défaut d’autres considérations majeures, cela indique que la norme de contrôle applicable à cette question est celle de la raisonnabilité (Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 54 (Dunsmuir)). De plus, l’application, par le directeur, de la Loi et du Code aux activités du demandeur soulève des questions mixtes de droit et de fait, qui sont assujetties à la norme de la décision raisonnable (Dunsmuir, précité). Toutefois, l’interprétation de l’article 5 de la Loi, en tant que « question de droit isolable », est assujettie à la norme de la décision correcte (Démocratie en surveillance II, précité, au paragraphe 22).

 

IV        CONCLUSIONS DE FAIT TIRÉES PAR LE DIRECTEUR

[21]           Comme les quatre décisions sont très semblables et qu’à certains égards, elles sont identiques, je vais les examiner ensemble. Dans chacune d’entre elles, le directeur donne une description détaillée des interactions entre le demandeur, NJM et la société en question.

 

[22]           À l’automne 2000, le demandeur était en rapport avec plusieurs sociétés de haute technologie de la Colombie-Britannique pour savoir s’il y avait concordance entre leurs besoins en investissement et la contribution qu’elles pourraient recevoir par l’entremise de Partenariat technologique Canada (PTC), un organisme de service spécial d’Industrie Canada dont le mandat consiste à verser des contributions à remboursement conditionnel à des entreprises du Canada pour les aider à mettre sur le marché les résultats de leurs activités de recherche et de développement dans le domaine de la technologie. Pour appliquer son programme de soutien financier, PTC travaille en concertation avec le Conseil national de recherches du Canada (CNRC) et le Centre de recherches en communications (CRC).

 

[23]           Le demandeur a organisé une série d’entrevues à Vancouver, en décembre 2000, entre diverses compagnies, y compris les sociétés, et les fonctionnaires fédéraux chargés d’appliquer le mécanisme de financement de PTC. À la suite de ces rencontres, chacune des sociétés a présenté une demande de financement à PTC en janvier 2001. La proposition de Wavemaker a été retenue en vue d’un financement immédiat lors de la réunion tenue par PTC le 6 février 2001. Les propositions de TIR, d’Infowave et d’Intrinsyc n’ont pas été retenues, mais on a réservé à plus tard leur examen en vue d’un financement éventuel.

 

[24]           Peu de temps après, le demandeur a signé avec chacune des sociétés un protocole d’entente pour le compte de NJM. Le protocole d’entente conclu avec TIR a été signé le 23 février 2001, avec Infowave, le 12 avril 2001, avec Intrinsync, le 26 mars 2001 et avec Wavemakers, le 23 février 2001. Chacun des protocoles d’entente comprenait le même préambule, dans lequel il était notamment précisé que NJM était engagée pour faciliter un processus de planification [traduction] « afin que TIR remplisse les conditions d’obtention d’un soutien financier d’organismes gouvernementaux », parmi d’autres services professionnels. Chaque société devait payer au demandeur une somme convenue dès la signature du protocole, ainsi que des honoraires représentant un pourcentage déterminé de la contribution financière du gouvernement au projet, dès l’approbation de la demande de financement par le gouvernement. Le protocole contenait la mise en garde suivante :

[traduction] Le rôle de NJM se termine avec la réalisation de l’objectif indiqué, c’est-à-dire l’observation des conditions requises pour un financement public. Cependant, à titre de service gratuit postérieur à l’approbation du financement, un contact continu sera maintenu avec la source de financement, jusqu’à l’achèvement ou la cessation du projet.

 

 

[25]           Après la signature du protocole d’entente, le demandeur a ménagé une série de rencontres avec les sociétés et les fonctionnaires fédéraux concernés par le processus de financement de PTC et il a assisté à ces rencontres.

 

[26]           Le 6 avril 2001, le demandeur a rencontré un administrateur de PTC ainsi qu’un employé du CNRC pour discuter de la proposition de TIR. Une entrevue entre TIR et PTC a été fixée au 2 mai 2001. Le demandeur, qui devait assister à cette entrevue, était qualifié par TIR de « représentant de TIR à Ottawa (consultant) ». Le demandeur a invité un gestionnaire du CRC à cette entrevue. Ce même mois, le demandeur a organisé d’autres entrevues entre TIR, l’agent d’investissement de PTC et un autre employé d’Industrie Canada. En septembre 2003, le demandeur a rencontré le directeur exécutif de PTC à propos de TIR. Il a alors négocié avec un agent d’investissement de PTC pour que des modifications soient apportées aux dispositions de financement insérées dans l’accord que TIR a finalement signé.

 

[27]           Par ailleurs, entre 2001 et 2003, le demandeur a rencontré des agents d’investissement de PTC et d’autres représentants de PTC pour communiquer des renseignements sur Infowave, Intrinsync, Wavemakers et leurs produits. Pendant la même période, le demandeur a ménagé des entrevues entre PTC, d’autres employés d’Industrie Canada et chacune des sociétés.

 

[28]           Le directeur exécutif de PTC (au nom du ministre de l’Industrie) a signé des accords de financement avec chacune des quatre sociétés. L’accord conclu avec TIR a été signé le 5 novembre 2001; il prévoyait l’attribution d’un financement maximum de 6 636 271 $. L’accord conclu avec Infowave a été signé le 8 décembre 2003; le financement maximum était fixé à 7 289 500 $. L’accord signé avec Intrinsync le 9 août 2002 prévoyait quant à lui un financement maximun de 6 636 271 $. Enfin, l’accord conclu avec Wavemaker a été signé le 24 octobre 2001; le financement maximum y était fixé à 4 418 283 $.

 

[29]           Dans chacun de ces protocoles, l’article 6.11 prévoyait que toute personne intercédant pour Infowave en vue d’obtenir l’accord et l’un quelconque de ses avantages devait être enregistrée comme lobbyiste selon la Loi. En outre, avant la signature de l’accord entre TIR et PTC, TIR avait certifié à PTC que, si elle recourait à un lobbyiste aux fins de sa demande d’investissement, elle en informerait PTC, et qu’un tel lobbyiste se conformerait à la Loi. Durant la période considérée, ni le demandeur ni NJM ne figuraient dans le registre des lobbyistes.

 

[30]           Chacune des sociétés a payé le demandeur pour ses services, soit directement, soit par l’entremise de NJM.

 

[31]           Le 16 décembre 2003, NJM, le demandeur et TIR ont conclu une entente « de règlement et de libération » qui déchargeait le demandeur et par laquelle celui-ci reconnaissait avoir reçu une somme de 1 065 121,50 $.

 

[32]           Intrinsyc a, au cours de l’année 2003, versé à NJM la commission de base de 2 000 $ prévue par le protocole d’entente ainsi que des versements totalisant 393 367,93 $. Toutefois, dans son rapport annuel de 2004, Industrie Canada a constaté qu’Intrinsync n’avait pas respecté l’accord de financement qu’elle avait signé du fait qu’elle avait recouru aux services d’un consultant externe. Intrinsync a été sommée de rembourser le gouvernement.

 

[33]           Entre mars 2002 et janvier 2004, Wavemakers a versé à NJM la commission de base de 2 000 $, majorée de la TPS, prévue par le protocole d’entente ainsi que des versements totalisant 291 136,03 $. Le premier des chèques en question a été fait à l’ordre du demandeur lui-même, et les autres ont été signés en faveur de NJM.

 

[34]           Les rapports entre Infowave et le demandeur étaient un peu plus chaotiques. Infowave a renoncé à son droit, prévu par le protocole, d’obtenir un service gratuit de liaison continue avec les sources de financement, et elle a prié NJM de ne pas exercer de telles activités à moins que la société ne le lui demande. Le demandeur a signé une lettre datée du 4 novembre 2003 dans laquelle il reconnaissait et acceptait ladite renonciation.

 

[35]           Par lettre datée du 4 novembre 2003, Infowave informait NJM que l’accord de financement conclu avec PTC obligeait le demandeur à confirmer qu’il n’avait pas sollicité au nom d’Infowave l’accord conclu avec PTC. Le demandeur a confirmé ce fait. Infowave a prié le demandeur de communiquer immédiatement avec PTC pour voir s’il disposait d’une information [traduction] « ne concordant pas avec ces observations ».

 

[36]           Le 24 mars 2004, le demandeur, en son propre nom et au nom de NJM, a signé un [traduction] « certificat de conformité » attestant qu’il n’avait pas sollicité l’accord conclu entre PTC et Infowave et qu’il ne s’était pas livré à des activités de lobbyiste au nom d’Infowave. Il reconnaissait qu’Infowave s’appuyait sur ce certificat dans ses rapports avec PTC.

 

[37]           Le surlendemain, le demandeur a annulé le protocole, pour « des raisons personnelles », avec prise d’effet immédiate. Dans son rapport du troisième trimestre de 2004, Infowave écrivait que PTC allait réduire son financement de 15 p. 100, c’est-à-dire de 1,1 million de dollars, ce qui [traduction] « correspond au montant qu’Infowave devait payer à un expert-conseil pour son aide dans l’élaboration de la “carte routière technologique” de la société et de la demande de financement à PTC ». Par suite de l’annulation du protocole, NJM a reçu sa commission de base de 2 000 $, mais aucun autre paiement ne lui a été fait.

 

V         MOTIFS AYANT CONDUIT LE DIRECTEUR À CONCLURE À UNE VIOLATION

[38]         Dans les quatre décisions, après avoir tiré ses conclusions de fait, le directeur a examiné les observations qu’il avait reçues de l’avocat du demandeur par lettre datée du 4 octobre 2006. Cette lettre contenait des renseignements biographiques au sujet du demandeur, ainsi qu’un exposé de ses antécédents professionnels au cours des années quatre-vingt et quatre-vingt-dix. Dans la lettre, l’avocat du demandeur faisait valoir que PTC recherchait activement des projets en 2000 et avait communiqué avec le demandeur pour qu’il l’aide dans ses recherches. Le demandeur expliquait qu’à l’époque en cause, les obligations d’enregistrement énoncées dans la Loi ne s’appliquaient pas si un titulaire de charge publique adressait à un lobbyiste une demande écrite sollicitant son avis sur une question. Pareillement, l’avocat du demandeur écrivait que les rencontres de décembre 2000 avaient été organisées à la demande de représentants de PTC, qu’elles avaient été organisées au profit de PTC (pour que PTC puisse contacter diverses sociétés possibles) et que, à l’époque, le demandeur n’avait encore de lien contractuel avec aucune des sociétés. Le demandeur faisait également valoir que les rencontres ultérieures avaient été organisées au profit du représentant de PTC et non au profit des sociétés. Enfin, l’avocat du demandeur soutenait que son client n’avait jamais communiqué avec des représentants de PTC dans le dessein d’influer sur les décisions de financement prises par PTC. Il était nécessaire que le demandeur communique avec des titulaires d’une charge publique pour le fonctionnement du mécanisme de financement et ses échanges se limitaient à communiquer à PTC des renseignements sur les sociétés et sur leurs demandes. En bref, le demandeur ne croyait pas qu’il avait exercé des activités qui l’auraient contraint à s’enregistrer selon la Loi.

 

[39]           Dans les quatre décisions, le directeur a analysé la portée de ses conclusions de fait et a conclu que le demandeur avait contrevenu à la Loi et au Code et ce, malgré les arguments de son avocat. Le directeur a relevé qu’il n’était pas rare pour des sociétés cherchant à obtenir de la part d’organismes publics une contribution remboursable d’engager un intermédiaire pour qu’il les aide à présenter leur demande. L’intermédiaire peut, ce faisant, organiser des entrevues entre l’entreprise concernée et les fonctionnaires, et communiquer avec les fonctionnaires au nom de l’entreprise. Le directeur a souligné que toute cette façon de faire était légitime, mais a rappelé que la Loi imposait certaines obligations à ceux qui entreprennent d’aider ainsi des entreprises moyennant rémunération.

 

[40]           Le directeur a considéré le texte du paragraphe 5(1) de la Loi, qui, durant la période des activités menées par le demandeur au nom de TIR, prévoyait notamment ce qui suit :

5. (1) Est tenue de fournir au directeur, dans les dix jours suivant l’engagement, une déclaration, en la forme réglementaire, contenant les renseignements prévus au paragraphe (2) toute personne (ci-après « lobbyiste-conseil ») qui, moyennant paiement, s’engage, auprès d’un client, personne physique ou morale ou organisation :

 

a) à communiquer avec un titulaire de charge publique afin de tenter d’influencer :

 

[…]

 

(v) l’octroi de subventions, de contributions ou autres avantages financiers par Sa Majesté du chef du Canada ou en son nom,

 

(vi) l’octroi de tout contrat par Sa Majesté du chef du Canada ou en son nom;

 

 

b) à ménager pour un tiers une entrevue avec le titulaire d’une charge publique.

5. (1) Every individual who, for payment, on behalf of any person or organization (in this section referred to as the “client”), undertakes to

 

 

 

 

 

 

 

 

(a) communicate with a public office holder in an attempt to influence

 

[…]

 

(v) the awarding of any grant, contribution or other financial benefit by or on behalf of Her Majesty in right of Canada, or

 

(vi) the awarding of any contract by or on behalf of Her Majesty in right of Canada, or

 

(b) arrange a meeting between a public office holder and any other person, shall, not later than ten days after entering into that undertaking, file with the registrar, in the prescribed form and manner, a return setting out the information referred to in paragraphe (2).

 

 

[41]           Le directeur a procédé à un examen approfondi pour déterminer si le demandeur s’était livré aux activités visées au paragraphe 5(1). Il a souligné que, selon le protocole conclu avec chacune des sociétés, NJM avait été engagée pour aider à obtenir [traduction] « un soutien financier » de la part d’organismes publics, et il a relevé que la liste des services devant être fournis par NJM comprenait [traduction] « la préparation de la proposition, sa présentation initiale, sa soumission ainsi que la discussion et la défense de celle-ci ». Le protocole prévoyait aussi que NJM assurerait [traduction] « une liaison permanente avec la ou les sources de financement » jusqu’à l’achèvement ou la cessation du projet. Le directeur a conclu en faisant valoir que ces mots attestaient l’intention des parties que NJM s’emploierait à influencer l’octroi d’une contribution, d’un contrat ou d’un avantage financier en faveur des sociétés.

 

[42]           Dans les quatre décisions, le directeur a conclu que, de 2001 à 2003, le demandeur avait rencontré des agents d’investissement et d’autres fonctionnaires de PTC pour les renseigner sur la société en question et sur son produit. Il ressortait également de la preuve que le rôle du demandeur avait notamment consisté à ménager des entrevues entre les sociétés et des titulaires d’une charge publique. Dans chacune des décisions, le directeur a conclu que le demandeur avait « assuré la coordination entre les représentants du gouvernement et ceux [de la société en question] en déterminant les disponibilités des participants et en fixant ou modifiant la date et l’heure de la réunion ». Le directeur a fait observer que les rencontres de décembre 2000 avaient eu lieu avant la signature des protocoles d’entente, mais que le demandeur avait organisé au moins une rencontre de plus pour le compte de chacune des quatre sociétés après la signature des protocoles.

 

[43]           Il ressortait enfin de la preuve que, dans les quatre cas, NJM et/ou le demandeur avaient été payés pour leur travail. 

 

[44]           Le directeur a par conséquent conclu que le demandeur avait contrevenu au paragraphe 5(1) de la Loi. Il a déclaré ce qui suit :

[traduction] Contre rémunération, il a agi en tant que lobbyiste-conseil. Il a organisé au moins une rencontre entre des titulaires d’une charge publique et des représentants de [la société en question]. Il a communiqué avec des titulaires d’une charge publique pour tenter d’influencer l’attribution d’une contribution financière par PTC. En vertu de la [Loi, le demandeur] était tenu de s’inscrire en tant que lobbyiste, mais ne l’a pas fait. Il aurait dû s’inscrire dans les dix jours suivant la signature du protocole d’entente avec [la société en question] […]

 

[45]           Le directeur s’est également demandé si les activités que le demandeur avait exercées pour le compte des sociétés constituaient un manquement aux principes ou aux règles énoncés dans le Code. Le principe du « professionnalisme » oblige les lobbyistes à respecter la lettre et l’esprit du Code et de toutes les règles de droit applicables, y compris la Loi et ses règlements d’application. En contrevenant à la Loi, le demandeur avait, selon le directeur, violé ce principe dans chacun des quatre cas. De plus, les activités du demandeur menées au nom d’Infowave avaient été, selon le directeur, contraires aux deux principes restants, à savoir « intégrité et honnêteté » et « franchise ». Le directeur a toutefois fait observer qu’à l’époque en cause, un manquement aux principes du Code ne suffisait pas à lui seul pour qu’on conclue à une transgression du Code. Il fallait qu’une personne enfreigne au moins une des règles du Code pour qu’on puisse conclure qu’elle avait commis une infraction au Code.

[46]           Le directeur a conclu que le demandeur avait transgressé dans chaque cas la troisième règle du Code, qui oblige les lobbyistes à informer leur client, employeur ou organisation des obligations auxquelles ils sont soumis en vertu de la Loi et du Code, comme le démontrait le fait non seulement que le demandeur ne s’était pas enregistré, mais qu’il avait aussi déclaré au directeur qu’il n’était pas obligé de s’inscrire conformément à la Loi. Le directeur a expliqué que, comme le demandeur était d’avis que ses activités n’étaient pas soumises à l’obligation de s’enregistrer selon la Loi, il s’ensuivait qu’il n’avait pas informé les sociétés des obligations que la Loi mettait à sa charge.

 

[47]           S’agissant d’Infowave, le directeur a conclu que le demandeur avait transgressé la deuxième règle du Code. La deuxième règle du Code dispose que les lobbyistes doivent fournir des renseignements exacts et concrets aux titulaires d’une charge publique et ne doivent pas induire sciemment en erreur qui que ce soit. Le directeur a souligné que le demandeur avait signé au nom de NJM des déclarations confirmant qu’il n’avait pas sollicité l’accord conclu avec PTC et qu’il n’avait pas exercé d’activités de lobbyiste pour obtenir un financement de la part de PTC. Le directeur a conclu que le demandeur avait signé ces déclarations inexactes en sachant qu’Infowave se fonderait sur ces déclarations dans ses rapports avec PTC et autres organismes. Le directeur a par conséquent conclu que le demandeur avait induit sciemment en erreur Infowave, PTC et d’autres en erreur ou qu’il n’avait pas veillé à ne pas les induire en erreur.

 

[48]           En résumé, le directeur a tiré les conclusions mixtes de droit et de fait suivantes :

a.                   Le demandeur s’était livré à des activités de lobbying au sens du paragraphe 5(1) de la Loi pour le compte des quatre sociétés et il devait donc s’enregistrer conformément à la Loi;

b.                  Le demandeur avait violé le paragraphe 5(1) de la Loi en ce qui concerne ses rapports avec les quatre sociétés en ne s’enregistrant pas;

c.                   Le demandeur a transgressé un ou plusieurs des principes du Code dans ses rapports avec les quatre sociétés, mais cette transgression ne constituait pas à elle seule une violation du Code;

d.                  Le demandeur avait transgressé la troisième règle du Code dans le cas des quatre sociétés en ne les informant pas des obligations que la Loi et le Code mettaient à sa charge;

e.                   En ce qui concerne ses rapports avec Infowave, le demandeur a transgressé la deuxième règle du Code en signant des déclarations portant qu’il ne se livrait pas à du lobbying, sachant qu’Infowave se fierait à ces déclarations.

 

VI        LÉGALITÉ DES DÉCISIONS DU DIRECTEUR

[49]           La Cour va maintenant examiner la légalité des décisions du directeur à la lumière des arguments que les parties ont d’abord soulevés dans la présente demande. La Cour tient également compte des arguments complémentaires formulés par les parties après le prononcé de l’arrêt de la Cour d’appel fédérale.

 

A – Obligation du demandeur de s’enregistrer

[50]           Dans la présente demande de contrôle judiciaire, le demandeur affirme que le directeur a commis une erreur dans son interprétation de la Loi. L’avocat du demandeur soulève bon nombre des mêmes arguments que ceux que le directeur a examinés dans ses décisions.

 

[51]           En premier lieu, l’avocat du demandeur affirme que son client ne s’est jamais livré aux activités de lobbying visées au paragraphe 5(1) de la Loi. Le demandeur n’a jamais communiqué avec un « titulaire d’une charge publique » pour tenter d’influencer l’octroi d’une subvention, d’une contribution, d’un contrat ou autre avantage financier. Toute communication que le demandeur a eue avec des « titulaires d’une charge publique » est qualifiée de communication [traduction] « strictement limitée à faire connaître les points saillants du projet et à faciliter, au sein des entreprises, la réponse aux questions soulevées par le processus d’examen de PTC ».

 

[52]           Deuxièmement, le demandeur affirme qu’il n’était pas tenu de s’enregistrer suivant l’alinéa 4(2)c) de la Loi, dans sa rédaction en vigueur à l’époque en cause (une disposition qui permettait aux titulaires d’une charge publique d’obtenir l’avis d’un spécialiste sans que celui-ci soit tenu de s’enregistrer). Suivant le demandeur, le PTC a sollicité son aide, ce qui le soustrayait à l’obligation de s’enregistrer. Le demandeur signale en particulier que le PTC l’avait d’abord approché pour qu’il l’aide à financer des entreprises qui conviendraient à son programme de financement.

 

[53]           Troisièmement, le demandeur fait valoir que les modifications apportées à la Loi, et entrées en vigueur le 20 juin 2005, révèlent que le législateur entendait cibler les [traduction] « tentatives directes » d’influencer des fonctionnaires. Dans le cas présent, tous les rapports que le demandeur a eus avec les représentants de PTC étaient accessoires aux obligations qu’il avait envers les sociétés et n’étaient donc pas des tentatives directes d’influencer des titulaires d’une charge publique.

 

[54]           Enfin, le demandeur fait valoir que la Loi est un texte de nature pénale qui devrait donc être interprétée étroitement. Il souligne que les sanctions prévues par la Loi ne se limitent pas à des amendes et à des peines d’emprisonnement. En fait, le pouvoir du directeur de présenter ses rapports finaux d’enquête au registraire général pour dépôt devant le Parlement [traduction] « constitue pour le demandeur un niveau très réel d’humiliation personnelle ». Appliquant à la Loi ces règles strictes d’interprétation, le demandeur dit qu’il n’a pas « cherch[é] à exercer une influence auprès [des] institutions » comme il est indiqué dans la Loi.

 

[55]           Avec égard pour les arguments habiles du demandeur, la Cour ne peut, selon la norme de la raisonnabilité, conclure que les décisions sont entachées d’une erreur justifiant une intervention.

 

[56]           S’agissant du premier argument soulevé par le demandeur, je conclus que la preuve dont disposait le directeur appuie nettement ses conclusions qu’après la signature des protocoles d’entente, le demandeur a ménagé des rencontres avec des titulaires de charges publiques et des représentants de chacune des sociétés. Il s’agissait de lobbyisme au sens de l’alinéa 5(1)b) de la Loi. Je suis également d’accord pour dire que la preuve appuie clairement la conclusion que le demandeur a communiqué avec des titulaires d’une charge publique pour tenter d’influencer l’octroi d’une contribution financière par PTC, ce qui constitue également du lobbyisme au sens du sous‑alinéa 5(1)a)(v)de la Loi. Bien que demandeur affirme qu’il n’a informé PTC que des points saillants des projets de la société, j’estime raisonnable de conclure qu’il a transmis ces renseignements à PTC pour le compte des sociétés pour inciter PTC à financer les projets. Je suis renforcé dans cette conclusion par le texte du protocole d’entente, qui prévoit que le demandeur devait aider [traduction] « à la préparation de la proposition, sa présentation initiale, sa soumission ainsi que la discussion et la défense de celle-ci » en vue d’aider la société [traduction] « à se qualifier pour l’obtention de soutien financier ». J’estime en outre que la preuve appuie la conclusion que le demandeur a été payé pour ces services

 

[57]           Le directeur a rejeté au cours de l’enquête l’argument du demandeur suivant lequel il n’était pas tenu de s’enregistrer par application de l’alinéa 4(2)c). Dans ses décisions, le directeur déclare :

[traduction] L’avocat du demandeur soutient que son client n’était pas tenu de s’enregistrer parce que c’est PTC qui avait au départ communiqué avec lui pour lui demander de trouver des entreprises. Il s’agit d’une mauvaise interprétation de l’ancien alinéa 4(2)c) de la Loi qui était en vigueur à l’époque où le demandeur a exercé ses activités au nom des sociétés. La loi conférait alors aux titulaires d’une charge publique le droit d’obtenir l’avis d’un spécialiste sans qu’entre en jeu l’obligation pour celui-ci de s’enregistrer. Cette disposition n’autorisait pas un lobbyiste à rechercher des clients et à exercer en leur nom des activités de lobbyiste sans s’enregistrer.

 

[58]           Je souscris à l’analyse du directeur et je conclus que la dispense d’enregistrement prévue à l’alinéa 4(2)c) de la Loi ne s’applique pas au demandeur. Cette exception ne vaut que pour les communications visant à répondre directement à une demande écrite de consultation faite par le titulaire d’une charge publique. PTC a d’abord communiqué avec le demandeur pour lui demander de l’aider à trouver des entreprises appropriées pour le programme de financement de PTC. J’estime toutefois que les activités du demandeur ne se sont pas limitées à répondre directement à cette demande. Pour les motifs qui ont été exposés, la preuve démontre plutôt que le demandeur se livrait nettement à des activités de lobbying pour le compte des sociétés.

 

[59]           Je rejette également l’argument du demandeur en ce qui concerne l’intention du législateur. Je signale tout d’abord qu’il n’y a rien dans les décisions qui m’amènerait à penser que le directeur a eu de la difficulté à interpréter les dispositions pertinentes de la Loi ou du Code ou qu’il les a trouvées ambigües. Dans le même ordre d’idées, je ne puis souscrire à l’argument de l’avocat du demandeur suivant lequel les modifications à la Loi, qui sont entrées en vigueur longtemps après l’époque qui nous intéresse, révèlent qu’en 2003 le législateur cherchait à ne cibler que les « tentatives directes » d’influencer des fonctionnaires. 

 

[60]           En tout état de cause, je suis d’avis que les activités du demandeur étaient des « tentatives directes » visant à influencer des représentants du gouvernement. Le demandeur se fonde sur le Résumé législatif des modifications apportées à la Loi comme preuve de l’intention du législateur. Voici un extrait du résumé en question :

La Loi ne vise que les tentatives directes d’influencer certaines décisions gouvernementales. Les lobbyistes ne sont donc tenus de s’enregistrer que s’ils ont eu une forme de communication ou de contact direct avec un titulaire de charge publique.

 

En l’espèce, il est acquis aux débats que le demandeur a eu « [une] communication ou [des] contacts directs » avec le PTC et avec d’autres titulaires de charge publique, de sorte que ses activités constituaient des « tentatives directes » au sens du Résumé législatif.

 

[61]           Enfin, bien que je doute que les exigences de la Loi en matière d’enregistrement soient de nature pénale, j’estime qu’il n’est pas nécessaire que je tranche cette question parce que, même si la Loi est interprétée de façon restrictive, le demandeur serait quand même tenu de s’enregistrer. Il ressort de la preuve que le demandeur a ménagé des rencontres avec des titulaires d’une charge publique, de sorte qu’il était tenu de s’enregistrer même dans l’hypothèse où l’on interprète l’alinéa 5(1)b) de façon stricte. De même, même en interprétant le sous-alinéa 5(1)a)(v) de façon stricte, le directeur disposait de suffisamment d’éléments de preuve pour pouvoir raisonnablement conclure que le demandeur avait communiqué avec PTC en vue d’influencer l’octroi, par le gouvernement fédéral, d’avantages financiers aux sociétés.

 

[62]           Pour tous ces motifs, il était raisonnable pour le directeur de conclure que le demandeur était tenu de s’enregistrer conformément au paragraphe 5(1) de la Loi et de conclure que le demandeur était par conséquent assujetti au Code.

 

B – Conclusion du directeur suivant laquelle le demandeur avait transgressé la Loi

[63]           Le directeur était en droit de conclure que le demandeur était tenu de s’enregistrer conformément au paragraphe 5(1) de la Loi, mais le directeur est allé plus loin et a conclu que le demandeur avait contrevenu à la Loi. Comme nous l’avons déjà expliqué, le directeur n’était pas compétent pour enquêter sur les contraventions à la Loi. Je conclus que le directeur a outrepassé sa compétence en tirant cette conclusion.

 

[64]           Toutefois, comme je suis désormais lié par l’arrêt Makhija II de la Cour d’appel fédérale, je ne puis souscrire à l’argument du demandeur que l’excès de compétence commis par le directeur a eu pour effet d’entacher sa décision en ce qui a trait aux contraventions au Code commises par le demandeur. Malgré les conclusions qu’il a tirées au sujet de la transgression de la Loi par le demandeur, le directeur a suffisamment motivé sa conclusion que le Code avait été transgressé et cette conclusion appartient « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir, précité, au paragraphe 47).

 

C – Contraventions au Code commises par le demandeur

[65]           Je suis d’accord avec le demandeur pour dire qu’à l’époque en cause, il fallait conclure non seulement à un manquement aux principes du Code mais aussi à une transgression des règles du Code pour pouvoir conclure à une violation de celui-ci. Je suis également d’accord pour dire qu’à elles seules, les règles énoncées dans le Code n’obligeaient pas le demandeur à s’enregistrer. J’estime néanmoins que les décisions prises au regard du Code étaient raisonnables. Il ressort en effet de ces décisions que le directeur n’a pas conclu que le demandeur avait contrevenu aux règles du Code en ne s’enregistrant pas. Il a plutôt conclu que le demandeur avait violé les règles du Code en n’informant pas les sociétés des obligations que la Loi et le Code mettaient à sa charge. Cette omission va expressément à l’encontre de la troisième règle du Code et elle constitue une violation du Code.

[66]           Pour arriver à cette conclusion, le directeur a expliqué ce qui suit :

[traduction] M. Makhija estimait, comme le démontre le fait qu’il ne s’est pas enregistré et comme le confirment les observations qu’il a formulées par écrit lors de l’enquête, que ses activités ne l’obligeaient pas à s’enregistrer sous le régime de la Loi sur l’enregistrement des lobbyistes. Il s’ensuit donc qu’il n’a pas révélé aux sociétés les obligations que la Loi sur l’enregistrement des lobbyistes mettait à sa charge.

 

[67]           Le raisonnement du directeur ne dépend pas de sa conclusion erronée que le demandeur avait violé la Loi. La troisième règle du Code oblige le lobbyiste à divulguer les obligations que la Loi et le Code mettent à sa charge, de sorte que le directeur devait d’abord déterminer si le demandeur était effectivement assujetti à de telles obligations. En d’autres termes, il fallait d’abord conclure que le demandeur était un lobbyiste au sens de la Loi pour pouvoir conclure qu’il avait transgressé le Code. Cette conclusion était nécessaire même si le directeur n’avait pas mené d’enquête sous le régime de la Loi.

 

[68]           Après avoir conclu que le demandeur était assujetti aux règles énoncées dans le Code, le directeur a conclu, en se fondant sur les observations que le demandeur avait lui-même présentées à l’enquête, que le demandeur ne s’estimait pas lié par le Code. Cette conclusion était à coup sûr raisonnable. D’ailleurs, le demandeur reprend la même thèse devant notre Cour. Le directeur a également mentionné le défaut du demandeur de s’enregistrer, mais seulement pour démontrer que le demandeur ne s’estimait pas lui-même assujetti aux dispositions du Code.

 

[69]           Il semble logique de présumer que le demandeur n’informerait pas les sociétés des obligations que la Loi et le Code mettaient à sa charge puisqu’il estimait qu’aucune obligation ne lui était imposée. Vu l’ensemble de la preuve soumise au directeur, cette conclusion de fait n’était pas déraisonnable et, comme je l’ai déjà expliqué, elle était indépendante de la conclusion que la Loi avait été transgressée.

 

[70]           C’est donc de façon raisonnable que le directeur a conclu que le demandeur avait omis, contrairement à la troisième règle du Code, de divulguer les obligations que le Code lui imposait. Il a reconnu que le demandeur ne s’estimait pas assujetti au Code mais il n’a pas considéré que cela constituait un moyen de défense. En d’autres termes, il a interprété la troisième règle du Code en considérant qu’elle prévoyait une responsabilité qui s’apparentait à une responsabilité absolue, qui n’exige pas la preuve d’un élément mental pour qu’on puisse conclure à une violation. Cette interprétation est manifestement implicite dans le raisonnement du directeur et elle est transparente et intelligible comme l’exige l’arrêt Dunsmuir, précité.

 

[71]           Il semble injuste de reprocher au demandeur de ne pas avoir divulgué les obligations qui lui incombaient s’il ne savait pas ou ne croyait pas qu’il en avait. Si je jugeais l’affaire en première instance, j’aurais préféré une interprétation qui exige des éléments de preuve tendant à démontrer une négligence ou une omission volontaire de révéler ses obligations avant de pouvoir conclure à une violation. De telles exigences concorderaient mieux avec l’objet du Code, en l’occurrence celui de s’assurer que les lobbyistes respectent certaines normes d’éthique.

 

[72]           Toutefois, pour les motifs qui suivent, je ne puis qualifier de déraisonnable l’interprétation retenue par le directeur. En premier lieu, la Loi et le Code sont libellés en termes impératifs. Le paragraphe 10.3(1) de la Loi précise que les lobbyistes « sont tenu[s] de se conformer » au Code. La troisième règle du Code précise que les lobbyistes « doivent informer » certaines personnes de leurs obligations. Il était raisonnable de la part du directeur de conclure, vu ce libellé, que le demandeur était assujetti à une obligation impérative qui ne dépendait pas d’un état psychologique quelconque.

 

[73]           Ensuite, la deuxième règle du Code prévoit notamment ce qui suit :

En outre, ils ne doivent pas induire sciemment en erreur qui que ce soit, et ils doivent veiller à ne pas le faire par inadvertance.

 

Il me semble que c’est à dessein que les rédacteurs du Code ont voulu créer une défense de diligence raisonnable à la deuxième règle, ce qui permet de penser que telle n’était pas leur intention à la troisième règle.

 

[74]           Troisièmement, je ne suis pas convaincu que la présomption normale en faveur d’une norme de responsabilité absolue dans le cas des infractions contre le bien-être public s’applique lorsque la loi ne permet pas au ministère public de poursuivre une infraction. Dans la présente demande, nous avons affaire à une enquête et à un rapport d’une autorité administrative et, fait important, la violation en question ne comporte pas de conséquences pénales.

 

[75]           Quatrièmement, et cet aspect est le plus important, la Cour d’appel fédérale a dit, dans l’arrêt Makhija II, au paragraphe 9 :

Si M. Makhija était tenu de déposer la déclaration réglementaire parce qu’il s’était engagé à se livrer à des activités de lobbyisme, il était, pour la même raison, tenu de se conformer au Code.

 

Dans le même ordre d’idées, la Cour d’appel fédérale a ajouté, au paragraphe 11, que le directeur avait le droit faire enquête « pour vérifier si cette personne s’était conformée aux modalités du Code ».

 

[76]           Il semble que la Cour d’appel fédérale n’ait pas jugé pertinent le fait que le demandeur ignorait que le Code lui imposait certaines obligations. Or, s’il avait des obligations, il devait se conformer strictement au Code et ce, qu’il soit au courant ou non des obligations en question. Je suis lié par l’arrêt de la Cour d’appel fédérale et je me vois dans l’impossibilité de conclure que l’on peut raisonnablement dispenser le demandeur de son obligation de se conformer à la troisième règle du Code parce qu’il ignorait les obligations qui lui incombaient.

 

[77]           J’estime également qu’il était raisonnable de la part du directeur de conclure que le demandeur avait contrevenu à la deuxième règle du Code en soumettant à Infowave des déclarations écrites dans lesquelles il affirmait ne pas s’être livré à du lobbying. Ainsi qu’il a déjà été mentionné, la deuxième règle prévoit notamment ce qui suit :

En outre, [les lobbyistes] ne doivent pas induire sciemment en erreur qui que ce soit, et ils doivent veiller à ne pas le faire par inadvertance.

 

[78]           Le directeur a déclaré ce qui suit :

[traduction] M. Makhija a, au nom de NJM, fourni à Infowave un « certificat de conformité » attestant qu’il n’avait pas sollicité l’accord conclu avec PTC et qu’il ne s’était pas livré à des activités de lobbyiste au nom d’Infowave pour obtenir la signature de l’accord en question. Il l’a fait en sachant qu’Infowave s’appuierait sur ce certificat dans ses rapports avec PTC et avec d’autres […] M. Makhija a contrevenu à la deuxième règle du Code soit en induisant sciemment Infowave en erreur soit en ne veillant pas à ne pas le faire par inadvertance.

 

 

[79]           Cette conclusion dépend elle aussi de la conclusion du directeur suivant laquelle la Loi a été violée. Pour déterminer si la deuxième règle du Code a été violée, le directeur devait décider si les déclarations du demandeur induisaient en erreur. Le directeur avait le droit de conclure que le demandeur s’était livré à du lobbyisme et, partant, que les déclarations du demandeur suivant lesquelles il ne s’était pas livré à du lobbyisme induisaient en erreur.

 

[80]           Ayant conclu que le demandeur avait fait des déclarations qui induisaient en erreur, le directeur devait ensuite décider si le demandeur l’avait fait sciemment ou sans veiller à ne pas induire en erreur. La preuve appuie la conclusion du directeur suivant laquelle le demandeur avait fait des déclarations inexactes en sachant qu’Infowave se fierait à ces déclarations dans ses rapports avec PTC et avec d’autres. L’enquête avait révélé que ces déclarations avaient été faites parce qu’elles étaient exigées par l’accord de financement de PTC. Le demandeur était par ailleurs invité à communiquer sans délai avec Infowave s’il avait des renseignements qui ne concordaient pas avec les déclarations. Le demandeur se rendrait ainsi compte qu’Infowave se fiait sur ces déclarations.

 

[81]           Compte tenu de ces éléments de preuve, le directeur pouvait raisonnablement conclure que les déclarations induiraient en erreur soit sciemment, soit par négligence. Comme il savait que l’on se fierait sur ses déclarations, le demandeur aurait dû à tout le moins dû entreprendre d’autres démarches pour en vérifier l’exactitude (c’est-à-dire pour déterminer si ses activités constituaient du lobbying au sens de la Loi) avant d’y apposer sa signature. Là encore, compte tenu du fait que, comme l’a dit la Cour d’appel fédérale, le directeur était compétent au départ pour mener une enquête en vue de déterminer s’il y avait eu contravention au Code, le directeur pouvait raisonnablement conclure que le demandeur avait fait preuve de négligence en ne veillant pas à ne pas induire en erreur. Cette conclusion n’est pas fondée sur la présumée contravention à la Loi commise par le demandeur du fait qu’il ne s’est pas enregistré.

 

[82]           J’aurais moi-même pu en arriver à des conclusions différentes au sujet des contraventions au Code, mais, là encore, ce n’est pas le critère applicable. Soit dit en passant, il semble que les conclusions auxquelles je suis arrivé dans l’affaire Makhija I, à savoir que : (i) « avant 2005, le code n’obligeait pas le demandeur à s’enregistrer comme lobbyiste (ce qui est confirmé par les déclarations faites par le directeur dans le rapport annuel 2005-2006); (ii) le directeur a tenté de justifier son enquête (qui en fait était une enquête sur une possible transgression de la Loi) sous le couvert d’une enquête portant sur une transgression présumée du Code » ont toutes les deux été implicitement infirmées, de sorte que je suis désormais lié par l’arrêt rendu par la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Makhija II. Je conclus donc qu’il n’était pas déraisonnable de la part du directeur de conclure que le demandeur avait contrevenu à la deuxième et à la troisième règles du Code.

 

VII       RÉPARATION

[83]           Ainsi que je l’ai déjà dit, je trouve raisonnables les conclusions que le directeur a tirées au sujet des contraventions au Code par le demandeur. J’ai toutefois également conclu que le directeur avait outrepassé sa compétence en concluant que le demandeur avait contrevenu à la Loi. En conséquence, je passe maintenant à la question de la réparation qu’il convient d’accorder relativement à cet excès de compétence. Dans sa première demande, en plus de réclamer un jugement déclarant qu’il n’avait pas contrevenu à la Loi et au Code, le demandeur sollicitait aussi une ordonnance annulant les décisions et enjoignant au registraire général de les retirer du Parlement du Canada.

 

[84]           Les réparations prévues au paragraphe 18.1(3) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F-7, sont discrétionnaires et l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire fait intervenir des considérations relatives à la prépondérance des inconvénients (Mines Alerte Canada c. Canada (Pêches et Océans), 2010 CSC 2, aux paragraphes 43 et 52 (Mines Alerte). L’arrêt Makhija II de la Cour d’appel fédérale constitue sans conteste un facteur pertinent dont on doit tenir compte et c’est ce que j’ai fait en décidant de me limiter à rendre un jugement déclaratoire et de ne pas annuler les décisions.

 

[85]           Dans l’arrêt Mines Alerte, la Cour suprême du Canada a jugé qu’un jugement déclarant une décision illégale constituerait une réparation adéquate pour le demandeur. Comme toute autre réparation aurait un impact disproportionné sur le défendeur, aucune autre réparation n’a été accordée. J’adopterais une approche similaire en l’espèce. Je signale que, comme le délai de prescription applicable à la poursuite des infractions à la Loi est expiré, aucune sanction légale ne peut être infligée au demandeur pour sa présumée transgression de la Loi. Lorsqu’une décision a des conséquences pratiques limitées, la Cour est justifiée d’exercer son pouvoir discrétionnaire en refusant d’annuler la décision en question (Stevens c. Parti conservateur du Canada, 2005 CAF 383, au paragraphe 52). Bien que le demandeur affirme avoir subi une atteinte à sa réputation du fait du dépôt des décisions devant le Parlement, il n’en demeure pas moins que ce préjudice peut en grande partie être réparé au moyen d’un jugement déclaratoire portant que ces décisions sont illégales. Je signale également que le prononcé de ce jugement déclaratoire n’empêchera pas le demandeur d’intenter une action en dommages-intérêts contre Sa Majesté pour la présumée atteinte à sa réputation, si tel est son souhait (Canada c. Grenier, 2005 CAF 348).

 

[86]           En revanche, il serait difficile en pratique d’accorder intégralement la réparation sollicitée par le demandeur. Premièrement, je ne suis pas compétent pour ordonner au Parlement du Canada de prendre quelque mesure que ce soit relativement aux décisions en question. Deuxièmement, bien que je puisse enjoindre au président du Conseil du Trésor (ou peut-être au registraire général) de prendre des mesures raisonnables pour faire retirer les décisions, on ne peut affirmer avec certitude que ces mesures seront efficaces en pratique puisque le Parlement est souverain. Troisièmement, comme je l’ai déjà expliqué, exception faite de la conclusion relative à la transgression de la Loi, toutes les autres conclusions tirées par le directeur sont valides et légales eu égard aux circonstances de l’espèce.

 

[87]           Pour ces motifs, je conclus que la réparation appropriée en l’espèce consiste à rendre un jugement déclarant que les décisions sont illégales dans la mesure où elles concluent que le demandeur a contrevenu à la Loi, et je vais également déclarer que les conclusions de contravention aux règles du Code sont valides et légales, eu égard aux circonstances de l’espèce.

 

[88]           Enfin, compte tenu du succès partagé de la présente affaire, aucuns dépens ne seront adjugés en faveur ou à l’encontre d’une partie.

 


JUGEMENT

 

LA COUR ACCUEILLE en partie la présente demande de contrôle judiciaire.

 

LA COUR DÉCLARE que les quatre rapports d’enquête de février 2007 (les décisions) sont illégaux dans la mesure où ils concluent que le demandeur a contrevenu la Loi.

 

LA COUR DÉCLARE EN OUTRE que les conclusions de contravention aux règles du Code contenues dans les décisions sont valides et légales eu égard aux circonstances de l’espèce.

 

LA COUR REFUSE EN CONSÉQUENCE d’accorder toutes les autres réparations sollicitées par le demandeur dans la présente instance.

 

LA COUR N’ADJUGE AUCUNS DÉPENS.

 

 

« Luc Martineau »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

 

Christiane Bélanger, LL.L.

 


Annexe I

 

Loi sur l’enregistrement des lobbyistes, L.R.C. 1985 (4e suppl.), ch. 44, dans sa rédaction en vigueur le 1er décembre 2003

 

[…] 

           

2. (1) Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi.

 

 

«paiement » Argent ou autre objet de valeur. Y est assimilée toute entente ou promesse de paiement.

 

 

 

 

« titulaire d’une charge publique » Agent ou employé de Sa Majesté du chef du Canada. La présente définition s’applique notamment :

 

a) aux sénateurs et députés fédéraux ainsi qu’à leur personnel;

 

 

b) aux personnes nommées à des organismes par le gouverneur en conseil ou un ministre fédéral, ou avec son approbation, à l’exclusion des juges rémunérés sous le régime de la Loi sur les juges et des lieutenants-gouverneurs;

 

 

c) aux administrateurs, dirigeants et employés de tout office fédéral, au sens de la Loi sur les Cours fédérales;

 

 

d) aux membres des Forces armées canadiennes;

 

e) aux membres de la Gendarmerie royale du Canada.

 

[…]

 

4(2) La présente loi ne s’applique pas dans les cas suivants :

 

[…]

 

c) présentation à un titulaire d’une charge publique, en réponse directe à sa demande écrite, d’avis ou observations, oralement ou par écrit, au nom d’une personne ou d’une organisation en rapport avec une mesure visée aux sous-alinéas 5(1)a)(i) à (vi) ou aux alinéas 6(1)a) à e) ou 7(1)a) à e).

 

 

[…]

 

5. (1) Est tenue de fournir au directeur, dans les dix jours suivant l’engagement, une déclaration, en la forme réglementaire, contenant les renseignements prévus au paragraphe (2) toute personne (ci‑après « lobbyiste-conseil ») qui, moyennant paiement, s’engage, auprès d’un client, personne physique ou morale ou organisation :

 

a) à communiquer avec un titulaire de charge publique afin de tenter d’influencer :

 

(i) l’élaboration de propositions législatives par le gouvernement fédéral ou par un sénateur ou un député,

 

 

(ii) le dépôt d’un projet de loi ou d’une résolution devant une chambre du Parlement, ou sa modification, son adoption ou son rejet par celle-ci,

 

 

(iii) la prise ou la modification de tout règlement au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur les textes réglementaires,

 

(iv) l’élaboration ou la modification d’orientation ou programmes fédéraux,

 

 

(v) l’octroi de subventions, de contributions ou autres avantages financiers par Sa Majesté du chef du Canada ou en son nom,

 

(vi) l’octroi de tout contrat par Sa Majesté du chef du Canada ou en son nom;

 

 

b) à ménager pour un tiers une entrevue avec le titulaire d’une charge publique.

 

 

 

 

 

 

 

[…]

 

8. Le registraire général du Canada peut désigner tout membre du personnel de son bureau à titre de directeur de l’enregistrement pour l’application de la présente loi.

 

9. (1) Le directeur tient un registre contenant tous les documents — déclarations ou autres — qui lui sont fournis en application de la présente loi.

 

[…]

 

10.1 Le gouverneur en conseil peut désigner un conseiller en éthique pour l’application de la présente loi.

 

10.2 (1) Le conseiller élabore un code de déontologie des lobbyistes portant sur toutes les activités visées aux paragraphes 5(1), 6(1) et 7(1).

[…]

 

(4) Le code n’est pas un texte réglementaire pour l’application de la Loi sur les textes réglementaires. Il doit cependant être publié dans la Gazette du Canada.

 

 

10.3 (1) Sont tenues de se conformer au code la personne requise par les paragraphes 5(1) ou 6(1) de fournir une déclaration ainsi que l’employé visé à l’alinéa 7(3)f).

 

 

 

 

 

 

 

[…]

 

14. (1) Exception faite du paragraphe 10.3(1), quiconque contrevient à la présente loi ou à ses règlements commet une infraction et encourt, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, une amende maximale de vingt-cinq mille dollars.

 

(2) Quiconque donne sciemment, dans tout document — déclaration ou autre — transmis au directeur, sous forme électronique ou autre, en application de la présente loi, des renseignements faux ou trompeurs commet une infraction et encourt, sur déclaration de culpabilité :

 

a) par procédure sommaire, une amende maximale de vingt-cinq mille dollars et un emprisonnement maximal de six mois, ou l’une de ces peines;

 

b) par mise en accusation, une amende maximale de cent mille dollars et un emprisonnement maximal de deux ans, ou l’une de ces peines.

 

 

(3) Les poursuites par voie de procédure sommaire engagées aux termes du présent article se prescrivent par deux ans à compter de la date de la prétendue perpétration.

 

 

 

[…]

 

[…]

 

2. (1) In this Act,

 

[…]

 

 

"payment" means money or anything of value and includes a contract, promise or agreement to pay money or anything of value;

 

[…]

 

"public office holder" means any officer or employee of Her Majesty in right of Canada and includes

 

 

(a) a member of the Senate or the House of Commons and any person on the staff of such a member,

 

(b) a person who is appointed to any office or body by or with the approval of the Governor in Council or a minister of the Crown, other than a judge receiving a salary under the Judges Act or the lieutenant governor of a province,

 

(c) an officer, director or employee of any federal board, commission or other tribunal as defined in the Federal Courts Act,

 

(d) a member of the Canadian Armed Forces, and

 

(e) a member of the Royal Canadian Mounted Police;

 

[…]

 

 

4(2) This Act does not apply in respect of

 

 

[…]

 

(c) any oral or written submission made to a public office holder by an individual on behalf of any person or organization in direct response to a written request from a public office holder, for advice or comment in respect of any matter referred to in any of subparagraphs 5(1)(a)(i) to (vi) or paragraphs 6(1)(a) to (e) or 7(1)(a) to (e).

 

[…]

 

5. (1) Every individual who, for payment, on behalf of any person or organization (in this section referred to as the “client”), undertakes to

 

 

 

 

 

 

 

 

(a) communicate with a public office holder in an attempt to influence

 

(i) the development of any legislative proposal by the Government of Canada or by a member of the Senate or the House of Commons,

 

(ii) the introduction of any Bill or resolution in either House of Parliament or the passage, defeat or amendment of any Bill or resolution that is before either House of Parliament,

 

(iii) the making or amendment of any regulation as defined in paragraphe 2(1) of the Statutory Instruments Act,

 

(iv) the development or amendment of any policy or program of the Government of Canada,

 

(v) the awarding of any grant, contribution or other financial benefit by or on behalf of Her Majesty in right of Canada, or

 

(vi) the awarding of any contract by or on behalf of Her Majesty in right of Canada, or

 

(b) arrange a meeting between a public office holder and any other person, shall, not later than ten days after entering into that undertaking, file with the registrar, in the prescribed form and manner, a return setting out the information referred to in paragraphe (2).

 

[…]

 

8. The Registrar General of Canada may designate any person employed in the office of the Registrar General of Canada as the registrar for the purposes of this Act.

 

9. (1) The registrar shall establish and maintain a registry in which shall be kept a record of all returns and other documents submitted to the registrar under this Act.

 

[…]

 

10.1 The Governor in Council may designate any person as the Ethics Counsellor for the purposes of this Act.

 

10.2 (1) The Ethics Counsellor shall develop a Lobbyists’ Code of Conduct respecting the activités described in paragraphes 5(1), 6(1) and 7(1).

[…]

 

(4) The Code is not a statutory instrument for the purposes of the Statutory Instruments Act, but the Code shall be published in the Canada Gazette.

 

10.3 (1) The following individuals shall comply with the Code :

 

(a) an individual who is required to file a return under subsection 5(1) or 6(1); and

 

(b) an individual who, in accordance with paragraph 7(3)(f), is named in a return filed under subsection 7(1).

 

[…]

 

 

14. (1) Every individual who contravenes any provision of this Act, other than subsection 10.3(1), or the regulations is guilty of an offence and liable on summary conviction to a fine not exceeding twenty-five thousand dollars.

 

 

(2) Every individual who knowingly makes any false or misleading statement in any return or other document submitted to the registrar under this Act, whether in electronic or other form, is guilty of an offence and liable

 

 

 

 

(a) on summary conviction, to a fine not exceeding twenty-five thousand dollars or to imprisonment for a term not exceeding six months, or to both; and

 

(b) on proceedings by way of indictment, to a fine not exceeding one hundred thousand dollars or to imprisonment for a term not exceeding two years, or to both.

 

(3) Proceedings by way of summary conviction in respect of an offence under this section may be instituted at any time within but not later than two years after the time when the subject-matter of the proceedings arose.

 

[…]

 


Code de déontologie des lobbyistes

 

Message d’introduction

 

Le Code de déontologie des lobbyistes est le fruit de nombreuses consultations auprès d’un large éventail de personnes et de groupes intéressés à accroître la confiance du public dans l’intégrité du processus décisionnel de l’État. Il a été soumis à l’examen du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre à l’automne 1996 et a été publié dans la Gazette du Canada, le 8 février 1997. Le code est en vigueur depuis le 1er mars 1997.

 

L’objet du Code de déontologie des lobbyistes est de rassurer le public canadien au sujet des normes d’éthique élevées que doivent respecter les lobbyistes de façon à préserver et à faire croître la confiance du public dans l’intégrité, l’objectivité et l’impartialité de la prise de décisions du gouvernement. À cet égard, le Code de déontologie des lobbyistes vient compléter les exigences d’agrément de la Loi modifiant la Loi sur l’enregistrement des lobbyistes entrée en vigueur le 31 janvier 1996.

 

Les lobbyistes, c’est-à-dire toutes les personnes rémunérées pour communiquer avec des titulaires fédéraux d’une charge publique au sujet de certaines décisions gouvernementales, sont tenus de se conformer au code. On entend par « titulaire d’une charge publique », presque toutes les personnes qui occupent un poste au sein du gouvernement fédéral, y compris les sénateurs, les députés ainsi que leur personnel, les agents et les employés des ministères et des agences, les membres des Forces armées canadiennes et de la Gendarmerie royale du Canada.

 

Le code débute par un préambule qui en établit les objectifs en le plaçant dans un contexte plus général. Par la suite vient un ensemble de principes, ceux-ci étant suivis de règles particulières. Les principes présentent, de façon positive, les buts et objectifs à atteindre, sans toutefois définir de normes précises. Quant aux règles, elles précisent les exigences en matière de comportement à adopter dans certaines situations. Les pouvoirs d’enquête conférés au directeur des lobbyistes seront exercés par celui-ci lorsque seront portées à son attention des allégations voulant que ces principes ou ces règles aient été transgressés.

 

Le Bureau du directeur des lobbyistes est à la disposition des lobbyistes et leur offrira conseils et commentaires au sujet de l’application du Code de déontologie des lobbyistes. Les rapports annuels au Parlement serviront à communiquer, sur une plus grande échelle, les conseils et les mises au point du code.

 

Nous invitons non seulement les lobbyistes, mais aussi le public à faire parvenir leurs questions et commentaires au Bureau du directeur des lobbyistes, par téléphone, par la poste, par télécopieur ou par courrier électronique […]

 

Préambule

 

Le Code de déontologie des lobbyistes s’appuie sur quatre notions énoncées dans la Loi sur l’enregistrement des lobbyistes :

 

•   L’intérêt public présenté par la liberté d’accès aux institutions de l’État;

•   La légitimité du lobbyisme auprès des titulaires d’une charge publique;

•   L’opportunité d’accorder aux titulaires d’une charge publique et au public la possibilité de savoir qui cherche à exercer une influence auprès de ces institutions;

•   L’enregistrement des lobbyistes rémunérés ne doit pas faire obstacle à cette liberté d’accès.

 

Le Code de déontologie des lobbyistes est un moyen important d’accroître la confiance du public en l’intégrité du processus décisionnel de l’État. La confiance que les Canadiennes et les Canadiens accordent aux titulaires d’une charge publique afin qu’ils prennent des décisions favorables à l‘intérêt public est indispensable à toute société libre et démocratique.

 

À cette fin, les titulaires d’une charge publique sont tenus, dans les rapports qu’ils entretiennent avec le public et les lobbyistes, d’observer les normes qui les concernent dans leurs codes de déontologie respectifs. Quant aux lobbyistes qui communiquent avec des titulaires d’une charge publique, ils doivent aussi respecter les normes déontologiques ci-après.

 

Ces codes remplissent conjointement une fonction importante visant à protéger l’intérêt public, du point de vue de l’intégrité de la prise des décisions au sein du Gouvernement.

 

Principes

 

Intégrité et honnêteté

 

Les lobbyistes devraient faire preuve d’intégrité et d’honnêteté dans toutes leurs relations avec les titulaires d’une charge publique, les clients, les employeurs, le public et les autres lobbyistes.

 

Franchise

 

En tout temps, les lobbyistes devraient faire preuve de transparence et de franchise au sujet de leurs activités de lobbyisme, et ce, tout en respectant la confidentialité.

 

Professionnalisme

 

Les lobbyistes devraient observer les normes professionnelles et déontologiques les plus strictes. Plus particulièrement, ils sont tenus de se conformer sans réserve tant à la lettre qu’à l’esprit du Code de déontologie des lobbyistes, de même qu’à toutes les lois pertinentes, dont la Loi sur l’enregistrement des lobbyistes et son règlement d’application.

 

Règles

 

Transparence

 

1. Identité et objet

 

Lorsqu’ils font des démarches auprès d’un titulaire d’une charge publique, les lobbyistes doivent révéler l’identité de la personne ou de l’organisation pour laquelle ils font ces démarches ainsi que l’objet de ces dernières.

 

2. Renseignements exacts

 

Les lobbyistes doivent fournir des renseignements qui sont exacts et concrets aux titulaires d’une charge publique. En outre, ils ne doivent pas induire sciemment en erreur qui que ce soit, et ils doivent veiller à ne pas le faire par inadvertance.

 

3. Divulgation des obligations

 

Les lobbyistes doivent informer leur client, employeur ou organisation des obligations auxquelles ils sont soumis en vertu de la Loi sur l’enregistrement des lobbyistes, et du fait qu’il leur faut se conformer au Code de déontologie des lobbyistes.

 

Confidentialité

 

4. Renseignements confidentiels

 

Les lobbyistes ne doivent pas divulguer de renseignements confidentiels, à moins d’avoir obtenu le consentement éclairé de leur client, de leur employeur ou de leur organisation, ou que la loi ne l’exige.

 

5. Renseignements d’initiés

 

Les lobbyistes ne doivent pas se servir des renseignements confidentiels ou d’initiés obtenus dans le cadre de leurs activités de lobbyisme au désavantage de leur client, de leur employeur ou de leur organisation.

 

Conflits d’intérêts

 

6. Intérêts concurrentiels

 

Les lobbyistes ne doivent pas représenter des intérêts conflictuels ou concurrentiels sans le consentement éclairé des personnes dont les intérêts sont en cause.

 

7. Divulgation

 

Les lobbyistes-conseils doivent informer les titulaires d’une charge publique qu’ils ont avisé leurs clients de tout conflit d’intérêts réel, possible ou apparent et ont obtenu le consentement éclairé de chaque client concerné avant d’entreprendre ou de poursuivre l’activité en cause.

 

8. Influence répréhensible

 

Les lobbyistes doivent éviter de placer les titulaires d’une charge publique en situation de conflit d’intérêts en proposant ou en prenant toute action qui constituerait une influence répréhensible sur ces titulaires.


Annexe II

Loi sur l’enregistrement des lobbyistes, L.R.C. 1985 (4e suppl.), ch. 44, dans sa rédaction en vigueur en octobre 2005

 

10.4 (1) Le directeur fait enquête lorsqu’il a des motifs raisonnables de croire qu’une personne a commis une infraction au code.

 

 

[…] 

           

(5) Le directeur doit, avant de statuer qu’elle a commis une infraction au code, donner à la personne la possibilité de présenter son point de vue.

 

 

[…]

 

(7) Si, dans l’exercice des pouvoirs et des fonctions que lui confère le présent article, le directeur a des motifs raisonnables de croire qu’une personne a commis une infraction à la présente loi ou à toute autre loi fédérale ou provinciale, il avise un agent de la paix compétent pour mener une enquête relativement à l’infraction.

 

(8) Le directeur suspend sans délai l’enquête menée en vertu du présent article à l’égard d’une infraction présumée au code si, selon le cas :

 

a) il a des motifs raisonnables de croire que la personne a commis une infraction à la présente loi ou à toute autre loi fédérale ou provinciale portant sur le même sujet;

 

 

 

b) l’on découvre que l’objet de l’enquête est le même que celui d’une enquête menée dans le but de décider si une infraction visée à l’alinéa a) a été commise, ou qu’une accusation a été portée à l’égard du même objet.

 

 

 

(9) Le directeur ne peut poursuivre l’enquête avant qu’une décision finale n’ait été prise relativement à toute enquête ou à toute accusation portant sur le même objet.

 

 

10.5 (1) Le directeur présente au registraire général du Canada un rapport d’enquête dans lequel il motive ses conclusions; ce dernier fait déposer le rapport devant les deux chambres du Parlement dans les quinze premiers jours de séance de chacune de celles-ci suivant sa réception.

 

 

 

 

 

(2) Le rapport peut faire état, si le directeur estime que l’intérêt public le justifie, des renseignements concernant tout paiement reçu ou toute dépense engagée par la personne tenue de fournir une déclaration en application du paragraphe 5(1) ou qui, aux termes des alinéas 7(3)f) ou f.1), est nommée dans une déclaration fournie en application du paragraphe 7(1), et se rapportant, le cas échéant, à l’une des mesures visées aux sous-alinéas 5(1)a)(i) à (vi) ou 7(1)a)(i) à (v).

 

10.4 (1) Where the registrar believes on reasonable grounds that a person has breached the Code, the registrar shall investigate to determine whether a breach has occurred.

 

[…]

 

(5) Before finding that a person has breached the Code, the registrar shall give the person a reasonable opportunity to present their views to the registrar.

 

[…]

 

(7) If, during the course of performing duties and functions under this section, the registrar believes on reasonable grounds that a person has committed an offence under this or any other Act of Parliament or of the legislature of a province, the registrar shall advise a peace officer having jurisdiction to investigate the alleged offence.

 

(8) The registrar must immediately suspend une enquête under this section of an alleged breach of the Code by any person if

 

(a) the registrar believes on reasonable grounds that the person has committed an offence under this or any other Act of Parliament or of the legislature of a province in respect of the same subject-matter; or

 

(b) it is discovered that the subject-matter of the investigation under this section is also the subject-matter of an investigation to determine whether an offence referred to in paragraph (a) has been committed or that a charge has been laid with respect to that subject-matter.

 

(9) The registrar may not continue une investigation under this section until any investigation or charge

regarding the same subject-matter has been finally disposed of.

 

10.5 (1) After conducting an investigation, the registrar shall prepare a report of the investigation, including the findings, conclusions and reasons for the registrar's conclusions, and submit it to the Registrar General of Canada who shall cause a copy of it to be laid before each House of Parliament on any of the first fifteen sitting days on which that House is sitting after it is received.

 

(2) The report may contain details of any payment received, disbursement made or expense incurred by an individual who is required to file a return under subsection 5(1) or by an employee who, in accordance with paragraph 7(3)(f) or (f.1), is named in a return filed under subsection 7(1), in respect of any matter referred to in any of subparagraphs 5(1)(a)(i) to (vi) or 7(1)(a)(i) to (v), as the case may be, if the registrar considers publication of the details to be in the public interest.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-662-07

 

INTITULÉ :                                       NEELAM MAKHIJA

c. PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

                       

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               le 11 janvier 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              le juge Martineau

 

DATE DES MOTIFS :                      le 11 février 2010

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Michael N. Bergman                                               POUR LE DEMANDEUR

 

Me Nathalie Benoit                                                       POUR LE DÉFENDEUR

 

                                                                                               

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Bergman & Associates                                                 POUR LE DEMANDEUR

Montréal (Québec)

 

John H. Sims, c.r.                                                         POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

 

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