Cour fédérale |
|
Federal Court |
Ottawa (Ontario), ce 22e jour de janvier 2010
En présence de l’honorable juge Pinard
ENTRE :
Jonathan Adrian VAZQUEZ CARDONA
Partie demanderesse
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT
[1] Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision rendue le 17 juin 2009 par le commissaire Me Michel Byczak de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) selon laquelle le demandeur n’est ni un « réfugié au sens de la Convention » ni une « personne à protéger » suivant les définitions données aux articles 96 et 97 respectivement de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. (2001), ch. 27.
[2] La Commission a statué au rejet de la demande en raison du manque de crédibilité du demandeur, de l’existence d’une protection étatique et de la possibilité pour le demandeur d’un refuge à l’intérieur même de son pays d’origine, le Mexique.
[3] L’omission par le demandeur d’indiquer dans son Formulaire de renseignements personnels (FRP) qu’il avait fait l’objet de menaces de mort a miné sa crédibilité. L’omission de mentionner dans son FRP qu’il avait effectué un suivi téléphonique concernant ses plaintes a en outre été souligné par la Commission. Le manque de preuve, telle une copie de la plainte déposée au poste de police par le demandeur, a davantage remis en question son récit. De plus, la Commission n’a pas jugé valable l’explication donnée par le demandeur selon laquelle il avait été impossible pour ses parents, toujours au Mexique, d’obtenir une copie de cette plainte. Enfin, le manque de preuve quant aux démarches entreprises par le demandeur afin d’obtenir la protection de l’État a convaincu le commissaire que son récit n’était pas crédible.
[4] Le demandeur s’en prend fondamentalement à l’appréciation des faits faite par la Commission, appréciation révisable selon la norme de contrôle de la décision raisonnable (voir Khokhar c. Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2008 CF 449, au paragraphe 22; Navarro et al. c. Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2008 CF 358, aux paragraphes 11 à 14 et Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 47).
[5] Après révision de la preuve et audition des procureurs des parties, la conclusion tirée par la Commission concernant le manque de crédibilité du demandeur m’apparaît tout à fait raisonnable, compte tenu notamment de l’expertise et de la spécialisation dont elle jouit, lesquelles lui offrent un statut privilégié afin d’apprécier la crédibilité des témoins et de la preuve présentée (Aguebor c. Canada (M.E.I.) (1993), 160 N.R. 315 (C.A.F.)).
[6] Le demandeur ayant fait défaut de démontrer que la Commission a rendu une décision fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont elle disposait, l’intervention de la Cour n’est donc pas justifiée (voir l’alinéa 18.1(4)d) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7).
[7] Quant à la protection de l’État, il incombait au demandeur de réfuter la présomption selon laquelle l’État dont il est ressortissant est en mesure de lui offrir une protection suffisante. Il n’a pas réussi à le faire. La jurisprudence récente de cette Cour, notamment la décision José Luis Cuna Ballesteros et al. c. Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2009 CF 352, décrit avec justesse l’étendue des démarches devant être faites par le demandeur à cet égard. En l’espèce, le fait que la persécution dont se plaint le demandeur aurait été effectuée par des agents de l’État ne suffit pas à le décharger de son fardeau (Navarro, ci-dessus). En outre, la conclusion de la Commission selon laquelle le récit du demandeur ne suffisait pas à justifier que la protection de l’État ne lui était pas disponible est conforme à la jurisprudence (Carillo c. Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2008 CAF 94, au paragraphe 32; Zhuravlvev c. Canada (Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2000] 4 C.F. 3, au paragraphe 31; Soberanis c. Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2007 CF 985, au paragraphe 11). Enfin, la crainte du demandeur ne saurait suffire à renverser le fardeau qui lui incombait de réfuter la présomption de l’existence d’une protection offerte par les autorités mexicaines (Santiago c. Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2008 CF 247; Judge c. Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2004 CF 1089).
[8] Enfin, le demandeur n’a rien offert de probant pour contrer la conclusion de la Commission relative à l’existence pour lui d’une possibilité de refuge à l’intérieur de son propre pays. Doit donc prévaloir la conclusion de la Commission, basée sur la preuve, que les présumés persécuteurs du demandeur n’étaient pas intéressés à le retrouver aux endroits proposés et qu’il ne serait donc pas déraisonnable pour lui de se réfugier à ces endroits.
[9] Pour toutes ces raisons, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.
JUGEMENT
La demande de contrôle judiciaire de la décision rendue par la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié le 17 juin 2009 est rejetée.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-3473-09
INTITULÉ : Jonathan Adrian VAZQUEZ CARDONA c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
LIEU DE L’AUDIENCE : Montréal (Québec)
DATE DE L’AUDIENCE : Le 12 janvier 2010
ET JUGEMENT : Le juge Pinard
DATE DES MOTIFS : Le 22 janvier 2010
COMPARUTIONS :
Me Claude Brodeur POUR LA PARTIE DEMANDERESSE
Me Suzanne Trudel POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Claude Brodeur POUR LA PARTIE DEMANDERESSE
Montréal (Québec)
John H. Sims, c.r. POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE
Sous-procureur général du Canada