Cour fédérale |
|
Federal Court |
[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]
Toronto (Ontario), le 17 septembre 2009
En présence de monsieur le juge Kelen
ENTRE :
et
REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE
MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT
[1] Il s’agit d’un appel fondé sur l’article 56 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13, sous sa version modifiée (la Loi), à l’égard d’une décision datée du 21 février 2008 par laquelle le registraire des marques de commerce a radié l’enregistrement numéro TMA 436,567 de l’appelante à l’égard de la marque de commerce ENTRE NOUS, laquelle marque avait été enregistrée en vue d’être employée en liaison avec des « services de télécommunication, nommément services téléphoniques interurbains ». Le registraire n’avait été saisi d’aucun élément de preuve établissant l’existence d’un contrat de licence entre le propriétaire de la marque de commerce et l’utilisateur de celle-ci.
[2] La seule question en litige est de savoir si, compte tenu des nouveaux éléments de preuve présentés en l’espèce établissant l’existence d’un contrat de licence autorisant l’emploi de la marque de commerce ENTRE NOUS par une personne autre que le propriétaire de la marque, il y a lieu d’annuler la décision du registraire de radier la marque de commerce.
[3] Les intimés n’ont pas contesté le présent appel et n’ont pas comparu devant la Cour dans la présente affaire.
Aperçu
[4] Le présent litige, qui semble assez complexe, est plutôt simple. La marque de commerce est employée par Primus, filiale de l’appelante, qui a omis par erreur de fournir des explications au registraire ou de lui présenter la preuve dont la Cour est saisie en l’espèce, de sorte que celui‑ci a radié la marque de commerce pour cause de défaut d’emploi. En cas d’appel devant la Cour fédérale, le propriétaire de la marque de commerce peut présenter de nouveaux éléments de preuve établissant l’emploi de la marque de commerce par un licencié, ce qu’il a fait. En conséquence, l’appel sera accueilli, sans contestation, et l’enregistrement de la marque de commerce sera rétabli.
FAITS
Contexte
[5] Le 25 novembre 1994, les prédécesseurs en titre de la requérante ont fait enregistrer la marque de commerce ENTRE NOUS sous le numéro TMA 436,267.
[6] La requérante, 3082833 Nova Scotia Company (3082833), est une société constituée sous le régime des lois de la province de la Nouvelle-Écosse et la dernière propriétaire dans la chaîne de titres se rapportant à la marque de commerce ENTRE NOUS. (3082833 a été créée par suite de la continuation de 3362426 Canada Inc., qui poursuivait ses activités sous le nom de Primus Telecommunications Canada Inc. (PTC), pour devenir 3082854 Nova Scotia Limited, qui a subséquemment fusionné avec 3074313 Nova Scotia Limited pour former 3082833 le 31 janvier 2004.)
[7] Contrairement à 3362426 Canada Inc., qui poursuivait ses activités sous le nom de PTC, 3082833 est actuellement le seul actionnaire de PTC, dont l’entreprise consiste à fournir des services de télécommunication, y compris des services interurbains au Canada.
[8] Le 3 février 2005, Lang Michener LLP a demandé au registraire de donner à la requérante l’avis prévu à l’article 45 de la Loi à l’égard de la marque de commerce ENTRE NOUS. Le 15 février 2005, le registraire a donné l’avis en question.
[9] Le 21 février 2006, Lang Michener LLP a présenté au registraire des observations écrites dans lesquelles elle a soutenu que la marque de commerce ENTRE NOUS devrait être radiée pour les motifs suivants :
[traduction]
1. L’emploi de la marque de commerce qui est révélé par la preuve ne constitue pas un emploi par le propriétaire et n’est pas réputé avoir le même effet que cet emploi par le propriétaire.
2. La marque de commerce enregistrée n’a pas été employée en liaison avec les services visés par l’enregistrement au cours de la période pertinente au sens donné au mot « emploi » à l’article 2 et au paragraphe 4(2) de la Loi.
3. La marque de commerce enregistrée n’a pas été employée à titre de marque de commerce au cours de la période pertinente au sens donné à l’expression « marque de commerce » à l’article 2 de la Loi.
4. Les factures « établies » sur lesquelles la marque de commerce enregistrée serait affichée ne sont que des factures symboliques et n’ont pas été établies dans la pratique ordinaire du commerce.
5. Il n’y a aucun élément de preuve justifiant le défaut d’emploi de la marque de commerce enregistrée par le propriétaire au cours de la période pertinente (page 3 des observations écrites de Lang Michener LLP).
[10] La requérante a soumis au registraire un affidavit daté du 15 septembre 2005 de Rob Warden, vice-président de PTC (premier affidavit de M. Warden). Dans cet affidavit, M. Warden a déclaré que PTC, qu’il a plus tard appelée « Primus », était une filiale en propriété exclusive de 3082833. Il a ensuite affirmé que Primus était le propriétaire de la marque de commerce ENTRE NOUS et qu’elle-même ainsi que ses prédécesseurs en titre avaient employé la marque de commerce à partir du 5 octobre 1994.
[11] Le premier affidavit de M. Warden comportait en pièce jointe une copie du certificat d’enregistrement sur lequel figurait le nom de la requérante, 3082833, à titre de propriétaire de la marque de commerce enregistrée ENTRE NOUS, ainsi que les renseignements remontant la chaîne de titres jusqu’à 3082833.
[12] Le premier affidavit de M. Warden comportait également en pièces jointes des copies expurgées de factures que Primus Canada avait envoyées à ses clients. Les factures visent à montrer le solde précédent, l’état du compte jusqu’à la date de facturation, le solde à remettre, des messages promotionnels, les appels faits et la consommation d’appels interurbains. La ligne suivante figure sur la dernière page de chaque facture : « [S]ommaire du groupe Entre Nous au [...] Ce mois-ci, vos économies Entre-Nous s’élèvent à [...] $ ». Ces factures visent à démontrer que PTC a employé la marque de commerce ENTRE NOUS au cours des trois dernières années entre le 15 février 2002 et le 15 février 2005.
[13] Le 28 août 2006, la requérante a sollicité une prorogation de délai rétroactive et l’autorisation de produire un affidavit modifié de Rob Warden daté du 28 août 2006. Dans les observations qu’elle a soumises au registraire, la requérante a affirmé que le premier affidavit de M. Warden contenait au paragraphe 1 une erreur d’écriture commise par inadvertance. Selon la requérante, dans le premier affidavit de M. Warden, Primus, définie comme étant PTC, a été nommée par erreur à titre de propriétaire de la marque de commerce ENTRE NOUS, plutôt que la société 3082833.
[14] La requérante n’a pas produit l’affidavit du 28 août 2006.
La décision faisant l’objet de l’appel
[15] Le registraire a décidé que la marque de commerce ENTRE NOUS avait été suffisamment employée et était reconnaissable à titre de marque de commerce, indépendamment de la construction grammaticale des mots, et que l’emploi particulier de ladite marque de commerce sur les factures n’était pas simplement symbolique.
[16] Cependant, le registraire a convenu avec la partie requérante que la marque de commerce ENTRE NOUS n’avait pas été employée par le propriétaire 3082833. Il a décidé qu’aucun élément de preuve ne montrait que 336242526 Canada Inc., poursuivant ses activités sous le nom de PTC, ou 3082833 avait employé la marque de commerce ENTRE NOUS. Le registraire a cité la déclaration figurant dans le premier affidavit de M. Warden, selon laquelle PTC et des prédécesseurs non nommés avaient employé la marque de commerce ENTRE NOUS. Il a également décidé que les factures qui, selon le déposant, avaient été établies par PTC, renvoyaient uniquement à Primus Canada, donnant ainsi à entendre qu’il rejetait lesdites factures comme preuve de l’emploi de la marque de commerce par PTC, parce qu’aucune explication n’avait été fournie au sujet du lien entre Primus Canada et PTC.
[17] Le registraire a décidé que la requérante ne pouvait invoquer la protection de l’article 50 de la Loi, parce qu’aucun élément de preuve ne montrait que PTC avait été autorisée par 3082833 à employer la marque de commerce ENTRE NOUS ou que, aux termes d’une licence, 3082833 contrôlait directement ou indirectement les caractéristiques ou la qualité des services. Le registraire a également décidé qu’aucun avis public d’une licence n’avait été donné de façon à justifier la protection prévue au paragraphe 50(2) de la Loi.
[18] Étant donné qu’il n’avait aucun élément de preuve justifiant le défaut d’emploi de la marque de commerce par le propriétaire, le registraire a radié l’enregistrement de celle-ci conformément au paragraphe 45(5) de la Loi.
Éléments de preuve supplémentaires produits
[19] La requérante dans le présent appel a produit un nouvel affidavit daté du 28 mai 2008 de Rob Warden (deuxième affidavit de M. Warden) en même temps que l’avis de demande.
[20] Au paragraphe 7 de ce deuxième affidavit, le déposant déclare que PTC a été autorisée, au moyen d’une entente conclue avec 3082833, à employer les marques de commerce appartenant à 3082833, y compris la marque de commerce ENTRE NOUS. Le déposant ajoute ce qui suit : [traduction] « [C]ette licence autorise Primus à commercialiser et à fournir des services de télécommunication, nommément des services téléphoniques interurbains, en liaison avec les marques de commerce de 3082833 Nova Scotia Company. De plus, aux termes de la licence, l’inscrivante contrôle, directement ou indirectement, les caractéristiques et la qualité des services exécutés et annoncés en liaison avec la marque ENTRE NOUS sous licence, de sorte que tout emploi de la marque ENTRE NOUS par Primus doit profiter à l’inscrivante. »
[21] Le deuxième affidavit de M. Warden comporte une description détaillée de l’emploi de la marque de commerce ENTRE NOUS par PTC. Afin de prouver l’emploi allégué, la requérante a joint au deuxième affidavit de M. Warden des documents identiques ou similaires à ceux qui avaient été joints au premier affidavit de M. Warden.
DISPOSITIONS LÉGISLATIVES PERTINENTES
[22] La procédure introduite devant le registraire est fondée sur l’article 45 de la Loi, qui exige que le propriétaire d’une marque de commerce prouve l’emploi de celle-ci à un moment quelconque au cours des trois années précédentes :
45. (1) Le registraire peut, et doit sur demande écrite présentée après trois années à compter de la date de l’enregistrement d’une marque de commerce, par une personne qui verse les droits prescrits, à moins qu’il ne voie une raison valable à l’effet contraire, donner au propriétaire inscrit un avis lui enjoignant de fournir, dans les trois mois, un affidavit ou une déclaration solennelle indiquant, à l’égard de chacune des marchandises ou de chacun des services que spécifie l’enregistrement, si la marque de commerce a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de l’avis et, dans la négative, la date où elle a été ainsi employée en dernier lieu et la
raison de son défaut d’emploi depuis cette date.
(2) Le registraire ne peut recevoir aucune preuve autre que cet affidavit ou cette déclaration solennelle, mais il peut entendre des représentations faites par le propriétaire inscrit de la marque de commerce ou pour celui-ci ou par la personne à la demande de qui l’avis a été donné ou pour celle-ci.
(3) Lorsqu’il apparaît au registraire, en raison de la preuve qui lui est fournie ou du défaut de fournir une telle preuve, que la marque de commerce, soit à l’égard de la totalité des marchandises ou services spécifiés dans l’enregistrement, soit à l’égard de l’une de ces marchandises ou de l’un de ces services, n’a été employée au Canada à aucun moment au cours des trois ans précédant la date de l’avis et que le défaut d’emploi n’a pas été attribuable à des circonstances spéciales qui le justifient, l’enregistrement de cette marque de commerce est susceptible de radiation ou de modification en conséquence. […] [Non souligné dans l’original.]
|
45. (1) The Registrar may at any time and, at the written request made after three years from the date of the registration of a trade-mark by any person who pays the prescribed fee shall, unless the Registrar sees good reason to the contrary, give notice to the registered owner of the trade-mark requiring the registered owner to furnish within three months an affidavit or a statutory declaration showing, with respect to each of the wares or services specified in the registration, whether the trade-mark was in use in Canada at any time during the three year period immediately preceding the date of the notice and, if not, the date when it was last so in use and the reason for the absence of such use since that date.
(2) The Registrar shall not receive any evidence other than the affidavit or statutory declaration, but may hear representations made by or on behalf of the registered owner of the trade-mark or by or on behalf of the person at whose request the notice was given.
(3) Where, by reason of the evidence furnished to the Registrar or the failure to furnish any evidence, it appears to the Registrar that a trade-mark, either with respect to all of the wares or services specified in the registration or with respect to any of those wares or services, was not used in Canada at any time during the three year period immediately preceding the date of the notice and that the absence of use has not been due to special circumstances that excuse the absence of use, the registration of the trade-mark is liable to be expunged or amended accordingly. …
[Emphasis added]
|
[23] La Loi exige que le propriétaire d’une marque de commerce prouve l’emploi de celle-ci. L’article 50 de la Loi permet au propriétaire de faire cette preuve lorsque la marque de commerce a été employée par une partie qui a obtenu une licence ou autre autorisation du propriétaire à cette fin, dans les cas où le propriétaire contrôle directement ou indirectement, aux termes d’une licence, les caractéristiques ou la qualité des marchandises et services ou dans les cas où un avis public de cette licence a été donné :
50. (1) Pour l’application de la présente loi, si une licence d’emploi d’une marque de commerce est octroyée, pour un pays, à une entité par le propriétaire de la marque, ou avec son autorisation, et que celui-ci, aux termes de la licence, contrôle, directement ou indirectement, les caractéristiques ou la qualité des marchandises et services, l’emploi, la publicité ou l’exposition de la marque, dans ce pays, par cette entité comme marque de commerce, nom commercial — ou partie de ceux-ci — ou autrement ont le même effet et sont réputés avoir toujours eu le même effet que s’il s’agissait de ceux du propriétaire.
(2) Pour l’application de la présente loi, dans la mesure où un avis public a été donné quant à l’identité du propriétaire et au fait que l’emploi d’une marque de commerce fait l’objet d’une licence, cet emploi est réputé, sauf preuve contraire, avoir fait l’objet d’une licence du propriétaire, et le contrôle des caractéristiques ou de la qualité des marchandises et services est réputé, sauf preuve contraire, être celui du propriétaire. […] |
50. (1) For the purposes of this Act, if an entity is licensed by or with the authority of the owner of a trade-mark to use the trade-mark in a country and the owner has, under the licence, direct or indirect control of the character or quality of the wares or services, then the use, advertisement or display of the trade-mark in that country as or in a trade-mark, trade-name or otherwise by that entity has, and is deemed always to have had, the same effect as such a use, advertisement or display of the trade-mark in that country by the owner.
(2) For the purposes of this Act, to the extent that public notice is given of the fact that the use of a trade-mark is a licensed use and of the identity of the owner, it shall be presumed, unless the contrary is proven, that the use is licensed by the owner of the trade-mark and the character or quality of the wares or
services is under the control of the owner. … |
[24] L’article 56 de la Loi permet d’interjeter appel d’une décision du registraire et autorise la partie appelante à produire des éléments de preuve supplémentaires :
56. (1) Appel de toute décision rendue par le registraire, sous le régime de la présente loi, peut être interjeté à la Cour fédérale dans les deux mois qui suivent la date où le registraire a expédié l’avis de la décision ou dans tel délai supplémentaire accordé par le tribunal, soit avant, soit après l’expiration des deux mois. […] (5) Lors de l’appel, il peut être apporté une preuve en plus de celle qui a été fournie devant le registraire, et le tribunal peut exercer toute discrétion dont le registraire est investi. |
56. (1) An appeal lies to the Federal Court from any decision of the Registrar under this Act within two months from the date on which notice of the decision was dispatched by the Registrar or within such further time as the Court may allow, either before or after the expiration of the two months. …
(5) On an appeal under subsection (1), evidence in addition to that adduced before the Registrar may be adduced and the Federal Court may exercise any discretion vested in the Registrar. |
QUESTION EN LITIGE
[25] La radiation de la marque de commerce ENTRE NOUS par le registraire devrait-elle être annulée?
ANALYSE
La norme de contrôle
[26] La norme de contrôle applicable à la décision du registraire est la norme de la décision raisonnable simpliciter (Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc., [2006] 1 R.C.S. 772, au paragraphe 39). Lorsque de nouveaux éléments de preuve sont présentés aux termes de l’article 56 de la Loi, la norme de contrôle est modifiée et l’affaire peut être instruite comme s’il s’agissait d’une nouvelle audition fondée sur ce dossier élargi plutôt que comme un simple appel (arrêt Mattel, précité, au paragraphe 35).
[27] Cependant, par suite du jugement que la Cour suprême du Canada a rendu dans Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] A.C.S. no 9 (QL), il est bien certain que la norme de la décision raisonnable simpliciter a été éliminée et que les cours appelées à contrôler des décisions doivent limiter leur analyse à deux normes de contrôle, soit celles de la décision raisonnable et de la décision correcte.
[28] Dans certaines décisions récentes, il a été conclu que la norme de contrôle applicable aux décisions du registraire est la décision correcte lorsque sont présentés de nouveaux éléments de preuve qui auraient eu une incidence sur la décision de celui-ci (Scotch Whisky Assn. c. Glenora Distillers International Ltd., 2009 CAF 16, 385 N.R. 159, au paragraphe 15).
[29] Étant donné que la requérante a produit de nouveaux éléments de preuve dont le registraire ne disposait pas lorsqu’il a rendu sa décision, je suis d’avis que la norme de contrôle est la décision correcte.
QUESTION EN LITIGE : La radiation de la marque de commerce ENTRE NOUS par le registraire devrait-elle être annulée?
[30] La requérante soutient que, compte tenu des nouveaux éléments de preuve figurant dans le deuxième affidavit de M. Warden, il est possible de prouver que 3082833 a autorisé sa filiale, PTC, à employer la marque de commerce ENTRE NOUS, de sorte que, conformément à l’article 50, l’emploi de la marque de commerce par PTC devrait profiter à 3082833.
[31] La preuve présentée à ce sujet se compose de la déclaration sous serment de Rob Warden qui figure dans le deuxième affidavit de celui-ci, où le déposant souligne au paragraphe 7 qu’un contrat de licence existe entre 3082833 et PTC en ce qui concerne l’emploi par celle-ci de la marque de commerce ENTRE NOUS. Selon le deuxième affidavit de M. Warden, 3082833 contrôle, directement ou indirectement, l’emploi de la marque de commerce ENTRE NOUS par PTC.
[32] Il n’est pas nécessaire de produire un contrat de licence formel pour prouver l’existence d’un contrat de licence aux termes de l’article 50 de la Loi (Wells' Dairy, Inc. c. U L Canada Inc. (2000), 7 C.P.R. (4th) 77, 98 A.C.W.S. (3d) 189 (C.F. 1re inst.), au paragraphe 38; TGI Friday's of Minnesota, Inc. c. Canada (Registraire des marques de commerce) (1999), 241 N.R. 362, 88 A.C.W.S. (3d) 201 (C.A.F.), au paragraphe 9). L’existence d’un contrat de licence peut s’inférer des faits. Il n’est pas nécessaire que la licence soit octroyée par écrit (Cushman & Wakefield, Inc. c. Wakefield Realty Corp., 2004 CF 210, 247 F.T.R. 180, au paragraphe 56). Toutefois, le fait qu’il existe une forme de contrôle entre les sociétés de la requérante ne permet pas en soi d’établir que l’emploi de la marque de commerce était contrôlé et d’en déduire qu’un contrat de licence existait (Cheung Kong (Holdings) Ltd. c. Living Realty Inc., [2000] 2 C.F. 501, 179 F.T.R. 161, aux paragraphes 44 et 45). Le contrôle doit être démontré.
[33] Dans le présent appel, la Cour est saisie de la preuve non contredite de Rob Warden, qui jure qu’une licence existe et que 3082833 contrôle l’emploi de la marque de commerce ENTRE NOUS par PTC.
[34] Je suis disposé à conclure que la preuve relative à la chaîne de titres confirme que 3082833 continue à contrôler l’emploi de la marque de commerce ENTRE NOUS par PTC et qu’un contrat de licence existe entre celle-ci et 3082833 au sujet de l’emploi de ladite marque de commerce par PTC. Pour en arriver à cette conclusion, je me fonde sur le fait que le prédécesseur en titre de 3082833, soit 3362426 Canada Inc., poursuivait ses activités sous le nom de PTC. Il n’y a aucune raison de conclure qu’après la restructuration de son entreprise, 3082833, qui est le seul actionnaire de PTC, cesserait de contrôler l’exploitation quotidienne de PTC, y compris l’emploi des marques de commerce.
[35] Je suis également disposé à déduire de la preuve que PTC poursuit ses activités sous le nom de Primus Canada, comme le montrent les factures jointes aux affidavits de la requérante.
[36] À mon avis, compte tenu des nouveaux éléments de preuve produits par la requérante, il est permis de dire que l’emploi de la marque de commerce ENTRE NOUS par PTC est contrôlé conformément à un contrat de licence qui a été conclu entre 3082833 et PTC à l’égard de l’emploi de la marque de commerce en question.
[37] Étant donné que j’en suis arrivé à la conclusion que 3082833 contrôle l’emploi de la marque de commerce ENTRE NOUS par PTC aux termes d’un contrat de licence, je suis d’avis que l’emploi de la marque de commerce ENTRE NOUS par PTC, que le registraire a confirmé, a le même effet que s’il s’agissait de l’emploi de ladite marque par 3082833.
[38] En conséquence, j’accueillerai l’appel et j’ordonnerai l’annulation de la décision par laquelle le registraire a radié l’enregistrement de la marque de commerce ENTRE NOUS.
JUGEMENT
1. L’appel est accueilli sans frais.
2. La décision datée du 21 février 2008 par laquelle le registraire des marques de commerce a radié l’enregistrement de la marque de commerce ENTRE NOUS est annulée.
3. Il est ordonné au registraire des marques de commerce de rétablir l’enregistrement de la marque de commerce ENTRE NOUS de l’appelante.
« Michael A. Kelen »
Traduction certifiée conforme
Julie Boulanger, LL.M.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : T-663-08
INTITULÉ : 3082833 NOVA SCOTIA COMPANY c. LANG MICHENER LLP et REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE
LIEU DE L’AUDIENCE : Toronto (Ontario)
DATE DE L’AUDIENCE : Le 15 septembre 2009
MOTIFS DU JUGEMENT
ET JUGEMENT : Le juge Kelen
DATE DES MOTIFS
ET DU JUGEMENT : Le 17 septembre 2009
COMPARUTIONS :
Daniel Cappe |
POUR L’APPELANTE
|
Aucune comparution |
POUR LES INTIMÉS
|
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Goodmans LLP Avocats 250, rue Yonge, bureau 2400 Toronto (Ontario) M5B 2M6
|
POUR L’APPELANTE |
Lang Michener LLP Avocats Brookfield Place, C.P. 747, bureau 2500 Toronto (Ontario) M5L 2T7 |
POUR LES INTIMÉS |