IMM-902-09
Ottawa (Ontario), le 27 mars 2009
En présence de monsieur le juge Phelan
ENTRE :
et
ET DE L’IMMIGRATION
MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE
[1] Le demandeur, lequel possède des antécédents en matière de trafic de stupéfiants et de fraude cherche à invoquer la compétence en equity de la Cour. Le demandeur a demandé un sursis à l’exécution de la mesure d’expulsion vers les États‑Unis ou la Colombie prise contre lui. La présente affaire porte sur le préjudice irréparable et la prépondérance des inconvénients.
[2] Le demandeur possède de nombreux antécédents judiciaires qui remontent jusqu’en 1985. Le tout s’est terminé par une déclaration de culpabilité pour trafic de cocaïne prononcée en 1992 aux États‑Unis. Après avoir purgé sa peine, le demandeur a été expulsé des États‑Unis.
[3] Le demandeur est retourné illégalement aux États‑Unis et il a éventuellement réussi à retourner au Canada. Il est entré au Canada sous une fausse identité, puis, toujours sous cette fausse identité, il a demandé l’asile. Sa demande d’asile été rejetée.
[4] Quelque temps après, la véritable identité du demandeur a été découverte et des mesures ont été entreprises afin de l’expulser.
[5] Malgré le statut illégal du demandeur et sachant que celui‑ci avait utilisé une fausse identité, l’épouse actuelle du demandeur a épousé ce dernier. Cette connaissance du passé du demandeur est pertinente parce que le préjudice allégué porte principalement sur le fait que l’épouse du demandeur a contracté un mariage avec celui‑ci sachant qu’il était porté à se livrer à des activités illégales.
[6] Malgré tout cela, le demandeur a déposé une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire (la demande CH) et une demande visant à faire blanchir son dossier (la demande d’approbation de réadaptation). Cette demande aurait permis de régler le cas de son casier judiciaire et aurait permis le dépôt d’une demande de parrainage.
[7] La première demande d’approbation de réadaptation a été retournée parce qu’il y manquait un certain nombre de détails. Il semble que la deuxième demande d’approbation de réadaptation a été égarée par CIC.
[8] Lorsque le demandeur a été appelé pour une entrevue, l’agent a été informé qu’une demande d’approbation de réadaptation était en cours de traitement et a appris que cette demande avait été égarée quelque part à CIC. L’agent a choisi de ne pas tenir compte de ces faits et a rejeté la demande CH.
[9] Le demandeur soulève la question de savoir si l’agent a agi de façon déraisonnable en rejetant la demande CH compte tenu de la demande d’approbation de réhabilitation déposée en temps opportun dont le règlement avait été compromis par les erreurs de CIC.
[10] Si on suppose qu’il s’agit d’une question sérieuse, et c’est ce que je suppose aux fins de la présente requête en sursis, la question consiste à savoir si un préjudice irréparable a été commis.
[11] Selon moi, aucun préjudice irréparable n’a été commis. J’adopte le raisonnement du juge Shore dans la décision Perry c. Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile Canada), 2006 CF 378, selon lequel, en règle générale, les difficultés économiques ou psychologiques importantes causées à la cellule familiale par l’expulsion ne suffit pas à établir l’existence d’un préjudice irréparable.
[12] L’épouse du demandeur, qui est en train de terminer sa maîtrise en santé du travail, affirme qu’elle dépend de son mari sur le plan affectif et financier. Il est très peu probable qu’elle doive avoir recours à l’aide sociale comme elle le prétend. Elle a épousé le demandeur alors qu’elle était au courant de son statut illégal, des condamnations criminelles prononcées contre lui et de ses agissements frauduleux. Il est donc mal aisé pour elle de s’opposer aux conséquences naturelles d’une expulsion aisément prévisible.
[13] La question du plaidoyer concernant l’« intérêt supérieur des enfants » est amplement réglée par le fait que les enfants de l’épouse du demandeur sont de jeunes adultes âgés de 18 et 20 ans.
[14] Il est difficile de croire que le demandeur subira un préjudice irréparable du fait qu’il devra présenter sa demande de l’extérieur du Canada comme le font quotidiennement la très grande majorité des immigrants.
[15] Enfin, selon la prépondérance des inconvénients, on ne sait trop si le principe de l’« attitude irréprochable » est une question distincte de celle de la prépondérance des inconvénients. En l’espèce, le débat n’est pas pertinent.
[16] La Cour, en l’espèce, apprécie (parmi d’autres facteurs comme les exigences prévues par la loi en matière d’expulsion) la conduite du ministère (qui constitue, dans le pire des cas, de l’incompétence) par rapport à celle du demandeur (trafic de stupéfiants/fraude et fausses déclarations). Il ne fait aucun doute que la prépondérance des inconvénients penche en faveur du défendeur et que même si la Cour dispose d’un large éventail de pouvoirs découlant de l’equity, le demandeur ne répond absolument pas aux critères d’application des mesures réparatrices concevables à ce titre. La Cour d’appel, dans l’arrêt Baron c. Canada (Ministre de la sécurité et de la protection civile), 2009 CAF 81, a traité de l’importance de l’application du principe de l’« attitude irréprochable ».
[17] Par conséquent, la présente requête en sursis est rejetée.
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE que la présente requête en sursis soit rejetée.
Traduction certifiée conforme
Claude Leclerc, LL.B.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIERS : IMM-505-09 et IMM-902-09
INTITULÉ : EDINSON CAICEDO SANCHEZ
c.
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
LIEU DE L’AUDIENCE : Toronto (Ontario)
DATE DE L’AUDIENCE : Le 23 mars 2009
ET ORDONNANCE : LE JUGE PHELAN
DATE DES MOTIFS
ET DE L’ORDONNANCE : Le 27 mars 2009
COMPARUTIONS :
Micheal Crane
|
|
Ladan Shahrooz
|
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Micheal Crane Avocat Toronto (Ontario)
|
|
John H. Sims, c.r. Sous‑procureur général du Canada Toronto (Ontario) |