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Date : 20090121

Dossier : IMM-3155-08

Référence : 2009 CF 53

Vancouver (Colombie‑Britannique), le 21 janvier 2009

En présence de madame la juge Layden-Stevenson

 

 

ENTRE :

OLEG KACHMAZOV

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Le demandeur a demandé un permis de travail temporaire. L’agent des visas de l’ambassade du Canada en Russie n’était pas convaincu que le demandeur quitterait le Canada à la fin de la période de séjour temporaire autorisée. Par conséquent, l’agent a rejeté la demande.

 

[2]               Le demandeur prétend que l’agent des visas a rejeté à tort sa demande au motif qu’il avait omis de soumettre un avis relatif au marché du travail (AMT). De plus, le demandeur prétend que l’agent des visas a commis une erreur dans son application du principe de la double intention.

 

[3]               Malgré l’éloquence des arguments présentés par l’avocat du demandeur et de la sensibilité  que j’éprouve pour la situation de ce dernier, je ne suis pas convaincue que l’agent des visas a commis une erreur, contrairement à ce que prétend le demandeur. Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire doit être rejetée.

 

I. Le contexte

[4]               Le demandeur est citoyen et résidant de la Russie. Sa femme vit et travaille au Canada depuis novembre 2005 dans le cadre du programme des aides familiaux résidants. Le 3 septembre 2008, elle a présenté une demande de résidence permanente au Canada et y a inscrit son mari.

 

[5]               Le 17 mars 2008, le demandeur a été sélectionné par la Colombie‑Britannique à titre de candidat de la province. Cette sélection permet au demandeur de présenter une demande de résidence permanente au Canada dans le cadre du Programme des candidats des provinces (PCP).

 

[6]               Le 22 avril 2008, le demandeur a présenté une demande de permis de travail temporaire, laquelle a été rejetée par l’agent des visas le 7 mai 2008. Dans les notes du STIDI, l’agent mentionne expressément qu’à deux occasions, des agents ont refusé d’accorder au demandeur un visa de visiteur au motif qu’ils n’étaient pas convaincus qu’il quitterait le Canada à l’expiration du visa. L’agent des visas affirme que la situation du demandeur n’a pas changé.

 

[7]               Le STIDI comprend une note portant que le demandeur n’a pas reçu d’AMT. De plus, l’agent souligne que la présence de sa femme au Canada constitue un motif sérieux pour lui de rester au Canada. Enfin, l’agent affirme qu’il a tenu compte du principe de la double intention, mais qu’il n’est pas convaincu que le demandeur quitterait le Canada à l’expiration du permis de travail temporaire.

 

II. La norme de contrôle

[8]               La norme de contrôle applicable à la question de savoir si l’agent des visas a commis une erreur dans son analyse de la demande de permis de travail temporaire est celle de la raisonnabilité : Dunsmuir c. New Brunswick, 2008 CSC 9; Li c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 1284. La Cour ne doit pas intervenir, à moins que la décision n’appartienne pas aux « issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » : Dunsmuir, au par. 47.

 

III. Les dispositions législatives

[9]               Les dispositions législatives pertinentes constituent l’annexe « A » des présents motifs.

 

IV. L’avis relatif au marché du travail

[10]           Le demandeur prétend que l’agent des visas a commis une erreur en exigeant un AMT. L’accord entre la Colombie‑Britannique et le gouvernement fédéral dispense le demandeur de l’obligation de présenter un AMT (Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, article 204) et FW 1 – Guide des travailleurs étrangers, article 5.27).

[11]           Je conviens avec le demandeur que le PCP de la Colombie‑Britannique n’oblige pas un candidat des provinces à présenter un AMT. Cependant, le candidat doit tout de même remplir les exigences relatives à l’obtention d’un permis de travail temporaire, soit notamment de prouver à l’agent des visas qu’il quittera le Canada à la fin de la période de séjour autorisée si son permis de travail expire avant qu’il n’obtienne le statut de résident permanent au Canada.

 

[12]           À mon avis, bien que l’agent des visas ait noté l’absence d’un AMT, le STIDI et la lettre de refus, considérés conjointement, indiquent que le refus découle du fait que le demandeur n’a pas convaincu l’agent des visas qu’il quitterait le Canada à la fin de la période de séjour temporaire autorisée. La lettre type de refus énonce différents motifs justifiant le refus, notamment l’absence d’un AMT. En l’espèce, le fait pour le demandeur de ne pas avoir convaincu l’agent, ainsi qu’il a été mentionné précédemment, constitue le motif du refus retenu. L’absence d’un AMT n’est pas un motif retenu.

 

[13]           De plus, l’observation de l’agent des visas selon laquelle la situation du demandeur n’a pas changé m’amène à examiner sa situation telle qu’elle était au moment des refus précédents. Ces renseignements indiquent qu’il travaillait à son compte, qu’il n’était pas très attaché à la Russie et qu’il désirait vivement rester au Canada. Même si la décision de l’agent des visas avait été différente, je ne saurais conclure qu’elle n’appartient pas aux « issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ».

 

 

V. La double intention

[14]           Le demandeur prétend que l’agent des visas a commis une erreur dans son application du principe de la double intention. La double intention serait consacrée dans la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (LIPR) et permettrait au demandeur de présenter une demande l’autorisant à séjourner temporairement en même temps qu’une demande de résidence permanente. En l’espèce, le demandeur pouvait demander le statut de résident permanent sur le fondement de son statut de candidat des provinces et aussi à titre d’époux d’une aide familiale résidante. Selon le demandeur, il était déraisonnable pour l’agent de considérer sa femme comme une [traduction] « pôle d’attraction » puisqu’ils peuvent tous les deux demander la résidence permanente.

 

[15]           Il n’est pas contesté qu’une personne « peut avoir la double intention d’immigrer et de respecter les règles de droit applicables au sujet du séjour temporaire » : Rebmann c. Canada (Solliciteur général), [2005] 3 C.F. 285 (C.F.); Bondoc c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2008] A.C.F. no 1063.

 

[16]           Bien que l’agent des visas n’ait pas besoin d’être convaincu que le demandeur compte séjourner temporairement au Canada, il doit néanmoins être convaincu qu’il ne restera pas illégalement au Canada si sa demande de résidence permanente est rejetée : Bondoc. De plus, l’agent des visas peut tenir compte des renseignements fournis dans des demandes antérieures et au cours d’entrevues, et il peut tirer des conclusions concernant l’intention du demandeur de retourner dans son pays : Jie c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] A.C.F. n1733.

[17]           Vu que l’agent des visas a expressément affirmé qu’il a tenu compte de la double intention et du fait que le demandeur peut demander la résidence permanente au Canada dans le cadre de deux programmes séparés, ce qui ne lui donne pas pour autant droit à un permis de travail, je ne saurais conclure que sa décision était déraisonnable.

 

[18]           Le demandeur n’a pas démontré que l’analyse de l’agent des visas était déraisonnable et par conséquent, la demande doit être rejetée. L’avocat n’a pas proposé de question à certifier et aucune ne se pose. L’intitulé sera modifié tel que demandé.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée. L’intitulé est modifié par la suppression du « ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile » à titre de défendeur.

 

 

« Carolyn Layden-Stevenson »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Mylène Boudreau


ANNEXE « A »

 

Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27

Paragraphe 22(2)

22. (2) L’intention qu’il a de s’établir au Canada n’empêche pas l’étranger de devenir résident temporaire sur preuve qu’il aura quitté le Canada à la fin de la période de séjour autorisée.

 

22. (2) An intention by a foreign national to become a permanent resident does not preclude them from becoming a temporary resident if the officer is satisfied that they will leave Canada by the end of the period authorized for their stay.

 

 

Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227

Articles 179, 200, 203 et 204

179. L’agent délivre un visa de résident temporaire à l’étranger si, à l’issue d’un contrôle, les éléments suivants sont établis :

a) l’étranger en a fait, conformément au présent règlement, la demande au titre de la catégorie des visiteurs, des travailleurs ou des étudiants;

b) il quittera le Canada à la fin de la période de séjour autorisée qui lui est applicable au titre de la section 2;

c) il est titulaire d’un passeport ou autre document qui lui permet d’entrer dans le pays qui l’a délivré ou dans un autre pays;

d) il se conforme aux exigences applicables à cette catégorie;

e) il n’est pas interdit de territoire;

f) il satisfait aux exigences prévues à l’article 30.

200. (1) Sous réserve des paragraphes (2) et (3), l’agent délivre un permis de travail à l’étranger si, à l’issue d’un contrôle, les éléments suivants sont établis :

a) l’étranger a demandé un permis de travail conformément à la section 2;

b) il quittera le Canada à la fin de la période de séjour qui lui est applicable au titre de la section 2 de la partie 9;

c) il se trouve dans l’une des situations suivantes :

(i) il est visé par les articles 206, 207 ou 208,

(ii) il entend exercer un travail visé aux articles 204 ou 205,

(iii) il s’est vu présenter une offre d’emploi et l’agent a, en application de l’article 203, conclu que cette offre est authentique et que l’exécution du travail par l’étranger est susceptible d’avoir des effets positifs ou neutres sur le marché du travail canadien;

d) [Abrogé, DORS/2004-167, art. 56]

e) il satisfait aux exigences prévues à l’article 30.

 

203. (1) Sur demande de permis de travail présentée conformément à la section 2 par un étranger, autre que celui visé à l’un des sous-alinéas 200(1)c)(i) et (ii), l’agent décide, en se fondant sur l’avis du ministère du Développement des ressources humaines, si l’offre d’emploi est authentique et si l’exécution du travail par l’étranger est susceptible d’avoir des effets positifs ou neutres sur le marché du travail canadien.

(2) Le ministère du Développement des ressources humaines fournit l’avis à la demande de tout employeur, groupe d’employeurs ou agent faite à l’égard :

a) soit de l’offre d’emploi présentée à l’étranger;

b) soit d’offres d’emploi qu’un employeur ou un groupe d’employeurs a présentées ou envisage de présenter.

(3) Le ministère du Développement des ressources humaines fonde son avis sur les facteurs suivants :

a) l’exécution du travail par l’étranger est susceptible d’entraîner la création directe ou le maintien d’emplois pour des citoyens canadiens ou des résidents permanents;

b) l’exécution du travail par l’étranger est susceptible d’entraîner le développement ou le transfert de compétences ou de connaissances au profit des citoyens canadiens ou des résidents permanents;

c) l’exécution du travail par l’étranger est susceptible de résorber une pénurie de main‑d’oeuvre;

d) le salaire offert à l’étranger correspond aux taux de salaires courants pour cette profession et les conditions de travail qui lui sont offertes satisfont aux normes canadiennes généralement acceptées;

e) l’employeur a fait ou accepté de faire des efforts raisonnables pour embaucher ou former des citoyens canadiens ou des résidents permanents;

f) le travail de l’étranger est susceptible de nuire au règlement d’un conflit de travail en cours ou à l’emploi de toute personne touchée par ce conflit.

(4) Dans le cas de l’étranger qui cherche à travailler dans la province de Québec, le ministère du Développement des ressources humaines établit son avis de concert avec les autorités compétentes de la province.

 

 

204. Un permis de travail peut être délivré à l’étranger en vertu de l’article 200 si le travail pour lequel le permis est demandé est visé par :

a) un accord international conclu entre le Canada et un ou plusieurs pays, à l’exclusion d’un accord concernant les travailleurs agricoles saisonniers;

b) un accord conclu entre un ou plusieurs pays et une ou plusieurs provinces, ou au nom de celles-ci;

c) un accord conclu entre le ministre et une province ou un groupe de provinces en vertu du paragraphe 8(1) de la Loi.

 

179. An officer shall issue a temporary resident visa to a foreign national if, following an examination, it is established that the foreign national

(a) has applied in accordance with these Regulations for a temporary resident visa as a member of the visitor, worker or student class;

(b) will leave Canada by the end of the period authorized for their stay under Division 2;

(c) holds a passport or other document that they may use to enter the country that issued it or another country;

(d) meets the requirements applicable to that class;

(e) is not inadmissible; and

(f) meets the requirements of section 30.

 

 

200. (1) Subject to subsections (2) and (3), an officer shall issue a work permit to a foreign national if, following an examination, it is established that

(a) the foreign national applied for it in accordance with Division 2;

(b) the foreign national will leave Canada by the end of the period authorized for their stay under Division 2 of Part 9;

(c) the foreign national

(i) is described in section 206, 207 or 208,

(ii) intends to perform work described in section 204 or 205, or

(iii) has been offered employment and an officer has determined under section 203 that the offer is genuine and that the employment is likely to result in a neutral or positive effect on the labour market in Canada; and

(d) [Repealed, SOR/2004-167, s. 56]

(e) the requirements of section 30 are met.

 

 

 

203. (1) On application under Division 2 for a work permit made by a foreign national other than a foreign national referred to in subparagraphs 200(1)(c)(i) and (ii), an officer shall determine, on the basis of an opinion provided by the Department of Human Resources Development, if the job offer is genuine and if the employment of the foreign national is likely to have a neutral or positive effect on the labour market in Canada.

(2) The Department of Human Resources Development shall provide the opinion referred to in subsection (1) on the request of an officer or an employer or group of employers. A request may be made in respect of

(a) an offer of employment to a foreign national; and

(b) offers of employment made, or anticipated to be made, by an employer or group of employers.

(3) An opinion provided by the Department of Human Resources Development shall be based on the following factors:

(a) whether the employment of the foreign national is likely to result in direct job creation or job retention for Canadian citizens or permanent residents;

(b) whether the employment of the foreign national is likely to result in the creation or transfer of skills and knowledge for the benefit of Canadian citizens or permanent residents;

(c) whether the employment of the foreign national is likely to fill a labour shortage;

(d) whether the wages offered to the foreign national are consistent with the prevailing wage rate for the occupation and whether the working conditions meet generally accepted Canadian standards;

(e) whether the employer has made, or has agreed to make, reasonable efforts to hire or train Canadian citizens or permanent residents; and

(f) whether the employment of the foreign national is likely to adversely affect the settlement of any labour dispute in progress or the employment of any person involved in the dispute.

(4) In the case of a foreign national who intends to work in the Province of Quebec, the opinion provided by the Department of Human Resources Development shall be made in concert with the competent authority of that Province.

 

204. A work permit may be issued under section 200 to a foreign national who intends to perform work pursuant to

(a) an international agreement between Canada and one or more countries, other than an agreement concerning seasonal agricultural workers;

(b) an agreement entered into by one or more countries and by or on behalf of one or more provinces; or

(c) an agreement entered into by the Minister with a province or group of provinces under subsection 8(1) of the Act.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-3155-08

 

INTITULÉ :                                       OLEG KACHMAZOV c. MCI

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 20 janvier 2009

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LA JUGE LAYDEN-STEVENSON

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 21 janvier 2009

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Lorne Waldman

POUR LE DEMANDEUR

 

Lisa Laird

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Waldman & Associés

Vancouver (Colombie‑Britannique)

POUR LE DEMANDEUR

 

 

John H. Sims, c.r.

Sous‑procureur général du Canada

Vancouver (Colombie‑Britannique)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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