Federal Court |
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Cour fédérale |
Ottawa (Ontario), le 17 novembre 2008
En présence de monsieur le juge Harrington
ENTRE :
FLOR LILIAN PENA MARQUEZ
IVANNA GONZALEZ PENA
ROLANDO GONZALEZ PENA
ROBERTO GONZALEZ LARA
MONICA ULIBARRI HERNANDEZ
Demandeurs
ET DE L’IMMIGRATION
MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE
[1] En janvier 2003, Ramon Gonzalez Lara a été enlevé à Mexico par un gang composé de sept membres. Ses frères Rafael et Roberto ont porté plainte aux autorités. Cinq des sept membres ont été capturés, jugés, déclarés coupables et emprisonnés. Les deux autres sont apparemment encore en liberté. À compter de novembre 2003 et pendant les deux années qui ont suivi, les deux frères ont reçu quelques appels téléphoniques sur leur cellulaire, lors desquels des menaces de mort ont été proférées, croient‑ils, par les ravisseurs en liberté.
[2] Rafael, son épouse et deux enfants se sont enfuis au Canada; Roberto et son épouse les ont suivis peu de temps après. Leur demande d’asile et de protection au Canada a été rejetée par la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié. Il s’agit du contrôle judiciaire de la décision de la Commission, laquelle portait sur la protection de l’État et, dans une moindre mesure, sur la possibilité de refuge intérieur. La commissaire a conclu que le Mexique était une démocratie disposant d’une force policière opérationnelle et qu’il déploie de sérieux efforts pour protéger ses citoyens, bien qu’il n’y parvienne pas toujours, évidemment.
[3] Les demandeurs font grand cas des parties des rapports portant sur la situation générale au Mexique, qui donnent à penser que la police est inefficace et qu’elle est habituellement complice des enlèvements. Cependant, en l’espèce, la police a agi très promptement, et elle a été capable de capturer la plupart des ravisseurs et de libérer Ramon.
[4] En ce qui concerne les appels téléphoniques de menaces, la commissaire a affirmé ce qui suit :
Les demandeurs d’asile allèguent qu’ils ont communiqué avec le PGR à Veracruz lorsqu’ils ont reçu des appels de menaces, mais qu’ils se sont fait dire que sans preuve plus concrète, la police ne pouvait rien faire. Vu les longs intervalles entre les appels, soit en novembre et en décembre 2003, en mai et en septembre 2004, en décembre 2005 et en mai 2006, j’estime que cette réaction n’était pas déraisonnable. La réponse à laquelle les demandeurs d’asile auraient pu raisonnablement s’attendre dans de telles circonstances n’est pas claire.
[5] Il n’y a rien de déraisonnable dans la conclusion selon laquelle la protection de l’État était offerte. Il ne s’agit pas d’une analyse recyclée. La présomption selon laquelle la protection de l’État était offerte n’a pas été réfutée (Canada (Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S. 691).
[6] Subsidiairement, la commissaire a également conclu que, si les demandeurs ne voulaient pas retourner à Mexico ou à Veracruz, « il y a de nombreux endroits au Mexique qu’ils peuvent choisir ». En appui à la prétention selon laquelle il ne suffisait pas de conclure que les demandeurs pouvaient aller ailleurs pour qu’il y ait une possibilité de refuge interne viable, les demandeurs ont mentionné les décisions Rabbani c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1997), 125 F.T.R. 141, et Valdez Mendoza c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 387. Entre autres choses, un autre lieu géographique précis, où la situation convient, doit être déterminé.
[7] Je partage certainement l’avis des demandeurs. Cependant, les demandeurs savaient que la possibilité de refuge intérieur posait un problème. Les demandeurs ont rejeté La Paz, dans la province de Baja California, au motif qu’il y a beaucoup de trafic de drogue là‑bas. Tout le nord du Mexique a également été rejeté en raison du trafic de drogue et de l’omniprésence d’un gang de ravisseurs que les demandeurs n’ont pas été capables de nommer. À Merida, il n’y a pas d’emploi et, à Acapulco, les demandeurs seraient décapités. [traduction] « Q. : O.K. Qu’en est‑il de San Luis Petisi? Petite ville bien tranquille. R. : Je n’ai rien contre San Luis Petisi, mais c’est comme si je ne me sentais en sécurité nulle part. »
[8] Ce « sentiment » découle du manque de confiance dans la police et de la croyance que les ravisseurs sont tant omniprésents qu’omniscients. Les demandeurs pourraient bien se « sentir » plus en sécurité au Canada, mais il y a un élément objectif au critère. Même Ramon, le frère qui a été enlevé, fait des allers‑retours entre les États‑Unis et le Mexique. En contexte, la commissaire a en fait déterminé un certain nombre de possibilités de refuge intérieur viable.
[9] Les deux conclusions de la commissaire étaient raisonnables et la décision ne sera pas modifiée.
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée. Il n’y a aucune question de portée générale à certifier.
« Sean Harrington »
Traduction certifiée conforme
Mario Lagacé, jurilinguiste
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-1880-08
INTITULÉ : Rafael Gonzalez Lara et al. c. MCI
LIEU DE L’AUDIENCE : MONTRÉAL (QUÉBEC)
DATE DE L’AUDIENCE : LE 12 NOVEMBRE 2008
MOTIFS DE L’ORDONNANCE
ET ORDONNANCE : LE JUGE HARRINGTON
DATE DES MOTIFS : LE 17 NOVEMBRE 2008
COMPARUTIONS :
Cristina Marinelli
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POUR LES DEMANDEURS |
Zoé Richard
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Cristina Marinelli Avocate Montréal (Québec)
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POUR LES DEMANDEURS |
John H. Sims, c.r. Sous-procureur général du Canada Montréal (Québec) |