Vancouver (Colombie-Britannique), le 5 novembre 2008
En présence de monsieur le juge Phelan
ENTRE :
et
ET DE L’IMMIGRATION
MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE
[1] Il s’agit d’une demande visant à surseoir à l’exécution d’une mesure d’expulsion prévue pour le vendredi 7 novembre 2008. La mesure d’expulsion fait suite aux décisions rendues par un seul et même agent ayant rejeté la demande d’examen des risques avant renvoi (ERAR) et la demande pour motif d’ordre humanitaire.
II. RÉSUMÉ DES FAITS
[2] Les faits sont assez simples. Le demandeur est un citoyen du Honduras qui a un passé assez mouvementé, ayant été condamné pour une série d’accusations au criminel au Canada et aux États-Unis. La dernière condamnation grave remonte à plus de dix ans.
[3] Le demandeur et son épouse née au Canada agissent en fait en qualité de parents ou de tuteurs de la nièce du demandeur. Le père de la nièce (le frère du demandeur) est en attente d’un procès pour maltraitance d’un enfant. La mère a été tuée dans un accident de la route.
[4] Il s’agit uniquement de savoir si la Cour devrait accorder un sursis en raison de la situation de la nièce. Les arguments concernant le demandeur et la validité de la décision visant la demande pour des motifs d’ordre humanitaire seront examinés à un autre moment et par un autre juge.
III. CRITÈRE À TROIS VOLETS
[5] Le critère qui s’applique à l’examen de demandes de sursis est bien établi dans l’arrêt Toth c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1988], 86 N.R. 302 (CAF). Pour les motifs qui suivent, je conclus que le demandeur répond aux critères pour accorder un sursis.
IV. QUESTION SÉRIEUSE
[6] En examinant l’intérêt supérieur de l’enfant, l’agent a conclu que trois adultes participaient à l’éducation de l’enfant : le demandeur, le père de l’enfant et l’épouse du demandeur. Deux sœurs du demandeur vivant au Canada ont aussi été mentionnées, mais leur rôle n’a pas été examiné.
[7] Bien que l’agent n’ait pas voulu présumer de ce qu’il pourrait advenir du père de l’enfant et de ses accusations au criminel, l’agent a conclu qu’un nombre suffisant de personnes participaient à la prise en charge de l’enfant et qu’il existait un nombre adéquat d’options pour assurer la protection de l’enfant.
[8] Si le demandeur est expulsé, les seules autres personnes qui pourront s’occuper de l’enfant (rien n’indique une intervention des services à l’enfance ou de quelque autre service comparable) sont une personne accusée de maltraitance d’un enfant et l’épouse du demandeur. L’épouse doit choisir entre rester au Canada ou accompagner son mari. L’agent a apparemment présumé que l’épouse resterait au Canada et qu’elle continuerait de s’occuper de la nièce de son mari.
[9]
Je
suis d’avis que le demandeur a établi l’existence d’une question sérieuse à
trancher, celle-ci ayant trait au caractère raisonnable des conclusions
concernant l’intérêt supérieur de l’enfant. On a peu tenu compte de ce qu’il
adviendra de l’enfant si les hypothèses formulées ne se confirment pas. L’épouse
a depuis déposé des éléments de preuve indiquant son intention de suivre son
époux – un élément dont l’agent n’avait pas été saisi, mais dont on ne
peut faire abstraction si l’intérêt supérieur de l’enfant doit être plus qu’une
simple formalité.
V. PRÉJUDICE
IRRÉPARABLE
[10] Le préjudice qui se pose, l’abandon d’un enfant, est une préoccupation réaliste. Contrairement à d’autres affaires d’expulsion mettant en cause des enfants, dans lesquelles l’un des parents reste au Canada ou les deux s’en vont avec l’enfant, cette conséquence habituelle de l’expulsion n’est pas garantie en l’espèce.
[11] En effet, ni le demandeur ni son épouse ne peuvent emmener l’enfant avec eux, car aucun des deux n’a d’autorité légale sur l’enfant.
[12] Dans Sowkey c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 67, j’ai conclu à un préjudice irréparable dans des circonstances comparables où le préjudice résultant de l’expulsion n’était pas une conséquence naturelle.
VI. PRÉPONDÉRANCE DES INCONVÉNIENTS
[13] Lorsqu’on soupèse les intérêts d’un enfant en regard des avantages de l’expulsion sur le plan administratif, le résultat doit habituellement favoriser l’enfant. C’est particulièrement le cas lorsque la question en litige concerne un sursis d’une période limitée.
[14] Les tribunaux ont un rôle spécial à jouer dans la protection des enfants. Un bref sursis en attendant l’examen de la demande d’autorisation laissera également le temps d’examiner plus à fond les autres options qui s’offrent pour la garde de cet enfant de trois ans.
VII. CONCLUSION
[15] Par conséquent, la demande de sursis de la mesure d’expulsion est accueillie en attendant le règlement définitif de la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire.
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE que la demande de sursis de la mesure d’expulsion soit accueillie, en attendant le règlement définitif de la demande de contrôle judiciaire.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-4770-08
INTITULÉ : LUIS FERRERA DIAZ
c.
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
LIEU DE L’AUDIENCE : VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE)
DATE DE L’AUDIENCE : LE 3 NOVEMBRE 2008
ET ORDONNANCE : LE JUGE PHELAN
DATE DES MOTIFS : LE 5 NOVEMBRE 2008
COMPARUTIONS :
Blake Hobson
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Edward Burnet
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
BLAKE HOBSON Avocat Surrey (Colombie-Britannique)
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JOHN H. SIMS, c.r. Sous-procureur général du Canada Vancouver (Colombie-Britannique) |