Federal Court |
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Cour fédérale |
Ottawa (Ontario), le 8 octobre 2008
En présence de monsieur le juge Kelen
ENTRE :
et
MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT
[1] La Cour statue sur une demande de contrôle judiciaire d’une décision par laquelle le ministre du Revenu national (le ministre) a refusé de dispenser Slau Limited (la demanderesse) du paiement des intérêts et des pénalités découlant de la nouvelle cotisation portant sur ses déclarations de revenus pour les années 1988, 1989 et 1990 en vertu du paragraphe 220(3.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la LIR), qui fait partie de ce qu’on appelle couramment « les dispositions d’équité ». La société demanderesse exerce ses activités à Ottawa sous l’appellation de Yangtzee Restaurant et elle possédait et exploitait auparavant le Golden Dragon Restaurant.
FAITS
Contexte
Années d’imposition 1988, 1989 et 1990
[2] Le 2 novembre 1990, la demanderesse a produit sa déclaration de revenus pour l’année d’imposition 1988. Elle n’a déclaré aucun revenu imposable. Le 25 janvier 1991 et le 2 décembre 1991, la demanderesse a produit ses déclarations de revenus pour les années d’imposition 1989 et 1990 respectivement. Elle n’a déclaré aucun revenu imposable pour les années en question. En 1992, l’Agence du revenu du Canada (l’ARC) a procédé à une vérification de la demanderesse pour les années 1988, 1999 et 1990 et, le 14 mai 1993, l’ARC a établi de nouvelles cotisations faisant état d’un revenu imposable et fixant l’impôt dû pour les années d’imposition en question, ainsi que des intérêts et des pénalités.
[3] L’avis de cotisation pour l’année d’imposition 1988 indiquait des sommes supplémentaires exigibles de 33 531,90 $ en impôt fédéral, 485,74 $ en intérêts sur acomptes provisionnels, 26 893,09 $ en intérêts en souffrance et 5 700,12 $ à titre de pénalité pour production tardive. L’impôt supplémentaire total dû pour l’année d’imposition 1988 s’élevait à 66 611,15 $. Dans l’avis de nouvelle cotisation établi pour l’année d’imposition 1989, l’ARC réclamait les sommes supplémentaires suivantes : 41 526,39 $ en impôt fédéral, 2 791,03 $ en intérêts sur acomptes provisionnels, 22 883,30 $ en intérêts en souffrance et une pénalité de 4 567,90 $ pour production tardive, pour un grand total de 71 768,62 $ dû pour l’année d’imposition 1989. L’avis de nouvelle cotisation pour l’année d’imposition 1990 indiquait 24 057,01 $ dus en impôt fédéral, 3 210,52 $ en intérêts sur acomptes provisionnels, 7 671,83 $ en intérêts en souffrance et une pénalité de 2 405,70 $ pour production tardive, pour un grand total de 37 345,06 $ pour l’année d’imposition 1990.
[4] La demanderesse a produit un avis d’opposition aux nouvelles cotisations et a finalement interjeté appel à la Cour canadienne de l’impôt. Au cours du procès qui s’est déroulé devant la Cour de l’impôt, en décembre 1996, la demanderesse et la défenderesse sont parvenues à une entente à l’amiable.
[5] L’entente à l’amiable conclue par les parties a donné lieu le 16 décembre 1996 à un règlement de l’appel sur consentement (le règlement). Le règlement prévoyait expressément dix rajustements au revenu imposable des années d’imposition 1988, 1989 et 1990.
Report rétrospectif de pertes
[6] La demanderesse a produit sa déclaration de revenus pour l’année d’imposition 1991 le 6 juin 1994. Le 20 juin 1995, la demanderesse a produit ses déclarations de revenus pour les années d’imposition 1992 et 1993. La demanderesse a déclaré des pertes autres que des pertes en capital pour les années d’imposition en question.
[7] L’entente à l’amiable et le règlement pour les années d’imposition 1988, 1989 et 1990 ne traitaient pas de la question du report rétrospectif des pertes autres que les pertes en capital des années d’imposition 1991, 1992 et 1993. La demanderesse affirme qu’elle croyait comprendre qu’elle aurait le droit de reporter rétrospectivement toutes les pertes subies au cours des années d’imposition 1991, 1992 et 1993 sur l’impôt établi par l’ARC pour les années 1988, 1989 et 1990.
Nouvelle cotisation établie à la suite du règlement
[8] Le règlement obligeait la demanderesse à déposer des états financiers modifiés pour l’année d’imposition 1990 en y incorporant les rajustements sur lesquels les parties s’étaient entendues et qui figuraient dans le règlement. Le règlement prévoyait que l’ARC enverrait des avis de nouvelle cotisation pour les années 1988, 1989 et 1990 sur réception de la déclaration de revenus modifiée de 1990. La demanderesse a produit une déclaration modifiée le 15 janvier 1997. La demanderesse a également soumis, pour les années d’imposition 1988, 1989 et 1990, des [traduction] « rajustements aux résultats » par lesquels elle demandait que les pertes autres que les pertes en capital subies au cours des années d’imposition 1991, 1992 et 1993 soient appliquées aux années d’imposition 1988, 1989 et 1990.
[9] Le 12 février 1997, l’ARC a envoyé des avis de nouvelle cotisation précisant la dette fiscale de la demanderesse pour les années 1988, 1989 et 1990 avec les pénalités et les intérêts afférents, le tout conformément aux modalités du règlement. Les avis de nouvelle cotisation faisaient état pour chacune des années d’imposition 1988, 1989 et 1990 d’un crédit qui avait pour effet de réduire le montant dû pour chacune de ces années. L’ARC a également envoyé en 1997 par la poste à la demanderesse un relevé de compte de l’entreprise faisant état des montants totaux dus pour chacune des années d’imposition 1988, 1989 et 1990 et dans lequel elle appliquait les crédits indiqués dans les avis de nouvelle cotisation au paiement des intérêts sur acomptes provisionnels en retard. L’avis de nouvelle cotisation pour l’année d’imposition 1988 fait état d’un crédit de 40 860,09 $. Dans le relevé de compte de l’entreprise, l’ARC a appliqué en 1997 ce montant aux 89 399,54 $ majorés des intérêts dus pour l’année d’imposition 1988, ramenant ainsi à 71 173,07 $ le solde total impayé. De même, l’avis de nouvelle cotisation pour l’année d’imposition 1989 indique un crédit de 88 206,36 $, qui a été appliqué aux 88,345,75 $ majorés des intérêts dus, pour un solde de 12 311,28 $. L’avis de nouvelle cotisation de l’année d’imposition 1990 indique un crédit de 2 469,60 $, lequel a été appliqué aux 41 808,17 $ majorés des intérêts de 10 647,65 $, pour un solde de 49 978,09 $.
[10] Le total des montants crédités à la demanderesse dans les avis de nouvelle cotisation s’élevait à 131 536,05 $. Ce montant a été appliqué au solde total de 211 553,46 $ majoré des intérêts dus pour les années d’imposition 1988, 1989 et 1990, pour un solde total de 133 462,44 $. Les avis de nouvelle cotisation ne tenaient pas compte des [traduction] « rajustements aux résultats » par lesquels la demanderesse réclamait le report rétrospectif des pertes.
[11] La demanderesse a reçu le 20 août 1997 une lettre du ministère des Finances de l’Ontario, qui acceptait sa demande de report rétrospectif des pertes.
[12] Entre 1997 et 2003, la demanderesse a correspondu à de nombreuses reprises avec l’ARC au sujet de la question du report rétrospectif des pertes. Le 20 mars 2003, la demanderesse a soumis à l’ARC des formules T2A(F) – Demande par une société d’un report rétrospectif de perte pour les années d’imposition 1991, 1992 et 1993. Le 6 juin 2003, l’ARC a accepté la demande formulée par la demanderesse pour que les pertes autres que les pertes en capital qu’elle avait subies au cours des années en question soient reportées sur les années d’imposition 1988, 1989 et 1990. L’ARC a par ailleurs confirmé que les pénalités et intérêts afférents étaient annulés en date du 16 décembre 1996, date de l’entente à l’amiable. Cette date a été retenue parce que la demanderesse avait déclaré dans une lettre à l’ARC qu’elle avait soulevé la question auprès de l’avocat de Sa Majesté au cours des négociations qui avaient eu lieu en décembre 1996, et qu’elle avait déposé des demandes modifiées réclamant le report rétrospectif des pertes en 1997. Bien que la demanderesse ait attendu jusqu’en 2003 pour déposer les formules T2A(F), il ressort du dossier que la question du report rétrospectif des pertes s’est posée dès décembre 1996. L’ARC a par conséquent annulé les intérêts et pénalités en date de décembre 1996 (rapport du second palier, dossier de la demanderesse, à la page 223).
Révision au premier palier
Première demande d’équité
[13] Dans deux lettres adressées à l’ARC le 3 mars 2004 et le 17 août 2004, la demanderesse a réclamé l’annulation de toutes les pénalités et de tous les intérêts calculés à partir de 1988. La demanderesse faisait valoir que les intérêts et les pénalités découlaient surtout des actes de l’ARC et que celle‑ci devait donc y renoncer pour des motifs d’équité.
[14] La demanderesse a reçu une lettre datée du 7 octobre 2004 de M. Vince Séguin, chef d’équipe de l’Unité de l’équité, au Bureau des services fiscaux d’Ottawa. La lettre informait la demanderesse que le ministre avait fait droit en partie à la demande d’allégement fondée sur les dispositions d’équité en annulant les pénalités et les intérêts à partir de décembre 1996, mais que le ministre avait refusé d’annuler la totalité des pénalités et des intérêts accumulés depuis 1988. La lettre précisait que les pertes autres que les pertes en capital ne pouvaient être déduites tant que les déclarations ne seraient pas produites et signalait que la déclaration de 1991 n’avait été produite qu’en juin 1994 et que celles de 1992 et de 1993 n’avaient été produites qu’en juin 1995. La lettre précisait par ailleurs que les dispositions législatives sur l’équité ne permettaient pas d’annuler les intérêts lorsque le contribuable avait commis une erreur ou s’était fondé sur une hypothèse incorrecte. La demanderesse a poursuivi sa correspondance avec l’ARC et a reçu, le 19 janvier 2005, une autre lettre confirmant la décision contenue dans la lettre du 7 octobre 2004.
[15] La demanderesse a reçu le 11 mars 2005 une lettre de l’ARC l’informant que le solde intégral des arriérés était dû et était payable sans délai étant donné que les délais d’appel étaient expirés. La demanderesse affirme que le relevé de l’ARC qui accompagnait cette lettre renferme de nombreuses erreurs.
[16] Le 22 mars 2005, l’ARC a enjoint à la demanderesse de payer la somme de 160 014,36 $ relativement aux pénalités et aux intérêts accumulés entre 1988 et 1996 sur le montant dû par la demanderesse pour les années d’imposition 1988, 1989 et 1990. La demanderesse a payé sur‑le‑champ 90 000 $ et a acquitté le solde de 70 000 $ sur une période de dix mois.
Deuxième demande d’équité
[17] La demanderesse a ensuite retenu les services d’un avocat et, par lettre datée du 13 décembre 2005, elle a réclamé une révision indépendante de la décision du 7 octobre 2004 par laquelle avait été refusée sa demande d’annulation des intérêts et des pénalités pour les années d’imposition 1988, 1989 et 1990. La demanderesse soutient que cette demande est restée sans réponse pendant plusieurs mois malgré les tentatives subséquentes faites par son avocat pour obtenir une réponse.
[18] Le 6 juillet 2006, la demanderesse a reçu une lettre de Mme Janet deKergommeaux, directrice par intérim du Bureau des services fiscaux d’Ottawa, l’informant que le ministre avait décidé de confirmer la décision du 7 octobre 2004. Cette lettre informait la demanderesse qu’elle avait 30 jours pour saisir la Cour fédérale d’une demande de contrôle judiciaire de la décision du ministre. La demanderesse a présenté une demande à la Cour fédérale dans le délai prescrit.
Premier contrôle judiciaire
[19] À l’issue des négociations, les parties ont acquiescé à un jugement faisant droit à la demande présentée par la demanderesse. Aux termes d’une ordonnance datée du 7 février 2007, la juge Mactavish a annulé sans frais la décision du 6 juillet 2006 du ministre et a renvoyé à ce dernier la demande de renonciation aux pénalités et aux intérêts concernant les années d’imposition 1988, 1989 et 1990 que la demanderesse avait formulée pour qu’ait lieu une autre révision de second palier par une personne ou plusieurs personnes qui ne s’étaient pas antérieurement penchées sur la question, pour que les points litigieux soient examinés conformément aux principes de justice naturelle et d’équité procédurale et, plus précisément, pour que tous les faits et documents pertinents soient révisés par l’autorité chargé de prendre une décision.
Révision au second palier
[20] Un rapport externe sur les dispositions d’allégement pour les contribuables daté du 11 octobre 2007 a été établi par M. Raji Narayan, agent chargé d’appliquer les mesures d’allégement pour les contribuables, et a été approuvé par M. Vance Smith, chef d’équipe à la Direction générale de la validation de l’ARC. Ce rapport recommandait de rejeter la demande d’annulation des intérêts et des pénalités formulée par la demanderesse. Le rapport a été transmis à Mme Lucie Bergevin, directrice du Bureau des services fiscaux d’Ottawa.
[21] Le 6 novembre 2007, la demanderesse a reçu une lettre de Mme Bergevin l’informant de la décision du ministre de confirmer les décisions déjà prises au premier et au second palier de la révision et celle de ne pas annuler les pénalités et les intérêts facturés au compte de la demanderesse pour les années d’imposition 1988, 1989 et 1990.
[22] Le 7 décembre 2007, la demanderesse a saisi la Cour fédérale d’une demande de contrôle judiciaire de la décision du 6 novembre 2007.
QUESTIONS À TRANCHER
[23] La question en litige dans la présente demande est celle de savoir si le ministre a commis une erreur dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire en vertu des dispositions d’équité en refusant de dispenser la demanderesse du paiement des pénalités et des intérêts. La demanderesse et la défenderesse s’accusent l’une l’autre des retards à l’origine de l’accumulation des intérêts et des pénalités.
NORME DE CONTRÔLE
[24] Dans l’arrêt Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, 372 N.R. 1, la Cour suprême du Canada a expliqué, au paragraphe 62, que la première étape de l’analyse relative à la norme de contrôle consiste à « vérifie[r] si la jurisprudence établit déjà de manière satisfaisante le degré de déférence correspondant à une catégorie de questions en particulier ».
[25] Dans l’arrêt Nail Centre and Esthetics Salon c. Canada (Agence des douanes et du revenu), 2005 CAF 166, 335 N.R. 178, la Cour d’appel fédérale a jugé que les décisions discrétionnaires prévues au paragraphe 220(3.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu sont assujetties à la norme de la décision raisonnable. La Cour d’appel a cité l’arrêt Lanno c. Canada (Agence des douanes et du revenu), 2005 CAF 153, 334 N.R. 348, dans lequel la Cour a conclu que la norme de la décision raisonnable était la norme de contrôle applicable en ce qui concerne des autres dispositions discrétionnaires de la Loi de l’impôt sur le revenu faisant partie des « dispositions d’équité ».
[26] Lorsqu’elle est saisie d’une demande de contrôle d’une décision de l’ARC assujettie à la norme de la décision raisonnable, la Cour doit se demander si la décision appartient aux issues possibles pouvant se justifier. Ainsi que la Cour suprême du Canada l’a expliqué dans l’arrêt Dunsmuir aux paragraphes 47 et 49 :
¶ 47 […] Le caractère raisonnable tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.
[…]
¶ 49 La déférence inhérente à la norme de la raisonnabilité implique donc que la cour de révision tienne dûment compte des conclusions du décideur […] La déférence commande en somme le respect de la volonté du législateur de s’en remettre, pour certaines choses, à des décideurs administratifs, de même que des raisonnements et des décisions fondés sur une expertise et une expérience dans un domaine particulier, ainsi que de la différence entre les fonctions d’une cour de justice et celles d’un organisme administratif dans le système constitutionnel canadien.
[27] En conséquence, la Cour procédera au contrôle de la présente décision en fonction de la norme de la « décision raisonnable ».
ANALYSE
Les dispositions d’équité
[28] Le paragraphe 220(3.1) de la LIR confère au ministre un vaste pouvoir discrétionnaire qui lui permet de renoncer en totalité ou en partie aux pénalités et aux intérêts accumulés en vertu de la loi ou de les annuler.
220. (3.1) Le ministre peut, au plus tard le jour qui suit de dix années civiles la fin de l’année d’imposition d’un contribuable ou de l’exercice d’une société de personnes ou sur demande du contribuable ou de la société de personnes faite au plus tard ce jour‑là, renoncer à tout ou partie d’un montant de pénalité ou d’intérêts payable par ailleurs par le contribuable ou la société de personnes en application de la présente loi pour cette année d’imposition ou cet exercice, ou l’annuler en tout ou en partie. Malgré les paragraphes 152(4) à (5), le ministre établit les cotisations voulues concernant les intérêts et pénalités payables par le contribuable ou la société de personnes pour tenir compte de pareille annulation.
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220. (3.1) The Minister may, on or before the day that is ten calendar years after the end of a taxation year of a taxpayer (or in the case of a partnership, a fiscal period of the partnership) or on application by the taxpayer or partnership on or before that day, waive or cancel all or any portion of any penalty or interest otherwise payable under this Act by the taxpayer or partnership in respect of that taxation year or fiscal period, and notwithstanding subsections 152(4) to (5), any assessment of the interest and penalties payable by the taxpayer or partnership shall be made that is necessary to take into account the cancellation of the penalty or interest.
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[29] Le ministre a par ailleurs publié des lignes directrices sur la renonciation aux pénalités et aux intérêts ou leur annulation. On les trouve actuellement dans la circulaire d’information 07‑1, Dispositions d’allègement pour les contribuables, datée du 31 mai 2007.
[30] Pour justifier sa demande d’annulation des intérêts et des pénalités, la demanderesse soutient que la décision de l’ARC d’autoriser le report rétrospectif des pertes a eu pour effet d’annuler toute conclusion antérieure suivant laquelle des montants d’impôt étaient dus pour les années 1988, 1989 et 1990. La demanderesse affirme donc qu’elle ne peut logiquement être tenue de payer des intérêts et des pénalités pour non‑paiement d’une dette inexistante. La demanderesse maintient par ailleurs que, dans la mesure où elle a tardé à réclamer le report rétrospectif des pertes, ce retard est imputable à l’ARC. La demanderesse affirme qu’elle ne pouvait réclamer le report rétrospectif des pertes alors qu’elle interjetait appel de la nouvelle cotisation, car on ne pouvait savoir avec certitude ce qu’elle devait en impôts pour les années d’imposition 1988, 1989 et 1990 tant que le sort de l’appel de la nouvelle cotisation n’était pas connu. La demanderesse réclame par conséquent une renonciation à la totalité des pénalités et des intérêts, ce qui équivaut à environ 160 000 $.
[31] La défenderesse soutient que les intérêts et les pénalités ont été imposés par suite des erreurs commises par la demanderesse et que le ministre ne peut y renoncer en vertu des dispositions d’équité. La défenderesse affirme en premier lieu que la demanderesse a produit ses déclarations de revenus en retard pour les années d’imposition 1988, 1989 et 1990, ainsi que pour les années d’imposition 1991, 1992 et 1993, et que l’obligation à laquelle la demanderesse était assujettie en tant que contribuable était de produire ses déclarations de revenus dans les délais prescrits. En deuxième lieu, ce n’est qu’en 1994 et 1995 qu’il est devenu possible de demander le report rétrospectif des pertes autres que les pertes en capital lorsque la demanderesse a produit ses déclarations de revenus pour les années 1991, 1992 et 1993. En troisième lieu, la défenderesse soutient que les nouvelles cotisations ont été établies en raison des déclarations de revenus inexactes produites pour les années 1988, 1989 et 1990. Ainsi, les pénalités et les intérêts réclamés par suite de la nouvelle cotisation sont imputables à une erreur de la demanderesse et non à des retards causés par l’ARC. La demanderesse avait l’obligation de comptabiliser de façon rigoureuse les revenus qu’elle avait reçus au cours de toute année d’imposition pour pouvoir bien calculer l’impôt exigible et produire ses déclarations de revenus au moment et aux conditions voulues. La thèse de la défenderesse est que le fait d’accorder un allégement fiscal en vertu des dispositions d’équité lorsque les intérêts et les pénalités sont attribuables à une erreur du contribuable dissuaderait les avocats et leurs clients de se conformer à la LIR.
[32] La défenderesse fait par ailleurs valoir que la demanderesse a attendu en mars 2003, lorsqu’elle a déposé les formules T2A(F), pour réclamer le report rétrospectif des pertes. Toutefois, on a appliqué le report rétrospectif des pertes en retenant comme date de référence celle du 16 décembre 1996 (date de l’entente à l’amiable). L’affirmation de la défenderesse suivant laquelle la demanderesse a attendu en mars 2003 pour réclamer le report rétrospectif des pertes n’est par conséquent pas pertinente. La période de temps au cours de laquelle les pénalités et les intérêts en cause dans la présente demande se sont accumulés est donc celle comprise entre 1988 et 1996. Il s’agit de savoir qui, de la demanderesse ou de l’ARC, est responsable des retards à l’origine de l’accumulation des intérêts et des pénalités.
Report rétrospectif des pertes
[33] Le paragraphe 111(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu prévoit que le contribuable a le droit de réclamer la déduction des pertes autres que ses pertes en capital.
111. (1) Pour le calcul du revenu imposable d’un contribuable pour une année d’imposition, peuvent être déduites les sommes appropriées suivantes :
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111. (1) For the purpose of computing the taxable income of a taxpayer for such a taxation year, there may be deducted such portion as the taxpayer may claim of the taxpayer’s
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Pertes autres que des pertes en capital
a) ses pertes autres que des pertes en capital subies au cours des 20 années d’imposition précédentes et des 3 années d’imposition suivantes; |
Non‑capital losses
(a) non‑capital losses for the 20 taxation years immediately preceding and the 3 taxation years immediately following the year; |
[34] L’alinéa 161(7)b) expose les conséquences du report rétrospectif des pertes sur les intérêts accumulés :
161. (7) Pour le calcul des intérêts à verser en application des paragraphes (1) ou (2) sur l’impôt ou sur une partie d’un acompte provisionnel pour une année d’imposition et pour l’application de l’article 163.1 : […] |
161. (7) For the purpose of computing interest under subsection 161(1) or 161(2) on tax or a part of an installment of tax for a taxation year, and for the purpose of section 163.1… |
b) la somme qui est appliquée en réduction de l’impôt payable par le contribuable pour l’année en vertu de la présente partie et des parties I.3, VI et VI.1 par suite de la déduction ou de l’exclusion de montants visés à l’alinéa a) est réputée avoir été versée au titre de son impôt payable pour l’année en vertu de la présente partie le trentième jour suivant le dernier en date des jours suivants : |
b) the amount by which the tax payable under this Part and Parts I.3, VI and VI.1 by the taxpayer for the year is reduced as a consequence of the deduction or exclusion of amounts described in paragraph (a) is deemed to have been paid on account of the taxpayer’s tax payable under this Part for the year on the day that is 30 days after the latest of |
(i) le premier jour qui suit cette année d’imposition ultérieure, |
(i) the first day immediately following that subsequent taxation year, |
(ii) le jour où la déclaration de revenu du contribuable ou de son représentant légal pour cette année d’imposition ultérieure a été produite, |
(ii) the day on which the taxpayer’s or the taxpayer’s legal representative’s return of income for that subsequent taxation year was filed, |
(iii) le jour où une déclaration de revenu modifiée du contribuable pour l’année a été produite ou un formulaire prescrit modifiant sa déclaration de revenu pour l’année a été présenté conformément au paragraphe 49(4) ou 152(6) ou à l’alinéa 164(6)e), dans le cas où il y a une telle production ou présentation, |
(iii) where an amended return of the taxpayer’s income for the year or a prescribed form amending the taxpayer’s return of income for the year was filed in accordance with subsection 49(4) or 152(6) or paragraph 164(6)(e), the day on which the amended return or prescribed form was filed, and |
(iv) le jour de la demande écrite à la suite de laquelle le ministre établit une nouvelle cotisation concernant l’impôt du contribuable pour l’année et qui tient compte de la déduction ou de l’exclusion, dans le cas où il y a une telle nouvelle cotisation. |
(iv) where, as a consequence of a request in writing, the Minister reassessed the taxpayer’s tax for the year to take into account the deduction or exclusion, the day on which the request was made. |
Dans le cas qui nous occupe, la disposition pertinente est le sous‑alinéa (iv), qui prévoit que la date à retenir est celle à laquelle le contribuable a demandé au ministre d’établir une nouvelle cotisation concernant l’impôt dû par le contribuable pour les années 1988, 1989 et 1990 pour que le ministre tienne compte du report rétrospectif des pertes (sous‑alinéa 161(7)b)(iv)). Toutefois, comme nous l’avons déjà signalé, la défenderesse a annulé les pénalités et les intérêts en date de l’entente à l’amiable parce que le dossier indiquait que la demanderesse avait réclamé le report dès décembre 1996.
[35] Comme le paragraphe 161(7) prévoit expressément les dates à retenir pour calculer les intérêts accumulés sur les impôts dont le montant a été réduit à la suite du report rétrospectif des pertes, le report rétrospectif des pertes prévu par la LIR n’a pas pour effet de nier l’existence de l’impôt dû ou des intérêts et pénalités qui en découlent. Le report rétrospectif des pertes ne crée pas de fiction juridique suivant laquelle l’impôt des années précédentes n’a jamais été exigible. Il permet tout simplement au contribuable de compenser l’impôt qu’il doit par des pertes autres que des pertes en capital déjà déclarées ou ultérieurement déclarées. L’argument que l’impôt n’a jamais été exigible est par conséquent mal fondé. L’impôt était exigible jusqu’à ce que la demanderesse demande qu’il soit compensé par des pertes subies au cours des années d’imposition 1991, 1992 et 1993.
[36] La demanderesse affirme que la période qui s’est écoulée avant qu’elle ne réclame l’établissement d’une nouvelle cotisation s’explique par le fait que sa déclaration de revenus pour 1988 n’a été produite qu’en 1990 et que ses déclarations de revenus pour 1989 et 1990 n’ont été produites qu’en 1991. Ce n’est qu’en 1993 que Revenu Canada a établi la cotisation relative à ces déclarations de revenus. L’appel de la demanderesse portait donc sur les cotisations relatives aux années 1993 à 1996. En 1996, les parties sont parvenues à une entente à l’amiable, qui prévoyait que la demanderesse produirait des déclarations de revenus modifiées dans lesquelles elle ajouterait certains revenus et inclurait certaines déductions conformément à l’entente à l’amiable. Lorsque la demanderesse a produit les déclarations modifiées exigées, elle a inclus des déclarations modifiées dans lesquelles elle réclamait le report rétrospectif des pertes autres que les pertes en capital subies au cours des années d’imposition 1991, 1992 et 1993.
[37] Le règlement fixait la dette fiscale pour les années d’imposition 1988, 1989 et 1990, mais ne traitait pas de la question du report rétrospectif des pertes. Dans sa lettre du 20 mars 2003 réclamant le report rétrospectif des pertes, la demanderesse explique qu’avant de signer le règlement, son avocat a soulevé la question du report rétrospectif des pertes auprès de l’avocat de Sa Majesté. La demanderesse a été [traduction] « informée que le report rétrospectif des pertes est une question distincte du contentieux fiscal qui doit être réglée avec l’ARC ». Cet aspect est expressément mentionné dans le « rapport de révision au second palier » de l’Agence du revenu du Canada (dossier de la demanderesse, à la page 220).
[38] L’ARC n’a pas donné suite sur‑le‑champ à la demande de report rétrospectif des pertes; elle ne l’a fait qu’en 2003, année où elle a reporté les pertes sur les années d’imposition 1988, 1989 et 1990. La demanderesse n’avait par conséquent aucun impôt sur le revenu à payer pour les années d’imposition 1988, 1989 et 1990. L’ARC maintient toutefois que la demanderesse doit toujours les intérêts et pénalités accumulés sur sa dette fiscale initiale jusqu’à la date de la conclusion de l’entente à l’amiable de 1996.
[39] La question soumise à la Cour est celle de savoir si la décision de l’ARC appartient aux issues possibles acceptables. Était‑il raisonnablement loisible à l’ARC de refuser de renoncer aux pénalités et aux intérêts accumulés entre 1988 et la date de l’entente à l’amiable de 1996? La demanderesse affirme que si, par suite du report rétrospectif des pertes subies en 1991, 1992 et 1993, elle ne devait aucun impôt sur le revenu avant les années d’imposition 1988, 1989 et 1990, il n’était pas raisonnable de s’attendre à ce qu’elle paye des intérêts et des pénalités sur une dette fiscale qui avait été effacée.
[40] La présente affaire porte sur une somme de près de 160 000 $ en intérêts et pénalités sur des impôts qui ont finalement été déclarés non exigibles par application du report rétrospectif des pertes. En fait, l’ARC a accepté qu’aucuns intérêts et pénalités ne seraient exigibles après décembre 1996, mais la défenderesse n’a pris cette décision qu’en 2003.
[41] Voici un extrait de la décision à l’examen, qui porte la date du 6 juillet 2006 (page 9 du dossier de la demanderesse) :
[traduction]
Mon examen n’a révélé l’existence d’aucun indice permettant d’imputer une erreur ou un retard à l’ARC ou de penser que des circonstances indépendantes de votre volonté auraient entraîné l’accumulation d’intérêts, d’arriérés ou de pénalités supplémentaires relativement aux années d’imposition 1988, 1989 et 1990. J’en conclus donc qu’il n’y a pas lieu d’annuler les pénalités et les intérêts facturés au compte de votre client pour les années en question.
[42] L’ARC a toutefois effectivement commis l’erreur de refuser d’abord la demande de report rétrospectif des pertes ou, du moins, elle a attendu six ans avant de décider d’autoriser le report rétrospectif des pertes et d’éliminer la dette fiscale de la demanderesse pour 1988, 1989 et 1990.
[43] Eu égard aux circonstances de l’espèce, la justice et l’équité justifient‑elle raisonnablement l’annulation des intérêts et des pénalités accumulés jusqu’en décembre 1996? La contribuable croyait que le report rétrospectif des pertes en question aurait pour effet d’effacer sa dette fiscale et a présumé à tort ─ mais on peut la comprendre ─ qu’il éliminerait aussi ce qu’elle devait en intérêts et en pénalités.
[44] Lorsqu’elle a fini par accepter le report rétrospectif des pertes le 6 juin 2003, l’ARC a accepté que [traduction] « les pénalités et les intérêts afférents ser[aient] annulés à compter de décembre 1996 » (lettre de Mme Elaine Routledge, dossier de la demanderesse, à la page 72). La raison invoquée par la défenderesse pour justifier le choix de cette date était que, suivant la preuve, la demanderesse avait réclamé le report rétrospectif des pertes dès 1996 et le retard qu’accusait l’acceptation du report rétrospectif des pertes était en partie attribuable à l’omission de l’ARC de communiquer efficacement avec la demanderesse pour régler la question du report rétrospectif des pertes. Il est logique et tout à fait raisonnable de penser que les mêmes raisons valent aussi pour les intérêts sur les pénalités découlant de la production tardive et les intérêts sur les acomptes provisionnels facturés après décembre 1996. Entre la date de la conclusion de l’entente à l’amiable et celle de l’acceptation du report rétrospectif des pertes, la demanderesse a tenté de convaincre l’ARC de reporter rétrospectivement les pertes subies au cours des années 1991, 1992 et 1993. Si l’ARC avait traité en temps opportun la demande de report rétrospectif des pertes de la demanderesse, ces dettes ne se seraient peut‑être jamais accumulées.
[45] La demanderesse n’est pas sans reproche en ce qui concerne l’accumulation de cette dette. Le rapport du vérificateur précise bien que la demanderesse n’a pas produit de déclarations de revenus pour les trois années précédant 1988, et qu’elle a produit quinze déclarations de revenus sur vingt en retard entre 1987 et 2006 (dossier de la demanderesse, à la page 225). La demanderesse est une entreprise bien informée qui compte un expert‑comptable à son service et qui sait qu’elle doit produire ses déclarations de revenus à temps et acquitter sans délai ses cotisations si elle souhaite éviter une accumulation d’intérêts. Les intérêts et les pénalités accumulés avant 1996 se justifiaient toutefois par la production tardive et par l’omission subséquente d’acquitter l’impôt dû pour les années d’imposition 1988, 1989 et 1990 et ce, d’autant plus que la demanderesse s’était vue condamnée à une pénalité plus sévère pour production tardive en vertu du paragraphe 162(2) de la LIR en raison de son omission répétée de produire ses déclarations, au lieu de se voir infliger la pénalité habituelle pour production tardive prévue au paragraphe 162(1). Compte tenu du montant d’argent en cause et de celui que la demanderesse devra quand même payer pour les intérêts et les pénalités accumulés avant le 1er décembre 1996, il est raisonnablement juste et équitable d’annuler tous les intérêts accumulés après cette date.
[46] Une autre considération ayant trait à l’équité concerne la confusion entourant les communications que la demanderesse a reçues de l’ARC. La demanderesse affirme que les avis de nouvelle cotisation qui ont été établis après la conclusion de l’entente à l’amiable renferment de nombreuses erreurs. L’avocate de la défenderesse admet que les formules [traduction] « créent beaucoup de confusion », expliquant que les formules que l’ARC emploie ont changé plusieurs fois. L’avocate de la défenderesse laisse entendre que la demanderesse aurait pu téléphoner à l’ARC pour obtenir des éclaircissements au sujet du montant qu’elle devait. Compte tenu de l’ampleur de la correspondance échangée entre la demanderesse et l’ARC, il est évident qu’il n’était pas facile d’obtenir de l’aide de l’ARC pour comprendre ses calculs.
[47] La Cour doit conclure que la seule façon raisonnable pour le Comité d’équité d’appliquer la justice et l’équité en l’espèce consisterait à appliquer le raisonnement suivi par l’ARC pour annuler les pénalités et les intérêts accumulés sur les impôts à compter de décembre 1996 à tous les intérêts accumulés jusqu’à maintenant. Suivant les renseignements que les parties ont communiqués depuis la clôture de l’audience, la demanderesse devrait donc au total 71 195,44 $ en intérêts et pénalités.
[48] Pour ce motif, la Cour annulera la décision au motif qu’elle est déraisonnable.
Renseignements de l’ARC fournis après l’audience
[49] Lors de l’audience qui s’est déroulée devant la Cour, les documents produits par l’ARC étaient, dans le meilleur des cas, confus et, dans le pire des cas, inintelligibles. La Cour a par conséquent demandé à l’ARC de lui préciser clairement le montant dû par la demanderesse en date du 1er décembre 1996 en pénalités pour production tardive, intérêts sur acomptes provisionnels et intérêts en souffrance. La Cour a demandé que ces renseignements soient fournis dans un délai d’une semaine. À la fin de cette semaine, l’ARC a réclamé une semaine de plus pour préparer les renseignements en question. Les renseignements que l’ARC a ensuite fournis étaient, là encore, confus et inintelligibles, et après avoir procédé à une analyse attentive avec l’aide des avocats des deux parties, la Cour a été forcée de constater que les renseignements fournis par l’ARC étaient entièrement erronés, ce qui confirme le sentiment de la Cour suivant lequel l’ARC est responsable de plusieurs des erreurs et importants retards qu’a connu en l’espèce l’établissement des cotisations relatives aux déclarations de revenus de la demanderesse.
Lettre adressée à la Cour par l’avocate de l’ARC
[50] Dans la lettre qu’elle a adressée à la Cour le 3 octobre 2008, l’avocate de l’ARC affirme que la demanderesse devait plus de 143 000 $ en date du 1er décembre 1996 en pénalités et intérêts. Après avoir procédé à sa propre analyse avec l’aide des avocats et de l’expert‑comptable de la demanderesse, la Cour et les avocats ont conclu que le montant exact que la demanderesse devait en date du 1er décembre 1996 se chiffrait à 71 195,44 $. Les renseignements fournis à la Cour par l’ARC étaient de toute évidence erronés.
Téléconférence avec la Cour et les parties le 7 octobre 2008
[51] Au cours de la téléconférence tenue avec la Cour le 7 octobre 2008, l’avocate de la défenderesse a admis que les renseignements fournis par cette dernière étaient clairement erronés et que les montants précités étaient les montants exacts dus en date du 1er décembre 1996.
Montant exact à rembourser
[52] Comme elle a payé 159 973,92 $ en remboursement de la dette réclamée par l’ARC (au lieu de 71 195,44 $), la demanderesse a droit au remboursement du trop‑payé. C’est à l’ARC qu’il incombe de rembourser ce montant.
Pouvoir de la Cour
[53] Aux termes du paragraphe 18.1(3) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F‑7, L.C. 2002, ch. 8, article 14, la Cour peut ordonner à l’office fédéral en cause d’accomplir tout acte qu’il a illégalement omis d’accomplir ou dont il a retardé l’exécution de manière déraisonnable. La Cour annulera donc la décision prise en l’espèce par le Comité d’équité et lui renverra l’affaire pour qu’il (agissant au nom du ministre en vertu de l’article 220 de la LIR) renonce aux intérêts accumulés en vertu de la loi après le 1er décembre 1996 ou qu’il les annule, et qu’il déclare que le montant raisonnable dû par la demanderesse en date du 1er décembre 1996 était de 71 195,44 $.
JUGEMENT
LA COUR ORDONNE :
1. La présente demande de contrôle judiciaire de la décision du 6 novembre 2007 du ministre du Revenu national est accueillie avec dépens;
2. La décision du 6 novembre 2007 du ministre est annulée et l’affaire est renvoyée au ministre pour qu’il prenne une nouvelle décision en partant du principe que la seule application raisonnable des règles de justice et d’équité en l’espèce consiste à renoncer aux intérêts accumulés après le 1er décembre 1996 de sorte que le montant dû par la demanderesse pour les pénalités, les intérêts sur les acomptes provisionnels et les intérêts en souffrance se chiffre à 71 195,44 $ et non à 159 973,92 $, ce que la demanderesse a payé.
« Michael A. Kelen »
Juge
Traduction certifiée conforme
Julie Boulanger, LL.M.
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COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : T‑2118‑07
INTITULÉ : SLAU LIMITED c. AGENCE DU REVENU DU CANADA
LIEU DE L’AUDIENCE : Ottawa (Ontario)
MOTIFS DU JUGEMENT : LE JUGE KELEN
ET DU JUGEMENT : Le 8 octobre 2008
COMPARUTIONS :
Matthew Mostyn
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Joanna Hill
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Kenneth Radnoff, c.r. Radnoff, Pearl LLP Ottawa (Ontario)
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John H. Sims, c.r. Sous‑procureur général du Canada
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