Ottawa (Ontario), le 6 octobre 2008
En présence de madame la juge Dawson
ENTRE :
demanderesse
et
ET DE L’IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT
[1] Un agent des visas a rejeté la demande de résidence permanente de Mme Bhatt, à titre de membre de la catégorie des travailleurs qualifiés. La présente demande de contrôle judiciaire déposée à l’encontre de cette décision est rejetée, parce que l’appréciation faite par l’agent de l’expérience et du facteur professionnel de Mme Bhatt n’est pas déraisonnable et qu’il n’y a aucune apparence de partialité ou d’injustice.
[2] La demande de résidence permanente de Mme Bhatt a été appréciée sous le régime de la Loi sur l’immigration, L.R.C. 1985, ch. I-2 (l’ancienne loi), et de son règlement d’application, le Règlement sur l’immigration de 1978, DORS/78-172 (l’ancien règlement). Elle a également été appréciée sous le régime de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi), et de son règlement d’application, le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le Règlement).
[3] Lors de l’appréciation de la demande de Mme Bhatt sous le régime de l’ancienne loi et de son règlement d’application, l’agent n’a accordé aucun point dans la catégorie de l’expérience. Cela a été fatal à sa demande, parce que le paragraphe 11(1) de l’ancien règlement exigeait d’un demandeur qu’il reçoive au moins un point d’appréciation pour l’expérience (à moins que le demandeur ait un emploi réservé, ce qui n’était pas le cas de Mme Bhatt).
[4] Lors de l’appréciation de la demande sous le régime de la législation actuelle, selon la conclusion de l’agent des visas, Mme Bhatt ne l’a pas convaincu qu’elle avait exercé une partie appréciable des fonctions principales de la profession qu’elle envisageait, celle de technicienne juridique (CNP 4211), notamment les fonctions essentielles. Cela a été fatal à sa demande par suite de l’application des paragraphes 75(2) et (3) du Règlement. L’article 75 est reproduit en annexe.
[5] Mme Bhatt fait valoir que les deux appréciations sont déraisonnables, parce que l’agent a fait abstraction de documents qu’elle avait présentés et qui démontraient son expérience professionnelle. Mme Bhatt avait fourni des lettres provenant de deux cabinets d’avocats où, affirme‑t‑elle, elle avait travaillé, lettres qui énonçaient les fonctions qu’elle dit avoir exercées entre juin 1999 et mai 2007.
[6] Mme Bhatt a dû se présenter à une entrevue qui avait pour but de vérifier son emploi et son expérience, parce que les lettres de ses employeurs qu’elle avait fournies ne semblaient pas dignes de foi. Voici ce qui est inscrit dans les notes du Système de traitement informatisé des dossiers d’immigration (le STIDI) au sujet de l’entrevue :
[traduction]
La DP déclare qu’elle a la responsabilité de conserver les projets de documents et de s’occuper des clients. Je lui ai demandé d’expliquer ses fonctions en détail. La DP n’a pas répondu à ma question. Comprenez‑vous ma question? Oui. Avez‑vous besoin d’un interprète? Non. Que faites‑vous au travail? Aucune réponse. Veuillez m’expliquer les fonctions de votre poste. Aucune réponse. J’ai expliqué à la DP que si elle ne répondait pas à mes questions, j’allais devoir rejeter sa demande. La DP déclare qu’elle comprend. Veuillez m’expliquer les fonctions de votre poste. Aucune réponse. Veuillez me dire ce que vous faites au travail. Aucune réponse. J’ai mis fin à l’entrevue et j’ai demandé un interprète, car je n’étais pas certain que la DP comprenait mes questions. L’entrevue a repris en hindi. La DP déclare qu’elle comprend l’interprète.
Veuillez expliquer les fonctions de votre poste. Je travaille de 10 h à 17 h et j’ai commencé en 1999. Je travaille pour M. Shah depuis 2006, puisque mon employeur précédent est parti au Canada. Je donne des conseils juridiques à mes clients. Je travaille en matière civile, relativement à plusieurs types de contrats. J’ai remarqué que la DP avait une copie de la description du CNP 4211 (technicien juridique) et qu’elle semblait la lire. Je lui ai demandé de me remettre ce document. Quel type de contrats préparez‑vous? Aucune réponse. La DP déclare maintenant qu’elle fournit des conseils sur des contrats relatifs aux biens. Quel genre de conseils donnez‑vous? Pause. Je collabore avec mes supérieurs pour apprendre et travailler. Pourquoi éprouvez‑vous tant de difficultés à répondre aux questions sur votre travail? Aucune réponse. La DP déclare alors qu’elle est nerveuse. Pourquoi? Aucune réponse.
[7] L’agent des visas a déposé un affidavit dans la présente instance, dans lequel il a déclaré sous serment que les notes du STIDI étaient le reflet exact des questions posées à Mme Bhatt et de ses réponses. On ne l’a pas contre‑interrogé sur cet affidavit. J’accepte donc les notes du STIDI à titre de preuve des faits auxquels elles font référence. Voir la décision Tajgardoon c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2001] 1 C.F. 591 (1re inst.). Dans la mesure où la preuve de l’agent des visas contredit celle de Mme Bhatt, je retiens la preuve de l’agent, parce qu’elle est compatible avec les notes du STIDI, lesquelles la corroborent.
[8] L’agent des visas n’était pas tenu de considérer comme véridique le contenu des lettres fournies par Mme Bhatt. Le vice de forme que l’agent a constaté dans la lettre, de même que l’incapacité de Mme Bhatt à répondre aux questions sur son expérience de travail et le fait que, durant l’entrevue, elle a semblé lire la description tirée du CNP pour les fonctions du poste de technicien juridique, étayent entièrement la conclusion de l’agent.
[9] Je suis convaincue que la décision est susceptible de contrôle suivant la norme de décision raisonnable. Voir la décision Choi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2008] A.C.F. no 734, au paragraphe 12. Les motifs de l’agent sont justifiés, clairs et intelligibles. La décision appartient aux issues acceptables pouvant se justifier en fait et en droit. La décision est donc raisonnable.
[10] Il n’y a aucune apparence d’injustice ou de partialité.
[11] La demande de contrôle judiciaire sera rejetée.
[12] Les avocats n’ont proposé aucune question à certifier et je conviens que le présent dossier n’en soulève pas.
JUGEMENT
LA COUR STATUE que :
1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.
Juge
Traduction certifiée conforme
Christian Laroche, LL.B.
Juriste-traducteur et traducteur-conseil
ANNEXE
L’article 75 du Règlement est rédigé comme suit :
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-2969-07
INTITULÉ : MINALBEN BHATT c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
LIEU DE L’AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L’AUDIENCE : LE 30 SEPTEMBRE 2008
MOTIFS DU JUGEMENT
DATE DES MOTIFS
ET DU JUGEMENT : LE 6 OCTOBRE 2008
COMPARUTIONS :
Stephen L. Winchie POUR LA DEMANDERESSE
Robert Bafaro POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Stephen L. Winchie POUR LA DEMANDERESSE
Mississauga (Ontario)
John H. Sims, c.r. POUR LE DÉFENDEUR
Sous‑procureur général du Canada