ENTRE :
Demandeur
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
Le juge Pinard
[1] Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire à l’encontre de la décision de monsieur Roger Houde, pour la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (ci-après la SPR), statuant que le demandeur n’est pas un « réfugié » au sens de la Convention, ni une « personne à protéger » selon les définitions données aux articles 96 et 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. (2001), ch. 27.
[2] Le demandeur reproche au décideur d’avoir commis plusieurs erreurs qui justifient l’intervention de cette Cour.
[3] Premièrement, le demandeur réfère au passage suivant de la décision :
Le demandeur a témoigné qu’il n’a pas de mandat d’émis contre lui, qu’il n’est pas recherché par la police et que c’est à son cousin qu’elle en voudrait.
[4] Le demandeur soutient que le tribunal a eu tort de considérer qu’il avait témoigné à l’effet qu’il n’était pas recherché par la police. Le demandeur a raison. Le contraire apparaît clairement de son Formulaire sur les renseignements personnels et de son témoignage à l’audition.
[5] Dans un deuxième temps, le demandeur reproche à la SPR d’avoir conclu qu’il existe une possibilité de refuge intérieur (« PRI ») en raison du fait qu’en Inde, le refuge intérieur est possible lorsqu’une personne est recherchée par des acteurs non-étatiques, sans reconnaître que c’est la police, ici, qui le recherche.
[6] Dans sa décision, la SPR fait référence au document intitulé Operational Guidance Note: India : « Sikhs from the Punjab are able to move freely within India and internal relocation to escape the attention of individuals in their home area would not be unduly harsh. » Tel que précisé par le demandeur, cette référence est dans la section intitulée « Sikhs in fear of non-State agents. » Bien que la conclusion du tribunal puisse être supportée par une autre section du même document intitulée « Sikhs in fear of State Persecution », il n’en demeure pas moins que le tribunal cite expressément un extrait qui ne s’applique pas au cas du demandeur.
[7] Dans un troisième temps, le demandeur réfère au passage suivant de la décision en cause :
Le demandeur a déposé sous C-8, une série sur la résurgence du terrorisme. Bien que valable aux yeux du conseiller, cette preuve documentaire consiste en articles de journaux. Aussi respectables que soient ces journaux, selon le procureur, le tribunal accorde plus de valeur probante au rapport qui constitue le Cartable national de Montréal qui provient de source non intéressée.
[8] Le demandeur reproche au tribunal de s’être basé sur un document qui n’était pas devant lui et dont il a vraisemblablement pu prendre connaissance dans l’intervalle de trois semaines entre la date de sa décision et celle de ses motifs. Effectivement, le « rapport qui constitue le Cartable national de Montréal » n’est pas mentionné dans la liste des documents que le tribunal précise avoir consultés et n’apparaît nulle part au dossier du tribunal. Il appert donc que la décision du tribunal est basée sur un document dont le demandeur n’aurait pas pu prendre connaissance en temps utile, soit avant que la décision ne soit rendue.
[9] À mon sens, il s’agit là de trois erreurs qui, prises ensemble, teintent et vicient la décision. À mon sens, un justiciable qui jure craindre la persécution dans le pays où on veut le retourner a droit, si on lui refuse l’asile, à une décision plus rigoureuse.
[10] En conséquence, la demande de contrôle judiciaire est accueillie, la décision de monsieur Roger Houde, pour la SPR, est annulée, et l’affaire est renvoyée devant la Section de la protection des réfugiés différemment constituée pour nouvelle détermination.
Ottawa (Ontario)
Le 14 janvier 2008
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-2193-07
INTITULÉ : MANPREET SINGH BRAR c. LE MINISTRE DE LA
CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
LIEU DE L’AUDIENCE : Montréal (Québec)
DATE DE L’AUDIENCE : Le 4 décembre 2007
MOTIFS DU JUGEMENT : Le juge Pinard
DATE DES MOTIFS : Le 14 janvier 2008
COMPARUTIONS :
Me Michel Le Brun POUR LE DEMANDEUR
Me Andrea Shahin POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Michel Le Brun POUR LE DEMANDEUR
Montréal (Québec)
John H. Sims, c.r. POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada