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Date : 20071115

 

                                                                                                                           Dossier : T‑1837‑07

 

Référence : 2007 CF 1196

 

 

Ottawa (Ontario), le jeudi 15 novembre 2007

 

 

EN PRÉSENCE DE MADAME LA PROTONOTAIRE MIREILLE TABIB

 

 

ENTRE :

 

PURDUE PHARMA

 

demanderesse

‑ et ‑

 

 

PHARMASCIENCE INC. et

LE MINISTRE DE LA SANTÉ

 

défendeurs

 

 

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]               Dans la présente requête en ordonnance d’interdiction présentée conformément au Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité) (le Règlement), la demanderesse sollicite une ordonnance déclarant que la demande est une instance à gestion spéciale et, dans le contexte de la gestion de l’instance, que la défenderesse Pharmascience Inc. (Pharmascience) est tenue de produire sa preuve avant que la demanderesse produise la sienne.

 

[2]               Il apparaît que les procédures introduites en vertu du Règlement deviennent de plus en plus complexes et longues, tant pour ce qui concerne le progrès de l’instance que pour ce qui concerne la durée des audiences, à tel point que les audiences au fond qui ont lieu au cours des six derniers mois de la suspension réglementaire de 24 mois deviennent la règle plutôt que l’exception, et au point qu’il est habituel que les audiences durent trois jours ou davantage. Autant que sache la soussignée, aucune demande du genre ne semble avoir été instruite au fond sans avoir dû être désignée comme instance à gestion spéciale et, le plus souvent, elles requièrent d’importantes audiences interlocutoires et audiences d’établissement de calendrier. Les avis d’allégations deviennent de plus en plus longs, et les allégations d’invalidité en particulier deviennent de plus en plus longues et de plus en plus complexes. Après qu’une allégation d’invalidité est faite, un demandeur est presque contraint de produire une preuve, et sa meilleure preuve, sur chacun des moyens allégués d’invalidité, même si le défendeur ne produira jamais une preuve sur cet aspect. Et, que le défendeur établisse ou non un dossier indépendant sur l’une quelconque de ses allégations d’invalidité, il est encore à même, et trop souvent se sent contraint, de produire une preuve visant simplement à ébranler, à contredire ou à mettre en doute la crédibilité des déposants du demandeur. Les points secondaires prennent donc souvent des proportions excessives, consommant les ressources des parties et celles de la Cour, et prolongeant le temps requis pour l’audition de la demande et pour la décision au fond. Heureusement, nombre de ces points sont abandonnés avant l’audience au fond, mais ils auront néanmoins contribué à multiplier le nombre d’experts jugés nécessaires par les parties, à prolonger le temps nécessaire pour organiser et conduire leurs contre‑interrogatoires, et souvent à augmenter le temps et les ressources que les parties et la Cour ont dû consacrer aux requêtes interlocutoires découlant de cette preuve.

 

[3]               En fin de compte, les questions, dans la grande majorité, sinon dans la totalité, des procédures introduites en vertu du Règlement finissent, lorsqu’elles sont sur le point d’être instruites, par être nettement plus réduites qu’elles l’étaient à l’origine et qu’elles le sont devenues au cours de l’instance. C’est le chemin parcouru pour en arriver là qui devient de plus en plus long et de plus en plus consommateur de temps et de ressources.

 

[4]               Existe‑t‑il un moyen de réduire plus tôt les questions à instruire? Peut‑on parvenir à régler les points soulevés dans la procédure d’une manière tout aussi juste, mais moins coûteuse et plus efficace? La présente requête de la demanderesse propose que l’on s’y prenne tout simplement en inversant l’ordre dans lequel la demanderesse et la défenderesse signifieront et produiront leur preuve.

 

[5]               L’idée n’est pas nouvelle, et elle a par le passé été proposée par des demandeurs et rejetée par les tribunaux (voir Merck & Co. c. Nu‑Pharm Inc. et al. (2000) 7 C.P.R. (4th) 292, et Bayer AG et al. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien‑être social) (1993) 51 C.P.R. (3rd) 329).

 

[6]               L’affaire dont je suis saisie est, je crois, différente. Dans les affaires antérieures, les demanderesses voulaient une inversion de l’ordre de production de la preuve en invoquant essentiellement des arguments fondés sur les dispositions du Règlement, et en alléguant l’équité procédurale et l’éventuel préjudice. Le moyen juste, tout en étant le moins coûteux et le plus efficace, de mener ces litiges complexes n’a pas été considéré dans ces précédents. La gestion des instances, et le pouvoir du juge chargé de la gestion de l’instance de donner les directives qui sont nécessaires pour que soit apportée au litige une solution qui soit juste et la plus expéditive et économique possible ne semblent pas avoir été considérés dans ces précédents (et d’ailleurs, s’agissant du jugement Merck, le principe de gestion des instances n’existait même pas). En outre, il est juste de dire que les procédures introduites en vertu du Règlement n’avaient pas, à l’époque, atteint les proportions qu’elles ont aujourd’hui. L’idée même que les parties s’interrogent sur l’opportunité d’une inversion de l’ordre dans lequel une portion ou la totalité de la preuve sera produite a d’ailleurs été soulevée récemment par la Cour lors de discussions informelles entre les membres de la Cour et les avocats spécialisés dans ce domaine, comme moyen possible de rationaliser les instances de cette nature.

 

[7]               Je suis d’avis que la Cour a, s’agissant de la gestion des instances, le pouvoir discrétionnaire de modifier l’ordre dans lequel la preuve des parties, dans une demande, sera signifiée et produite, si elle est persuadée que cela est nécessaire pour apporter une solution au litige qui soit juste et la plus expéditive et économique possible. Ce pouvoir discrétionnaire est envisagé à l’alinéa 385(1)a) des Règles. Au besoin, on peut aussi invoquer à ce propos l’article 55 des Règles, qui autorise la Cour à modifier une règle ou à exempter une partie ou une personne de son application. On peut également faire une analogie avec l’article 274, qui fixe l’ordre dans lequel la preuve sera présentée durant un procès, mais qui prévoit explicitement que la Cour peut donner des directives contraires.

 

[8]               Selon moi, si une telle inversion doit être envisagée ou ordonnée, elle doit l’être pour permettre d’apporter au litige une solution qui soit la plus expéditive et la plus économique possible, tout en demeurant juste. Autrement dit, le but et la condition préalable seraient qu’une telle inversion ne doit pas modifier les droits substantiels des parties ni l’équité de leurs droits procéduraux. La première exigence, celle à laquelle la partie requérante a l’obligation de satisfaire, c’est de convaincre la Cour qu’une telle ordonnance contribuerait à apporter à la procédure une solution à la fois juste et la plus expéditive et économique possible. C’est à la Cour qu’il appartient de dire si l’ordonnance devrait être rendue, compte tenu des circonstances.

 

[9]               En l’espèce, les parties ont généralement admis que la présente affaire fait intervenir des questions particulièrement complexes d’interprétation et d’invalidité. Il y a aussi des questions de non‑contrefaçon. L’avis d’allégation de la défenderesse s’étend sur 93 pages, fait état de quelque 13 motifs d’invalidité et comprend également un avis d’allégation auparavant émis par Novopharm à propos du même médicament, avis qui lui‑même a donné lieu à une demande d’interdiction extrêmement longue et complexe. (La demande fut finalement l’objet d’une transaction, mais uniquement après que toute la preuve eut été produite, y compris la contre‑preuve.)

 

[10]           Ayant entendu les observations détaillées des parties, et ayant été personnellement chargée de la gestion de l’instance pour ce qui concernait la demande antérieure faisant intervenir Novopharm, je considère qu’il est fort possible que la présente affaire ne puisse être menée à son terme dans le délai de 24 mois prévu par le Règlement, pour le cas où les deux parties obtiendraient l’autorisation d’assigner chacune plus de cinq experts, et pour le cas où des requêtes en autorisation de produire une contre‑preuve seraient déposées. Au vu du dossier que j’ai devant moi, si le litige suit son cours de la manière ordinaire, cela pourrait fort bien se produire.

 

[11]           Selon la demanderesse, sa proposition aurait pour effet de réduire dès le départ les points à décider, ainsi que de diminuer les probabilités qu’une contre‑preuve soit requise, et finalement elle se révélerait plus expéditive et moins coûteuse pour les parties.

 

[12]           S’agissant des allégations de non‑contrefaçon, la demanderesse admet que le facteur le plus important de réduction des points à décider sera son propre examen de l’information de Pharmascience portant sur la formulation, la dissolution et les essais pharmacocinétiques, ainsi que sa conclusion quant aux revendications du brevet auxquelles selon elle il serait porté atteinte. Jusqu’à ce que cela soit fait, demander à Pharmascience de produire sa preuve la première ne permettrait pas de réduire les points à décider et forcerait plutôt Pharmascience à produire une preuve sur des points qui ne seront peut‑être jamais disputés. La demanderesse dit que cette réduction initiale des questions de non‑contrefaçon pourrait se faire en l’espace d’environ 21 jours, après qu’elle aura reçu et passé en revue l’information de Pharmascience et qu’elle aura dit alors, probablement par avis de demande modifié, à quelles revendications du brevet il serait selon elle porté atteinte. Puis la demanderesse explique que, si Pharmascience était dès lors requise de produire sa preuve la première, il y aurait possibilité de réduire encore les points à décider, puisque Pharmascience pourrait abandonner certaines de ses allégations de non‑contrefaçon. La période requise pour le dépôt des affidavits des deux parties, selon cette proposition, serait de 110 jours, plutôt que de 150 jours d’après le calendrier autrement envisagé par les parties, soit 40 jours de moins. Je reconnais qu’il y aurait possibilité de réduire davantage les points anticipés par la demanderesse, mais la plupart des points à réduire seraient de toute façon réduits dans la procédure normale. Je ne suis pas certaine que la réduction additionnelle possible des points à décider serait assez appréciable, et l’épargne de temps assez appréciable, pour qu’il soit opportun de forcer Pharmascience, sans son consentement, à produire la première sa preuve concernant la contrefaçon, d’autant plus qu’il me semble que les questions de non‑contrefaçon sont beaucoup moins volumineuses et complexes que les questions d’invalidité, et que les questions d’invalidité dicteront probablement le rythme auquel cette demande pourra suivre son cours.

 

[13]           C’est à propos des questions d’invalidité que je puis imaginer le plus fort potentiel de réduction des questions et d’épargne de temps et d’argent. La demanderesse a admis que, s’agissant des allégations d’absence de solides prévisions et des allégations de portée excessive des revendications, il lui faudrait probablement produire une preuve factuelle des inventeurs avant que Pharmascience puisse être requise de produire sa preuve. La demanderesse dit qu’il lui serait possible de le faire dans un délai de 30 jours. Elle croit que Pharmascience aurait alors sans doute besoin de 90 jours (y compris la période initiale de 30 jours) pour signifier et produire sa preuve concernant l’invalidité. Comme cela aurait pour effet de réduire considérablement les points à décider, la demanderesse croit qu’un maximum de 60 jours, et probablement moins, lui serait nécessaire pour produire sa preuve. La période totale requise pour le dépôt des preuves respectives des parties serait donc de 150 jours. Elle ne serait pas en réalité différente si la demanderesse déposait sa preuve la première, de la manière habituelle. (La demanderesse aurait besoin de 90 jours pour produire sa preuve la première, et Pharmascience a dit que, sous réserve de son examen de la preuve de la demanderesse, elle ne prévoyait pas qu’une période supérieure à 60 jours lui serait nécessaire pour produire sa contre‑preuve.)

 

[14]           La distinction entre les deux manières de s’y prendre serait perçue ainsi : Pharmascience a fait savoir au cours de l’audience que la preuve qu’elle envisage aujourd’hui de présenter à la fois sur les questions d’invalidité et sur les questions de contrefaçon pourrait probablement être produite par un maximum de cinq experts. Par ailleurs, la demanderesse, ayant déjà eu l’expérience d’une contestation de ce brevet en particulier à l’encontre de Novopharm, et même compte tenu de la jurisprudence récente qui limite à cinq, sans l’autorisation de la Cour, le nombre d’experts que peut appeler chacune des parties, dit qu’il est probable qu’elle devra appeler plus de cinq experts, afin de faire bonne figure sur les treize motifs d’invalidité invoqués dans l’avis d’allégation. La demanderesse a cependant admis que, si Pharmascience devait produire sa preuve la première et se limiter à cinq experts, non seulement il lui serait beaucoup plus difficile d’obtenir l’autorisation de produire plus de cinq experts, mais aussi que cela ne lui serait peut‑être pas nécessaire du tout, puisqu’il en résulterait nécessairement une réduction des points à décider.

 

[15]           Or, Pharmascience a dit à l’audience que, si la demanderesse produisait sa preuve la première et obtenait l’autorisation de produire le témoignage de plus de cinq experts, il serait très probable que Pharmascience elle‑même, par nécessité, sollicite l’autorisation de produire le témoignage de plus de cinq experts, ainsi qu’un délai additionnel pour ce faire.

 

[16]           Je conclus de ce qui précède qu’il est en effet assez probable que, si Pharmascience devait produire sa preuve la première, cela aurait pour effet de réduire sensiblement les points à débattre dans cette affaire, et qu’il est probable que moins de témoins experts seraient nécessaires. Moins il y aura d’experts et plus les points litigieux seront réduits, plus faibles seront les probabilités qu’une contre‑preuve soit demandée ou autorisée. D’ailleurs, c’est connu, les experts sont très occupés, et la tâche de s’assurer de leur présence durant un contre‑interrogatoire représente le gros du délai généralement ménagé pour les contre‑interrogatoires. Moins il y aura d’experts, moins il faudra de temps pour coordonner, organiser et conduire leurs contre‑interrogatoires. Le résultat, c’est que les points litigieux seront décidés d’une manière plus économique, et d’une manière plus expéditive.

 

[17]           Évidemment, il n’y a aucune certitude à cela, d’autant que les parties peuvent, au vu des circonstances de la présente affaire, et selon l’ordre dans lequel elles produiraient leurs preuves, faire valoir, justification à l’appui, que des requêtes en autorisation de produire une contre‑preuve seront probablement nécessaires et pourraient différer la date et la tenue des contre‑interrogatoires d’experts. Néanmoins, je reste convaincue que, au vu des circonstances de la présente affaire, il est probable que l’inversion de l’ordre dans lequel la preuve doit être produite, du moins s’agissant des questions d’invalidité, aurait pour effet de réduire d’une manière appréciable les points litigieux et de favoriser, pour les points soulevés dans cette demande, une solution juste, tout en étant plus économique et plus expéditive. Il y a à cela une importante réserve:  les épargnes de temps et d’argent ne sauraient à mon avis être mises à profit que si les deux parties sont engagées dans ce processus et l’ont véritablement à cœur, pour que chacune puisse bénéficier de la coopération et de la transparence de l’autre, deux conditions indispensables. D’ailleurs, la complexité même des points litigieux et l’étrangeté résultant de l’inversion partielle requise pour l’examen des allégations de non‑contrefaçon, d’absence de prévisions solides et de portée excessive des revendications, nécessiteraient un degré élevé de coopération entre les parties.

 

[18]           Malheureusement, Pharmascience s’oppose énergiquement à l’idée d’inverser l’ordre dans lequel la preuve sera produite, à moins que la demanderesse n’offre les contreparties suivantes : 1) que Pharmascience soit autorisée, de plein droit, à déposer une contre‑preuve; et 2) que la demanderesse abandonne, et s’engage à ne pas invoquer, les arguments avancés dans son avis de demande à propos des lacunes de l’avis d’allégation. La demanderesse ne fera pas ces concessions et je ne crois pas que sa position soit déraisonnable. Il faut donc en déduire que Pharmascience s’oppose à l’ordre proposé par la demanderesse pour la production de la preuve. L’opposition de Pharmascience – et la nature des concessions qu’elle recherche – sont telles que, au vu des circonstances, imposer une inversion de l’ordre de production de la preuve, en totalité ou en partie, ne favoriserait pas le climat de coopération nécessaire pour que les parties tirent pleinement bénéfice des gains de temps. Les épargnes de temps et d’argent qui résulteraient alors d’une inversion de l’ordre de présentation de la preuve seraient probablement moins considérables, et cela milite contre l’idée d’imposer une telle inversion à Pharmascience.

 

[19]           Je reconnais qu’il y a un avantage tactique indéniable pour la partie, quelle qu’elle puisse être, qui produit sa preuve la deuxième. Non seulement cette partie produira sa preuve sensiblement de la manière qu’elle avait prévu de la présenter et de la modeler, mais encore elle a l’avantage additionnel de pouvoir l’adapter pour qu’elle s’oppose le mieux à celle de la partie adverse; en l’absence d’une preuve indépendante qui lui soit propre, cette partie a aussi la possibilité d’affaiblir et de contester directement la preuve de la partie adverse, ainsi que de miner sa crédibilité. Ce sont là des avantages tactiques, qui, bien que légitimes, ne sont ni substantiels ni procéduraux. Ces avantages tactiques, du moins l’espère‑t‑on, ne devraient pas en définitive déterminer l’issue de la procédure.

 

[20]           Pour le meilleur ou pour le pire, la procédure envisagée par les Règles en ce qui concerne les demandes présentées en vertu du Règlement fait que la défenderesse dispose de cet avantage tactique, et il me semble que, pour la priver de cet avantage sans son consentement, il faudrait pouvoir compter sur d’importantes épargnes de temps, d’argent et de ressources, tant pour la Cour que pour les parties.

 

[21]           Comme je l’ai dit plus haut, cette affaire fait intervenir des questions de contrefaçon, d’absence de solides prévisions et d’invalidité, pour lesquelles la preuve devrait être produite dans l’ordre normal; l’inversion de cet ordre ne s’appliquerait donc qu’à une partie de la preuve, une procédure qui, à ce jour, reste mal connue de la Cour et des parties et qui, pour cette raison, et sauf coopération exemplaire entre les parties, pourrait nécessiter davantage d’interventions interlocutoires de la part de la Cour.

 

[22]           Eu égard à ce qui précède, et compte tenu aussi que la notion d’inversion de l’ordre de présentation de la preuve, pour quelques‑uns ou la totalité des points litigieux dans une procédure d’avis de conformité, est encore une notion nouvelle, que certains défendeurs n’ont peut‑être pas mesurée au moment de signifier leurs avis d’allégation, et à laquelle ils ne sont donc peut‑être pas en état de faire face, je n’exercerai pas mon pouvoir discrétionnaire d’établir un calendrier selon lequel Pharmascience devrait produire sa preuve la première. Ce qui ne veut pas dire que la Cour ne pourrait pas un jour décider d’exercer différemment son pouvoir discrétionnaire, même dans des circonstances analogues.

 

[23]           Je relèverai cependant que la position et l’argumentation de Pharmascience donnent à penser que Pharmascience est davantage préoccupée de préserver l’avantage tactique dont elle bénéficie en produisant sa preuve après que la demanderesse aura produit la sienne, qu’elle ne l’est de réduire dès le début les points litigieux, afin de limiter le nombre d’experts, et les frais qu’ils entraînent, et probablement de comprimer le temps nécessaire pour faire instruire cette demande. C’est, je crois, un choix que Pharmascience a le droit de faire, mais, simultanément, les conséquences de ce choix ne devraient pas être subies uniquement par la demanderesse et par la Cour. Le Règlement prévoit qu’il doit être statué dans un très court délai sur les demandes de ce genre et, en tentant de caser à l’intérieur de ce délai des procédures qui ressemblent en complexité aux actions pleinement engagées en contrefaçon de brevets, la Cour est trop souvent obligée de planifier, d’instruire et de juger des requêtes complexes, dans des délais trop brefs, à plus forte raison s’il s’agit de l’audition au fond. Quand les affaires sont reportées, c’est au demandeur qu’il appartient de justifier une prorogation de la période de suspension, sous peine de perdre la possibilité qu’il a d’obtenir une ordonnance d’interdiction. La demanderesse doit composer aussi avec la menace de devoir payer des dommages‑intérêts selon l’article 8 pour une période plus longue si sa demande est finalement rejetée. Dans la mesure où ces points litigieux pourraient devoir être décidés en rapport avec la présente procédure, je crois qu’il serait légitime que la Cour examine la manière dont cette demande a en réalité suivi son cours et qu’elle tienne compte des répercussions qu’a pu avoir le choix de Pharmascience.

 

 

 


ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE :

 

1.                  La présente instance suivra son cours en tant qu’instance à gestion spéciale;

 

2.                  Jusqu’à nouvelle directive ou ordonnance du juge ou du protonotaire chargé de la gestion de l’instance, le calendrier des démarches complémentaires à accomplir dans la présente instance sera le suivant :

 

a)         la preuve de la demanderesse sera signifiée et déposée au plus tard 97 jours après la date à laquelle Pharmascience se sera conformée à l’ordonnance de divulgation datée du 14 novembre 2007, période qui comprendra le congé de Noël;

b)      la preuve de la défenderesse sera signifiée et déposée au plus tard 60 jours après la date de signification de la preuve de la demanderesse;

c)       les contre‑interrogatoires sur affidavits auront lieu au plus tard 90 jours à compter de la date de signification de la preuve de la défenderesse;

d)      la demanderesse est autorisée à signifier et déposer une demande d’audience dès qu’auront eu lieu les contre‑interrogatoires sur affidavits, et en tout état de cause elle devra le faire au plus tard 10 jours après qu’auront eu lieu les contre‑interrogatoires sur affidavits.

e)       le dossier de la demanderesse sera signifié et déposé au plus tard 45 jours après qu’auront eu lieu les contre‑interrogatoires sur affidavits.

f)        le dossier de la défenderesse sera signifié et déposé au plus tard 45 jours après la signification du dossier de la demanderesse.

 

3.                  Les dépens de la requête suivront l’issue de la cause.

 

 

« Mireille Tabib »

Protonotaire

 

 

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes, LL.B.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                                T‑1837‑07

 

 

INTITULÉ :                                                               Purdue Pharma
c.
Pharmascience Inc. et le ministre de la Santé

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                         OTTAWA (ONTARIO)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                       LE 1er NOVEMBRE 2007

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :                          LA PROTONOTAIRE MIREILLE TABIB

 

 

DATE DES MOTIFS :                                              LE 15 NOVEMBRE 2007

 

 

COMPARUTIONS :

 

JAMES MILLS

 

POUR LA DEMANDERESSE

PAULA BREMNER

 

POUR LA DÉFENDERESSE

PHARMASCIENCE INC.

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

GOWLING LAFLEUR HENDERSON LLP

Ottawa (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

HITCHMAN & SPRIGINGS

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DÉFENDERESSE

PHARMASCIENCE INC.

JOHN H. SIMS, c.r.

SOUS‑PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

POUR LE DÉFENDEUR

LE MINISTRE DE LA SANTÉ

 

 

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