Ottawa (Ontario), le 26 juillet 2007
EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE MAX M. TEITELBAUM
ENTRE :
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT
[1] Il s’agit d’un appel d’une décision rendue le 9 novembre 2006, dans laquelle un juge de la citoyenneté (le juge) a conclu que Lau Kwok Ping, la demanderesse, n’avait pas satisfait aux conditions de résidence énumérées à l’alinéa 5(1)c) de la Loi sur la citoyenneté, L.R.C. 1985, ch. C‑29 (la Loi) et a donc rejeté sa demande de citoyenneté.
[2] Selon l’alinéa 5(1)c) de la Loi, toute personne qui demande la citoyenneté doit avoir résidé au Canada pendant au moins trois ans en tout (1095 jours) dans les quatre ans (1460 jours) qui ont précédé la date de sa demande de citoyenneté. En l’espèce, la preuve a révélé que la demanderesse avait seulement été physiquement présente au Canada pendant 982 jours.
[3] Bien qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour fédérale que la présence physique de l’auteur d’une demande de citoyenneté n’est pas requise pour toute la période de 1095 jours, le juge a souligné dans sa décision qu’il était d’avis qu’une absence trop longue du Canada pendant cette période minimale établie par la Loi était contraire à l’objet des conditions de résidence prévues à la Loi. Étant donné que la demanderesse n’avait pas été physiquement présente au Canada pendant 1095 jours, le juge a donc conclu qu’elle n’avait pas satisfait aux conditions de résidence énumérées à l’alinéa 5(1)c) de la Loi.
[4] Comme le terme « résidence » n’est pas défini dans la Loi, il est bien établi que les juges de la citoyenneté peuvent appliquer un des trois critères établis pour décider si un demandeur a satisfait aux conditions de résidence (voir Rizvi c. Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2005 CF 1641; Eltom c. Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2005 CF 1555, Lam c. Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, [1999] A.C.F. no 410 (QL)). Un de ces critères, connu comme le critère de la présence physique ou le critère de la décision Pourghasemi, exige que le demandeur soit physiquement présent au Canada pendant une période minimale de 1095 jours. Les deux autres critères reposent sur des interprétations plus souples des conditions de résidence. Par exemple, le critère de la décision Koo exige que l’on calcule les absences du demandeur du Canada en vue de déterminer quel genre de liens ce dernier entretient avec le Canada et s’il y « vit régulièrement, normalement ou ordinairement ». Un juge de la citoyenneté peut appliquer l’un de ces trois critères, et la Cour peut réexaminer la décision pour s’assurer que le critère choisi par le juge de la citoyenneté a bien été appliqué.
[5] La demanderesse allègue que le juge de la citoyenneté a commis une erreur en omettant de préciser le critère de citoyenneté qu’il avait appliqué. Avec égards, je suis d’avis que la prétention de la demanderesse sur cette question n’est pas fondée. Le juge a manifestement choisi le critère de la présence physique en indiquant qu’il était d’avis que le fait d’examiner la période de résidence autrement qu’en comptant le nombre de jours où un demandeur avait été physiquement présent au Canada était contraire à l’objet de la Loi. Après avoir fait son choix quant au critère, il l’a appliqué lorsqu’il a dit [traduction] « Vous n’avez pas été en mesure de me convaincre que vous avez été physiquement présente au Canada pendant la période requise ».
[6] La demanderesse conteste également la décision du juge au motif qu’il a tiré une conclusion défavorable relative à la crédibilité sans l’informer de ses préoccupations à cet égard. Cette prétention est fondée sur le fait que le juge a écrit ce qui suit dans ses notes :
[traduction]
Vous alléguez avoir été absente seulement 478 jours sur une période de 1460 jours, résultant en une présence physique totale de 982 jours, ce qui indique qu’il vous manque 113 jours pour satisfaire à la condition minimale de 1045 jours prévue à la Loi. À mon avis, en me fondant sur la preuve documentaire que vous avez fournie, il vous manque même un plus grand nombre de jours. Je ne crois pas que vous êtes honnête et sincère au sujet de toutes vos absences (dossier certifié du tribunal, aux pages 6 et 7).
Le défendeur soutient que cette prétention n’est pas fondée puisque la décision du juge de la citoyenneté ne reposait pas sur une conclusion défavorable relative à la crédibilité de la demanderesse.
[7] Il n’y a rien qui indique que le juge a tenu compte de sa préoccupation quant à la sincérité de la demanderesse lorsqu’il a rendu sa décision. En fait, le juge n’était pas tenu de décider si la demanderesse avait été malhonnête au sujet de ses absences du Canada puisque, par sa propre preuve, elle n’avait pas été en mesure de satisfaire au critère de la présence physique. Dans les circonstances, il n’était pas nécessaire que le juge informe la demanderesse du fait qu’il avait des préoccupations quant à la sincérité de ses prétentions, puisque cela n’ajoutait rien à la validité de sa décision.
[8] Étant donné que le juge a rejeté la demande de citoyenneté de la demanderesse sur le fondement qu’elle n’a pas été en mesure de satisfaire aux conditions de résidence énumérées dans la Loi, l’appel doit être rejeté.
JUGEMENT
LA COUR STATUE que l’appel est rejeté.
Juge suppléant
Traduction certifiée conforme
Caroline Tardif, LL.B, trad.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : T-16-07
INTITULÉ : LAU KWOK PING c. LE
MINISTRE DE LA
CITOYENNETÉ ET DE
L’IMMIGRATION
LIEU DE L’AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L’AUDIENCE : LE 17 JUILLET 2007
MOTIFS DE L’ORDONNANCE : LE JUGE SUPPLÉANT
TEITELBAUM
DATE DES MOTIFS : LE 26 JUILLET 2007
COMPARUTIONS :
Max Chaudhary POUR LA DEMANDERESSE
John Provart POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Chaudhary Law Office
North York (Ontario)
John H. Sims, c.r. POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada
Toronto (Ontario)