Date : 20070720
Dossier : T-1379-05
Référence : 2007 CF 763
Ottawa (Ontario), le 20 juillet 2007
En présence de Monsieur le juge Blanchard
ENTRE :
LE CHEF LLOYD CHICOT, agissant en son nom
et au nom de tous les membres de la Première nation KA’A’GEE TU,
et la PREMIÈRE NATION KA’A’GEE TU
demandeurs
et
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
et PARAMOUNT RESOURCES LTD.
défendeurs
MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE
TABLE DES MATIÈRES
Paragraphe
1. Introduction 1
2. Les faits
- Les parties
- La géographie
- Le projet 9
- Les Traités nos 8 et 11 12
- Le processus Deh Cho 15
- Le processus d’approbation réglementaire 18
- Financement 31
- Les deux premières étapes du projet de développement des collines Cameron 37
- Le projet d’expansion 56
- Le processus de consultation pour fins de modifications concernant le projet d’expansion 76
3. Les questions en litige 89
4. La norme de contrôle 90
5. Le droit applicable 94
6. Analyse 100
7. Autres questions 125
8. Conclusion 131
9. Réparation 132
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ANNEXE A : les articles 3, 60.1, 63, 111, 114, 115, 115.1, 125, 66
128, 130, 131, 131.1 et 135 de la Loi sur la gestion des
ressources de la vallée du Mackenzie et
l’article 5 de la Loi sur les opérations pétrolières au Canada
ANNEXE B : Mesures d’atténuation recommandées R-13, R-15, R-16 et R-17 81
ANNEXE C : Recommandations modifiées R-13, R-15, R-16 et R-17 83
ANNEXE D : Sommaire des recommandations et des suggestions 85
1. Introduction
[1] La présente demande de contrôle judiciaire vise à contester la décision d’approuver une recommandation concernant un projet de mise en valeur de ressources pétrolières et gazières dans les Territoires du Nord-Ouest. Ce projet - appelé « projet d’expansion » - que propose Paramount Resources Ltd. (Paramount) est situé dans les collines Cameron, sur lesquelles la Première nation Ka’a’Gee Tu (la PNKT) revendique des droits ancestraux et des droits issus de traités. Selon la PNKT, le projet a des répercussions défavorables sur leurs droits issus de traités établis et leurs droits ancestraux revendiqués, et elle soutient de ce fait que la Couronne était soumise à l’obligation de consultation et d’accommodement avant d’approuver le projet. En l’èspece, la PNKT soutient que la Couronne ne s’est pas acquittée de cette obligation.
2. Les faits
- Les parties
[2] La PNKT, une collectivité des Premières nations du Deh Cho (PNDC) qui descendent du peuple South Slavey de la Nation dénée, et son chef Lloyd Chicot sont les demandeurs en l’espèce. Le 1er novembre 1990, un sous-groupe de la Bande de Fort Providence, composé de 36 membres résidant au lac Kakisa, a formé la Bande de Kakisa Lake. En 1996, le conseil de cette bande a décidé d’adopter le nom de « Première nation Ka’a’Gee Tu ». À l’heure actuelle, environ 55 personnes vivent dans la communauté de Kakisa, sur la rive est du lac Kakisa. La liste des membres de la PNKT compte aujourd’hui environ 62 personnes.
[3] Paramount, qui est défenderesse en l’espèce, est une société d’exploitation de ressources énergétiques dont le siège est situé à Calgary et qui se livre à la prospection, à la mise en valeur, à la transformation, au transport et à la mise en marché de pétrole et de gaz. Paramount fait de la prospection et exploite des réserves pétrolières et gazières dans la région des collines Cameron depuis 1979 environ, après avoir obtenu des permis de prospection visant une superficie d’environ 80 800 acres dans cette région.
[4] Les « ministres compétents », aux termes de l’article 111 de la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie, 1998, ch. 25 (la Loi), sont le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien (AINC), le ministre des Pêches et des Océans, le ministre d’Environnement Canada et le ministre de l’Environnement et des Ressources naturelles du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest.
— La géographie
[5] Les collines Cameron sont une réunion éloignée, située dans les Territoires du Nord-Ouest, juste au nord de la frontière de l’Alberta; elles sont formées par un haut plateau, au sud du lac Tathlina, ainsi que par une série de collines environnantes et plus basses, qui s’étendent au sud-ouest et à l’ouest du lac Tathlina. Le projet de mise en valeur de Paramount vise le haut plateau. Celui-ci est inaccessible des versants nord, nord-ouest et sud-est, et seule y mène une route praticable l’hiver, quand le sol est gelé, du côté sud-ouest, où le terrain n’est pas aussi abrupt. La rivière Cameron s’écoule depuis le plateau vers le nord-ouest et se déverse dans le lac Tathlina, qui est situé à une distance d’environ dix kilomètres au nord du plateau. Le lac Kakisa se trouve à une distance d’environ 70 kilomètres au nord du plateau des collines Cameron, et la communauté de Kakisa est situé sur la rive est de ce lac.
[6] Les demandeurs revendiquent un lien spirituel et culturel profond, de même qu’une dépendance économique à l’égard des collines Cameron. Comme l’a déclaré le chef Chicot : [traduction] « notre culture, notre économie, notre spiritualité et notre mode de vie sont intimement liés à notre terre, qui subvient à nos besoins et qui nous soutient. Notre terre est la demeure du peuple Ka’a’Gee Tu aujourd’hui vivant ainsi que celle de nos ancêtres, et la demeure de toutes les générations à venir de Ka’a’Gee Tu ». Avant l’arrivée de colons dans la région, la PNKT y prenait des animaux, du poisson, des arbres et de l’eau, et de nombreuses familles continuent de chasser et de piéger dans les collines Cameron.
[7] Les demandeurs revendiquent la gouvernance de la région des collines Cameron. Cependant, d’autres groupes autochtones, dont les membres Deh Cho des Premières nations de Deh Gah Got’ie, de Katlodeeche, de West Point et de Trout Lake, la Première nation Dene Tha de l’Alberta, la Première nation de Fort Providence ainsi que les Métis des Territoires du Nord-Ouest revendiquent eux aussi les collines Cameron comme faisant partie de leur territoire traditionnel. Il n’y a pas de consensus parmi ces groupes autochtones au sujet de cette gouvernance.
[8] En l’espèce, les parties ne contestent pas que les terres visées par le projet de mise en valeur que propose Paramount sont également celles pour lesquelles les demandeurs revendiquent des droits issus de traités et font valoir des droits ancestraux. Elles ne s’entendent cependant pas sur la gravité des répercussions du projet que propose Paramount sur ces droits. Les défendeurs conviennent que la Couronne avait l’obligation de consulter les demandeurs, mais il n’y a pas d’entente sur la portée ou la teneur de cette obligation. Les défendeurs sont d’avis que, dans les circonstances, la Couronne s’est acquittée de son obligation de consultation.
- Le projet
[9] Les travaux de mise en valeur des ressources pétrolières et gazières dans les collines Cameron ont procédé par étapes. Les travaux de prospection ont débuté au début des années 1960. Paramount a obtenu des droits miniers à long terme au début des années 1980 et, en 2004, elle s’était vu accorder plusieurs permis de production, de découverte et de prospection. Les travaux de mise en valeur de Paramount dans les collines Cameron se sont déroulés en trois étapes : le projet de forage (août 2000), le projet de réseau de pipeline et de conduites de collecte (avril 2001), ainsi que le projet d’expansion (août 2003). Ces trois projets sont appelés collectivement le « projet de mise en valeur des collines Cameron ». Le projet de mise en valeur proposé au départ consistait à l’installation d’un pipeline transfrontalier, d’une batterie centrale et des installations de collecte. Lorsque la construction du réseau de pipeline et de conduites de collecte a pris fin en août 2002, Paramount a demandé des permis d’utilisation des terres et des eaux afin d’avoir accès à de nouveaux emplacements de puits et raccorder les nouveaux puits au réseau de collecte récemment bâti. Cet aspect du projet de mise en valeur a été qualifié de « projet d’expansion ». Ce dernier a marqué le début des travaux de production de Paramount dans les collines Cameron. L’approbation du projet d’expansion est la décision visée par la présente procédure de contrôle judiciaire.
[10] Le projet d’expansion est d’une grande portée. À la longue, il comportera les éléments suivants : le forage, la mise à l’essai et le raccordement d’une cinquantaine de puits supplémentaires sur dix ans, la production de gaz et de pétrole sur une période de 15 à 20 ans, l’excavation de 733 kilomètres de lignes sismiques, la construction de campements temporaires desservant jusqu’à 200 travailleurs, l’enlèvement d’eau dans divers lacs, de même que l’élimination des déchets de forage.
[11] Avant d’examiner les questions qui sont soulevées en l’èspece, lesquelles ont essentiellement trait à l’obligation de consultation de la Couronne, il est nécessaire de comprendre le contexte dans lequel a été prise la décision contestée. À cette fin, je me propose de passer en revue les renseignements de base sur les traités pertinents, le processus des revendications territoriales globales des Premières nations du Deh Cho, le processus d’approbation réglementaire prévu par la Loi, ainsi que la manière dont ce processus a été suivi en l’espèce.
— Les Traités nos 8 et 11
[12] Les Premières nations du Deh Cho tombent sous le coup des Traités nos 8 et 11. Le Traité no 8 a été signé le 21 juin 1899, et le Traité no 11, le 27 juin 1921, avec un accord d’adhésion signé le 17 juillet 1922. À l’époque de la signature du Traité no 11, la PNKT faisait partie de la collectivité des Premières nations du Deh Cho et était donc liée par ce traité. Les deux traités comportent des dispositions relatives à la cession de terres et à l’abandon de droits. Ils garantissent aussi à ses signataires autochtones le droit de « se livrer à leurs occupations ordinaires de la chasse au fusil, de la chasse au piège et de la pêche dans l’étendue de pays cédée… ». Ils prévoient également la création de terres de réserve. Cependant, dans les Territoires du Nord-Ouest (les T.N.-O.), aucune réserve n’a été constituée à part en vertu du Traité no 11, celui qui est en litige en l’èspece.
[13] La Couronne du chef du Canada et les Premières nations du Deh Cho ne s’entendent pas sur la question de savoir si le Traité no 11 a éteint le titre autochtone. La Couronne est d’avis que le Traité no 11 a éteint des droits, tandis que les Deh Cho et les demandeurs sont d’avis qu’il s’agit d’un traité de paix et d’amitié, dans le cadre duquel le titre ancestral n’a pas été abandonné. Les demandeurs soutiennent que les Deh Cho n’ont pas autorisé la Constitution de réserves en vertu des traités parce qu’ils ne voulaient pas reconnaître l’interprétation donnée par la Couronne aux traités.
[14] Le titre ancestral à l’égard des terres visées par les traités est contesté, mais l’existence des droits issus de traités qu’ont les demandeurs de chasser, de pêcher et de piéger dans la région des collines Cameron ne fait l’objet d’aucune contestation.
- Le processus Deh Cho
[15] En 1976 et en 1977, s’appuyant sur le fait que les clauses des traités relatives aux terres n’avaient pas été mises en œuvre, le Canada a accepté les revendications territoriales globales des Dénés et des Métis de la vallée du Mackenzie, dans les T.N.-O. En fin de compte, des ententes ont été conclues et mises en œuvre pour les Gwich’in, les Dénés du Sahtu et les Métis, toutes dans le cadre du Traité no 11, à la suite de quoi le Canada a adopté la Loi, essentiellement pour donner effet à ces ententes. La Loi a été modifiée en août 2005 afin de refléter les conditions de l’entente conclue entre le Canada et les Tlicho au sujet des revendications territoriales et de l’autonomie gouvernementale.
[16] La revendication territoriale globale découlant du Traité no 11 porte sur ce que l’on appelle la région du Deh Cho, qui englobe les collines Cameron. Cette revendication a été acceptée en vue de négociations par la Couronne du chef du Canada en 1998. Le processus de négociation est devenu connu sous le nom de « processus Deh Cho ». Les parties aux négociations sont les Premières nations du Deh Cho, dont les demandeurs font partie, le gouvernement du Canada et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest. Le processus visant à constituer une tribune favorisant l’agencement harmonieux des titres et des compétences des Autochtones et de la Couronne dans le but de négocier une entente finale.
[17] Bien que les négociations se poursuivent dans le cadre du processus Deh Cho, diverses ententes ont été conclues en cours de route, dont l’Entente sur les mesures provisoires de 2003, qui envisage l’aménagement du territoire Deh Cho, conformément aux principes de respect de la terre des Deh Cho. Cette entente établit le Comité d’aménagement du territoire Deh Cho, lequel est chargé de la conservation, de la mise en valeur et de l’utilisation des terres, des eaux et des autres ressources. Dans le cadre de cette entente, le Canada et les Premières nations du Deh Cho ont négocié la désignation de certaines terres déclarées inaliénables et soustraites au jalonnement minier. Les critères convenus pour l’identification de ces terres comprennent notamment : les terres servant à la récolte de nourriture et de médicaments, les terres présentant une importance culturelle et spirituelle, les terres écologiquement sensibles, de même que les bassins hydrographiques. Les terres ainsi désignées demeurent soumises à l’exercice continu des droits existants.
— Le processus d’approbation réglementaire
[18] Les projets d’exploitation pétrolière et gazière de la vallée du Mackenzie sont complexes, et font jouer plusieurs textes de loi et plusieurs organismes administratifs. Le texte des dispositions législatives pertinentes est joint aux présents motifs en tant qu’annexe A.
[19] La construction et l’exploitation d’un réseau de pipeline et de conduites de collecte cernent des pouvoirs de l’Office national de l’énergie (l’ONE), aux termes de la Loi sur les opérations pétrolières du Canada, L.R., 1985, ch. O-7, et de la Loi fédérale sur les hydrocarbures, L.R., 1985, ch. 36 (2e suppl.). À la suite des ententes sur les revendications territoriales globales des Gwich’in et des Métis, la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie a été adoptée en 1998. Celle-ci prévoit la création de deux offices réglementaires : l’Office des terres et des eaux de la vallée du Mackenzie (l’Office des terres et des eaux) et l’Office d’examen des répercussions environnementales de la vallée du Mackenzie (l’Office d’examen). Ces deux organismes ont été établis en vertu de la Loi comme institutions publiques dans le cadre d’un système intégré et coordonné de gestion des terres et des eaux dans la vallée du Mackenzie.
[20] L’Office des terres et des eaux et l’Office d’examen ont pour mission de réglementer toutes les utilisations qui sont faites des terres et des eaux, y compris les dépôts de déchets, dans la vallée du Mackenzie. En ce qui concerne le projet de loi C-6, qui a précédé l’adoption de la loi, il a fallu cinq ans par le mettre au point, et durant ce temps de nombreuses consultations ont été abouties avec tous les groupes intéressés, y compris les Premières nations concernées qui ont été financées pour examiner l’avant-projet de loi.
[21] Aux termes de la Loi, il incombe à l’Office des terres et des eaux de délivrer les permis d’utilisation des terres et d’utilisation des eaux dans les régions de la vallée du Mackenzie qui font l’objet d’une revendication territoriale en cours. Les promoteurs doivent s’adresser à l’Office des terres et des eaux pour obtenir un permis d’utilisation des terres et un permis d’utilisation des eaux lorsque l’activité qu’ils proposent se déroulera dans la vallée du Mackenzie. L’article 60.1 de la Loi exige expressément que l’Office des terres et des eaux prenne en considération, lorsqu’il prend ses décisions, « le bien-être et le mode de vie des peuples autochtones du Canada ».
60.1 Dans l’exercice de ses pouvoirs, l’office tient compte, d’une part, de l’importance de préserver les ressources pour le bien-être et le mode de vie des peuples autochtones du Canada visés par l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 et qui utilisent les ressources d’une région de la vallée du Mackenzie et, d’autre part, des connaissances traditionnelles et des renseignements scientifiques mis à sa disposition.
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60.1 In exercising its powers, a board shall consider (a) the importance of conservation to the well-being and way of life of the aboriginal peoples of Canada to whom section 35 of the Constitution Act, 1982 applies and who use an area of the Mackenzie Valley; and (b) any traditional knowledge and scientific information that is made available to it.
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[22] Aux termes du paragraphe 63(2) de la Loi, l’Office des terres et des eaux est tenu d’aviser les collectivités et les Premières nations concernées de toute demande de permis dont il est saisi.
[23] L’article 114 de la Loi expose l’objet de la partie 5 de la Loi, qui est d’instaurer un processus comprenant un examen préalable, une évaluation environnementale et une étude d’impact. L’Office d’examen constitue l’outil primordial, dans la vallée du Mackenzie, d’évaluation environnementale et d’étude d’impact des projets, et il a pour mission de veiller à ce qu’il soit tenu compte, dans le cadre du processus, des réserves des Autochtones et du public en général.
[24] Selon les principes directeurs de la partie 5, qui sont exposés à l’article 115 de la Loi, le processus doit tenir compte des points suivants : la protection de l’environnement contre les répercussions nuisibles importantes des projets de développement, le maintien du bien-être social, culturel et économique des habitants et des collectivités de la vallée du Mackenzie, de même que l’importance de préserver le bien-être et le mode de vie des peuples autochtones. L’article 115.1 indique expressément que l’Office d’examen tient compte des connaissances traditionnelles qui sont mises à sa disposition dans le cadre de l’exercice de ses pouvoirs.
[25] La consultation des collectivités fait partie intégrante des processus qui suivent l’Office des terres et des eaux et l’Office d’examen. L’article 3 de la Loi régit la façon dont cette consultation doit être aboutie :
3. Toute consultation effectuée sous le régime de la présente loi comprend l’envoi, à la partie à consulter, d’un avis suffisamment détaillé pour lui permettre de préparer ses arguments, l’octroi d’un délai suffisant pour ce faire et la possibilité de présenter à qui de droit ses vues sur la question; elle comprend enfin une étude approfondie et impartiale de ces vues.
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3. Wherever in this Act reference is made, in relation to any matter, to a power or duty to consult, that power or duty shall be exercised
(a) by providing, to the party to be consulted,
(i) notice of the matter in sufficient form and detail to allow the party to prepare its views on the matter,
(ii) a reasonable period for the party to prepare those views, and
(iii) an opportunity to present those views to the party having the power or duty to consult; and
b) by considering, fully and impartially, any views so presented.
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[26] L’Office des terres et des eaux et l’Office d’examen ont tous deux établi des lignes directrices sur la façon dont les promoteurs doivent mener les consultations lorsque les demandes sont présentées aux offices respectifs.
[27] La Loi prévoit un processus d’examen en trois étapes : l’examen préalable, l’évaluation environnementale et l’étude d’impact. Les promoteurs doivent consulter les parties concernées avant de présenter leur demande, et la consultation comporte l’envoi d’un avis suffisamment détaillé, l’octroi d’un délai suffisant pour que la partie consultée puisse préparer ses arguments, de même que la possibilité de faire valoir son point de vue sur la question. Lorsque l’Office des terres et des eaux conclut que le processus de consultation - préalable à la demande - de la collectivité a eu lieu, il procède à l’examen préalable, qui vise à déterminer si le projet de développement est susceptible d’avoir des répercussions nuisibles importantes sur l’environnement. Dans l’affirmative, l’Office des terres et des eaux renvoie alors la proposition à l’Office d’examen en vue d’une évaluation environnementale, conformément à l’article 125 de la Loi. Autrement, la demande passe à l’étape de l’octroi de l’autorisation.
[28] Lorsque la demande renvoyée par l’Office des terres et des eaux donne lieu à l’évaluation environnementale, l’Office détermine la portée de celle-ci et demande une description plus détaillée du projet de développement. Puis, l’Office d’examen cerne les questions à étudier et fixe le mandat relatif à l’évaluation environnementale. La version provisoire du mandat est transmise à toutes les parties pour observations. Lorsque le mandat est formulé de manière définitive, le promoteur établit le rapport d’évaluation du promoteur (REP). Le REP est transmis à toutes les parties et il est soumis à une vérification de conformité par laquelle il est comparé au mandat. Il passe ensuite par l’examen technique dans le cadre duquel les participants peuvent faire valoir leur point de vue étayé par les faits et les éléments de preuve pertinents, au sein d’une tribune ouverte au public. Les questions qui découlent de l’examen technique et qui nécessitent une réponse officielle sont diffusées par la voie de demandes d’information (DI), qui peuvent provenir de n’importe quelle partie et qui sont portées à la connaissance de tous. L’Office d’examen peut ordonner l’audience. À la suite de celle-ci, l’Office d’examen prend en considération le REP et les éléments de preuve pertinents et décide si le projet de développement est susceptible d’avoir des répercussions nuisibles importantes sur l’environnement ou de susciter des réserves importantes dans le grand public. Aux termes de l’article 128, l’Office d’examen peut décider qu’aucune évaluation n’est nécessaire, il peut recommander que la proposition soit approuvée sous réserve de l’imposition de mesures qu’il juge nécessaires pour éviter qu’il y ait des répercussions nuisibles, il peut recommander que la proposition soit rejetée sans procéder à une évaluation environnementale, ou, s’il décide que le projet de développement risque de susciter des réserves importantes dans le grand public, il peut ordonner l’étude d’impact. La décision de l’Office d’examen est assujettie à l’article 130 de la Loi, qui confie essentiellement la décision ultime aux ministres compétents.
[29] Selon l’article 130 de la Loi, après avoir étudié le rapport d’évaluation environnementale les ministres peuvent ordonner l’étude d’impact même si l’Office d’examen a décidé qu’une telle étude n’était pas nécessaire (alinéa 130(1)a)). Lorsque ce dernier recommande d’approuver une proposition sous réserve de la prise de certaines mesures, ou bien de la rejeter parce qu’elle aura des répercussions nuisibles sur l’environnement, les ministres peuvent :
1) accepter la recommandation ou la renvoyer à l’Office d’examen pour réexamen (sous-alinéa 130(1)b)) ou
2) après avoir consulté l’Office d’examen, soit rejeter la recommandation et ordonner l’étude d’impact sur la proposition, soit accepter la recommandation sous réserve de certaines modifications.
Cette dernière option porte le nom de processus de « consultation pour fins de modification ». Les parties qui prennent part à ce processus sont des représentants des ministres compétents et de l’Office d’examen. La Loi n’oblige pas les ministres à faire intervenir d’autres parties dans le processus, et cela inclut les parties qui ont pris part à l’évaluation environnementale ou à l’étude d’impact.
[30] La troisième étape – l’étude d’impact – consiste en un examen de l’évaluation environnementale par une formation composée d’au moins trois membres que nomme l’Office d’examen. Cette formation est investie des pouvoirs d’un office d’examen, et la Loi expose de façon exhaustive de quelle manière l’étude doit être aboutie. Selon le paragraphe 135(1) de la Loi, après avoir étudié le rapport de la formation d’examen les ministres peuvent accepter les recommandations qui y figurent avec ou sans modifications, les rejeter ou renvoyer la proposition à l’Office d’examen.
- Financement
[31] Les demandeurs soutiennent que, durant tout le processus que l’Office d’examen a suivi au sujet du projet de développement des collines Cameron, ils ont participé à chacun des volets du processus d’évaluation environnementale dans la mesure où leurs ressources restreintes le leur permettaient.
[32] Les demandeurs font valoir que, en raison d’un manque de ressources, ils n’ont pu participer pleinement et entièrement au processus de consultation que prévoit la Loi, mais il ressort de la preuve que la Couronne leur a accordé une aide financière à cette fin.
[33] Au cours de l’exercice 2001-2002, la PNKT a demandé à AINC – et reçu - une somme de 40 000 $ pour l’aider à assumer les frais relatifs à un projet de recherche sur les connaissances traditionnelles orales. Ce projet a abouti à la réalisation d’un film documentaire, produit en preuve, qui est intitulé « Straight from the Heart ». Ce film montre des Aînés parlant à la PNKT des connaissances traditionnelles, et faisant notamment part de récits, de légendes et de connaissances sur la terre. Ce projet a coûté 30 844 $, et il s’est soldé par un excédent de 9 166 $.
[34] Au cours de l’exercice 2002-2003, la PNKT a demandé à AINC – et reçu - la somme de 40 000 $ afin de pouvoir participer à des activités de gestion des terres et des ressources dans la région. À cette fin, un coordonnateur des ressources pétrolières et gazières a été embauché et chargé de s’occuper des réserves environnementales et d’agir comme porte-parole de la PNKT. Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest (GTNO) a lui aussi accordé la somme de 40 000 $ à cette fin. Les subventions de 80 000 $ destinées aux activités de gestion des ressources qui ont été octroyées en 2002-2003 se sont soldées par un excédent de 6 476 $.
[35] Au cours de l’exercice 2003-2004, la PNKT a demandé à AINC la somme de 40 000 $ pour continuer de payer le coordonnateur des ressources pétrolières et gazières; elle a reçu 10 000 $. La même somme a été versée à cette fin en 2004-2005. Toujours en 2004-2005, AINC lui a accordé la somme de 10 000 $ pour mettre la dernière main au protocole communautaire concernant le projet d’exploitation pétrolière et gazière des collines Cameron.
[36] En résumé, entre 2001 et 2005, AINC et le GTNO ont octroyé à la PNKT la somme totale de 140 000 $ pour son projet concernant les connaissances traditionnelles ainsi que pour les services du coordonnateur des ressources pétrolières et gazières. Cela constitue 30 000 $ de moins que le montant que demandait la PNKT. Le dossier indique que, sur le montant total reçu, la PNKT a eu un excédent de 15 642 $.
- Les deux premières étapes du projet de développement des collines Cameron
[37] Depuis 1992, Paramount a obtenu 14 permis de production (deux en 1992, quatre en 2002, deux en 2003 et six en 2004), et elle détient sept permis d’utilisation des terres (PUT), quatre permis d’utilisation des eaux et 22 baux de surface fédéraux, tous pour les collines Cameron. Comme je l’ai dit plus tôt, le projet de développement s’est déroulé en trois étapes : le projet de forage, le projet de réseau de pipeline et de conduites de collecte, ainsi que le projet d’expansion.
[38] Le projet de forage portait sur neuf nouveaux puits et sept puits existants en vue d’évaluer les réserves pétrolières et gazières. Le projet de réseau de pipeline et de conduites de collecte avait trait à la construction d’un vaste réseau transfrontalier destiné à raccorder les puits de Paramount situés dans les collines Cameron au réseau pipelinier de l’Alberta. Le projet comprenait aussi plus de 60 kilomètres de pipelines, les installations associées à onze puits existants et neuf puits nouveaux, des campements de construction temporaires permettant d’accueillir jusqu’à 200 travailleurs, un campement permanent pour 20 travailleurs, une piste d’atterrissage et des routes permettant aux véhicules d’accéder aux emplacements des puits.
[39] Des demandes de permis d’utilisation des eaux et de permis d’utilisation des terres ont été présentées le 29 août 2000 à l’Office des terres et des eaux pour l’exécution du projet de forage. Ce projet a été soumis le 20 novembre 2000 à l’Office d’examen en vue d’une évaluation environnementale, et ce dernier a rendu public son rapport le 16 octobre 2001. L’Office a recommandé que les permis d’utilisation des terres et d’utilisation des eaux soient délivrés, à la condition que l’on respecte les mesures d’atténuation figurant dans le rapport environnemental de Paramount. Le projet de forage a finalement été autorisé sur cette base.
[40] Les demandeurs disent avoir été surpris d’apprendre en 2001, quand le projet de forage a été soumis pour la première fois à l’Office d’examen, l’ampleur des plans de Paramount pour la région des collines Cameron. Ils soutiennent qu’ils ignoraient que la Couronne fédérale avait déjà délivré à Paramount de nombreux permis concernant les collines Cameron. Ils ajoutent que la PNKT s’est trouvée confrontée à un projet de développement industriel de grande envergure sans avoir participé de manière sérieuse à la délivrance des premiers permis de découverte et de prospection accordés à Paramount.
[41] Paramount a mis en branle le projet de réseau de pipeline et de conduites de collecte en avril 2001 en présentant à l’Office des terres et des eaux des demandes de permis d’utilisation des terres et d’utilisation des eaux. La PNKT a pris part aux processus d’examen préalable et d’évaluation environnementale concernant ce projet. Entre le 22 juin 2000 et le 19 novembre 2001, plus d’une douzaine de réunions ont eu lieu et de nombreuses conférences téléphoniques ont été tenues avec Paramount, afin de discuter des connaissances traditionnelles, des avantages du projet pour la collectivité de Kakisa, des réserves relatives aux autres bandes qui revendiquaient la gouvernance de la région des collines Cameron à titre de territoire traditionnel, ainsi que des mesures d’atténuation concernant l’environnement. La participation de la PNKT a consisté, notamment, à survoler en hélicoptère le projet proposé et à effectuer une excursion de trois jours jusqu’au territoire entourant le lac Tathlina afin de discuter des connaissances traditionnelles.
[42] Le projet a été transmis à l’Office d’examen en vue d’une évaluation environnementale et, le 3 décembre 2001, l’Office a rendu public son rapport.
[43] Dans le REP qu’elle a établi pour l’évaluation environnementale du réseau de pipeline et de conduites de collecte, Paramount a conclu que le projet ne donnerait pas lieu à une accumulation de conséquences nuisibles importantes sur l’environnement et que l’on ne s’attendait pas à ce qu’il y ait des répercussions nuisibles à la poursuite des activités traditionnelles. Tant la PNKT que le GTNO ont exprimé leur désaccord. Les demandeurs ont émis des doutes quant à la capacité de Paramount de tirer des conclusions à propos des répercussions de ses projets sur les demandeurs en l’absence d’une étude appropriée sur l’utilisation traditionnelle des terres. Dans ses observations à l’Office d’examen, le GTNO a fait valoir que Paramount avait sous-estimé les répercussions du projet sur le caribou boréal. Dans son rapport d’évaluation environnementale concernant le projet de réseau de pipeline et de conduites de collecte, l’Office d’examen a conclu que les demandeurs jouaient [traduction] « un rôle très actif sur le plan de l’utilisation traditionnelle des terres… la plupart des habitants, sinon tous, participent d’une façon ou d’une autre à l’utilisation traditionnelle des terres ». L’Office d’examen a souscrit aux données du GTNO selon lesquelles [traduction] « … la terre permet aux familles de Kakisa de subvenir, dans une proportion de 50 % à 60 %, voire plus, à leurs besoins annuels de nourriture ». En fin de compte, l’Office d’examen a recommandé qu’avec la mise en œuvre de 21 mesures d’aménagement, le projet [traduction] « … n’est pas susceptible d’avoir des répercussions nuisibles importantes sur l’environnement ou de susciter des réserves importantes dans le grand public ».
[44] Paramount a exprimé de sérieux doutes au sujet des mesures nos 13, 15, 16 et 17. Ces recommandations sont reproduites à l’annexe B jointe aux présents motifs. On recommande essentiellement de ne pas mettre à exécution le projet avant que Paramount : 1) ait revu son plan de ressources patrimoniales en vue d’y intégrer les réserves des Premières nations, 2) ait dressé un plan d’indemnisation, en collaboration avec les Premières nations concernées, visant les répercussions sur les terres et sur les ressources utilisées, au-delà des activités de piégeage, 3) ait fourni à AINC une preuve que les Premières nations concernées ont approuvé l’étude sur l’utilisation traditionnelle et ait intégré dans son plan de développement les mesures d’atténuation découlant de cette étude.
[45] La PNKT a écrit à l’Office d’examen et à AINC afin de les inciter à appuyer les mesures en question et demander que l’on prenne les mesures nécessaires pour s’assurer que Paramount respectait ces conditions avant le début de tout travail de construction sur le terrain. La PNKT a signalé que le rapport étayait sa position selon laquelle l’étude de Paramount sur l’utilisation traditionnelle n’avait pas été complétée et que le plan de retombées économiques ne répondait pas à certaines des exigences prescrites par la loi en matière d’indemnisation.
[46] Dès le début du projet de développement des collines Cameron, les demandeurs ont exprimé des doutes sur les répercussions réelles de ce projet sur les terres, les eaux et la faune dans la région des collines Cameron, et donc sur leurs droits de chasse, de pêche et de piégeage. Dès le départ, la PNKT a systématiquement fait valoir deux réserves : premièrement, il fallait mener une étude sur l’utilisation traditionnelle des terres afin d’obtenir des données de base en fonction desquelles il serait possible de concevoir des mesures d’atténuation et de mesurer les dommages causés par le projet de développement de Paramount, et, deuxièmement, il fallait négocier avec la PNKT une entente sur les répercussions et les retombées économiques, qui comprendrait les investissements faits dans la collectivité ainsi que les perspectives d’emploi, afin de traiter de l’atteinte, par Paramount, aux droits ancestraux et issus de traités. De l’avis des demandeurs, ni l’un ni l’autre de ces objectifs n’a été atteint.
[47] Pour ce qui est de l’étude sur l’utilisation traditionnelle des terres, Paramount a établi un plan de retombées économiques, conformément au paragraphe 5(2) de la Loi sur les opérations pétrolières au Canada. Paramount reconnaît que ce plan n’a jamais visé à porter sur les retombées économiques ou les répercussions précises pour une collectivité particulière, mais plutôt des retombées pour les Canadiens en général et les habitants du Nord en particulier.
[48] Les demandeurs soutiennent que l’étude de Paramount sur les connaissances traditionnelles ne répond pas aux exigences d’une étude appropriée sur l’utilisation traditionnelle des terres. Ils ajoutent que l’étude a été préparée sans consultations sérieuses et sans leur participation pleine et entière. Ils sont d’avis que l’étude est lacunaire, en ce sens qu’elle ne traite pas de la question de savoir de quelle façon la PNKT occupe son territoire, de quelle façon ses lois protégent les terres, les eaux et la faune, ou de quelle façon les activités de Paramount ont des répercussions réelles sur son économie, sa culture, son mode de vie traditionnel et son bien-être.
[49] Paramount soutient que c’est la PNKT elle-même qui a restreint l’accès aux connaissances traditionnelles qui auraient permis d’aider davantage à concevoir des mesures d’aménagement. L’étude de Paramount sur les connaissances traditionnelles a été établie à partir d’informations recueillies auprès d’Aînés de la PNKT et auprès du chef Chicot lui-même, qui a pris part au processus. Paramount soutient qu’après avoir préparé l’étude, elle a tenté à plusieurs reprises d’obtenir des demandeurs des observations supplémentaires. Nulle n’a été faite. L’étude de Paramount a donc été remise à l’Office d’examen sans autre apport de la part des demandeurs.
[50] Les demandeurs conviennent que seule une quantité restreinte d’informations sur l’utilisation traditionnelle des terres a été produite à Paramount et à l’Office d’examen. Ils expliquent qu’ils ne voulaient pas que certaines de leurs connaissances traditionnelles confidentielles deviennent publiques, comme l’emplacement de lignes de piégeage. Ils croyaient en outre que Paramount [traduction] « doit reconnaître les droits ancestraux et issus de traités de la PNKT avant que le reste des informations soit communiqué dans le cadre des négociations de l’ABA sur l’atteinte aux droits de la PNKT ».
[51] Les demandeurs soutiennent également qu’ils n’ont pas participé au processus qui a abouti à la préparation, par Paramount, de l’entente sur les retombées économiques et qu’il n’y a pas eu de véritable consultation au sujet de la prise en compte des questions qui préoccupaient véritablement leurs collectivités. Le plan de retombées économiques prévoyait l’indemnisation des piégeurs [traduction] « qui peuvent établir de manière concluante que les niveaux de prises inférieurs qu’ils ont subi sont directement imputables aux activités de Paramount dans la région ». De l’avis des demandeurs, le plan de Paramount était irréalisable, et ce, pour un certain nombre de raisons. Premièrement, ils ne tenaient pas de relevés précis de leurs prises; deuxièmement, la perte directe des revenus tirés du piégeage n’est pas la seule répercussion qui justifie une indemnisation ou des avantages; troisièmement, le plan ne tient pas compte du fait que les droits issus de traités et les droits ancestraux revendiqués des demandeurs sont en jeu.
[52] Le 20 décembre 2001, le ministre d’AINC a entamé le processus de consultation aux fins de modification concernant le rapport d’évaluation environnementale sur le projet de réseau de pipeline et de conduites de collecte. Les ministres ont signalé certaines réserves à l’égard des recommandations nos 13, 15, 16 et 17 qui figuraient dans le rapport d’évaluation environnementale de l’Office d’examen, et ils ont proposé certaines modifications ainsi qu’une suppression. L’Office d’examen a jugé que d’autres participants au processus d’évaluation environnementale devaient avoir la possibilité d’exprimer leurs réserves à propos des mesures contestées dont il serait question lors de la prochaine réunion entre AINC, l’ONE et l’Office d’examen. C’est ainsi qu’une copie de la lettre de l’Office d’examen à AINC, datée du 24 décembre 2001, a été transmise à tous les participants, dont la PNKT; dans cette lettre, l’Office d’examen a exprimé l’avis qu’il ne s’opposerait pas à ce que ces participants fassent connaître leurs vues au sujet des changements que proposaient les ministres.
[53] Dans une lettre adressée à l’Office d’examen en date du 3 janvier 2002, AINC a exprimé l’avis que d’après les dispositions de la Loi, seuls le ministre fédéral et les ministres compétents devaient consulter l’Office d’examen au sujet de son rapport.
[54] L’Office d’examen et les ministres se sont rencontrés à huis clos le 4 janvier 2002, malgré les protestations des demandeurs. Après avoir examiné les preuves présentées dans le cadre du processus de consultation pour fins de modifications, l’Office d’examen a entériné l’apport de modifications à toutes les mesures contestées, et il a également supprimé la mesure no 17. Le 11 janvier 2002, les ministres ont pris une décision définitive qui modifiait largement les recommandations nos 13, 15 et 16 et qui supprimait la recommandation no 17. Le texte de ces recommandations modifiées est reproduit à l’annexe C jointe aux présents motifs. Dans sa lettre de décision, le ministre d’AINC, s’exprimant au nom des ministres compétents aux termes de la Loi, a signalé que certaines lettres exprimant les vues des demandeurs avaient été prises en considération. Je signale toutefois que le ministre n’a pas fait mention de certaines autres lettres envoyées pour le compte des demandeurs.
[55] Les demandeurs ont estimé que la décision des ministres était préjudiciable à leurs intérêts et, en particulier, ils ont protesté contre la suppression de la recommandation no 17 et les modifications apportées aux autres mesures recommandées. Ils ont réitéré leur position qu’ils n’avaient pas été consultés à ce sujet.
- Le projet d’expansion
[56] En avril 2003, Paramount a présenté à l’Office des terres et des eaux une demande visant à faire modifier certains des permis d’utilisation des terres et des permis d’utilisation des eaux qui avaient été délivrés à l’égard de son projet initial. Cet aspect du projet de développement a été appelé le « projet d’expansion ». Ce dernier a marqué le début des travaux de production de Paramount dans les collines Cameron. Il consistait à l’origine à faire approuver cinq puits supplémentaires mais, à terme, il inclurait aussi le forage, la mise à l’essai et le raccordement d’un nombre maximal de 50 puits supplémentaires sur 10 ans, la production de pétrole et de gaz pendant une période de plus de 15 à 20 ans, l’excavation de 733 kilomètres de lignes sismiques, la construction de campements temporaires desservant jusqu’à 200 travailleurs, le retrait d’eau de divers lacs, ainsi que l’élimination de déchets de forage.
[57] Après avoir reçu la demande, l’Office des terres et des eaux a procédé à l’examen préalable obligatoire du projet. Lors de cette étape, il a consulté 21 organismes, dont la PNKT et la PNDC. L’Office des terres et des eaux a conclu, à la suite de cet examen préalable, que le projet aurait des répercussions nuisibles importantes sur l’environnement et qu’il était manifesté qu’il susciterait des réserves dans le grand public. Il a donc transmis la demande de Paramount à l’Office d’examen en vue d’une évaluation environnementale, conformément à l’article 125 de la Loi, et il a recommandé que l’Office d’examen envisage la tenue d’audiences publiques conjointes avec l’Office des terres et des eaux.
[58] L’évaluation environnementale a suivi le processus que j’ai résumé plus tôt dans les présents motifs. En juin 2003, l’ébauche de mandat et l’ébauche de plan de travail ont été envoyées aux parties intéressées, dont les demandeurs. Le 21 juillet 2003, ces derniers ont répondu à l’ébauche de mandat et, à la suite des observations de la PNKT, le plan de travail a été modifié.
[59] Le 8 août 2003, l’Office d’examen a émis le mandat final, qui définissait la portée de l’évaluation environnementale. L’Office d’examen a décidé qu’il fallait que l’évaluation environnementale soit axée sur les effets cumulatifs des activités de forage, de mise à l’essai et de raccordement du nombre maximal de 50 puits supplémentaires sur les 10 années suivantes qui était indiqué dans le projet de développement prévu de Paramount, et non pas seulement des cinq emplacements de puits pour lesquels une demande avait en fait été présentée.
[60] Le 17 septembre 2003, Paramount a préparé son REP et l’a soumis à l’Office d’examen; ce rapport comportait l’évaluation des répercussions des cinq emplacements de puits visés par la demande, plus celui des 48 autres dont il était question dans le projet de développement prévu. Le REP comprenait aussi un sommaire détaillé du processus de consultation publique et des résultats de diverses études qui avaient été entreprises en vue d’une évaluation environnementale. Il comportait aussi, dans une annexe, un sommaire des consultations et des communications qui avaient eu lieu entre Paramount et la PNKT depuis mai 2000. Le sommaire indique qu’il y a eu de nombreuses lettres et un grand nombre de rencontres et de communications entre les parties.
[61] La deuxième étape de l’évaluation environnementale comportait deux séries de demandes d’information (DI). Un grand nombre de ces dernières provenaient de la PNKT et ont été transmises à AINC et à Paramount. Il y a eu des réponses, mais pas toujours à la satisfaction de la PNKT.
[62] Une conférence préalable à l’audience a été tenue au sujet du processus à suivre et de l’ébauche d’ordre du jour pour l’audience publique. Une réunion communautaire a été tenue à Kakisa le 17 février 2004, entre les membres de la PNKT, l’Office des terres et des eaux, l’Office d’examen et Paramount, en vue de discuter de questions connexes.
[63] L’Office d’examen et l’Office des terres et des eaux ont tenu conjointement une audience publique à Hay River, les 18 et 19 février 2004. Les demandeurs y ont participé et ont eu l’occasion d’interroger Paramount et les autres parties qui avaient pris part à l’évaluation environnementale.
[64] À la suite de l’audience publique, les parties ont été invitées à présenter des rapports techniques à l’Office d’examen. C’est ce qu’a fait la PNKT les 2 et 10 mars 2004. Paramount s’est exprimée quant aux réserves soulevées dans le rapport technique de la PNKT. Dans la lettre datée du 11 mars 2004 et adressée à l’Office d’examen, AINC s’est lui aussi exprimé quant aux réserves qu’avait soulevées la PNKT dans son rapport technique, ainsi qu’à des questions que la PNKT avait posées à l’audience publique.
[65] Lors du processus d’évaluation environnementale, les demandeurs ont produit deux demandes d’information (DI 1.2.136 et DI 1.2.137) pour qu’AINC précise comment il entendait s’acquitter de son obligation de consultation et d’accommodement. AINC a répondu que l’Office des terres et des eaux et l’Office d’examen étaient les principales voies de consultation en matière d’évaluation environnementale avec les groupes autochtones et le grand public en général; tels sont leurs modes de participation. AINC a signalé qu’il attendrait la fin du processus d’évaluation environnementale pour prendre une décision quelconque au sujet d’une atteinte possible aux droits ancestraux et de la consultation des Autochtones sur le projet.
[66] La manière dont AINC conçoit l’obligation de consultation qui incombe à la Couronne à l’égard d’un droit ancestral revendiqué est exposée dans sa réponse à la demande d’information 1.2.31 de la PNKT, que je reproduis ci-dessous :
[traduction]
Droits ancestraux : la Couronne ne peut porter indûment atteinte aux droits que protège l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982, et il incombe à la Première nation de prouver qu’un droit existe et que l’on y porterait indûment atteinte. Il est impossible à la Couronne de décider unilatéralement quelles revendications une Première nation pourrait formuler ou quel en serait l’issue ultime. Lorsqu’il répond à une revendication, et sans restreindre d’aucune façon l’ampleur ou la portée des questions qu’il peut prendre en considération, y compris les preuves ethnographiques, historiques, traditionnelles et d’autre nature, le Canada prend également en compte les manifestations d’accord ou d’appui des Premières nations à l’égard de l’activité proposée.
[Souligné dans l’original.]
[67] L’Office d’examen a rendu publics son rapport et ses motifs sur l’évaluation environnementale le 1er juin 2004. Dans ce rapport, l’Office d’examen a reconnu la dépendance de la PNKT de la région des collines Cameron et a tiré certaines conclusions quant aux répercussions possibles du projet sur les droits des demandeurs. Voici quelques extraits pertinents de ce document.
[traduction]
Les collines Cameron constituent pour les Premières nations locales une région à utilisation traditionnelle importante. (Page vi)
Il ne fait aucun doute, de l’avis de l’Office d’examen, que la preuve produite au cours de la présente procédure offre un fondement solide aux réserves exprimées à propos de cette région, relativement surtout aux effets possibles du projet de développement proposé sur les activités traditionnelles qui sont importantes pour les[Ka’a’Gee Tu et autres collectivités autochtones]. (Page 14)
L’Office conclut que les conséquences environnementales de l’empreinte directe et indirecte combinée du projet de développement prévu sont élevées (potentiellement importantes) pour le caribou boréal et la martre. (Page 42)
L’Office d’examen appuie les demandes des collectivités en vue de la conclusion d’une entente socio-économique avec Paramount. L’Office convient également avec le GTNO, que les ententes socio-économiques contribuent à la bonne évaluation de l’incidence des aspects sociaux et culturels de l’exploitation du Nord canadien. (Page 51)
[68] Malgré les observations qui précèdent, l’Office d’examen a conclu ce qui suit : [traduction] « … avec la mise en œuvre des mesures recommandées dans le présent rapport d’évaluation environnementale et les engagements qu’a pris Paramount Ressources Ltd, … le projet de développement proposé n’aura vraisemblablement pas de répercussions importantes sur l’environnement ou ne suscitera pas de préoccupations importantes dans le grand public, et il devrait passer à l’étape réglementaire des autorisations ». L’Office d’examen a formulé dans son rapport 17 mesures d’atténuation et suggestions, lesquelles sont jointes ci-après, en tant qu’annexe D.
[69] Le rapport a pris en compte les répercussions sur [traduction] « le milieu biophysique » et [traduction] « le milieu socio-économique et culturel ».
[70] En ce qui concerne le milieu biophysique, diverses questions relatives à la qualité de l’air, la qualité de l’eau, la faune et, en particulier, le caribou boréal et les répercussions cumulatives du projet, ont été prises en considération.
[71] Les demandeurs ont fait valoir leurs réserves quant à la qualité de l’eau et à ses répercussions sur la pêche. L’Office d’examen a conclu qu’il y avait un risque de répercussions nuisibles importantes pour l’eau en raison d’éventuels déversements et de la sédimentation des voies d’eau due à l’érosion, par suite des activités de Paramount dans les collines Cameron. L’Office d’examen a conclu que l’application des mesures R-8 à R-11 et de la suggestion S-1 atténuerait ces répercussions possibles.
[72] Pour ce qui est des activités de chasse et de piégeage, l’Office d’examen a conclu que, le reste de la preuve ne donnait pas lieu à des réserves relatives à la faune, sauf dans le cas du caribou boréal. Il a conclu que les mesures concernant le caribou boréal que proposait le GTNO, et qu’appuyaient les demandeurs, atténueraient le risque de répercussions environnementales défavorables et importantes pour la population de caribous. D’autres réserves ont été soulevées au sujet des loups et des carcajous. L’Office d’examen a examiné la preuve et a conclu que l’approche de Paramount était raisonnable; il a décidé qu’il fallait prendre explicitement en compte les loups et les carcajous lors des prochaines évaluations environnementales que l’on mènerait dans la région. Au fin du compte, l’Office d’examen a formulé les mesures d’atténuation R-12 à R-14 et les suggestions S-3 et S-4 au sujet de la faune.
[73] Quant aux répercussions sur le milieu socio-économique et culturel, l’Office d’examen a pris en considération les difficultés entourant la conclusion d’une entente au sujet du Programme d’indemnisation concernant la faune et la récolte des ressources. Il a signalé que les collectivités autochtones insistaient pour que les programmes d’indemnisation comportent des éléments économiques et culturels, et pas seulement la perte des revenus tirés des récoltes. L’Office d’examen a conclu que, pour éviter qu’il y ait des répercussions socio-écononomiques nuisibles, potentielles et importantes sur le milieu en rapport avec la viabilité des collines Cameron en tant que source de récoltes et de préservation de possibilités de récoltes à long terme, d’autres mesures d’atténuation s’imposaient. Il a recommandé les mesures R-15 et R-16 ainsi que les suggestions S-5 et S-6.
[74] Dans la lettre datée du 24 juin 2004 et adressée aux ministres compétents, la PNKT a répondu au rapport environnemental de l’Office d’examen. Dans la lettre ultérieure datée du 7 juillet 2004 et adressée aux ministres compétents et à l’Office d’examen, la PNKT a demandé à participer au processus postérieur à la publication du rapport en vertu des articles 130 et 131 de la Loi. Dans sa lettre datée du 29 juillet 2004 qu’elle a adressée à AINC, la PNKT a exprimé son ferme avis qu’ [traduction] « … un processus postérieur à la publication du rapport et à huis clos, qui les exclut » contrevient manifestement aux principes de justice naturelle et d’équité et que la Couronne, en s’engageant dans un tel processus, contrevient à son obligation de consultation.
[75] Dans la lettre adressée à la PNKT en date du 26 août 2004, le ministre des Pêches et des Océans a déclaré qu’il rendrait avec les autres ministres compétents sa décision conformément à l’article 130 de la Loi. Cela reflète aussi la position qu’AINC a adoptée et qui est exprimée à maintes reprises dans le dossier, à savoir qu’aux termes de la Loi, seuls les ministres compétents et l’Office d’examen peuvent participer au processus de consultation aux fins de modification.
- Le processus de consultation pour fins de modification concernant le projet d’expansion
[76] Tant l’ONE que les ministres compétents avaient des doutes au sujet de certaines des mesures d’atténuation que l’Office d’examen a présentées. Par la lettre datée du 19 août 2004 et adressée à l’Office d’examen, le ministre d’AINC, s’exprimant au nom des ministres compétents, a entrepris de consulter l’Office d’examen, conformément à l’alinéa 130(1)b) de la Loi. AINC a informé l’Office d’examen le 17 novembre 2004 que les ministres compétents voulaient se pencher sur les mesures recommandées R7, R11, R12, R13, R15 et R16 qui figuraient dans le rapport d’évaluation environnementale. Des modifications, et leurs justifications, ont été soumises à l’examen de l’Office. En particulier, les modifications proposaient la suppression des recommandations R15 et R16.
[77] L’Office d’examen a décidé de solliciter des observations sur les modifications que proposaient les ministres responsables, et ce, auprès des parties qui avaient participé au processus d’évaluation environnementale, dont les demandeurs.
[78] En réponse, la PNKT a écrit à l’Office d’examen le 17 décembre 2004 et lui a fait part d’observations détaillées sur les modifications qu’il était proposé d’apporter aux mesures que l’Office avait recommandées. Essentiellement, elle a réitéré le point de vue qu’elle avait fait valoir dans sa lettre du 14 juin 2004 à l’Office d’examen. Elle a déclaré que certains changements proposés étaient en général acceptables, mais elle s’opposait fermement à la suppression des recommandations R15 et R16 et exhortait les ministres compétents à affermir les mesures recommandées. En outre, a-t-elle fait valoir, le processus de consultation aux fins de modification n’était pas conforme à l’obligation de consultation de la Couronne, comme l’avait précisé la Cour suprême du Canada dans deux décisions récentes : Nation haïda c. Colombie-Britannique (Ministre des Forêts), 2004 CSC 73, [2004] 3 R.C.S. 511 et Première nation Tlingit de Taku River c. Colombie-Britannique (Directeur d’évaluation de projet), 2004 CSC 74, [2004] 3 R.C.S. 550. Dans les affaires de cette nature, l’honneur de la Couronne est en jeu et il est nécessaire de tenir une consultation véritable avant que l’on approuve un projet qui portera atteinte à des droits et à un titre autochtones. Selon le mémoire que la PNKT a présenté à l’Office d’examen, le processus de consultation pour fins de modification et le fond des modifications proposées représentent une [traduction] « vision appauvrie de l’honneur de la Couronne ».
[79] Après le prononcé des décisions de la Cour suprême dans les affaires Nation haïda et Taku, et avant que la décision soit prise au sujet du projet d’expansion, AINC a procédé à l’ [traduction] « analyse des consultations de la Couronne » dans le but de vérifier si les mesures de consultation et d’accommodement prises jusque-là avaient réglé comme il faut des atteintes possibles à un traité ancestral ou à des droits ancestraux revendiqués. L’analyse a conclu que l’on avait effectué les consultations appropriées.
[80] Par la suite, les demandeurs ont été exclus du processus de consultation aux fins de modifications, qui s’est poursuivi pendant trois mois jusqu’au 15 mars 2005, date à laquelle l’Office d’examen a entériné les recommandations révisées.
[81] L’Office d’examen, les ministres et l’ONE se sont rencontrés le 24 janvier 2005; ils ont décidé que le Canada adopterait la position selon laquelle les recommandations R-15 et R-16 seraient révisées en profondeur, plutôt que supprimées. Le 15 mars 2005, l’Office d’examen a transmis aux ministres la version finale des recommandations révisées. Les demandeurs n’ont pas pris part à cette réunion et n’ont pas été consultés au sujet des recommandations finales.
[82] La PNKT a écrit directement au ministre d’AINC à six occasions différentes entre le 20 juillet 2004 et le 27 avril 2005 pour demander qu’AINC respecte son obligation légale de consultation avant de rendre une décision finale. Ces lettres sont restées sans réponse jusqu’au 17 mai 2005, date à laquelle le ministre d’AINC a écrit au chef Chicot et lui a assuré qu’on communiquerait avec lui avant la prise de la décision finale. Mais cet engagement n’a pas été tenu. Jamais AINC n’a rencontré la PNKT pour discuter des modifications proposées aux mesures recommandées ou de la décision finale concernant le projet d’expansion.
[83] Dans sa lettre du 24 mars 2005 au ministre d’AINC, l’avocate de la PNKT s’est penchée sur les recommandations modifiées qui avaient été soumises pour décision aux ministres compétents. Dans ses observations, elle a fait valoir que, dans le cadre du processus qui avait abouti aux recommandations modifiées, on n’avait pas sollicité les observations de la PNKT et que, de ce fait, les réserves de celle-ci n’avaient pas été entendues. La PNKT a fait valoir que les recommandations avaient été largement remaniées en secret et que, en conséquence, les règles d’équité et de justice n’avaient pas été respectées et l’honneur de la Couronne avait été entaché. Par ailleurs, les modifications proposées équivalaient en fait au rejet des recommandations initiales et, de ce fait, faisaient jouer la condition imposée par la loi, soit la tenue impérative. Enfin, a-t-elle soutenu, dans les circonstances, la Couronne n’avait pas respecté son obligation de consultation et d’accommodement.
[84] Le ministre d’AINC, au nom des ministres compétents et par la lettre datée du 5 juillet 2005, a entériné les mesures d’atténuation recommandées de l’Office d’examen, sans y apporter de modifications. Dans la lettre de décision, il a déclaré que la décision avait été prise après consultation de l’Office d’examen et la prise en considération du rapport d’évaluation environnementale et des lettres de divers intervenants, dont les suivantes : celles de la PNKT datées du 24 juin et du 10 août 2004, de même que celles de l’avocate de la PNKT datées du 20 juillet, du 31 août, du 19 novembre et du 13 décembre 2004, ainsi que du 24 mars et du 28 avril 2005.
[85] Par les lettres datées du 20 et du 28 juillet 2005, les demandeurs se sont adressées à l’Office des terres et des eaux pour l’informer que la décision des ministres n’était pas conforme à l’obligation de consultation et d’accommodement qui incombait à la Couronne fédérale et qu’ils devaient toujours être consultés de manière appropriée.
[86] Sur les 17 mesures recommandées, 12 ont été modifiées au cours du processus de consultation pour fins de modifications. L’ONE a modifié six mesures qui relevaient de sa compétence. L’ONE soutient que ces modifications ont été apportées après réception des observations de Paramount, des ministères et des demandeurs.
[87] Les ministres compétents ont modifié six autres mesures relevant de leur compétence. Les recommandations R-15 et R-16 n’ont pas été supprimées comme cela avait été proposé au départ, mais plutôt modifiées. Les modifications apportées à la recommandation R-15 ont supprimé l’obligation de fixer un programme d’indemnisation et des mesures d’exécution par voie d’arbitrage exécutoire, et les modifications apportées à la recommandation R-16 ont fait disparaître l’obligation de conclure une entente socio-économique de concert avec les collectivités concernées. Je reproduis ci-dessous le texte des deux recommandations modifiées :
[traduction]
R-15 L’Office d’examen recommande que Paramount, dans la lettre adressée aux parties à l’évaluation environnementale, s’engage à indemniser la Première nation Ka’a’Gee Tu et les autres groupes autochtones concernés de toute perte directe sur le plan de la récolte de ressources et d’animaux sauvages découlant des activités abouties dans le cadre du projet, et de prendre en considération les pertes indirectes au cas par cas.
R-16 L’Office d’examen recommande que Paramount rende compte chaque année au gouvernement des Territoires du
Nord-Ouest et aux autres parties à l’évaluation environnementale de ses résultats sur le plan de la prestation d’avantages
socio-économiques, comme des occasions d’emploi et de formation pour les habitants de la région, y compris un plan de consultation communautaire permanent et détaillé exposant les mesures qu’elle a prises et prendra pour améliorer ses résultats à cet égard. Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest examinera ce rapport avec Paramount de concert avec les autres parties à l’évaluation environnementale.
[88] Les demandeurs contestent la décision des ministres compétents : ils ont présenté le 9 août 2005 la présente demande de contrôle judiciaire, qui a été modifiée le 23 février 2006.
3. Les questions en litige
[89] La principale question en litige dans la présente procédure est la suivante : la Couronne a-t-elle manqué à son obligation de consultation au moment de rendre la décision? Il faut donc répondre aux questions suivantes :
1) Quelle est la teneur de l’obligation de consultation et d’accommodement incombant à la Couronne?
2) La Couronne a-t-elle respecté son obligation dans les circonstances ?
3) Si la réponse est négative, quelle est la réparation qui convient?
4. La norme de contrôle
[90] Dans l’arrêt Nation haïda, la Cour suprême s’est prononcée sur la norme de contrôle qui s’applique aux décisions gouvernementales que l’on conteste en faisant valoir que l’État ne s’est pas acquitté de son obligation de consultation et d’accommodement en attendant que des revendications soient réglées. Dans cet arrêt, la juge en chef McLachlin a laissé entendre qu’en l’absence d’un processus imposé par la loi pour la tenue d’un tel examen, ce sont les principes généraux du droit administratif qui doivent être pris en compte. En l’espèce, comme dans l’affaire Nation haïda, aucun processus d’examen particulier n’a été établi. Aux paragraphes 61 à 63 des motifs de décision de la Cour, la juge en chef fait les observations suivantes :
61. Quant aux questions de droit, le décideur doit, en règle générale, rendre une décision correcte : voir, par exemple, Paul c. Colombie‑Britannique (Forest Appeals Commission), [2003] 2 R.C.S. 585, 2003 CSC 55. Par contre, en ce qui a trait aux questions de fait et aux questions mixtes de fait et de droit, l’organisme de révision peut devoir faire preuve de déférence à l’égard du décideur. L’existence et l’étendue de l’obligation de consulter ou d’accommoder sont des questions de droit en ce sens qu’elles définissent une obligation légale. Cependant, la réponse à ces questions repose habituellement sur l’appréciation des faits. Il se peut donc qu’il convienne de faire preuve de déférence à l’égard des conclusions de fait du premier décideur. La question de savoir s’il y a lieu de faire montre de déférence et, si oui, le degré de déférence requis dépendent de la nature de la question dont était saisi le tribunal administratif et de la mesure dans laquelle les faits relevaient de son expertise : Barreau du Nouveau-Brunswick c. Ryan, [2003] 1 R.C.S. 247, 2003 CSC 20; Paul, précité. En l’absence d’erreur sur des questions de droit, il est possible que le tribunal administratif soit mieux placé que le tribunal de révision pour étudier la question, auquel cas une certaine déférence peut s’imposer. Dans ce cas, la norme de contrôle applicable est vraisemblablement la norme de la décision raisonnable. Dans la mesure où la question est une question de droit pur et peut être isolée des questions de fait, la norme applicable est celle de la décision correcte. Toutefois, lorsque les deux types de questions sont inextricablement liées entre elles, la norme de contrôle applicable est vraisemblablement celle de la décision raisonnable : Canada (Directeur des enquêtes et recherches) c. Southam Inc., [1997] 1 R.C.S. 748.
62. Le processus lui‑même devrait vraisemblablement être examiné selon la norme de la décision raisonnable. La perfection n’est pas requise; il s’agit de se demander si, « considéré dans son ensemble, le régime de réglementation [ou la mesure gouvernementale] respecte le droit ancestral collectif en question » : Gladstone, précité, par. 170. Ce qui est requis, ce n’est pas une mesure parfaite mais une mesure raisonnable. Comme il est précisé dans Nikal, précité, par. 110, « [l]e concept du caractère raisonnable doit [. . .] entrer en jeu pour ce qui [. . .] concern[e] l’information et la consultation. [. . .] Dans la mesure où tous les efforts raisonnables ont été déployés pour informer et consulter, on a alors satisfait à l’obligation de justifier. » Le gouvernement doit déployer des efforts raisonnables pour informer et consulter. Cela suffit pour satisfaire à l’obligation.
63. Si le gouvernement n’a pas bien saisi l’importance de la revendication ou la gravité de l’atteinte, il s’agit d’une question de droit qui devra vraisemblablement être jugé selon la norme de la décision correcte. Si le gouvernement a raison sur ces points et agit conformément à la norme applicable, la décision ne sera annulée que si le processus qu’il a suivi était déraisonnable. Comme il a été expliqué précédemment, l’élément central n’est pas le résultat, mais le processus de consultation et d’accommodement.
[91] Ces principes généraux s’appliquent en l’espèce. La question de l’existence et de la teneur de l’obligation de consultation et d’accommodement est une question de droit susceptible de contrôle selon la norme de la décision correcte. Pour répondre à la question de savoir si la Couronne a manqué à son obligation de consultation laquelle a pris sa décision, il faut habituellement évaluer les faits de l’espèce au vu de la teneur de l’obligation. Pour ce qui est des conclusions de fait, il peut être justifié de faire preuve de déférence à l’égard du décideur. Le degré de déférence qu’il convient d’accorder au tribunal saisi de la demande de contrôle dépend de la nature de la question et de l’expertise relative du décideur à l’égard des faits en question. Il est difficile en l’espèce d’isoler les pures questions de droit des questions de fait. Essentiellement, la question principale vise à savoir si les processus réglementaires et d’évaluation environnementale prescrits, tels qu’ils ont été mis en œuvre, répondent à l’obligation de la Couronne en matière de consultation et d’accommodement dans les circonstances. Il s’agit là d’une question mixte de fait et de droit. Selon la jurisprudence Nation haïda, il s’ensuivrait donc qu’à défaut d’une erreur au sujet de questions de droit, en raison de l’élément factuel de la décision les ministres sont peut-être mieux placés que le tribunal de contrôle pour évaluer la question, et, de ce fait, une certaine déférence peut s’imposer.
[92] En outre, les décisions que prennent les ministres dans ces circonstances sont de nature polycentrique, en ce sens qu’elles consistent souvent à faire des choix entre des intérêts opposés. Ces facteurs militent en faveur d’une certaine déférence à l’endroit du décideur.
[93] En me fondant sur les principes susmentionnés, qui sont exposés dans l’arrêt Nation haïda, je conclus que la question de savoir si le processus réglementaire en litige et son application répondent à l’obligation de la Couronne en matière de consultation et d’accommodement dans les circonstances doit être examinée en fonction de la norme de la décision raisonnable. En ce qui concerne les questions relatives à l’existence et à la teneur de l’obligation, dans la mesure où elles se posent en l’èspece, la norme de contrôle est celle de la décision correcte.
5. Le droit applicable
[94] Il a été décidé à l’origine que l’obligation de consultation découlait de l’obligation fiduciaire à laquelle la Couronne est tenue envers les Autochtones (voir Guerin c. Canada, [1984] 2 R.C.S. 335, 13 D.L.R. (4th) 321 et R. c. Sparrow, [1990] 1 R.C.S. 1075). Dans des arrêts plus récents, la Cour suprême a statué que l’obligation de consultation et d’accommodement est fondée sur l’honneur de la Couronne; celle-ci doit donc agir honorablement et prendre part aux processus de négociation dans le but de concilier les intérêts de la Couronne et ceux des Autochtones (voir l’arrêt Nation haïda, précité; l’arrêt Taku, précité, et l’arrêt Première nation crie Mikisew c. Canada (Ministre du Patrimoine canadien), 2005 CSC 69, [2005] A.C.S. no 71).
[95] Dans l’arrêt Nation haïda, la juge en chef McLachlin expose les circonstances qui donnent naissance à l’obligation de consultation. Au paragraphe 35 des motifs de décision, elle fait les obervations suivantes :
Mais à quel moment, précisément, l’obligation de consulter prend‑elle naissance? L’objectif de conciliation ainsi que l’obligation de consultation, laquelle repose sur l’honneur de la Couronne, tendent à indiquer que cette obligation prend naissance lorsque la Couronne a connaissance, concrètement ou par imputation, de l’existence potentielle du droit ou titre ancestral revendiqué et envisage des mesures susceptibles d’avoir un effet préjudiciable sur celui‑ci : voir Halfway River First Nation c. British Columbia (Ministry of Forests), [1997] 4 C.N.L.R. 45 (C.S.C.-B.), p. 71, le juge Dorgan.
[96] Pour que l’obligation prenne naissance, il faut tout d’abord qu’il y ait un droit ou un titre ancestral existant ou potentiel sur lequel les actions envisagées par la Couronne pourraient avoir une incidence défavorable. Deuxièmement, celle-ci doit être au courant (de manière soit subjective, soit objective) de ce droit ou de ce titre potentiel et consciente de la possibilité que les actions envisagées puissent avoir une incidence défavorable sur ces droits. Dans l’arrêt Nation haïda, il ne s’agissait pas de traités, mais il n’y a rien dans cette décision qui indique que les mêmes principes ne pourraient pas s’appliquer aux affaires ou des traités sont en jeu. En effet, dans l’arrêt Mikisew, la Cour suprême a essentiellement décidé que les principes énoncés dans l’arrêt Nation haïda s’appliquaient aux traités.
[97] Bien que la connaissance d’une revendication crédible mais non prouvée suffise pour donner lieu à une obligation de consultation et, le cas échéant, d’accommodement, la teneur de l’obligation varie selon les circonstances. Ce qui est précisément exigé du gouvernement peut varier suivant le sérieux de la revendication et l’incidence des actions gouvernementale envisagée sur les droits en cause. Cependant, à tout le moins, cette teneur doit correspondre à l’honneur de la Couronne. Au paragraphe 39 de l’arrêt Nation haïda, la juge en chef s’est exprimée en ces termes :
[…] La nature précise des obligations qui naissent dans différentes situations sera définie à mesure que les tribunaux se prononceront sur cette nouvelle question. En termes généraux, il est néanmoins possible d’affirmer que l’étendue de l’obligation dépend de l’évaluation préliminaire de la solidité de la preuve étayant l’existence du droit ou du titre revendiqué, et de la gravité des effets préjudiciables potentiels sur le droit ou le titre. Par conséquent, contrairement à la question de savoir s’il existe ou non une obligation de consultation, qui donne lieu à la réponse « oui » ou « non », la question de savoir en quoi consiste cette obligation est en soi variable. Tant la solidité du droit revendiqué que la gravité de l’effet possible sur ce droit sont des facteurs à utiliser pour déterminer la teneur de l’obligation de consultation.
[98] Aux paragraphes 43 à 45 de l’arrêt Nation haïda, la juge en chef a invoqué l’idée de gradation aidant à déterminer le genre d’obligations qui peuvent prendre naissance dans des situations différentes.
Sur cette toile de fond, je vais maintenant examiner le type d’obligations qui peuvent découler de différentes situations. À cet égard, l’utilisation de la notion de continuum peut se révéler utile, non pas pour créer des compartiments juridiques étanches, mais plutôt pour préciser ce que le principe de l’honneur de la Couronne est susceptible d’exiger dans des circonstances particulières. À une extrémité du continuum se trouvent les cas où la revendication de titre est peu solide, le droit ancestral limité ou le risque d’atteinte faible. Dans ces cas, les seules obligations qui pourraient incomber à la Couronne seraient d’aviser les intéressés, de leur communiquer des renseignements et de discuter avec eux des questions soulevées par suite de l’avis. La [traduction] « “consultation”, dans son sens le moins technique, s’entend de l’action de se parler dans le but de se comprendre les uns les autres » : T. Isaac et A. Knox, « The Crown’s Duty to Consult Aboriginal People » (2003), 41 Alta. L. Rev. 49, p. 61.
À l’autre extrémité du continuum on trouve les cas où la revendication repose sur une preuve à première vue solide, où le droit et l’atteinte potentielle sont d’une haute importance pour les Autochtones et où le risque de préjudice non indemnisable est élevé. Dans de tels cas, il peut s’avérer nécessaire de tenir une consultation approfondie en vue de trouver une solution provisoire acceptable. Quoique les exigences précises puissent varier selon les circonstances, la consultation requise à cette étape pourrait comporter la possibilité de présenter des observations, la participation officielle à la prise de décisions et la présentation de motifs montrant que les réserves des Autochtones ont été prises en compte et précisant quelle a été l’incidence de ces réserves sur la décision. Cette liste n’est pas exhaustive et ne doit pas nécessairement être suivie dans chaque cas. Dans les affaires complexes ou difficiles, le gouvernement peut décider de recourir à un mécanisme de règlement des différends comme la médiation ou un régime administratif mettant en scène des décideurs impartiaux.
Entre les deux extrémités du continuum décrit précédemment, on rencontrera d’autres situations. Il faut procéder au cas par cas. Il faut également faire preuve de souplesse, car le degré de consultation nécessaire peut varier à mesure que se déroule le processus et que de nouveaux renseignements sont mis au jour. La question décisive dans toutes les situations vise à déterminer ce qui est nécessaire pour préserver l’honneur de la Couronne et pour concilier les intérêts de la Couronne et ceux des Autochtones. Tant que la question n’est pas réglée, le principe de l’honneur de la Couronne commande que celle-ci mette en balance les intérêts de la société et ceux des peuples autochtones lorsqu’elle prend des décisions susceptibles d’entraîner des répercussions sur les revendications autochtones. Elle peut être appelée à prendre des décisions en cas de désaccord quant au caractère suffisant des mesures qu’elle adopte en réponse aux réserves exprimées par les Autochtones. Une attitude de pondération et de compromis s’impose alors.
[99] Le genre d’obligation et le niveau de consultation varieront donc selon les circonstances.
6. Analyse
[100] En l’espèce, le défendeur - le procureur général du Canada - ne conteste pas que la Couronne était tenue de consulter les demandeurs avant de prendre la décision contestée. Le procureur général du Canada est d’avis que le processus de consultation qui a eu lieu répondait à l’obligation de la Couronne en matière de consultation et d’accommodement dans les circonstances. Comme nul ne conteste que l’obligation a pris naissance, j’examinerai maintenant la teneur et la portée de l’obligation de consultation incombant à la Couronne à l’égard de la PNKT dans les circonstances. Comme il est signalé dans l’arrêt Nation haïda, l’étendue de l’obligation de consultation et d’accommodement dépend, d’une part, de l’appréciation préliminaire de la solidité de la preuve qui étaye l’existence du droit ou du titre revendiqué et, d’autre part, de la gravité des effets préjudiciables potentiels sur ce droit ou ce titre. Je vais maintenant me pencher sur chacun de ces facteurs à tour de rôle.
[101] L’existence des vastes de droits de chasse, de piégeage et de pêche que le Traité no 11 confère aux demandeurs n’est pas contestée. Ces droits n’étant pas revendiqués mais établis, l’analyse devrait alors, en principe, porter sur la mesure dans laquelle les actions envisagées par la Couronne aurait une incidence défavorable sur les droits de récolte des demandeurs, de façon à déterminer la teneur de l’obligation en matière de consultation de la Couronne. Toutefois, en l’espèce, il y a aussi une revendication relative à un titre ancestral qui peut avoir une incidence sur l’obligation de la Couronne. Avant d’examiner la gravité de l’effet défavorable potentiel sur le droit ou le titre revendiqué, il est donc nécessaire d’examiner la solidité du dossier des demandeurs.
[102] En l’espèce, les demandeurs soutiennent qu’ils n’ont jamais renoncé à leurs droits ancestraux par le Traité no 11. Contrairement à la manière dont AINC interprète l’obligation de consultation de la Couronne dans la réponse à la DI 1.2.31, que j’ai reproduite plus tôt au paragraphe 66, la jurisprudence Nation haida enseigne qu’il n’est pas nécessaire que le groupe autochtone prouve l’existence du droit revendiqué avant que l’obligation prenne naissance. L’existence des droits de récolte des demandeurs n’est pas contestée, mais les parties ne s’entendent pas sur la question de savoir si le Traité no 11 a éteint le titre ancestral. Les demandeurs tiennent le Traité no 11 pour un traité de paix et d’amitié et soutiennent que l’intention des Autochtones qui l’ont signé n’était donc pas de céder un titre ancestral. La Couronne interprète le Traité no 11 comme une entente d’extinction qui prévoit essentiellement la cession et l’abandon des terres visées, sous réserve du « droit de se livrer à leurs occupations ordinaires de la chasse au fusil, de la chasse au piège et de la pêche ». La Couronne reconnaît qu’elle n’a pas respecté l’obligation de créer des réserves que comporte ce Traité. Les demandeurs soutiennent que les Deh Cho n’ont pas permis que l’on mette à part pour eux des terres de réserve dans le cadre du Traité car ils ne voulaient pas avaliser l’interprétation de la Couronne du Traité.
[103] Depuis 1998, la question du titre ancestral, la « question des terres » fait l’objet du « processus Deh Cho » par lequel la Couronne du chef du Canada, les Premières nations du Deh Cho et le GTNO ont convenu de trouver une solution négociée. Le processus a abouti à un accord-cadre négocié, signé en 2001. Deux accords ont été ultérieurement négociés : une Entente provisoire sur l’exploitation des ressources et une Entente sur les mesures provisoires. Cette dernière a abouti à la creation du Comité d’aménagement du territoire du Deh Cho, qui envisage de recourir à une approche concertée pour l’aménagement du territoire du Deh Cho, qui englobe la région des collines Cameron.
[104] Le défendeur soutient que le processus de revendications territoriales a été engagé « sous toutes réserves » et qu’il ne devrait donc avoir aucune incidence sur l’appréciation de la solidité du dossier des demandeurs. Bien qu’il ne s’agisse pas d’un facteur déterminant, la participation de la Couronne au processus de revendications territoriales est un facteur qui peut aider la Cour à faire cette appréciation.
[105] Il ressort de la preuve qu’un élément important du Traité no 11 - l’obligation de Couronne de désigner des terres de réserve - n’a pas été respecté. Les parties aux présentes ne le contestent pas. L’effet juridique éventuel du défaut de la Couronne de respecter l’obligation prévue par le Traité à l’égard du titre ancestral que revendiquent les demandeurs reste à déterminer sur la foi d’un dossier plus étoffé au procès. Pour les besoins de la présente demande, je pense qu’il est juste de considérer que les faits dont découlent les questions de titre foncier qui se rattachent au Traité no 11 sont des facteurs importants pour apprécier la solidité du dossier des demandeurs.
[106] L’obligation incombant à la Couronne aux termes du Traité no 11, c’est-à-dire la désignation de terres de réserve, constitue, pourrait-on dire, un aspect fondamental du Traité. En l’espèce, la Couronne n’a pas désigné des terres de réserve à l’usage exclusif de la collectivité autochtone, comme l’exige le Traité. La question qui se pose est donc la suivante : quel effet, le cas échéant, le manquement de la Couronne à l’obligation que lui impose le Traité a-t-il sur la revendication du titre ancestral qu’invoquent les demandeurs? À mon avis, la question soulève à tout le moins une question grave à débattre. En outre, le fait que la Couronne a souscrit au processus des revendications territoriales globales dans le but de trouver une solution négociée à la question des terres, et les ententes qui en ont découlé, donnent encore plus de force à l’argument des demandeurs selon lequel leur revendication est bien fondée. Les facteurs susmentionnés doivent être mis en balance avec le texte du traité dont la formulation, d’après le défendeur, confirme manifestement la renonciation au titre ancestral à l’égard des terres en question.
[107] Il n’appartient pas à la Cour, dans le cadre d’une procédure de contrôle judiciaire, de se prononcer sur la revendication des demandeurs. Il vaut mieux aborder ces questions dans le contexte du procès où l’on prend en considération et où l’on examine en détail les preuves ethnographiques, historiques et traditionnelles pertinentes. En l’espèce, bien qu’il soit difficile de quantifier la solidité du dossier des demandeurs, je conclus néanmoins que leur cause est raisonnablement défendable. Cette opinion repose sur l’examen du dossier qui m’a été produit, sur la nature de la revendication, sur la formulation du Traité no 11, sur le manquement de la Couronne à l’obligation que lui impose le Traité, de même que sur l’engagement de la Couronne à l’égard du processus des revendications territoriales globales. Dans les circonstances, ces facteurs contribuent à intensifier la teneur de l’obligation de consultation qui incombe à la Couronne puis qu’elle n’est pas exclusivement fondée sur l’interprétation des droits issus du traité qui sont en jeu.
[108] Examinons maintenant la gravité des effets potentiellement défavorables de les actions envisagée de la Couronne sur les droits ou sur le titre revendiqués.
[109] Le projet d’expansion comporte, parmi les autres activités que j’ai évoqués plus haut dans les présents motifs, le forage et la mise à l’essai d’une cinquantaine de puits supplémentaires sur une période de dix ans, des travaux de récupération, 733 kilomètres de lignes sismiques et la mise en place de campements temporaires destinés à répondre aux besoins d’effectifs pouvant atteindre 200 travailleurs. Même à l’étape de l’examen préalable, l’Office d’examen avait conclu des effets négatifs importants que le projet aurait des effets nuisibles importants sur l’environnement et il était clair que le projet suscitait des préoccupations dans le grand public. Pour saisir l’importance de l’effet que le projet d’expansion aurait eu sur les terres en litige ainsi que sur les droits de capture des demandeurs, il suffit d’examiner le rapport publié à la suite du processus d’évaluation environnementale abouti en vertu de la Loi. À la page 14 de son rapport, l’Office d’examen a conclu que la preuve constituait un [traduction] « justifiait nettement les préoccupations exprimées à propos de cette région, surtout relativement aux effets possibles du projet de développement proposé sur les activités traditionnelles qui sont importantes pour les Ka’a’Gee Tu et d’autres collectivités autochtones ».
[110] Paramount soutient qu’il y a peu d’éléments tendant à établir que l’une quelconque des activités traditionnelles des demandeurs se déroule concrètement sur le plateau des collines Cameron, soit l’emplacement des activités de Paramount dont il est question dans la présente procédure. Cela est peut-être vrai, mais il demeure que le plateau se trouve dans la région visée par le titre ancestral que revendiquent les demandeurs. En outre, comme je l’ai dit plus haut dans les présents motifs, l’Office d’examen a conclu, au vu de la preuve, que les effets directs et indirects combinés du projet de développement prévu sur l’environnement seraient considérables. En outre, l’Office d’examen n’a pas fait de distinction entre le plateau et les autres secteurs des collines Cameron. Il a plutôt reconnu que les collines Cameron constituent, pour les Premières nations vivant sur les lieux, une région importante en ce qui a trait aux activités traditionnelles.
[111] L’Office d’examen a rendu publics les rapports environnementaux exhaustifs au sujet du projet de réseau de pipeline et de conduites de collecte et du projet d’expansion. Ces rapports, que j’ai analysés de façon assez détaillée plus haut dans les présents motifs, portent sur les effets potentiels de l’exploitation pétrolière et gazière sur les terres, le poisson et la faune au sein du territoire touché et recommandent de nombreuses mesures d’aménagement que l’Office d’examen a considérées comme nécessaires pour contrer et amoindrir l’effet de ces projets sur l’environnement et, partant, par extension, sur le traité des demandeurs et les droits qu’ils revendiquent. L’examen de la preuve qui a amené l’Office d’examen à rédiger son rapport sur le projet d’expansion et à recommander la prise de mesures d’aménagement ne laisse que peu de doutes quant à l’importance de son effet potentiel sur la région des collines Cameron, ainsi que sur le traité des demandeurs et les droits qu’ils revendiquent.
[112] Je conclus donc que le projet d’expansion aura une incidence importante et durable sur la région des collines Cameron et, par conséquent, sur les terres visées par le titre ancestral revendiqué par les demandeurs. Je conclus également que le projet pouvait avoir une incidence marquée sur les [traduction] « vastes droits de chasse, de piégeage et de pêche » des demandeurs.
[113] Le défendeur - le procureur général du Canada - invoque la jurisprudence Mikisew et soutient que, dans les circonstances, l’obligation de la Couronne est minimale. Dans l’arrêt Mikisew rendu par la Cour suprême, où étaient également en jeu des droits issus de traité établis, le juge Binnie a fait les observations suivantes : « … étant donné que la Couronne se propose de construire une route d’hiver relativement peu importante sur des terres cédées où les droits de chasse, de pêche et de piégeage des Mikisew sont expressément assujettis à la restriction de la " prise ", j’estime que l’obligation de la Couronne se situe plutôt au bas du continuum ». Le juge Bennie a ensuite défini la teneur de cette obligation minimale.
[114] En l’espèce, les demandeurs revendiquent aussi un titre ancestral, ce qui n’était pas le cas dans l’affaire Mikisew. Par ailleurs, le projet d’exploitation pétrolière et gazière dans la région des collines Cameron, depuis son origine, et le projet d’expansion en particulier, vont nettement plus loin que la construction d’une route de peu d’importance. À mon avis, l’ampleur matérielle du projet et son incidence potentielle sur l’environnement et les droits de chasse, de pêche et de piégeage établis des demandeurs, de même que le titre ancestral revendiqué, comme nous l’avons vu plus tôt, militent en faveur du fait que la teneur de l’obligation de consultation qui incombe à la Couronne est plus intense que celle dont il est question dans l’arrêt Mikisew.
[115] Même dans l’arrêt Mikisew, où il a conclu que l’obligation de la Couronne en matière de consultation était minimale, le juge Bennie a néanmoins dit que la Couronne était tenue de réduire au minimum les répercussions défavorables sur les droits de chasse, de pêche et de piégeage des Mikisew. Au paragraphe 64 des motifs de la Cour, le juge Bennie a défini la teneur de l’obligation en ces termes :
[…] La Couronne devait aviser les Mikisew et nouer un dialogue directement avec eux (et non, comme cela semble avoir été le cas en l’espèce, après coup lorsqu’une consultation publique générale a été tenue auprès des utilisateurs du parc). Ce dialogue aurait dû comporter la communication de renseignements sur le projet traitant des intérêts des Mikisew connus de la Couronne et de l’effet préjudiciable que le projet risquait d’avoir, selon elle, sur ces intérêts. La Couronne devait demander aux Mikisew d’exprimer leurs réserves et les écouter attentivement, et s’efforcer de réduire au minimum les effets préjudiciables du projet sur les droits de chasse, de pêche et de piégeage des Mikisew.
[116] Le juge Binnie a souscrit à l’exposé suivant du juge d’appel Finch (aujourd’hui juge en chef de la C.-B.) à propos de l’obligation de consultation, dans l’arrêt Halfway River First Nation c. British Columbia (Ministry of Forests) (1999), 178 D.L.R. (4th) 666 aux paragraphes 159 et 160 :
[traduction]
Ce n’est pas parce qu’on a donné un avis suffisant d’une décision envisagée qu’on a aussi respecté l’exigence de la consultation suffisante.
L’obligation de consultation de la Couronne lui impose l’obligation concrète de veiller raisonnablement à ce que les Autochtones disposent en temps utile de toute l’information nécessaire pour avoir la possibilité d’exprimer leurs intérêts et leurs réserves, et de faire en sorte que leurs observations sont prises en considération avec sérieux et, lorsque c’est possible, sont intégrées d’une façon qui puisse se démontrer dans le plan d’action proposé.
[Non souligné dans l’original]
[117] À mon avis, vu le contexte, et surtout la gravité des effets que pourraient faire subir aux Autochtones, les actions envisagées par la Couronne et de la solidité du dossier de revendication des droits ancestraux des demandeurs, militent en faveur de consultations plus approfondies. Dans ces circonstances, l’obligation implique une participation officielle au processus décisionnel.
[118] Le processus de consultation que prévoit la Loi est exhaustif et offre la possibilité de tenir des consultations importantes entre le promoteur et les groupes autochtones concernés. Comme je l’ai dit plus haut, il ressort du dossier que les demandeurs ont eu de nombreuses occasions de faire valoir leurs préoccupations par écrit ou à l’occasion de réunions publiques au moyen d’observations faites par l’intermédiaire d’un avocat, sinon directement. Le dossier établit aussi que les demandeurs ont participé de près au processus et que leur participation a influencé le travail et les recommandations de l’Office d’examen. Le produit du processus de consultation se reflète essentiellement dans les rapports d’évaluation environnementale de l’Office d’examen. Ces rapports, bien qu’ils ne produisent pas nécessairement les résultats recherchés par les demandeurs, reflètent bel et bien la contribution collective de toutes les parties en cause, les demandeurs compris. Le rapport d’évaluation environnementale concernant le projet d’expansion montre clairement que l’on a tenu compte d’un grand nombre des réserves des demandeurs. Même si, en fin de compte, l’Office d’examen a donné son aval au projet, il ne l’a fait qu’avec des mesures d’aménagement et des suggestions importantes que les demandeurs appuyaient et qui contribuaient dans une large mesure à répondre à leurs principales réserves.
[119] Jusqu’à ce stade, le processus a, selon moi, permis aux demandeurs de faire valoir leurs intérêts et leurs préoccupations; ces préoccupations ont été sérieusement prises en considération et, dans toute la mesure du possible, manifestement intégrées dans le plan d’action proposé. Je conclus que, jusqu’à ce stade du processus, les demandeurs ont pu participer officiellement au processus décisionnel.
[120] En l’espèce, le problème est survenu quand la Couronne a décidé de se prévaloir du « processus de consultation pour fins de modifications » que prévoit la Loi. Aux termes de celle-ci, quand l’Office d’examen recommande d’approuver un projet et que cette recommandation est soumise à l’imposition de mesures jugées nécessaires pour éviter les répercussions défavorables importantes du projet, la loi prevoit que, dans le cadre de ce processus, les ministres compétents peuvent convenir d’adopter la recommandation avec modifications après avoir consulté l’Office d’examen. Par suite du processus de consultation pour fins de modifications, un grand nombre des recommandations de l’Office d’examen ont été modifiées. Les recommandations R-15 et
R-16 revêtaient une importance particulière pour les demandeurs, car elles se répercutaient sur le plan d’indemnisation relatif aux ressources fauniques et sur l’entente socio-économique. Cela s’est fait malgré la position exprimée fermement et de longue date par les demandeurs selon laquelle ces recommandations étaient pour eux d’une importance capitale. À part le fait de s’opposer à ce que l’on change ou que l’on supprime ces recommandations, les demandeurs n’ont eu aucune possibilité de contribuer de quelque manière aux changements que l’on proposait d’apporter à ces recommandations. Il aurait peut-être fort bien pu y avoir d’autres options qui auraient pu répondre dans une large mesure aux objections des demandeurs. En l’absence de consultations, jamais nous ne le saurons. Dans les circonstances, le processus de consultation pour fins de modifications a essentiellement permis à la Couronne de modifier unilatéralement l’issue de ce qui avait été jusque là, pourrait-on dire, un processus de consultation sérieux. La mise en œuvre des mesures d’aménagement recommandées par l’Office d’examen n’aurait peut-être pas été suffisante pour répondre à toutes les réserves des demandeurs, mais, dans les circonstances, elle aurait éventuellement répondu à l’obligation de la Couronne en matière de consultation et d’accommodement. Les recommandations étaient en effet l’aboutissement d’un processus qui donnait aux Autochtones la possibilité d’y contribuer concrètement et par lequel la Couronne, par l’entremise de l’Office d’examen, faisait montre de l’intention de répondre réellement à leurs préoccupations. À l’évidence, cela ne peut être dit du processus de consultation pour fins de modifications. Les nouvelles propositions qui en ont découlé n’ont jamais été communiquées aux demandeurs pour observations. Il n’y a tout simplement pas eu de consultation, a fortiori de consultation véritable, à ce stade.
[121] Il ne suffit pas d’invoquer le processus que prévoit la Loi. Dès le départ, les représentants de la Couronne ont soutenu que le processus prévu par la Loi répondait suffisament à l’obligation de consultation, essentiellement puisque c’était ce que prévoyait la Loi. Je conviens avec les demandeurs que l’obligation de la Couronne en matière de consultation ne peut pas être circonscrite par une loi. Cela ne veut pas dire que le fait de faire jouer un processus légal ne répond jamais à l’obligation de consultation. Dans l’arrêt Taku, au paragraphe 22, la Cour suprême a conclu que le processus emprunté par la province de la Colombie-Britannique en vertu de l’Environmental Protection Act de cette province répondait à l’obligation de la Couronne en matière de consultation. En l’espèce, les circonstances sont différentes. Les pouvoirs que la Loi accorde aux ministres doivent être exercés de manière conforme au principe de l’honneur de la Couronne. Vu la façon dont le processus de consultation pour fins de modifications a été mis en œuvre en l’espèce, pour les raisons mentionnées dans les présentes, la Couronne n’a pas respecté son obligation de consultation et il y a eu atteinte au principe de l’honneur de la Couronne.
[122] Le défendeur - le procureur général du Canada - soutient qu’au stade de la consultation pour fins de modifications le rôle que joue le tribunal administratif est polycentrique; il exerce son jugement en tenant compte des questions pertinentes, notamment économiques, sociales, politiques et que, de ce fait, le tribunal de contrôle doit faire preuve de déférence à l’égard de la décision du tribunal administratif. En outre, le défendeur - le procureur général du Canada - soutient que le processus de consultation pour fins de modifications n’est qu’un élément mineur du processus global et qu’avant de rendre une décision en vertu de l’article 130 de la Loi, il y a eu une analyse complète de la proposition et de ses effets réels et à long terme.
[123] Il est vrai que l’Office d’examen, par un long processus d’audience à laquelle la PNKT a pris part, a entrepris d’examiner les réserves des demandeurs et a finalement formulé des recommandations en vue de régler certaines d’entre elles. Cependant, en empruntant le « processus de consultation pour fins de modifications » qui a abouti à une révision importante de certaines recommandations clés de l’Office d’examen, notamment les recommandations nos 15 et 16, sans consulter les demandeurs, les ministres ont essentiellement décidé de ne pas se fonder sur le rôle d’enquête et d’appréciation des faits que joue l’Office d’examen. Il ne suffit pas pour les ministres, à ce stade, de faire valoir qu’à la suite de consultations préalables ils étaient au courant des réserves des demandeurs. Le problème est que les demandeurs n’ont pas été mis au courant des propositions ultérieures des ministres qui ont changé les mesures d’aménagement que l’Office d’examen avait recommandées. Ils n’ont pas pu faire part de leur point de vue ni s’inspirer des modifications proposées parce qu’ils n’ont pas participé au processus. Ils n’ont tout simplement pas été consultés. En fin de compte, les ministres ont lancé leur propre processus visant à décider de la manière de répondre aux réserves des demandeurs, et ce processus ne comportait aucune participation de la part des demandeurs. Les choses se sont agravées, en l’espèce, par l’importance des changements qui ont été apportés aux recommandations de l’Office d’examen, des changements qui, les ministres le savaient, étaient importants pour les demandeurs. À mon avis, dans les circonstances, la Couronne n’a pas respecté son obligation de consultation relativement aux nouvelles propositions auxquelles a abouti le processus de consultation pour fins de modifications.
[124] Je conclus que la Couronne n’a pas respecté son obligation de consultation dans les cironstances. En résumé, le processus de consultation pour fins de modifications a abouti à des changements de fond à des recommandations importantes formulées en termes du processus de consultation antérieur auquel avaient pris part les demandeurs et d’autres intervenants. Ces changements ont été faits sans la contribution des demandeurs. On ne peut donc pas dire que le processus de consultation pour fins de modifications a été mené dans l’intention véritable d’intégrer dans la décision finale les réserves de la PNKT. À ce stade, les demandeurs ont été essentiellement exclus du processus.
7. Autres questions
[125] Les demandeurs soutiennent que la réunion que les ministres ont tenue avec Paramount le 17 mai 2005 a enfreint les règles d’équité procédurale et donne lieu à une crainte raisonnable de partialité. À cette époque, les ministres étaient au courant que les parties avaient adopté des positions contraires quant à la question de savoir s’il fallait modifier ou non les recommandations qui figuraient dans le rapport d’évaluation environnementale portant sur le projet d’expansion. Il incombait donc aux ministres de veiller à ce que l’on respecte l’obligation d’équité procédurale et d’accorder un accès égal aux demandeurs.
[126] Paramount prétend que les réunions tenues à Ottawa n’ont jamais porté sur le processus de consultation pour fins de modifications, mais, de manière générale, sur le projet de développement de Paramount et les lenteurs du processus réglementaire. S’exprimant au nom des défendeurs, M. Livingstone déclare que même si Paramount a fait un [traduction] « exposé général sur son projet de développement à Mimi Fortier », la réunion n’avait rien à voir avec le processus de consultation pour fins de modifications et qu’il était loisible aux demandeurs de solliciter une réunion de ce genre.
[127] À mon avis, il est très judicieux que des représentants de ministres ne tiennent pas de réunions avec une partie à une procédure, en l’absence de la ou des parties adverses, quand la décision des ministres en question n’a pas été prise. Je conclus néanmoins qu’en l’espèce, la preuve ne me permet pas de conclure que la réunion contestée a donné lieu à un manquement à l’équité procédurale ou que les circonstances particulières donnent lieu à une crainte raisonnable de partialité.
[128] Les demandeurs font également valoir qu’un manque de ressources les a empêchés de participer de façon pleine et entière au processus de consultation que prévoit la Loi. Il ressort de la preuve que la Couronne a bel et bien accordé des fonds à la PNKT pour lui permettre de prendre part au processus de consultation. Les fonds qui ont été avancés pendant la période de cinq ans ne « répondaient pas intégralement à tout ce que les demandeurs avaient demandé, mais les sommes en question n’étaient pas négligeables. Les demandeurs allèguent qu’un manque de ressources les a empêchés de prendre pleinement part au processus, mais ils ne disent pas de quelles ressources supplémentaires ils auraient eu besoin, ni à quelle fin ces ressources auraient servi. En outre, comme je l’ai mentionné, il ressort de la preuve que les fonds octroyés ont donné lieu à un excédent. La preuve figurant dans le dossier ne me permet pas de décider si les ressources accordées ont été suffisantes pour que la PNKT puisse participer de façon sérieuse au processus. Quoi qu'il en soit, comme j’ai conclu plus haut que, dans les circonstances, la Couronne du chef du Canada n’a pas respecté son obligation de consultation, je n’ai pas besoin de me pencher sur la question de l’aide financière pour trancher la présente demande.
[129] Enfin, les demandeurs soutiennent que l’étude de Paramount sur les connaissances traditionnelles a été effectuées sans consultation véritable et qu’elle ne répond donc pas aux conditions d’une étude valable sur l’utilisation des terres traditionnelles. Je conclus, sur la foi de la preuve, que les demandeurs n’ont pas expliqué de manière satisfaisante pourquoi ils n’ont pas pris part au processus de consultation destiné à la mise au point d’une étude sur les connaissances traditionnelles. Je ne suis pas convaincu que les réserves soulevées ou les excuses données par les demandeurs pour justifier le fait de ne pas avoir fait part d’informations sur les connaissances traditionnelles à Paramount ou à l’Office d’examen sont fondées.
[130] Je crois comprendre que la principale réserve était d’éviter que des informations confidentielles concernant les connaissances traditionnelles des demandeurs deviennent publiques. Ceux-ci n’ont produit aucune preuve indiquant qu’ils n’avaient pas d’autres options qui leur auraient permis de protéger ces informations confidentielles contre leur diffusion publique tout en prenant part au processus. À mon avis, n’ayant pas justifié leur absence du processus, les demandeurs ne peuvent pas maintenant se plaindre que l’on n’a pas pris en compte leurs préoccupations lors de la préparation de l’étude sur les connaissances traditionnelles. Il n’est peut-être pas nécessaire de trancher la question, mais, compte tenu de ma conclusion antérieure, qui suffit à trancher le litige, selon laquelle la Couronne a manqué à son obligation de consultation, tout processus de consultation ultérieur obligera les demandeurs à faire part de leurs connaissances traditionnelles et à participer pleinement et véritablement au processus de consultation.
8. Conclusion
[131] La Couronne du chef du Canada n’a pas respecté son obligation de consultation et, le cas échéant, d’accommodement avant de prendre une décision définitive quant à l’approbation du projet d’expansion. La Couronne du chef du Canada se trouve dans l’obligation de consulter la PNKT au sujet des modifications qu’elle se propose d’apporter aux recommandations de l’Office d’examen suite au processus d’évaluation environnementale concernant le projet d’expansion. Il est nécessaire de faire preuve de bonne foi au stade « consultation pour fins de modifications » du processus, et bien que les parties ne soient pas tenues d’arriver à une entente, il y a cette consultation qui donne lieu à l’obligation de prendre des mesures d’accommodement à l’égard des réserves de la PNKT. La portée et la nature de ces mesures, s’il y en a, ne peuvent être déterminées qu’en termes d’une véritable consultation à ce stade final du processus.
9. Réparation
[132] Les demandeurs demandent à la Cour :
a) De rendre un jugement déclaratoire portant que la décision est invalide et illégale, et annulant cette dernière. En outre, de déclarer que les ministres ont manqué à leur obligation constitutionnelle et légale de consultation et d’accommodement à l’égard des K’a’Gee Tu avant de prendre leur décision.
(b) D’ordonner aux ministres de consulter les Ka’a’Gee Tu, dans le cadre de négociations entamées de bonne foi, et de prendre en compte les clauses du Traité des Ka’a’Gee Tu qui se rapportent à leurs réserves avant d’autoriser la poursuite du projet d’expansion, et d’ordonner que Paramount prenne part aux négociations. Celles-ci seraient entamées sous la supervision de la Cour.
(c) D’interdire aux ministres et à Paramount d’entreprendre d’autres démarches en rapport avec l’approbation du projet d’expansion, jusqu’à nouvelle ordonnance de la Cour.
(d) De dire qu’il est loisible aux parties de présenter une nouvelle demande à la présente Cour en vue d’obtenir un autre redressement.
(e) De leur accorder les dépens.
[133] Je conclus que, dans les circonstances, la réparation appropriée consiste en une déclaration portant que la Couronne du chef du Canada a manqué à son obligation de consultation et d’accommodement. J’ordonnerai donc que, conformément aux motifs qui précèdent les parties doivent entreprendre un processus de consultation véritable afin qu’il soit tenu compte des réserves de la PNKT et, s’il y a lieu, que les mesures d’accommodement qui s’imposent soient prises. Ce processus doit viser à concilier les divergences entre les parties, et ce, d’une manière qui concorde avec le principe de l’honneur de la Couronne ainsi qu’avec les principes que la Cour suprême du Canada a énoncés dans les arrêts Nation haïda et Taku.
[134] Les demandeurs auront droit à leurs dépens relatifs à la demande.
ORDONNANCE
LA COUR DÉCLARE que :
La Couronne du chef du Canada a manqué à son obligation de consulter la Première nation Ka’a’Gee Tu avant d’approuver le projet d’expansion.
LA COUR ORDONNE que :
- Conformément aux motifs qui précèdent, les parties doivent lancer un processus de consultation véritable dans le but de tenir compte des réserves de la PNKT et, s’il y a lieu, de prendre les mesures d’accommodement qui s’imposent. Ce processus doit avoir un objectif de réconciliation, et ce, d’une manière qui concorde avec le principe de l’honneur de la Couronne et les principes que la Cour suprême du Canada a énoncés dans les arrêts Nation haïda et Taku.
- Les demandeurs auront droit à leurs dépens relatifs à la demande, et ces derniers seront assumés et partagés par les défendeurs selon la formule dont ils conviendront.
- À défaut d’une telle entente, chacun des défendeurs pourra signifier et déposer, avant le 20 août 2007 au plus tard, des observations écrites d’une longueur maximale de 10 pages sur le mode de répartition des coûts entre eux, et les réponses, d’une longueur maximale de cinq pages chacune, devront être signifiées et déposées le 31 août 2007 au plus tard. La Cour, après avoir étudié les observations écrites, fixera ensuite la part des dépens qu’assumera chaque défendeur.
Traduction certifiée conforme
François Brunet, LL.L, B.C.L.
ANNEXE A
Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie 1998, ch. 26
Mackenzie Valley Resource Management Act, 1998 C-26
3. Toute consultation effectuée sous le régime de la présente loi comprend l’envoi, à la partie à consulter, d’un avis suffisamment détaillé pour lui permettre de préparer ses arguments, l’octroi d’un délai suffisant pour ce faire et la possibilité de présenter à qui de droit ses vues sur la question; elle comprend enfin une étude approfondie et impartiale de ces vues.
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3. Wherever in this Act reference is made, in relation to any matter, to a power or duty to consult, that power or duty shall be exercised (a) by providing, to the party to be consulted, (i) notice of the matter in sufficient form and detail to allow the party to prepare its views on the matter, (ii) a reasonable period for the party to prepare those views, and (iii) an opportunity to present those views to the party having the power or duty to consult; and (b) by considering, fully and impartially, any views so presented.
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60.1 Dans l’exercice de ses pouvoirs, l’office tient compte, d’une part, de l’importance de préserver les ressources pour le bien-être et le mode de vie des peuples autochtones du Canada visés par l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 et qui utilisent les ressources d’une région de la vallée du Mackenzie et, d’autre part, des connaissances traditionnelles et des renseignements scientifiques mis à sa disposition.
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60.1 In exercising its powers, a board shall consider (a) the importance of conservation to the well-being and way of life of the aboriginal peoples of Canada to whom section 35 of the Constitution Act, 1982 applies and who use an area of the Mackenzie Valley; and (b) any traditional knowledge and scientific information that is made available to it. |
111. (1) Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente partie. « autorité administrative » « autorité administrative » Personne ou organisme chargé, au titre de toute règle de droit fédérale ou territoriale, de délivrer les permis ou autres autorisations relativement à un projet de développement. Sont exclus les administrations locales et les organismes administratifs désignés. « étude d’impact » «étude d’impact » Examen d’un projet de développement effectué par une formation de l’Office en vertu de l’article 132. « évaluation environnementale » « évaluation environnementale » Examen d’un projet de développement effectué par l’Office en vertu de l’article 126. « examen préalable » «examen préalable » Examen d’un projet de développement effectué en vertu de l’article 124. « mesures correctives ou d’atténuation » « mesures correctives ou d’atténuation » Mesures visant la limitation, la réduction ou l’élimination des répercussions nuisibles sur l’environnement. Sont notamment visées les mesures de rétablissement. « ministre compétent » « ministre compétent » Le ministre du gouvernement fédéral ou du gouvernement territorial ayant compétence, sous le régime des règles de droit fédérales ou territoriales, selon le cas, en ce qui touche le projet de développement en cause. « Office » « Office » L’Office d’examen des répercussions environnementales de la vallée du Mackenzie constitué en vertu du paragraphe 112(1). « organisme administratif désigné » « organisme administratif désigné » Organisme mentionné à l’annexe. « Organisme administratif autonome » dans l’accord de revendication. « programme de suivi » « programme de suivi » Programme visant à vérifier, d’une part, le bien-fondé des conclusions de l’évaluation environnementale ou de l’étude d’impact, selon le cas, et, d’autre part, l’efficacité des mesures correctives ou d’atténuation auxquelles est assujetti le projet de développement. « projet de développement » « projet de développement » Ouvrage ou activité — ou toute partie ou extension de ceux-ci — devant être réalisé sur la terre ou sur l’eau. Y sont assimilées la prise de mesures, par un ministère ou un organisme gouvernemental, en vue de la constitution de parcs régis par la Loi sur les parcs nationaux du Canada ou de la constitution de parcs en vertu d’une règle de droit territoriale ainsi que l’acquisition de terres sous le régime de la Loi sur les lieux et monuments historiques. « répercussions environnementales » ou « répercussions sur l’environnement » « répercussions environnementales » ou « répercussions sur l’environnement » Les répercussions sur le sol, l’eau et l’air et toute autre composante de l’environnement, ainsi que sur l’exploitation des ressources fauniques. Y sont assimilées les répercussions sur l’environnement social et culturel et sur les ressources patrimoniales.
Champ d’application
(2) La présente partie s’applique aux projets de développement devant être réalisés en tout ou en partie dans la vallée du Mackenzie et ne s’applique pas, à l’exception de l’article 142, aux projets devant être réalisés entièrement à l’extérieur de celle-ci. 1998, ch. 25, art. 111; 2000, ch. 32, art. 55; 2005, ch. 1, art. 65. |
111. (1) The following definitions apply in this Part. "designated regulatory agency" "designated regulatory agency" means an agency named in the schedule, referred to in a land claim agreement as an independent regulatory agency. "development" "development" means any undertaking, or any part or extension of an undertaking, that is carried out on land or water and includes an acquisition of lands pursuant to the Historic Sites and Monuments Act and measures carried out by a department or agency of government leading to the establishment of a park subject to the Canada National Parks Act or the establishment of a park under a territorial law. "environmental assessment" "environmental assessment" means an examination of a proposal for a development undertaken by the Review Board pursuant to section 126. "environmental impact review" "environmental impact review" means an examination of a proposal for a development undertaken by a review panel established under section 132. "follow-up program" "follow-up program" means a program for evaluating (a) the soundness of an environmental assessment or environmental impact review of a proposal for a development; and (b) the effectiveness of the mitigative or remedial measures imposed as conditions of approval of the proposal. "impact on the environment" "impact on the environment" means any effect on land, water, air or any other component of the environment, as well as on wildlife harvesting, and includes any effect on the social and cultural environment or on heritage resources. "mitigative or remedial
measure" "mitigative or remedial measure" means a measure for the control, reduction or elimination of an adverse impact of a development on the environment, including a restorative measure. "preliminary screening" "preliminary screening" means an examination of a proposal for a development undertaken pursuant to section 124. "regulatory authority" "regulatory authority" , in relation to a development, means a body or person responsible for issuing a licence, permit or other authorization required for the development under any federal or territorial law, but does not include a designated regulatory agency or a local government. "responsible minister" "responsible minister" , in relation to a proposal for a development, means any minister of the Crown in right of Canada or of the territorial government having jurisdiction in relation to the development under federal or territorial law. "Review Board" "Review Board" means the Mackenzie Valley Environmental Impact Review Board established by subsection 112(1)
(2) This Part applies in respect of developments to be carried out wholly or partly within the Mackenzie Valley and, except for section 142, does not apply in respect of developments wholly outside the Mackenzie Valley. 1998, c. 25, s. 111; 2000, c. 32, s. 55; 2005, c. 1, s. 65.
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114. La présente partie a pour objet d’instaurer un processus comprenant un examen préalable, une évaluation environnementale et une étude d’impact relativement aux projets de développement et, ce faisant : a) de faire de l’Office l’outil primordial, dans la vallée du Mackenzie, en ce qui concerne l’évaluation environnementale et l’étude d’impact de ces projets; b) de veiller à ce que la prise de mesures à l’égard de tout projet de développement découle d’un jugement éclairé quant à ses répercussions environnementales; c) de veiller à ce qu’il soit tenu compte, dans le cadre du processus, des réserves des autochtones et du public en général. |
114. The purpose of this Part is to establish a process comprising a preliminary screening, an environmental assessment and an environmental impact review in relation to proposals for developments, and (a) to establish the Review Board as the main instrument in the Mackenzie Valley for the environmental assessment and environmental impact review of developments; (b) to ensure that the impact on the environment of proposed developments receives careful consideration before actions are taken in connection with them; and (c) to ensure that the concerns of aboriginal people and the general public are taken into account in that process.
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Résultat de l’évaluation environnementale
128. (1) Au terme de l’évaluation environnementale, l’Office : a) s’il conclut que le projet n’aura vraisemblablement pas de répercussions nuisibles importantes sur l’environnement ou ne sera vraisemblablement pas la cause de réserves importantes dans le grand public, déclare que l’étude d’impact n’est pas nécessaire; b) s’il conclut que le projet aura vraisemblablement des répercussions nuisibles importantes sur l’environnement : (i) soit ordonne, sous réserve de la décision ministérielle prise au titre de l’alinéa 130(1)c), l’étude d’impact, (ii) soit recommande que le projet ne soit approuvé que si la prise de mesures de nature, à son avis, à éviter ces répercussions est ordonnée; c) s’il conclut que le projet sera vraisemblablement la cause de réserves importantes dans le grand public, ordonne, sous réserve de la décision ministérielle prise au titre de l’alinéa 130(1)c), l’étude d’impact; d) s’il conclut que le projet aura vraisemblablement des répercussions nuisibles si importantes sur l’environnement qu’il est injustifiable, en recommande le rejet, sans étude d’impact. Rapport de l’Office (2) L’Office adresse son rapport d’évaluation, d’une part, au ministre fédéral, qui est tenu de le transmettre à tout ministre compétent, et, d’autre part, à l’organisme administratif désigné chargé de délivrer les permis ou autres autorisations nécessaires à la réalisation du projet. Il adresse également le rapport au gouvernement tlicho s’il s’agit d’un projet devant être réalisé — même en partie — sur les terres tlichos. Copie (3) L’Office adresse une copie du rapport au promoteur du projet de développement, à l’organe en ayant effectué l’examen préalable et, en cas de renvoi effectué en vertu du paragraphe 126(2), au ministère, à l’organisme, à la première nation, au gouvernement tlicho ou à l’administration locale concernée. Régions touchées (4) Dans son rapport, l’Office précise la région — même située à l’extérieur de la vallée du Mackenzie — dans laquelle, à son avis, le projet aura vraisemblablement les répercussions visées à l’alinéa (1)b) ou sera vraisemblablement la cause des réserves visées à l’alinéa (1)c), ainsi que la mesure dans laquelle la région sera ainsi touchée. 1998, ch. 25, art. 128; 2005, ch. 1, art. 78. |
Assessment by Review Board
128. (1) On completing an environmental assessment of a proposal for a development, the Review Board shall, (a) where the development is not likely in its opinion to have any significant adverse impact on the environment or to be a cause of significant public concern, determine that an environmental impact review of the proposal need not be conducted; (b) where the development is likely in its opinion to have a significant adverse impact on the environment, (i) order that an environmental impact review of the proposal be conducted, subject to paragraph 130(1)(c), or (ii) recommend that the approval of the proposal be made subject to the imposition of such measures as it considers necessary to prevent the significant adverse impact; (c) where the development is likely in its opinion to be a cause of significant public concern, order that an environmental impact review of the proposal be conducted, subject to paragraph 130(1)(c); and (d) where the development is likely in its opinion to cause an adverse impact on the environment so significant that it cannot be justified, recommend that the proposal be rejected without an environmental impact review. Report to ministers, agencies and Tlicho Government (2) The Review Board shall make a report of an environmental assessment to (a) the federal Minister, who shall distribute it to every responsible minister; (b) any designated regulatory agency from which a licence, permit or other authorization is required for the carrying out of the development; and (c) if the development is to be carried out wholly or partly on Tlicho lands, the Tlicho Government. (3) The Review Board shall provide a copy of its report to any body that conducted a preliminary screening of the proposal, to any body that referred the proposal to the Review Board under subsection 126(2) and to the person or body that proposes to carry out the development. (4) The Review Board shall identify in its report any area within or outside the Mackenzie Valley in which the development is likely, in its opinion, to have a significant adverse impact or to be a cause of significant public concern and specify the extent to which that area is affected. 1998, c. 25, s. 128; 2005, c. 1, s. 78.
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130. (1) Au terme de leur étude du rapport d’évaluation environnementale, le ministre fédéral et les ministres compétents auxquels le rapport a été transmis peuvent, d’un commun accord : a) ordonner l’étude d’impact malgré la déclaration contraire faite en vertu de l’alinéa 128(1)a); b) accepter la recommandation faite par l’Office en vertu du sous-alinéa 128(1)b)(ii) ou de l’alinéa 128(1)d), la lui renvoyer pour réexamen ou après avoir consulté ce dernier soit l’accepter avec certaines modifications, soit la rejeter et ordonner l’étude d’impact; c) dans les cas où, à leur avis, l’intérêt national l’exige et après avoir consulté le ministre de l’Environnement, saisir celui-ci de l’affaire, quelles que soient les conclusions du rapport, pour qu’un examen conjoint soit effectué sous le régime de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale.
Consultation du gouvernement tlicho (1.1) Avant de prendre la mesure visée aux alinéas (1)a) ou c), le ministre fédéral et les ministres compétents consultent le gouvernement tlicho si le projet de développement doit être réalisé — même en partie — sur les terres tlichos.
Régions touchées (2) Dans les cas où ils ordonnent l’étude d’impact, le ministre fédéral et les ministres compétents précisent la région — même située à l’extérieur de la vallée du Mackenzie — dans laquelle, à leur avis, le projet aura vraisemblablement des répercussions nuisibles importantes ou sera vraisemblablement la cause de réserves importantes dans le grand public, ainsi que la mesure dans laquelle la région sera ainsi touchée. Renseignements supplémentaires (3) Le ministre fédéral et les ministres compétents sont tenus d’indiquer, au soutien de la décision ou dans le cadre des consultations visées à l’alinéa (1)b), les renseignements dont il a été tenu compte et qui étaient inconnus de l’Office, ainsi que les questions d’intérêt public qui ont été étudiées et qui n’ont pas été soulevées par ce dernier. Communication de la décision (4) Le ministre fédéral est chargé de communiquer la décision ainsi rendue à l’Office, aux premières nations, administrations locales et autorités administratives touchées par celle-ci et aux ministères et organismes des gouvernements fédéral et territorial concernés. Mise en œuvre (5) Ces premières nations, administrations locales, autorités administratives, ministères et organismes sont tenus de se conformer à la décision ministérielle dans la mesure de leur compétence. La mise en œuvre de celle-ci incombe au ministre fédéral et aux ministres compétents. 1998, ch. 25, art. 130; 2005, ch. 1, art. 80. |
130. (1) After considering the report of an environmental assessment, the federal Minister and the responsible ministers to whom the report was distributed may agree (a) to order an environmental impact review of a proposal, notwithstanding a determination under paragraph 128(1)(a); (b) where a recommendation is made under subparagraph 128(1)(b)(ii) or paragraph 128(1)(d), (i) to adopt the recommendation or refer it back to the Review Board for further consideration, or (ii) after consulting the Review Board, to adopt the recommendation with modifications or reject it and order an environmental impact review of the proposal; or (c) irrespective of the determination in the report, to refer the proposal to the Minister of the Environment, following consultation with that Minister, for the purpose of a joint review under the Canadian Environmental Assessment Act, where the federal Minister and the responsible ministers determine that it is in the national interest to do so. (1.1) Before making an order under paragraph (1)(a) or a referral under paragraph (1)(c), the federal Minister and the responsible ministers shall consult the Tlicho Government if the development is to be carried out wholly or partly on Tlicho lands. (2) Where an environmental impact review of a proposal is ordered under subsection (1), the federal Minister and responsible ministers shall identify any area within or outside the Mackenzie Valley in which the development is likely, in their opinion, to have a significant adverse impact or to be a cause of significant public concern and specify the extent to which that area is affected.
(3) If the federal Minister and responsible ministers consider any new information that was not before the Review Board, or any matter of public concern not referred to in the Review Board’s reasons, the new information or matter shall be identified in the decision made under this section and in any consultation under paragraph (1)(b). (4) The federal Minister shall distribute a decision made under this section to the Review Board and to every first nation, local government, regulatory authority and department and agency of the federal or territorial government affected by the decision.
(5) The federal Minister and responsible ministers shall carry out a decision made under this section to the extent of their respective authorities. A first nation, local government, regulatory authority or department or agency of the federal or territorial government affected by a decision made under this section shall act in conformity with the decision to the extent of their respective authorities. 1998, c. 25, s. 130; 2005, c. 1, s. 80.
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Décision ministérielle 135. (1) Au terme de son étude du rapport visé au paragraphe 134(2), le ministre fédéral et les ministres compétents auxquels ce document a été transmis peuvent, d’un commun accord, parvenir à l’une des décisions suivantes : a) ils acceptent la recommandation de la formation de l’Office ou la lui renvoient pour réexamen; b) après avoir consulté celle-ci, ils l’acceptent avec certaines modifications ou la rejettent. Renseignements supplémentaires (2) Le ministre fédéral et les ministres compétents sont tenus d’indiquer, au soutien de la décision ou dans le cadre des consultations visées à l’alinéa (1)b), les renseignements dont il a été tenu compte et qui étaient inconnus de la formation, ainsi que les questions d’intérêt public qui ont été étudiées et qui n’ont pas été soulevées par celle-ci.
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Consideration of report by ministers 135. (1) After considering the report of a review panel, the federal Minister and responsible ministers to whom the report was distributed may agree to (a) adopt the recommendation of the review panel or refer it back to the panel for further consideration; or (b) after consulting the review panel, adopt the recommendation with modifications or reject it.
(2) If the federal Minister and responsible ministers consider any new information that was not before the review panel, or any matter of public concern not referred to in the panel’s reasons, the new information or the matter shall be identified in the decision made under this section and in their consultations under paragraph (1)(b).
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Loi sur les opérations pétrolières au Canada/
Canada Oil and Gas Operations Act
5(2) Avant d’autoriser les activités prévues à l’alinéa (1)b), l’Office national de l’énergie exige la soumission d’un programme qu’il juge acceptable, prévoyant dans l’exécution de celles-ci l’embauche de Canadiens et offrant aux fabricants, conseillers, entrepreneurs et compagnies de services canadiens la juste possibilité de participer, compte tenu de leur compétitivité, à la fourniture des biens et services utilisés lors de ces activités.
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5(2) Before authorizing any work or activity under paragraph (1)(b), the National Energy Board shall require the submission of a plan satisfactory to the National Energy Board for the employment of Canadians and for providing Canadian manufacturers, consultants, contractors and service companies with a full and fair opportunity to participate on a competitive basis in the supply of goods and services used in that work or activity.
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ANNEXE B
Mesures d’atténuation recommandées R-13, R-15, R-16 et R-17,
extraites du rapport d’évaluation environnementale
concernant le projet de réseau de pipelines et de conduites de collecte
L’OEREVM a produit les recommandations suivantes en rapport avec le projet de réseau de pipeline et conduites de collecte dans le rapport d’évaluation environnementale initial, daté du 16 octobre 2001 :
[traduction]
R-13 Qu’AINC veille à ce que Paramount discute du plan d’indemnisation qu’elle propose avec les collectivités concernées et le GTNO. Paramount devrait élargir s’il y a lieu la portée de ce plan afin de veiller à ce que les répercussions raisonnables et crédibles sur l’utilisation des ressources et des terres qui sont attribuables au projet de développement et qui sont relevées par les collectivités soient admissibles à une indemnité.
R-14 Que l’OTEVM et l’ONE veillent à ce que Paramount inclue des mesures d’atténuation dans l’étude sur les connaissances traditionnelles afin de traiter des répercussions que cette étude a relevées. L’OTEVM et l’ONE devraient obtenir de Paramount des exemplaires de l’étude sur les connaissances traditionnelles, de pair avec une preuve que les collectivités approuvent cette étude. L’OTEVM et l’ONE devraient veiller à ce que les conditions soient modifiées en cas de besoin afin de traiter des répercussions relevées par l’étude qui n’ont pas déjà été réglées au moyen des clauses existantes.
R-15 Qu’AINC et Paramount modifient le plan de retombées économiques qu’AINC a approuvé le 25 septembre 2001 afin d’inclure le plan d’indemnisation révisé établi à la suite de la mesure no 13 de l’Office d’examen, ou que l’on dresse un plan distinct pour traiter de ces réserves. Si Paramount et les collectivités ne parviennent pas à s’entendre sur la teneur du plan d’indemnisation révisé, AINC devrait prendre la décision finale et approuver le plan de retombées économiques modifié.
R-16 Qu’AINC veille à ce que le plan de retombées économiques modifié oblige Paramount à fournir des exemplaires des rapports annuels qu’exige ce plan au GTNO, à l’Office d’examen, à l’OTEVM ainsi qu’aux collectivités locales, en plus d’AINC. Il faudrait élargir la portée des rapports annuels au-delà de ce qui est actuellement exigé. Ces derniers devraient exposer en détail les consultations entreprises avec les collectivités locales, analyser les réserves que les collectivités ont soulevées, décrire la façon dont Paramount a réglé ou entend régler ces réserves, et traiter des mesures que Paramount prendra pour améliorer les répercussions socio-économiques positives et minimiser les répercussions socio-économiques nuisibles.
R-17 Que l’OTEVM, l’ONE et AINC ne prennent aucune mesure irréversible en rapport avec le projet de développement avant qu’AINC ait souscrit à la recommandation concernant un plan de retombées économiques modifié. Un exemplaire du plan modifié, une fois terminé, devrait être fourni à chacune des collectivités potentiellement touchées, de même qu’à l’Office d’examen, l’OTEVM, l’ONE, AINC et le GTNO.
ANNEXE C
Recommandations R-13, R-15, R-16 et R-17 modifiées
à la suite du processus de consultation pour fins de modifications
concernant le projet de réseau de pipeline et de conduites de collecte
AINC a entrepris un processus de consultation pour fins de modifications visant à changer ces recommandations. Les recommandations finales ont été rendues publiques le 11 janvier 2002; elles modifiaient considérablement les recommandations R-13 à R-16 et supprimaient la recommandation R-17. Le texte des recommandations modifiées est le suivant :
[traduction]
R-13 (modifiée) Que Paramount discute, mette au point et applique un plan d’indemnisation relatif à la faune et à la récolte de ressources avec les collectivités des Premières nations qui sont potentiellement concernées – la Première nation Deh Gah Go’tie, les Métis de Fort Providence, la Première nation Ka’a’Gee Tu, la Première nation K’atlodeeche et la Première nation West point. Le plan doit inclure une indemnisation pour la diminution des activités de chasse, de piégeage, de pêche et d’autres activités de récolte de ressources qui est imputable au projet de développement, comme convenu par Paramount et les collectivités. Paramount débutera les consultations le plus tôt possible; une ébauche de plan sera présentée aux collectivités dans les 60 jours suivant l’acceptation, par le minitsre d’AINC, du rapport d’évaluation environnementale, et un plan final sera soumis aux collectivités dans les 90 jours suivant l’acceptation du rapport d’évaluation environnementale. Le plan s’appliquera rétroactivement aux répercussions qui se feront sentir dès le début de la construction des installations de collecte et des pipelines. Si Paramount ou l’une quelconque des collectivités en fait la demande, le GTNO et AINC faciliteront les discussions relatives à ce plan.
R-14 (modifiée) L’OTEVM et/ou l’ONE devraient s’assurer que les collectivités autochtones concernées ont reçu un exemplaire de l’étude sur les connaissances traditionnelles et ont eu l’occasion de commenter cette étude et les mesures d’atténuation que propose Paramount. L’OTEVM et/ou l’ONE devraient s’assurer aussi que Paramount met en œuvre des mesures d’atténuation appropriées pour contrer les répercussions qu’aura le projet pendant toute sa durée.
R-15 (modifiée) Que Paramount et les collectivités collaborent dans toute la mesure du possible à la mise au point du plan d’indemnisation relatif à la faune et à la récolte de ressources. Si les parties ne parviennent pas à s’entendre sur le contenu du plan dans le délai prescrit de 90 jours, un arbitre indépendant sera nommé conjointement par le GTNO et AINC dans les 30 jours suivants. Le processus d’arbitrage prendra fin dans les 30 jours suivant la nomination de l’arbitre.
R-16 (modifiée) À la suite de l’examen et de l’acceptation du rapport annuel de Paramount sur les collines Cameron, AINC en fournira des exemplaires au GTNO, à l’Office d’examen, à l’OTEVM ainsi qu’aux collectivités des Premières nations potentiellement concernées. Le rapport annuel devrait exposer en détail les consultations entreprises avec les collectivités locales, analyser les réserves que ces dernières ont soulevées, décrire de quelle façon Paramount a réglé ou entend régler ces réserves, et analyser les mesures que Paramount prendra pour améliorer les répercussions socio-économiques positives.
R-17 (modifiée) Cette mesure a été supprimée.
ANNEXE D
SOMMAIRE DES RECOMMANDATIONS ET DES SUGGESTIONS
Rapport d’évaluation environnementale et motifs de décision
EA03-005 Expansion du projet des collines Cameron de Paramount Resources Limited
[traduction]
Recommandations
R-1 L’Office d’examen recommande que les autorités réglementaires incluent dans leurs autorisations les éléments exposés dans les engagements du promoteur, décrits à l’annexe A, qui cernent de leur compétence.
R-2 L’Office d’examen recommande que Paramount établisse un rapport dans un délai de 12 mois, et chaque année par la suite, jusqu’à ce que les travaux relatifs au secteur visé par la LDI soient abandonnés et rétablis. Ce rapport, distribué en langage clair aux parties à la présente EE, décrira la mise en œuvre de chaque engagement pris au cours de la présente EE, comme il est indiqué à l’annexe A.
R-3 L’Office d’examen recommande qu’avant de délivrer d’autres permis, Paramount mette en place une station météorologique (qui surveillera, à tout le moins, la vélocité du vent, sa direction et la température) dans le secteur visé par la LDI des collines Cameron en vue de recueillir les données de base se rapportant à son projet de développement. Les données météorologiques seront fournies chaque année au personnel chargé de la qualité de l’air du GTNO (RWED) et à Environnement Canada, de pair avec une remodélisation détaillée des divers scénarios de développement de Paramount afin de s’assurer que les conditions météorologiques locales se reflètent dans les résultats modélisés.
R-4 L’Office d’examen recommande que Paramount mette en place un système de suivi continu des analyses de gaz afin de suivre la qualité de l’air ambiant (au moins une heure pour le SO2 et le NO2) et qu’il fournisse les données obtenues au grand public par l’entremise d’un site Web, qui sera mis à jour à intervalles d’au moins un mois si un raccordement en direct n’est pas disponible. Paramount fournira les rapports annuels sur l’état de la qualité de l’air dans les collines Cameron à toutes les collectivités potentiellement touchées et au gouvernement dans un document en langage clair, et ce, pendant toute la durée des activités de Paramount dans les collines Cameron.
R-5 L’Office d’examen recommande que Paramount installe une unité d’adoucissement à amines à la batterie centrale (H-03) avant de raccorder d’autres puits ou d’amener du carburant adouci de l’extérieur des collines Cameron, conformément au plan de développement initial de Paramount.
R-6 L’Office d’examen recommande que tout autre moteur à combustion mis en place pour les chauffes-lignes et les chevalets de pompage dans les collines Cameron fonctionnent au carburant adouci ou à une autre source de carburant exempt de soufre.
R-7 L’Office d’examen recommande que le gouvernement du Canada (AINC et Environnement Canada) et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest mettent en œuvre la recommandation no 7 extraite de l’EE de Ranger-Chevron d’ici juin 2005.
R-8 L’Office d’examen recommande que Paramount modifie ses procédures de déclaration des déversements concernant le projet de développement des collines Cameron de Paramount afin qu’elles comportent un avis de déversement à l’intention des collectivités potentiellement touchées. Les déversements doivent être signalés d’une manière conforme aux procédures de déclaration des déversements des TNO.
R-9 L’Office d’examen recommande que Paramount continue de surveiller tous les sites de travail en vue d’y cerner des signes d’érosion, et qu’elle prenne à l’avance les mesures qui conviennent pour éviter de tels problèmes. L’Office d’examen recommande que les mesures appropriées d’atténuation de l’érosion soient déterminées à l’avance et autorisées par des inspecteurs de l’ONE et d’AINC, et que toute remise en état des sites soit documentée et signalée aux trois mois aux autorités réglementaires et à la Première nation Ka’a’Gee Tu.
R-10 L’Office d’examen recommande que Paramount, dans le cas d’un franchissement d’eau isolé, maintienne le débit de l’eau en amont au même niveau qu’avant les travaux. Tous ces travaux doivent être terminés le plus rapidement possible afin de perturber le moins possible les déplacements des poissons.
R-11 L’Office d’examen recommande que le ministère des Pêches et des Océans procède à des visites de sites régulières dans les collines Cameron afin de faire des inspections et de déterminer s’il y a des effets sur les poissons ou leur habitat. Les rapports relatifs à ces inspections doivent être accessibles au grand public par l’entremise du MPO et aussi envoyés directement, dans une version en langage clair, à la Première nation Ka’a’Gee Tu.
R-12 L’Office d’examen recommande que RWED entreprenne, d’ici les six prochains mois, la formation d’un groupe de travail sur le caribou boréal du Deh Cho (DCBCWG). Ce groupe de travail se chargera, notamment, de ce qui suit : l’identification de l’habitat, l’évolution des aires, les seuils, les systèmes de surveillance, les mesures d’atténuation adaptatives, les programmes de recherche et les modèles d’effets cumulatifs. En outre, il coordonnera ses activités avec des groupes de travail similaires en Alberta et en Colombie-Britannique.
R-13 L’Office d’examen recommande que l’OTEVM adopte une cible de perturbation linéaire moyenne de 1,8 kilomètre par kilomètre carré en tant que seuil de perturbation du caribou boréal pour l’ensemble de la région des collines Cameron (TNO), de façon à éviter de soumettre à des répercussions environnementales nuisibles les populations de caribou boréal dont les aires englobent le secteur visé par la LDI de Paramount et la région environnante. Cette recommandation sera prise en considération dans toutes les demandes futures d’utilisation des terres qui concernent la région.
R-14 L’Office d’examen recommande que Paramount situe au moins 50 % de toutes les activités de développement proposées et prévues dans le secteur visé par la LDI des collines Cameron, ainsi qu’il est décrit dans le rapport d’évaluation du promoteur de Paramount, dans des secteurs qui sont actuellement perturbés (à la date de l’autorisation, par le ministre, du présent rapport d’évaluation environnementale). Cette exigence devrait être incluse en tant que condition relative à l’octroi du permis d’utilisation des terres MV2002A0046.
R-15 L’Office d’examen recommande que Paramount et les autres parties au plan d’indemnisation relatif à la faune et à la récolte de ressources dans la région des collines Cameron qui est formulé de manière définitive en réponse aux mesures nos 13 et 15 de la décision EE01-005 établissent le plan d’indemnisation. Si les parties ne parviennent pas à mettre la dernière main à ce plan dans les 90 jours suivant l’acceptation de ce rapport par le ministre fédéral, l’affaire sera soumise à un arbitrage exécutoire, conformément à l’Arbitration Act des TNO. Une lettre signée par les parties et indiquant qu’elles souscrivent au plan d’indemnisation ou, dans le cas d’un arbitrage, à la décision de l’arbitre doit être déposée auprès de l’ONE et de l’OTEVM avant le début des activités de Paramount visées par le permis d’utilisation des terres MV2002A0046.
R-16 L’Office d’examen recommande que le GTNO conclue une entente socio-économique avec Paramount, en consultation avec les collectivités touchées, avant que débutent les activités visées par le permis d’utilisation des terres MV2002A0046. L’entente socio-économique traitera de questions telles que les objectifs d’emploi, les possibilités d’instruction et de formation offertes aux habitants de l’endroit, ainsi qu’un plan de consultation communautaire permanent.
R-17 L’Office d’examen recommande que l’on informe directement la PNKT si l’on découvre des ressources patrimoniales ou si l’on en soupçonne l’existence lors des activités de Paramount dans les collines Cameron.
Suggestions
S-1 L’Office d’examen suggère que le MPO invite un membre de la Première nation Ka’a’Gee Tu à accompagner ses inspecteurs lors des inspections de la zone des opérations dans les collines Cameron.
S-2 L’Office d’examen suggère que les organismes chargés de la gestion et de la protection des ressources hydriques augmentent leurs efforts de surveillance et d’exécution proportionnellement à l’intensification de l’ampleur du projet de développement de Paramount dans la région des collines Cameron.
S-3 L’Office d’examen suggère que l’OTEVM et l’ONE précisent des lignes sismiques à faible impact (actuellement : 4,5 mètres de largeur en moyenne, maximum de 5 m de largeur, ligne de visée maximale de 200 m) en tant que norme actuellement en vigueur pour les programmes géophysiques aboutis dans l’habitat du caribou boréal, comme il est indiqué dans la version 2003 de l’ébauche de document de l’OEREVM : Reference Bulletin – Preliminary Screening of Seismic Operations in the Mackenzie Valley.
S-4 L’Office d’examen suggère que le RWED détermine s’il est nécessaire de faire des recherches concertées en vue de documenter les répercussions du projet de développement des collines Cameron sur les populations de martres, de loups et de carcajous.
S-5 L’Office d’examen suggère que la PNKT et Paramount reprennent la discussion et la rédaction du plan d’investissement communautaire, et que le 30 novembre 2004 soit la date d’achèvement et de mise en œuvre visée.
S-6 L’Office d’examen suggère que Paramount poursuive ses discussions avec les Hay River Health and Social Services à l’égard des services (d’urgence ou d’autre nature) que l’entreprise peut utiliser dans certains cas.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
INTITULÉ DE LA CAUSE : LE CHEF LLOYD CHICOT, agissant en son nom et au nom de tous les membres de la Première nation KA’A’GEE TU, et la PREMIÈRE NATION KA’A’GEE TU c. LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA et PARAMOUNT RESOURCES LTD.
LIEU DE L’AUDIENCE : VANCOUVER (C.-B.)
DATE DE L’AUDIENCE : LE 23 JANVIER 2007
MOTIFS DE L’ORDONNANCE
ET ORDONNANCE : LE JUGE BLANCHARD
DATE DES MOTIFS : LE 20 JUILLET 2007
COMPARUTIONS :
Louise Mandell, c.r. POUR LES DEMANDEURS
Timothy Howard/Cheryl Sharvit
Donna Tomljanovic POUR LE DÉFENDEUR,
LE PROCUREUR GÉNÉRAL
Everett Bunnell, c.r. POUR LA DÉFENDERESSE,
Jung Lee PARAMOUNT
Vickie Giannacopoulos POUR LA DÉFENDERESSE,
Ronald M. Kruhlak MACKENZIE VALLEY
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Mandell Pinder POUR LES DEMANDEURS
Vancouver (C.-B.)
John H. Sims, c.r. POUR LE DÉFENDEUR,
Sous-procureur général du Canada LE PROCUREUR GÉNÉRAL
Edmonton (Alberta)
Macleod Dixon POUR LA DÉFENDERESSE,
Calgary (Alberta) PARAMOUNT
McLennon Ross s.r.l. POUR LA DÉFENDERESSE,
Edmonton (Alberta) MACKENZIE VALLEY