Ottawa (Ontario), le 31 octobre 2006
EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE LEMIEUX
ENTRE :
et
LA NATION CRIE D’ERMINESKIN et le CONSEIL TRIBAL D’ERMINESKIN
MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE
Introduction
[1] Le 31 août 2005, George Leslie Minde (le demandeur) a été élu chef de la Nation crie d’Ermineskin (la Nation) pour un second mandat de trois ans. Il avait d’abord été élu chef en août 2002. Deux appels interjetés à l’encontre de l’élection d’août 2005 ont été instruits, et rejetés, par le Comité des appels en matière d’élections. Le second mandat du demandeur a débuté le 1er octobre 2005.
[2] Le 4 décembre 2005, lors d’une réunion extraordinaire du Conseil tribal d’Ermineskin (le Conseil tribal), la résolution du conseil de bande qui suit (la Résolution) a été adoptée :
[traduction]
Il est résolu, à une réunion dûment convoquée, que nous, le Conseil tribunal d’Ermineskin, prenons la décision qui suit en vertu du Code d’éthique du Conseil faisant partie de la Constitution de la Tribu d’Ermineskin :
Attendu que le Conseil tribal d’Ermineskin a accepté la recommandation faite par le Conseil des anciens d’Ermineskin de mettre en application l’article 15 le 31 octobre 2005, et
Attendu que George L. Minde n’a pas comparu devant le Conseil des anciens d’Ermineskin dans le délai imparti,
Par conséquent, le Conseil tribal d’Ermineskin exerce par les présentes le pouvoir que lui confère l’article 11, par suite de quoi George L. Minde est réputé avoir quitté son poste de chef, en raison de la violation des articles 4, 5 et 9 du Code d’éthique faisant partie de la Constitution de la Tribu d’Ermineskin ». [Non souligné dans l’original.]
[3] Les dispositions pertinentes des Règles d’éthique du Conseil actuellement en vigueur sont jointes aux présents motifs à titre d’annexe A.
[4] Le 30 janvier 2006, M. Minde a demandé le contrôle judiciaire de la Résolution, qu’il a qualifié de résolution [traduction] « censée mettre fin aux fonctions de chef de la Nation du demandeur ou constater sa destitution automatique ». Il demande les mesures de redressement suivantes :
1. une ordonnance annulant la Résolution du 4 décembre 2005,
2. une déclaration portant que le demandeur, George L. Minde, est le chef de la Nation,
3. toute autre mesure de redressement jugée indiquée par la Cour,
4. les dépens avocat‑client pour la présente action ou, subsidiairement, la somme de 25 000 $ au titre des dépens.
[5] Le demandeur invoque l’atteinte à l’équité procédurale comme motif principal d’annulation de la Résolution. Selon ses dires, on ne l’a pas avisé de la tenue de la réunion extraordinaire du 4 décembre 2005 du Conseil tribal, il ne savait pas quelle mesure on se proposait d’y prendre, il ne savait pas quelles allégations étaient portées contre lui et il n’a pas eu l’occasion de se défendre. Parmi les autres motifs invoqués, il y a aussi l’absence d’avis à deux autres membres du Conseil tribal quant à la réunion du 4 décembre 2005, ainsi que l’absence de quorum. Le chef Minde déclare n’avoir pris connaissance de la Résolution que le 20 décembre 2005, lorsqu’on lui a signifié l’acte introductif d’instance dans le cadre de l’instance en Alberta.
[6] L’affidavit du chef Minde est venu appuyer sa demande de contrôle judiciaire, tout comme celui de Donna Littlechild Patenaude, confirmant qu’elle n’avait pas reçu avis de la réunion extraordinaire du 4 décembre et que seulement cinq conseillers y étaient présents. Le chef Minde a été contre‑interrogé au sujet de son affidavit.
[7] L’avocat du conseil tribal admet qu’il n’y a aucune preuve que le demandeur, qui est en tant que chef membre d’office du Conseil tribal, ait jamais été avisé de la tenue ou de l’objet de la réunion extraordinaire du 4 décembre 2004, ou qu’il y ait été présent pour pouvoir se faire entendre et se défendre.
[8] La présente procédure de contrôle judiciaire a pris un tour inattendu lors du dépôt du dossier des défendeurs. Ceux‑ci y soutiennent en effet que la Nation est dotée de sa propre Constitution, qui est constituée du Système tribal d’Ermineskin (le Système tribal) et des Règlements. Les défendeurs renvoient tout particulièrement au Règlement E‑83‑01, en sa version modifiée en 1987 et en 1996, soit la Loi coutumière relative à l’exercice des activités du Conseil tribal d’Ermineskin (le chef et les conseillers), qui prévoit que le Conseil des anciens d’Ermineskin (le Conseil des anciens) « conseille le chef et les conseillers et surveille la conduite du chef et des conseillers, à l’égard desquels il peut prendre les mesures disciplinaires qui pourront être indiquées le cas échéant, et selon ce qui est prévu au protocole d’entente joint aux présentes à titre d’annexe B ». [Non souligné dans l’original.]
[9] À la page 007 du dossier des défendeurs, on trouve un document daté du 27 octobre 2004 et intitulé Protocole d’entente sur la durée des fonctions. Le protocole est conclu entre le chef Minde et le Sénat des anciens d’Ermineskin, et on prévoit à son article 8 [traduction] « la cessation respectivement à la fin de mon mandat comme chef ». Je reproduis l’article 4 du Protocole d’entente :
[traduction]
En tant que chef, je suis moi‑même au fait de mes responsabilités envers les membres de la Nation crie d’Ermineskin et je conviens ainsi par les présentes que mon poste devient vacant en cas de violation des règles prévues par le Système tribal d’Ermineskin. J’accepte par les présentes, en outre, que des déductions soient faites sur mon salaire pour les heures où je suis en retard ou absent sans autorisation lors de réunions, de même que je consens à toute suspension décidée par le Sénat des anciens pour conduite inconvenante. » [Non souligné dans l’original.]
[10] Les défendeurs affirment qu’en août 2005, le Conseil des anciens a décidé de faire enquête par suite d’allégations selon lesquelles le chef Minde aurait pris part indûment à trois opérations financières mettant en cause des fonds de la Nation. Selon leurs dires, le Conseil des anciens a avisé le chef et lui a demandé sa collaboration dans le cadre de l’enquête. Le chef Minde aurait refusé de collaborer, par suite de quoi le Conseil des anciens lui aurait signifié un Avis de destitution automatique daté du 14 novembre 2005 et précisant, notamment, que le chef était déchu de son poste parce qu’il n’avait pas tenu compte d’avis précédemment signifiés par le Conseil des anciens pour obtenir sa collaboration à l’enquête. L’une des opérations en cause est survenue en août 2004 et concernait le prétendu achat de nouveau matériel lourd d’une valeur de 149 000 $.
[11] L’essentiel de l’argumentation des défendeurs c’est que M. Minde n’a pas intenté son recours contre l’organisme approprié. Ils soutiennent que le décideur était en l’espèce le Conseil des anciens et non le Conseil tribal, et que la Résolution n’avait pas eu en fait de rôle à jouer dans la décision du Conseil des anciens selon laquelle M. Minde était réputé avoir quitté son poste de chef. Selon eux, si le demandeur avait voulu contester par voie de contrôle judiciaire la décision le déclarant réputé avoir quitté son poste de chef, c’est la décision du Conseil des anciens qu’il aurait dû viser à faire annuler.
[12] Le 30 juin 2006, le demandeur a déposé sa réplique, dans laquelle il fait valoir les trois points suivants :
· Le Conseil des anciens n’existait pas pendant toute la période pertinente, soit d’août à décembre 2005, à l’époque où les étapes disciplinaires se sont prétendument échelonnées.
· Si le Conseil des anciens existait bel et bien pendant toute la période pertinente, il n’avait pas le pouvoir de destituer M. Minde ou de prononcer sa « destitution automatique », puisque c’est malgré tout le Conseil tribal qui disposait d’un tel pouvoir.
· Le Conseil des anciens n’est pas un office fédéral au sens de l’article 2 de la Loi sur les Cours fédérales.
[13] Dans le cadre de sa réplique, le demandeur a déposé un avis juridique externe (c.‑à‑d. ne provenant pas du conseiller juridique habituel) daté du 21 octobre 2005 et que le Conseil tribal a reçu. On traitait dans cet avis de l’obligation d’équité procédurale imposée par la loi relativement à la suspension de deux semaines dont le chef Minde était censé avoir fait l’objet en date du 17 octobre 2005.
[14] La réponse des défendeurs était appuyée par l’affidavit de George Ermineskin, président du Conseil des anciens. Divers procès‑verbaux de réunions du Conseil des anciens et des copies d’avis d’enquête transmis au chef Minde étaient joints à cet affidavit. M. Ermineskin a été contre‑interrogé. Les défendeurs ont produit trois autres affidavits, dont les auteurs n’ont pas été contre‑interrogés :
· L’affidavit de J. Wilton Littlechild, c.r., auquel étaient joints des documents concernant le Système tribal et la Constitution de la Nation.
· L’affidavit de Bob Small, ancien membre du Conseil tribal d’octobre 1999 à 2005, qui a donné des précisions sur sa participation, de concert avec le demandeur, à l’achat du matériel lourd et qui a endossé les chèques remis au concessionnaire d’automobiles. Comme on le lui avait demandé, M. Small s’est présenté devant le Conseil des anciens en août 2005 pour expliquer son rôle dans l’affaire. Le Conseil des anciens a décidé de suspendre pendant dix ans le droit de M. Small de se présenter à toute élection au sein de la Nation.
· L’affidavit de Craig Makinaw, qui est membre du Conseil tribal depuis 1993. M. Makinaw a joint plusieurs documents à son affidavit, dont diverses résolutions, ainsi qu’une note du 5 décembre 2005 adressée aux administrateurs et gestionnaires d’entreprises de la Nation et d’autres organisations leur laissant savoir que M. Minde n’occupait plus le poste de chef.
Le contexte et les faits
a) La procédure judiciaire en Alberta
[15] Le 16 décembre 2005, la Nation et le Conseil tribal ont déposé comme demandeurs devant la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta une déclaration à l’encontre de M. Minde, défendeur, où ils alléguaient, inter alia, ce qui suit :
· Au moment où il a prêté son serment d’office, M. Minde a signé une entente en date du 27 octobre 2004 et conclue avec le Sénat des anciens d’Ermineskin, par laquelle il convenait que, s’il devait enfreindre les règles du Système tribal d’Ermineskin, son poste serait réputé vacant.
· M. Minde a enfreint le Code d’éthique et, par conséquent, l’entente signée le 27 octobre 2004.
· M. Minde a manqué à son obligation fiduciaire en tant que chef du fait de ses transactions avec un concessionnaire d’automobiles et de sa participation à l’acquisition frauduleuse d’équipement lourd à prix excessif.
· M. Minde est coupable d’abus de confiance pour avoir comploté en vue de l’achat de l’équipement lourd par la Nation.
· M. Minde est coupable de tromperie et de fausse représentation dans ses transactions avec un membre de la tribu et en faisant en sorte que trois chèques soient endossés et remis au concessionnaire sans que le Conseil tribal soit au courant ou y consente.
[16] Les demandeurs ont réclamé le versement par M. Minde de dommages‑intérêts généraux d’un montant de 149 000 $ ainsi que de dommages‑intérêts punitifs et exemplaires, et ils ont sollicité une injonction interlocutoire et permanente enjoignant à M. Minde de quitter immédiatement le bureau du chef aux bureaux de l’Administration de la bande et lui interdisant toute ingérence à l’endroit du Conseil tribal, du personnel de la bande ou des membres de la bande de la Nation.
[17] Les demandeurs ont également allégué dans la déclaration qu’après avoir découvert l’émission des trois chèques d’un montant total de 149 000 $, le Conseil tribal a ouvert une enquête confiée aux anciens de la Tribu. Les demandeurs ont ajouté qu’on a alors demandé à M. Minde de collaborer à l’enquête, mais qu’il s’y était refusé.
[18] Selon les demandeurs, le Conseil des anciens s’est vu conférer par le Conseil tribal le pouvoir de faire enquête sur les questions touchant le chef et les conseillers et il a accepté de procéder à l’enquête. On a allégué en outre dans la déclaration que le Conseil des anciens n’a ménagé aucun effort pour respecter les principes d’application régulière de la loi au cours de l’enquête; M. Minde aurait toutefois refusé de participer, bien qu’il ait reçu des avis de comparution et qu’on lui ait fourni amplement l’occasion de comparaître et de témoigner pour son propre compte.
[19] Les demandeurs ont ajouté que le Conseil des anciens a infligé une suspension sans rémunération à M. Minde en attendant la conclusion de l’enquête et a avisé ce dernier de sa suspension. Bien que M. Minde ait ainsi été avisé, les demandeurs soutiennent qu’il a veillé sciemment à ce que lui soient versés son salaire et certains frais de déplacement engagés le 10 octobre 2005, ou vers cette date.
[20] Les demandeurs ont également allégué que le 22 septembre 2005, lors d’une réunion générale des anciens, une résolution a été adoptée à l’unanimité enjoignant au Conseil des anciens de mettre en application la suspension de M. Minde et lui donnant pleins pouvoirs pour ce faire, et prévoyant notamment que, si ce dernier ne comparaissait pas devant le Conseil des anciens, il serait automatiquement déchu de son poste de chef de la Nation.
[21] Les demandeurs ont ajouté que, le 4 décembre 2005, le Conseil tribal a adopté une résolution par laquelle il acceptait la recommandation faite par le Conseil des anciens que M. Minde soit réputé avoir quitté son poste de chef en raison de violations de la Constitution et de Règlements de la Tribu d’Ermineskin. [Non souligné dans l’original.]
[22] Les demandeurs ont demandé à la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta de délivrer une injonction interlocutoire. Le juge Belzil a instruit l’affaire les 16, 17, 30 et 31 janvier 2006.
[23] Le juge Belzil a rendu sa décision le 8 février 2006. Il a délivré une injonction interlocutoire enjoignant à M. Minde, jusqu’à nouvelle ordonnance de la Cour, de ne pas pénétrer dans les bureaux de bande de la Nation ni s’engager dans quelque opération financière que ce soit au nom de la Nation ou du Conseil tribal, qu’il s’agisse notamment d’émettre des chèques ou de signer des contrats. On lui interdisait en outre toute ingérence à l’endroit du personnel, des membres ou des entreprises tribales de la Nation.
[24] Le juge Belzil a assorti l’injonction interlocutoire de certaines conditions, parmi lesquelles les suivantes :
· Si M. Minde devait avoir gain de cause dans le cadre de sa demande de contrôle judiciaire devant la Cour fédérale et obtenir la déclaration ou l’ordonnance sollicitée portant qu’il est toujours chef de la Nation, les parties sont autorisées à se présenter de nouveau devant lui pour faire modifier ou annuler son ordonnance.
· M. Minde est autorisé à se rendre une fois aux bureaux de la Nation pendant les heures normales d’ouverture, accompagné d’un représentant désigné par le Conseil tribal, pour emporter avec lui les objets personnels qu’il a pu laisser dans son ancien bureau. [Non souligné dans l’original.]
b) Les motifs du juge Belzil
[25] Le juge Belzil a étayé de longs motifs l’octroi de l’injonction interlocutoire à l’encontre de M. Minde. J’estime ces motifs d’un grand intérêt quant à plusieurs points soulevés dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire.
[26] Premièrement, selon lui l’objet de la résolution du 4 décembre 2005 du Conseil tribal était de [traduction] « déclarer que le défendeur avait quitté son poste de chef et de désigner un chef par intérim en attendant la tenue d’une élection partielle ». [Non souligné dans l’original.]
[27] Deuxièmement, il a rejeté l’argument avancé par M. Minde en défense selon lequel la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta n’avait pas compétence pour connaître de l’affaire, la Cour fédérale, plutôt, étant compétente. Il a statué que les cours de l’Alberta avaient compétence, puisque les demandeurs faisaient essentiellement valoir l’inconduite délictuelle de M. Minde pour réclamer le versement de dommages‑intérêts. Il s’est fondé à cet égard sur l’arrêt Horseman c. Horse Lake First Nation [2005] A.J. n° 24 de la Cour d’appel de l’Alberta.
[28] Troisièmement, à la requête des demandeurs, il a statué que la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta n’avait pas compétence à l’égard de la demande reconventionnelle de M. Minde visant à ce que cette cour déclare qu’il est bien le chef de la Nation et qu’à aucun moment il n’a été suspendu ni destitué, déclare qu’il n’existe pas de Conseil des anciens/Sénat des anciens de la Nation et déclare, enfin, que sont invalides et sans effet toutes les décisions prises par le Conseil tribal à compter du 17 octobre 2005. [Non souligné dans l’original.]
[29] Les demandeurs ont soutenu que la demande reconventionnelle de M. Minde constituait en fait une demande en vue du contrôle judiciaire d’une décision du Conseil tribal, laquelle demande devrait plutôt être introduite devant la Cour fédérale. Le juge Belzil a statué en faveur des demandeurs et déclaré que [traduction] « le recours pour le défendeur [M. Minde] consiste à demander le contrôle judiciaire par la Cour fédérale de la résolution de la bande sur laquelle s’appuie cette dernière pour soutenir qu’il a quitté son poste de chef de la Nation ». (Paragraphe 31) [Non souligné dans l’original.]
[30] Quatrièmement, il a examiné en quelle qualité il devait considérer M. Minde aux fins de la demande d’injonction interlocutoire des demandeurs :
· À cet égard, il a dit (paragraphe 35 des motifs) que, selon les prétentions des demandeurs, M. Minde avait été destitué de son poste de chef de la Nation par suite de l’adoption d’une résolution en date du 4 décembre 2005 du Conseil tribal et il a ajouté (paragraphe 36) que M. Minde avait refusé de reconnaître la validité de la résolution et avait soutenu toujours être le chef de la Nation.
· Il a également statué (paragraphe 37) qu’il n’y avait pas lieu pour lui de spéculer sur l’issue de la demande de contrôle judiciaire présentée devant la Cour fédérale.
· Il a enfin conclu (paragraphes 38 et 39) que la résolution du Conseil tribal adoptée le 4 décembre 2005 [traduction] « qu’on m’a présentée semble valide à sa face même et on peut s’en autoriser » et « ainsi, aux fins de la présente demande, le défendeur n’est pas actuellement le chef de la Nation; il n’occupe en fait actuellement aucun poste électif au sein de la bande. Tirer une autre conclusion empiéterait sur la compétence exclusive de la Cour fédérale ». [Non souligné dans l’original.].
c) Le contexte
[31] Je vais maintenant établir le contexte entourant la présente demande de contrôle judiciaire.
[32] Premièrement, depuis 1983 le chef et les membres du Conseil tribal de la Nation sont choisis selon la coutume de la bande, une question que ne régissent donc pas les articles 74 à 79 de la Loi sur les Indiens. Cette coutume en la matière porte notamment sur les questions du mandat et de la destitution (voir la décision du juge Heald, alors juge à la Section de première instance, dans l’affaire Crow c. Conseil de la bande indienne de Blood 107 FTR 270).
[33] Deuxièmement, les membres de la Nation ont codifié les coutumes relatives aux élections pour les postes de chef et de conseillers en ratifiant en assemblée générale la première version d’un règlement désigné le Règlement E‑83‑02 (révisé par le Règlement 86‑01). Le titre abrégé de ce règlement est [traduction] « Déclaration des règles coutumières relatives à l’établissement du Conseil de bande et à l’élection de ses membres ». La dernière révision est datée du 31 mai 2004 et elle a été ratifiée le 23 juin 2004 à une assemblée générale des membres (voir le dossier du demandeur, page 52). L’article 32 de ce règlement traite des conditions s’attachant aux postes, l’alinéa a) prévoyant ce qui suit :
[traduction]
Conformément aux articles 8, 9 et 10 du Code d’éthique du Système tribal d’Ermineskin, le chef ou un conseiller élu est destitué si :
i. il décède;
ii. il présente en bonne et due forme sa démission par écrit;
iii. il est reconnu coupable d’un acte criminel;
iv il ne prend pas part, sans motif valable, à l’administration de la tribu pendant quatre (4) jours ouvrables consécutifs. [Non souligné dans l’original.]
[34] Troisièmement, l’on renvoie au Système tribal tout au long des présents motifs. Le Système tribal consiste en une constitution et en divers règlements. Je vais décrire ces documents de façon résumée :
1. La constitution de la Nation est constituée d’un préambule, d’une déclaration de primauté du Traité n° 6, d’une reconnaissance particulière de textes constitutionnels et de lois du Canada et de l’énoncé de la composition, des pouvoirs et des responsabilités du Conseil tribal, qui compte un chef et huit conseillers élus conformément à la coutume tribale. Le Conseil tribal est expressément reconnu en tant que gouvernement de la Tribu d’Ermineskin.
2. Divers règlements, en particulier :
· Le Règlement E‑83‑01, redésigné la Loi coutumière E‑83‑01, soit la Loi coutumière relative à l’exercice des activités du Conseil tribal d’Ermineskin en sa version révisée en 1987, en 1995 et en 1996. Ce règlement compte plusieurs sections (A à K). Les dispositions pertinentes des sections A et B figurent à l’annexe A des présents motifs. La section C traite des réunions du Conseil tribal, la section D des procès‑verbaux, la section E des salaires, la section F des déplacements et la section G des comités. D’autres sections traitent de questions comme l’établissement d’une Commission de déontologie, les jours fériés, les assemblées générales, les postes à pourvoir et les modifications.
· Le Règlement 83‑02, révisé par le Règlement E‑86‑01, soit le Règlement sur les élections selon la coutume.
· Le Règlement 83‑04, en matière de gestion financière de la Nation. [Non souligné dans l’original.]
[35] Quatrièmement, d’après la preuve présentée, une réunion a été tenue le 12 août 2005, soit avant les élections du 31 août 2005, à laquelle assistaient des membres du Comité des finances, certains anciens (34 parmi les 77), sept membres du Conseil tribal (le demandeur et Bob Small étant absents) et divers membres de la Nation. Les membres du Conseil tribal présents à la réunion ont décidé de lancer une enquête visant la participation prétendument inopportune du chef à trois opérations financières mettant en cause des fonds de la Nation, enquête qui serait menée par neuf membres désignés du Conseil des anciens (les membres désignés) (dossier des défendeurs, page 12).
[36] Il importe aussi de savoir qu’avant la réunion du 12 août 2005, une réunion extraordinaire du Conseil tribal a été tenue le 8 août 2005 au cours de laquelle a été adoptée la résolution suivante (dossier des défendeurs, page 57) :
[traduction]
Il est résolu que nous, le chef et les conseillers d’Ermineskin, reconnaissons par les présentes le Conseil des anciens, tel que présenté conformément au Règlement n° E‑83‑01 du Système tribal d’Ermineskin (la section B uniquement) :
En outre, que la section B du Règlement n° E‑83‑01 relatif à l’exercice des activités du Conseil d’Ermineskin soit modifié afin que celui‑ci soit constitué de tous les anciens de la tribu d’Ermineskin.
En outre, qu’aux fins de l’article 2 de la section B, le quorum soit de neuf (9) anciens, sous réserve de modifications, d’ajouts ou de suppressions, le texte révisé final devant être approuvé par le chef et les membres du Conseil formant quorum. [Non souligné dans l’original.]
[37] Le 16 août 2005, le Conseil des anciens a transmis une lettre au chef et aux conseillers d’Ermineskin. On y déclarait que le Conseil des anciens [traduction] « a été autorisé par le Conseil [tribal] d’Ermineskin, d’un commun accord lors d’une réunion tenue le 8 août 2005 au Centre des anciens, à aller de l’avant si, d’après la preuve factuelle, la perpétration d’infractions était attestée par des représentants de la Tribu d’Ermineskin relativement à l’opération de 149 000 $ ». On ajoutait ensuite ce qui suit dans la lettre :
[traduction]
En conclusion, les membres désignés du Conseil des anciens (quorum de neuf) prendront, en fonction de leurs conclusions, les mesures disciplinaires prévues
· à l’article 2 de la section B du Règlement n° 83‑01 relatif à l’exercice des activités du Conseil d’Ermineskin;
· à l’alinéa G, de l’article 28 du Règlement E‑86‑01, le Règlement sur les élections selon la coutume de la Tribu d’Ermineskin.
Un rapport final sera présenté, de même que les faits et les infractions que le Conseil des anciens pourrait sanctionner au moyen de mesures disciplinaires contre leurs auteurs. » (Dossier de réplique du demandeur, page 101.)
[38] J’ai déjà reproduit à l’annexe A des présents motifs l’article 2, section B, du Règlement E‑83‑01 relatif aux règles de conduite du Conseil tribal d’Ermineskin.
[39] L’article 28 du Règlement sur les élections selon la coutume de la tribu d’Ermineskin (Règlement E‑86‑01) traite de la Commission des appels en matière d’élections et autorise celle‑ci à étudier toute plainte relative à une élection. L’alinéa G de l’article 28 prévoit ce qui suit :
[traduction]
G) Si un appel révèle qu’un candidat a commis des actes inadmissibles, la Commission des appels en matière d’élections a le pouvoir d’éliminer ce candidat en lui interdisant de se porter candidat comme chef ou membre du Conseil tribal lors de toute élection pendant une période maximale de dix (10) ans ». [Non souligné dans l’original.]
[40] Je vais maintenant faire le résumé des principales mesures prises par les membres désignés du Conseil des anciens, lesquels je désire souligner forment quorum de ce Conseil en vertu de la modification adoptée le 8 août 2005 par le Conseil tribal. Je mentionnerai à l’occasion dans le résumé des mesures prises par l’ensemble des anciens et d’autres par le Conseil tribal. C’est moi qui ai souligné divers éléments. Je désire enfin ajouter que bon nombre des documents du dossier des défendeurs étaient partiellement ou presque totalement illisibles, ce qui n’a pas facilité la compréhension de l’affaire par la Cour.
1. Le 23 août 2005, les membres désignés ont envoyé au chef Minde un avis d’enquête/de suspension où ils disaient : [traduction] « après avoir examiné les renseignements concernant la façon dont s’est effectuée l’opération de 149 000 $ […] les neuf membres désignés du Conseil des anciens d’Ermineskin suspendent par les présentes [le chef Minde et Bob Small] de leurs fonctions et imposent la suspension de tous leurs pouvoirs et privilèges, avec prise d’effet immédiat et sans solde jusqu’à ce que l’enquête soit terminée » et « conformément à la section B – Conseil des anciens –, article 2 – Fonctions – (des Règles d’éthique), enjoignent au Conseil tribal de se conformer immédiatement à cette directive et à faire appliquer cette suspension avec prise d’effet immédiat ». [Non souligné dans l’original.]
2. Le 24 août 2005, les membres désignés ont envoyé au chef Minde un premier avis d’application obligatoire afin qu’il comparaisse devant eux au sujet de l’achat de l’équipement lourd, décrit comme ayant été fait par lui sans autorisation. On précisait dans l’avis que des mesures disciplinaires seraient prises si le chef Minde [traduction] « ne comparaissait pas à cette audience ».
3. Le 1er septembre 2005, les membres désignés ont envoyé au chef Minde un deuxième avis de comparaître d’application obligatoire.
4. Le 1er septembre 2005, les membres désignés ont envoyé à l’intention du Conseil tribal/de l’Administrateur un avis de mise en application de la suspension. On demandait comme mesure que soit réuni un quorum de membres du Conseil tribal en vue de faire appliquer la suspension du Chef Minde au moyen d’une motion dûment autorisée.
5. Le 8 septembre 2005, le président du Conseil des anciens, George P. Ermineskin, a écrit au chef Minde au sujet de l’enquête.
6. Le 19 septembre 2005, le président du Conseil des anciens a écrit au Conseil tribal/à l’Administrateur pour l’informer que le Conseil des anciens lui demandait instamment de mettre en application la suspension du chef Minde.
7. Le 22 septembre 2005, les anciens ont semble‑t‑il convoqué une assemblée générale des membres de la Nation, à laquelle ont assisté 103 des 3 500 membres. La résolution suivante a alors été adoptée (dossier de réplique du demandeur, page 103) :
[traduction]
Il est résolu que nous, les membres de la Tribu d’Ermineskin, par les présentes, enjoignons au Conseil des anciens de la Tribu d’Ermineskin – que nous appuyons et à qui nous accordons pleins pouvoirs à cette fin – de mettre en application la suspension du chef George L. Minde pour une période maximale de quatorze (14) jours, pendant laquelle il devra comparaître à une audience devant le Conseil des anciens, faute de quoi il sera automatiquement destitué de son poste de chef de la Tribu d’Ermineskin, en plus de ne pouvoir se porter candidat ou occuper un poste de dirigeant ou à caractère financier pendant dix ans dans le cadre du Système tribal d’Ermineskin.
8. Le 22 septembre 2005, le président du Conseil des anciens a écrit au chef Minde au sujet de sa suspension ainsi que de la motion adoptée le même jour. La lettre comportait un avis d’audition et informait le chef Minde que, s’il ne comparaissait pas devant les membres enquêteurs d’ici le 31 octobre 2005 au plus tard, il serait destitué à cette date de son poste de chef.
9. Dans le dossier des défendeurs sont reproduites (pages 28 et 29) des lettres du président du Conseil des anciens, George P. Ermineskin, datées des 5 et 12 octobre 2005 et traitant de la convocation d’une réunion du Conseil tribal d’Ermineskin et de [traduction] « l’adoption/la mise en application de la décision du Conseil des anciens concernant le chef Minde et Bob Small [relativement à leurs violations délibérées…] ».
10. Le 14 octobre 2005 (dossier des défendeurs, page 58) la copie d’une résolution du Conseil tribal datée du 14 octobre 2005. La résolution ne figure pas sur un document standard de motion du chef et du Conseil et le chef Minde et Bob Small n’étaient pas présents à la réunion. Cette résolution prévoit ce qui suit :
[traduction]
« Il est résolu à une réunion dûment convoquée du Conseil tribal que nous, le Conseil tribal d’Ermineskin, par les présentes, enjoignons aux membres désignés du Conseil des anciens de la Tribu d’Ermineskin – que nous appuyons et à qui nous accordons pleins pouvoirs à cette fin – de mettre en application la suspension sans solde du chef George L. Minde pour une période maximale de quatorze (14) jours, pendant laquelle il devra comparaître à une audience devant le Conseil des anciens, faute de quoi il sera automatiquement destitué de son poste de chef de la Tribu d’Ermineskin, avec prise d’effet immédiat ». [Non souligné dans l’original.]
11. Le 17 octobre 2005, le président du Conseil des anciens, George P. Ermineskin, a écrit au chef Minde pour l’aviser officiellement qu’il était toujours suspendu et qu’il devait comparaître devant les membres désignés au plus tard le 31 octobre 2005.
12. Le 21 octobre 2005, ou vers cette date, le Conseil tribal/l’Administrateur a reçu d’un conseiller juridique externe un avis juridique concernant les exigences en matière d’équité procédurale applicables à la suspension du chef Minde. Ces exigences, était‑il dit, s’appliquaient tant à ce qui entourait la suspension qu’à la destitution du chef de son poste électif; on demandait également dans l’avis des renseignements additionnels qui, s’ils ont été fournis, ne figurent pas au dossier.
13. Le 27 octobre 2005, les membres désignés ont envoyé à George Minde un avis final d’audience/de mise en application de la suspension.
14. Le 31 octobre 2005, à 16 h, les membres désignés ont décidé de mettre en application la « destitution automatique » de George Minde de son poste de chef pour défaut de comparution à l’audience. Dans leur décision, les membres ont déclaré qu’ils enjoignaient au Conseil tribal de mettre celle‑ci en application par voie de motion.
15. Le même jour, soit le 31 octobre 2005, à 16 h 30, les membres désignés ont envoyé au chef Minde un avis de destitution automatique. On informait alors le chef Minde qu’il pouvait en appeler de la décision.
16. Le 31 octobre 2005 (dossier des défendeurs, page 59) la résolution du Conseil tribal suivante :
[traduction]
Il est résolu à une réunion dûment convoquée du Conseil que nous, le Conseil d’Ermineskin, reconnaissons et mettons en application la destitution automatique du chef George L. Minde tel qu’il est déclaré dans la lettre d’avis officiel de comparution du 27 octobre.
En outre, que M. Minde dispose de dix (10) jours ouvrables à compter de cette date de remise en mains propres de l’avis pour interjeter appel devant le Conseil d’Ermineskin, tel qu’il est prévu à l’article 15 des Règles d’éthique.
17. Le 14 novembre 2005, il semble qu’un autre avis de destitution automatique ait été envoyé à George Minde par les membres désignés du Conseil des anciens. Le quatrième paragraphe de la lettre d’avis prévoit ce qui suit :
[traduction]
Par conséquent, nous les membres désignés du Conseil des anciens enjoignons au Conseil tribal d’Ermineskin de mettre en application la présente décision, également par voie de motion du Conseil de bande, dans le respect des pouvoirs conférés par la Constitution de la Tribu d’Ermineskin et les politiques, règlements, coutumes et traditions de la Première nation d’Ermineskin ».
18. Le 4 décembre 2005, la Résolution contestée a été adoptée en l’absence du demandeur.
Analyse
a) La norme de contrôle
[41] M. Minde soutient que la Résolution du 4 décembre 2005 devrait être annulée au motif principal qu’elle a été adoptée au mépris de l’équité procédurale : on ne l’a pas avisé de la tenue non plus que de l’objet de la réunion extraordinaire et il n’était pas présent à celle‑ci. La norme de contrôle applicable est celle de la décision correcte.
[42] Le juge Rothstein, alors juge à la Cour d’appel fédérale, a déclaré dans Canada (Procureur général) c. Featherston [2005] CAF 111 que les questions d’équité procédurale n’ont pas à faire l’objet de l’analyse pragmatique et fonctionnelle, les cours devant trancher ces questions au plan juridique en se fondant sur les motifs du juge Binnie dans l’arrêt de la Cour suprême du Canada SCFP c. Ontario (Ministre du Travail), [2003] 1 R.C.S. 539.
[43] La question de savoir si le Conseil tribal exerçait des pouvoirs conférés par la loi lorsqu’il a adopté la Résolution le 4 décembre 2005 est une question de droit qui, en fonction d’une analyse pragmatique et fonctionnelle, appelle la norme de la décision correcte, puisqu’il n’y a pas de clause privative, que la Cour a dans l’ensemble une expertise plus poussée en la matière, que la question est de nature juridique et que l’objet des mesures législatives ne commande pas une grande retenue. C’est la même norme qui s’applique au pouvoir des membres désignés du Conseil des anciens de prendre une décision exécutoire relativement au mandat du chef.
b) La Résolution et l’équité procédurale
[44] Même s’il est bien établi que la portée des règles d’équité procédurale varie en fonction des circonstances, je suis d’avis qu’on ne peut mettre en cause que le demandeur avait droit au respect des règles d’équité procédurale quant à la Résolution du 4 décembre 2005, où l’on déclarait qu’en application des Règles d’éthique faisant partie de la Constitution de la Tribu d’Ermineskin, le demandeur avait quitté son poste de chef. Le droit du chef Minde de demeurer en fonction était directement touché. Je m’appuie sur ce point sur les arrêts bien connus de la Cour suprême du Canada Nicholson c. Haldeman‑Norfolk (Regional Municipality) Commissioners of Police, [1979] 1 R.C.S.; Cardinal c. Établissement de Kent, [1985] 2 R.C.S. 649; et Lakeside Colony of Hutterian Brethern c. Hofer, [1992] 3 R.C.S. 165.
[45] Il ne fait aucun doute que la Résolution a été adoptée en violation des droits de M. Minde à l’équité procédurale. Les exigences les plus fondamentales de la justice en matière de procédure, soit le droit d’être avisé et l’occasion de présenter des observations, n’ont pas été respectées.
[46] Je me fonde en outre sur la décision du juge Rothstein, alors juge à la Section de première instance de la Cour fédérale, dans Sparvier c. Bande indienne Cowessess n° 73 et al., [1993] 3 C.F. 143 pour affirmer que les principes d’équité procédurale doivent être appliqués dans les cas où la coutume d’une bande prescrit les procédures que doit suivre le décideur en vue de la destitution du chef ou d’un conseiller de la bande (voir les paragraphes 55 et 57 de ses motifs). (Voir également Duncan c. Conseil de bande de la Première nation Behdzi Ahda, 2003 FC 1385, et Bande indienne de Sucker c. Calliou [1999] A.C.F. 1135).
[47] Je dois également ajouter que le Conseil tribal était au fait des exigences en cause d’équité procédurale, comme il avait examiné un avis juridique qui en faisait état relativement à la question connexe de la suspension.
c) Qui était le décideur?
[48] Pour les motifs qui vont suivre, je suis d’avis que le véritable décideur en l’espèce était le Conseil tribal et non les membres désignés du Conseil des anciens (le quorum du Conseil).
[49] Pour en arriver à ma décision, j’ai lu le Système tribal de la Nation (Constitution et Règlements) en le considérant dans son ensemble et en contexte pour veiller à donner un sens à l’ensemble de ses dispositions.
[50] En outre, je n’ai pas interprété de manière littérale les dispositions du Système tribal de la Nation, les interprétant au contraire libéralement et en contexte en vue de découvrir les lois coutumières de la Première nation qui en constituent le fondement.
[51] Je présume en outre, aux fins de ma conclusion sur ce point, sans toutefois en décider, qu’un Conseil des anciens dûment constitué en conformité avec la Loi coutumière serait un office fédéral susceptible de contrôle judiciaire en vertu de l’article 18 de la Loi sur les Cours fédérales. Encore une fois pour les fins de ma conclusion, j’ai considéré comme seule Loi coutumière valide et en vigueur relativement à l’exercice des activités du Conseil tribal d’Ermineskin celle qui est jointe à titre d’annexe C à l’affidavit souscrit le 22 avril 2006 par Wilton Littlechild, c.r. Cette version intègre des modifications adoptées en 1995 et en 1996 et qui éliminent la confusion découlant de la désignation tantôt d’un Conseil des anciens tantôt d’un Sénat des anciens dans les versions antérieures, particulièrement dans la version annexée à l’affidavit du demandeur.
[52] J’estime que les neuf membres désignés du Conseil des anciens (le quorum du Conseil) ne sont pas le décideur en l’espèce pour les raisons qui vont suivre.
[53] Premièrement, on ne m’a présenté aucune preuve démontrant que la modification par règlement à la Loi coutumière E‑83‑01, en sa version modifiée, adoptée par le Conseil tribal le 8 août 2005 ait été jamais ratifié par une majorité des membres de la Nation tel que le requiert la section K de la Constitution de la Nation (voir le dossier des défendeurs, page 122).
[54] La preuve est plutôt à l’effet contraire. Dans son affidavit, J. Wilton Littlechild affirme que la seule version valide et en vigueur du Règlement E‑83‑01 prévoit l’existence d’un Conseil d’anciens, dont les cinq membres sont désignés parmi une liste de candidats soumise par les anciens, trois de ces membres formant quorum, dont le mandat est notamment de connaître des appels interjetés en application de l’article 15 du Règlement.
[55] Il ressort clairement de la preuve, en outre, que les neuf membres désignés du Conseil des anciens ont été désignés par 34 anciens lors de la rencontre du 8 août après que le Conseil tribal eut effectué la prétendue modification par règlement (voir le contre‑interrogatoire de George Ermineskin, dossier de réplique du demandeur, pages 15 et 16).
[56] Sur ce fondement, il n’y a pas eu constitution en bonne et due forme des neuf membres désignés, formant quorum du Conseil des anciens, et par conséquent toute action prise par ceux‑ci après leur prétendue constitution était invalide. Paradoxalement, si cet organisme avait fait l’objet d’un contrôle judiciaire de la Cour, cette décision aurait été annulée.
[57] L’avocat des défendeurs a soutenu que je ne devrais pas interpréter les dispositions du Règlement traitant de la constitution du Conseil des anciens comme étant impératives, mais bien plutôt directives, invoquant à cet égard les motifs du juge Rothstein dans la décision Sparvier, précitée, où ce dernier s’était lui‑même appuyé sur la décision du Conseil privé dans l’arrêt Montreal Steel Railway Co. c. Normandin [1917] A.C. 170.
[58] J’estime toutefois que cette décision n’est pas pertinente en l’espèce. Les dispositions du Règlement qui traitent de la composition, du quorum et du mandat du Conseil des anciens ne sont pas de caractère procédural ou de simples formalités, mais attestent plutôt l’intention d’établir un tribunal d’appel pouvant efficacement faire s’appliquer les Règles d’éthique régissant le chef et le Conseil. L’observation de ces dispositions est essentielle pour réaliser l’objet et le but de ces Règles, et qu’elles aient un caractère impératif ne serait pas contraire à leur objet.
[59] Deuxièmement, la preuve révèle clairement que les membres désignés, formant quorum du Conseil des anciens reconstitué, même si on les avait valablement constitués, considéraient eux‑mêmes ne pas avoir le pouvoir de prendre une décision exécutoire relativement à M. Minde. Ils estimaient que toute mesure qu’ils prendraient, qu’il s’agisse d’une suspension des fonctions, d’une destitution ou d’une destitution automatique, devait être sanctionnée et ratifiée par le Conseil tribal pour produire légalement ses effets.
[60] Cette considération est de grande importance, selon moi, en raison de la nature de la Loi coutumière en cause. Qui en effet serait mieux placé que les anciens de cette Première nation pour établir la portée de tout pouvoir disciplinaire dont la coutume et la tradition auraient pu investir un organisme particulier?
[61] Malgré cela, aucun des affiants des défendeurs n’a présenté à la Cour la moindre preuve significative quant aux pratiques ou traditions coutumières en matière disciplinaire dans le domaine. Deux situations seulement sont mentionnées à cet égard dans la preuve. La première situation concerne la comparution volontaire de Bob Small devant les membres désignés et l’acceptation par ce dernier de la décision prise qu’il lui soit interdit d’être candidat lors d’une élection pendant dix ans. En d’autres mots, on ne l’a pas destitué de son poste de conseiller tribal; il n’a pas brigué les suffrages lors de l’élection d’août 2005. L’autre situation est mentionnée à la page 86 du dossier des défendeurs; il s’agit de la démission d’Earl Ermineskin de son poste de conseiller après que le Sénat des anciens eut fait enquête à son sujet en juin 1997 parce qu’il n’était pas présent lors de réunions ordinaires du Conseil tribal.
[62] Pour résumer, je juge fort révélateur ce que les membres désignés estiment être la portée de leurs pouvoirs en matière disciplinaire eu égard au mandat du chef et des conseillers de la Nation, de même que l’absence de preuve valable en sens contraire.
[63] Troisièmement, j’estime aussi que les défendeurs ne peuvent faire valoir devant la Cour que le Conseil tribal n’était pas le décideur qui a destitué le demandeur de ses fonctions. Ils ont soutenu le contraire devant le juge Belzil, soit que le Conseil tribal était bien le décideur en l’espèce.
[64] Finalement, le 4 décembre 2005, le Conseil tribal n’a pas approuvé de manière tout simplement automatique les actions du Conseil des anciens dans le cadre de son enquête sur les allégations portée contre le chef Minde. La décision du Conseil tribal s’appuyait sur la recommandation faite par le Conseil des anciens de mettre en application l’article 15 du Code d’éthique du Conseil. L’article 15, dont l’application est déclenchée par une décision du Conseil, traite de la possibilité pour un conseiller d’en appeler devant le Conseil des anciens d’Ermineskin établi en vertu de la section B des Règles d’éthique [traduction] « de toute suspension ou réprimande résultant de violations des Règles d’éthique ci‑dessus ». Le Conseil tribal est allé plus loin le 4 décembre 2005 et a déclaré exercer [traduction] « par les présentes le pouvoir que lui confère l’article 11, par suite de quoi George L. Minde est réputé avoir quitté son poste de chef, en raison de la violation des articles 4, 5 et 9 du Code d’éthique faisant partie de la Constitution de la Tribu d’Ermineskin ». Comme je l’ai déjà conclu, le Conseil tribal a enfreint les droits à l’équité procédurale du demandeur lorsqu’il en est arrivé à sa décision.
[65] Les raisons permettant de considérer que les membres désignés ne sont pas les décideurs en l’espèce suffisent pour qu’il soit justifié de conclure que c’est bien le Conseil tribal qui a pris la décision portant que le demandeur avait quitté son poste de chef.
[66] Je le fais toutefois sous réserve, les deux avocats ayant reconnu devant moi que les documents attestant la Constitution et les Règlements de la Nation avaient besoin d’une mise à jour parce qu’ils sont entachés de lacunes et d’imperfections. C’est d’ailleurs là l’opinion qu’a exprimée M. Littlechild lors de la première lecture d’une mise à jour projetée de la Loi coutumière relative à l’exercice des activités du Conseil d’Ermineskin. M. Littlechild a déclaré (page 84 du dossier des défendeurs) : [traduction] « ce règlement remontait à 1983 et nécessitait d’être mis à jour d’une manière qui ait du sens et soit de portée pratique ».
[67] En l’absence de preuve expliquant les pratiques et les traditions sous‑tendant les dispositions codifiées de la Loi coutumière de la Nation applicable en l’espèce, il me semble, d’après le contexte et à des fins d’harmonisation, qu’on entendait que les questions touchant le mandat du chef et des conseillers élus soient traitées au premier palier par le Conseil tribal, avec possibilité d’appel auprès d’un Conseil des anciens dûment constitué, dont les décisions seraient définitives.
[68] Pour ce qui est de la suspension du chef ou de tout conseiller de son poste, les indices sont très clairs. Pour ce qui est de la suspension d’un poste électif, c’est le Conseil qui après audience est le décideur, tel que le prévoit l’article 10 des Règles d’éthique, dans les cas de violation des articles 7, 8 et 9 des Règles, un appel pouvant alors être interjeté auprès du Conseil des anciens d’Ermineskin en vertu de l’article 15. Le seul indice en sens contraire, c’est qu’à l’article 15 seul le conseiller est mentionné comme disposant du droit d’en appeler d’une suspension.
[69] On fait également état aux articles 8 et 11 des Règles d’éthique d’un chef ou d’un conseiller « réputé avoir quitté ses fonctions, de sorte que son poste devient vacant », mais on ne précise pas alors s’il existe un droit à une audience devant le Conseil tribal. On peut inférer l’existence d’un tel droit des dispositions de l’article 32 du Règlement E‑86‑01, la Déclaration des règles coutumières relatives à l’établissement du Conseil de bande et à l’élection de ses membres. On prévoit à cet article que, sous réserve de conditions prescrites, [traduction] « [e]n application des articles 8, 9 et 10 des Règles d’éthique du Système d’Ermineskin, le chef ou le conseiller élu est destitué ». Pour que ces dispositions aient un sens, il semble qu’on doit supposer qu’a été intégré par renvoi au Règlement E‑86‑01 le pouvoir décisionnel et en matière d’audience du Conseil tribal quant au renvoi du chef et des conseillers, sous réserve d’un appel auprès du Conseil des anciens.
[70] En outre, tout pouvoir résiduaire quant à la destitution de leur poste du chef ou d’un conseiller, s’il en est, serait dévolu au Conseil tribal qui, aux termes de la Constitution de la Nation, constitue le gouvernement de la Nation.
[71] Je ne puis par ailleurs admettre quelque argument que ce soit selon lequel la destitution du demandeur se justifie en raison d’une violation du protocole d’entente. Premièrement, cette entente a été signée à des fins protocolaires et non de mise en application (voir le contre‑interrogatoire de George Ermineskin, dossier de réplique du demandeur, pages 24 à 26). Deuxièmement, selon les termes de son article 4, l’entente n’ajoute rien aux Règles d’éthique mais s’harmonise plutôt avec elles.
Mesures de redressement
[72] Le paragraphe 18.1(3) de la Loi sur les Cours fédérales traite comme suit des pouvoirs de la Cour fédérale :
Pouvoirs de la Cour fédérale (3) Sur présentation d’une demande de contrôle judiciaire, la Cour fédérale peut :
|
Powers of Federal Court (3) On an application for judicial review, the Federal Court may
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a) ordonner à l’office fédéral en cause d’accomplir tout acte qu’il a illégalement omis ou refusé d’accomplir ou dont il a retardé l’exécution de manière déraisonnable;
|
(a) order a federal board, commission or other tribunal to do any act or thing it has unlawfully failed or refused to do or has unreasonably delayed in doing; or
|
b) déclarer nul ou illégal, ou annuler, ou infirmer et renvoyer pour jugement conformément aux instructions qu’elle estime appropriées, ou prohiber ou encore restreindre toute décision, ordonnance, procédure ou tout autre acte de l’office fédéral. |
(b) declare invalid or unlawful, or quash, set aside or set aside and refer back for determination in accordance with such directions as it considers to be appropriate, prohibit or restrain, a decision, order, act or proceeding of a federal board, commission or other tribunal. |
[73] Comme l’a déclaré le juge Rothstein dans la décision Sparvier, précitée, lorsqu’il y a déni d’équité procédurale dans la procédure suivie par un tribunal, la Cour annulera habituellement la décision et, selon les circonstances, pourra renvoyer l’affaire pour que soit rendue une nouvelle décision qui tienne compte des directives jugées appropriées par la Cour.
[74] Je me trouve confronté au même problème que celui auquel faisait face le juge Rothstein dans l’affaire Sparvier, précitée. Si la décision était tout simplement annulée en l’espèce, les résultats de l’élection du 31 août 2005 seraient rétablis. Ainsi le demandeur serait rétabli dans ses fonctions de chef sans que quiconque s’occupe de la question de savoir s’il existe ou non des motifs valables pour qu’il soit destitué. Le demandeur devrait assumer et exercer ses fonctions tout en étant l’objet de soupçons. Je ne crois pas ce résultat satisfaisant, ni dans l’intérêt véritable de la Nation. Cette Première nation divisée n’obtiendra pas sa guérison à moins que des explications ne soient données au sujet de l’opération de 149 000 $ et que cette question ne soit réglée. Il en va de même pour les deux autres opérations financières entachées, prétend‑on, d’irrégularités. Il se peut bien que M. Minde ait des explications valables à donner. On doit donc lui fournir l’occasion de s’expliquer, ce que la présente décision lui permettra de faire.
[75] Renvoyer les questions en jeu au Conseil tribal pour qu’il rende une nouvelle décision soulève des problèmes manifestes. La doctrine de nécessité pourrait s’appliquer, mais on n’a pas fait valoir ce point devant moi.
[76] Je préférerais de beaucoup que la Première nation trouve elle‑même une solution au problème, plutôt que la Cour impose une solution qui pourrait desservir les intérêts de la Nation.
[77] Le juge Rothstein a écrit ce qui suit dans la décision Sparvier :
Pour les motifs qui précèdent, je suis d’avis que les avocats devraient avoir l’occasion d’approfondir la question de la réparation en l’espèce, et de s’entendre, si possible, sur la manière de résoudre l’affaire, avant qu’une ordonnance ne soit rendue par la Cour. Le greffier de la Cour communiquera donc avec les avocats peu de temps après la publication des présents motifs pour organiser une conférence téléphonique avec moi pour que je puisse savoir comment les avocats souhaitent procéder, c’est‑à‑dire par voie d’audition, de mémoire ou de quelque autre façon, sur la question de la réparation.
Pour éviter toute incertitude ou confusion et pour que la bande ne subisse aucun inconvénient, je déclare expressément que la publication des présents motifs n’a, pour le moment, aucune incidence sur l’administration de la bande. Une ordonnance ne sera pas rendue tant que les avocats n’auront pas eu l’occasion de présenter d’autres observations sur la question de la réparation.
[78] Je fais miennes les observations ci‑dessus du juge Rothstein, tout en ajoutant que je serai disposé à délivrer l’ordonnance appropriée après avoir entendu les avocats des parties.
[79] Le demandeur a droit à ses dépens dans le cadre du présent contrôle judiciaire, puisqu’il a eu gain de cause. Les dépens avocat‑client ne sont attribués que lorsque le comportement de la partie adverse a été répréhensible, scandaleux ou outrageant; tel n’a pas été le cas en l’espèce. Toutefois, la façon dont le Conseil tribal a réglé la question de la destitution du chef était contraire à la loi, ce qui ressortait essentiellement de l’avis juridique obtenu.
[80] Rien ne me permet d’attribuer au demandeur des dépens d’un montant fixé à 25 000 $, comme aucun mémoire de frais pro forma ne m’a été remis. Les dépens doivent être fixés selon la fourchette supérieure de la colonne IV.
ORDONNANCE
LA COUR REPORTE la délivrance d’une ordonnance fixant la mesure de redressement appropriée jusqu’au moment où les avocats des parties auront eu l’occasion de s’exprimer sur cette question.
Traduction certifiée conforme
Alphonse Morissette, LL.L.
ANNEXE A
(A) Règles d’éthique – Constitution de la Tribu d’Ermineskin (Règlement 83‑01), en sa version modifiée
- Le chef et les conseillers de la Nation crie d’Ermineskin disposent du salaire fixé au moyen du processus budgétaire de la Tribu d’Ermineskin.
- Aucune autre forme de salaire n’est versée au chef ou aux conseillers à même les ressources de la Tribu.
- Le chef et les conseillers ne touchent pas d’honoraires pour les réunions de comité auxquels ils assistent pendant le jour pour y discuter des affaires de la Tribu d’Ermineskin. Les salaires versés tiennent lieu de tels paiements.
- Nul individu ou conseiller ne peut autoriser, au nom de la Nation crie d’Ermineskin ou du Conseil, que des fonds soient versés ou engagés, sauf par suite d’une décision du Conseil avec quorum prise à une réunion ordinaire du Conseil. Le pouvoir d’ainsi verser ou engager des fonds doit être délégué à l’Administrateur de la Tribu ou, subsidiairement, le pouvoir à cet égard du chef et des conseillers doit être assorti de limites lors d’une réunion dûment convoquée du Conseil et ratifié lors d’une assemblée générale des membres. Le chef a le pouvoir d’engager des sommes ne dépassant pas 500 $, si la dépense faite satisfait aux critères suivants :
- Lorsqu’est traitée une question pouvant conférer un avantage à lui‑même ou à un membre de sa famille, le chef ou le conseiller concerné s’abstient de prendre part à toute discussion ou à toute décision liée à cette question et il s’abstient de voter à son égard.
- Les conseillers assistent à toutes les réunions et assemblées, ordinaires, extraordinaires ou générales, convoquées par le chef, à moins qu’ils ne soient malades ou que le chef n’ait autorisé leur absence.
- Tout membre du Conseil tribal d’Ermineskin, y compris le chef, absent sans autorisation d’une réunion ordinaire est soustrait de la liste de paye du Conseil et le versement de ses allocations de présence est suspendu jusqu’à ce que le Conseil en décide autrement en application de l’article 10 de la présente Loi coutumière.
- Tout membre du Conseil, y compris le chef, qui s’est absenté de trois (3) réunions ordinaires consécutives sans autorisation est réputé avoir quitté ses fonctions et son poste devient vacant.
- Tout membre du Conseil, y compris le chef, dont le comportement est inconvenant est immédiatement suspendu de ses fonctions, et le versement de son salaire, de ses frais de déplacement et de ses allocations de présence est suspendu jusqu’à ce que le Conseil en décide autrement en application de l’article 10 ci‑dessous.
- Toute violation des articles 7 et 9 entraîne la suspension automatique du membre du Conseil concerné, qui en est avisé par écrit, par suite de quoi il dispose du droit d’être entendu du Conseil. Le Conseil peut réinstaller la personne suspendue dans ses fonctions, avec ou sans salaire, par trois voix sur quatre.
- Tout membre du conseil qui enfreint trois (3) quelconques règles d’éthique se voit suspendre le versement de ses allocations de présence et est réputé avoir quitté à ses fonctions, de sorte que son poste devient vacant.
- Le chef et les conseillers expriment leur volonté de se soumettre aux présentes règles de conduite pendant leur mandat lorsqu’ils prêtent serment à titre de chef ou de conseillers, tel qu’il est prévu à l’annexe A jointe à la présente loi coutumière et au protocole d’entente signé publiquement à une assemblée générale des membres.
- […]
- […]
- Le conseiller concerné a le droit d’en appeler de toute suspension ou réprimande résultant de violations des règles d’éthique ci‑dessus. L’appel est interjeté directement devant le Conseil des anciens établi conformément à la clause B ci‑dessous, dont les décisions sur ces questions sont finales.
B. Conseil des anciens
1. Conditions d’admissibilité et nomination
a) Les membres du Conseil des anciens sont choisis parmi une liste de candidats soumise par les anciens.
b) Le Conseil des anciens est constitué de cinq (5) anciens qui sont membres de la Nation d’Ermineskin.
c) Un ancien est une personne âgée d’au moins soixante (60) ans qui jouit de l’estime de la collectivité.
d) L’ancien qui démissionne ou dont la conduite est jugée inconvenante par les anciens est remplacé.
e) Le Conseil des anciens doit être bien informé relativement au Conseil tribal d’Ermineskin.
2 Fonctions
a) Le Conseil des anciens conseille le chef et les conseillers et il surveille la conduite du chef et des conseillers, à l’égard desquels il peut prendre les mesures disciplinaires qui pourront être indiquées le cas échéant, et selon ce qui est prévu au protocole d’entente joint aux présentes à titre d’annexe B ».
b) Des anciens sont membres d’office de tous les comités du Système tribal d’Ermineskin.
c) […]
d) […]
e) Le quorum est constitué de trois (3) anciens.
f) […]
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : T‑183‑06
INTITULÉ : GEORGE LESLIE MINDE
c.
LA NATION CRIE D’ERMINESKIN et le CONSEIL TRIBAL D’ERMINESKIN
LIEU DE L’AUDIENCE : Edmonton (Alberta)
DATE DE L’AUDIENCE : LE 22 AOÛT 2006
MOTIFS DE L’ORDONNANCE
ET ORDONNANCE : LE JUGE LEMIEUX
DATE DES MOTIFS
ET DE L’ORDONNANCE : LE 31 OCTOBRE 2006
COMPARUTIONS :
James Dixon, c.r. POUR LE DEMANDEUR
403‑343‑1160
David Holt POUR LES DÉFENDEURS
780‑423‑1888
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Dixon & Associates POUR LE DEMANDEUR
Old Court House Law Offices
101 4836, Ross Street
Red Deer (Alberta) T4N 1X4
dixonjl@telusplanet.net
Hladun & Company POUR LES DÉFENDEURS
Avocats
10187 – 101 Street
Edmonton (Alberta) T5J 0Z9