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Date : 20060926

Dossier : T-1556-06

Référence : 2006 CF 1137

Montréal (Québec), le 26 septembre 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE HARRINGTON

 

ENTRE :

742190 ONTARIO INC. faisant affaire sous la raison sociale

VAN DEL MANOR NURSING HOME

 

demanderesse

 

et

 

AGENCE DES DOUANES

ET DU REVENU DU CANADA

 

défenderesse

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Van Del Manor Nursing Home a eu des ennuis avec les autorités fiscales pendant plusieurs années. Sa situation est maintenant régularisée, sauf en ce qui a trait aux retenues à la source de ses employés qu’elle a omis de verser il y de nombreuses années. Cette omission a entraîné des intérêts et des pénalités.

 

[2]               La maison de soins infirmiers, qui n’a pas vraiment été en activité depuis de nombreuses années, a demandé à six reprises à la défenderesse, parfois appelée Douanes Canada, parfois l’Agence, d’exercer le pouvoir discrétionnaire que lui confèrent les dispositions de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. 1985, ch. 1 (5e suppl.) (LIR), communément appelées les dispositions d’équité, et de renoncer aux pénalités et aux intérêts accumulés. Il a été acquiescé à sa demande à une occasion au début des années 1990.

 

[3]               À l’heure actuelle, la maison de soins infirmiers doit plus de 300 000 $ en intérêts et pénalités. Elle a demandé à Douanes Canada de l’exonérer des intérêts et des pénalités. Le dernier refus qu’elle a essuyé remonte au 22 août 2006, et celui-ci a été suivi d’une ordonnance de saisie‑arrêt signifiée à la ville de Toronto, qui loue l’ancienne maison de soins infirmiers et s’en sert comme centre d’hébergement pour hommes sans abri.

 

[4]               La maison de soins infirmiers a déposé une demande de contrôle judiciaire de cette décision, ou de ces deux décisions, et demande entre-temps une injonction interlocutoire ou une suspension de l’ordre de paiement. Il s’agit de la question à trancher dans la présente requête.

 

[5]               Bien que la maison de soins infirmiers laisse entendre qu’elle ne doit pas le montant allégué, cette question ne relève pas de la compétence de la Cour. Selon le paragraphe 152(8) de la LIR, une cotisation est réputée être valide et exécutoire malgré toute erreur, tout vice de forme ou toute omission, sous réserve des modifications qui peuvent y être apportées ou de son annulation lors d'une opposition ou d'un appel interjeté devant la Cour canadienne de l’impôt (Le ministre du Revenu national c. MacIver (1999), 99 D.T.C. 5524, Canada (Ministre du Revenu national – M.R.N.) c. Services M.L. Marengère Inc. (1999), 176 F.T.R. 1, 2000 D.T.C. 6032).

 

[6]               Une injonction interlocutoire, ou une suspension, en attendant l’issue d’une autre instance, est un redressement en equity. Pour qu’il soit accordé, le demandeur doit établir l’existence d’une question sérieuse à trancher, d’un préjudice irréparable et de la prépondérance des inconvénients en sa faveur (RJR-MacDonald Inc. c. Canada (Procureur général), [1994] 1 R.C.S. 311).

 

[7]               Dans l’arrêt RJR-MacDonald, précité, il a été déterminé qu’une question sérieuse était une question qui n’était ni futile ni vexatoire. Toutefois, si la suspension a pour effet d’accorder la réparation demandée dans la demande sous‑jacente, le tribunal saisi de la requête devrait examiner de près le fond de la demande (Wang c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 148, [2001] 3 C.F. 682).

 

[8]               La décision de l’Agence de ne pas exercer son pouvoir discrétionnaire ne devrait pas être remise en cause à moins d’être considérée déraisonnable (Lanno c. Canada (Agence des douanes et du revenu), 2005 CAF 153, [2005] A.C.F. no 714 (C.F.) (QL)).

 

[9]               En l’espèce, l’Agence a demandé, année après année, à la société de produire ses déclarations de revenus. Aucune déclaration n’a été produite depuis 1997. Il incombe à la demanderesse de produire tous les renseignements pertinents. Il n’était pas déraisonnable pour l’Agence de refuser d’exercer son pouvoir discrétionnaire en faveur de la société.

 

[10]           De plus, l’année dernière dans le dossier T-862-05, la défenderesse a annulé un ordre de paiement qui avait été signifié à la ville de Toronto au motif que la maison de soins infirmiers était sur le point de présenter une demande de révision administrative de sa décision défavorable en réponse à la demande fondée sur l’équité. La société a été informée qu’elle devrait vraisemblablement produire toutes ses déclarations arriérées, ce qui s’est avéré. Elle ne l’a pas fait.

 

[11]           Il s’agit du premier motif pour lequel la présente demande devrait être rejetée. Je dois ajouter cependant que si la maison de soins infirmiers fournit ces renseignements à la défenderesse, elle aura alors le droit de demander une septième renonciation aux intérêts et aux pénalités en vertu des dispositions d’équité.

 

[12]           Il y a une autre raison pour laquelle la demande ne devrait pas être accueillie. À titre de tribunal d’equity, la Cour devrait garder à l’esprit les douze maximes de l’equity. Il y en a trois qui sont pertinentes et qui nous amènent à conclure que la présente demande devrait être rejetée avec dépens. Elles sont liées à la prépondérance des inconvénients :

A.                 Celui qui invoque l’équité doit lui‑même être sans reproche.

B.                 Le manque de diligence fait échec à l'équité.

C.                 L’équité considère que ce qui aurait dû être fait l'a été effectivement.

 

[13]           La maison de soins infirmiers, une société, est normalement tenue d’être représentée par un avocat. Elle a cependant obtenu une ordonnance spéciale autorisant sa directrice, Mme Pinnock, à la représenter lors de la présente audience. Néanmoins, elle était représentée par un avocat qui a été d’un grand secours pour déconstruire la demande que Mme Pinnock avait élaborée. Comme cet avocat a été autorisé à comparaître uniquement pour la demande et n’est donc pas inscrit au dossier, si la société souhaite être représentée par Mme Pinnock lors de la demande de contrôle judiciaire, comme il a été mentionné au début de l’audience relative à la présente demande, elle devrait en demander l’autorisation à la Cour au préalable.

 

ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que la demande soit rejetée avec dépens.

 

 

 

« Sean Harrington »

Juge

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Suzanne Bolduc, LL.B.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                               T-1556-06

 

INTITULÉ :                                             742190 ONTARIO INC. faisant affaire sous la raison sociale VAN DEL MANOR NURSING HOME

c.

AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                       TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                     LE 18 SEPTEMBRE 2006

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                             LE JUGE HARRINGTON

 

DATE DES MOTIFS :                            LE 26 SEPTEMBRE 2006

 

 

COMPARUTIONS :

 

Gregory J. Lyndon

 

POUR LA DEMANDERESSE

Wendy J. Linden

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

AVOCATS INASCRITS AU DOSSIER :

 

Gregory J. Lyndon

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

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