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Date: 20230925


Dossier: T-2493-22

Référence: 2023 CF 1285

Ottawa (Ontario), le 25 septembre 2023

En présence de monsieur le juge Régimbald

ENTRE :

ABASSE ASGARALY

demandeur

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Contexte

[1] Le demandeur, M. Abasse Asgaraly, demande le contrôle judiciaire d’une décision du 29 novembre 2022 dans laquelle un agent de l’Agence du revenu du Canada [l’ARC] responsable de la conformité des prestations a conclu que le demandeur n’était pas admissible à la Prestation canadienne de relance économique [PCRE].

[2] La décision contestée refuse la PCRE au demandeur au motif qu’il n’avait pas gagné au moins 5 000 $ (avant impôts) de revenus d’emploi ou de revenus nets de travail indépendant en 2019, en 2020 ou au cours des 12 mois précédant la date de sa première demande.

[3] En contrôle judiciaire, le rôle de la Cour n’est pas de conclure en l’admissibilité ou non de M. Asgaraly à la PCRE. Le rôle de la Cour est simplement de déterminer, à la lumière de la preuve et des arguments qui ont été présentés devant l’agent, si sa décision est raisonnable.

[4] Pour les motifs qui suivent, et en conformité avec le rôle de la Cour, je conclus que la décision de l’agent est raisonnable.

II. Faits

[5] M. Asgaraly travaille à son compte dans le domaine de l’assurance voyage.

[6] En juin 2017, M. Asgaraly a été licencié d’une entreprise d’assurance privée. Il a alors perçu une indemnité d’assurance-emploi de 2017 à 2019.

[7] M. Asgaraly a ensuite créé sa propre entreprise – KMB Consulting Inc. – qui donne des conseils stratégiques et de développement dans l’industrie de l’assurance voyage, l’assistance médicale et de voyage. La Covid-19 a compromis son projet d’entreprise.

[8] M. Asgaraly a demandé la PCRE pour les périodes 2 à 15, soit 14 périodes de deux semaines du 11 octobre 2020 au 24 avril 2021. Les demandes de PCRE de M. Asgaraly pour les périodes 2 à 13 ont été initialement acceptées sans examen et il a reçu les versements correspondants à ces périodes. Ses demandes de PCRE pour les périodes 14 et 15 ont été mis en suspens parce que son dossier a été sélectionné à titre de vérification.

[9] Le 27 juillet 2021, M. Asgaraly a transmis à l’agent de premier examen : (i) une facture datée du 24 décembre 2020 que M. Asgaraly avait émise à SITATA Inc. pour un montant de 3 705 €, soit environ 5 668,65 $ CAD ; et (ii) deux confirmations de transferts bancaires effectués en février 2021 par SITATA Inc. pour le paiement de la facture de décembre 2020.

[10] Le 4 août 2021, M. Asgaraly a été avisé à l’issu du premier examen qu’il était inadmissible à la PCRE pour les périodes 14 et 15 au motif qu’il n’avait pas gagné au moins 5 000 $ (avant impôts) de revenus d’emploi ou de revenus nets de travail indépendant en 2019, en 2020 ou au cours des 12 mois précédant la date de sa première demande.

[11] Le 10 août 2021, M. Asgaraly a demandé un deuxième examen de son admissibilité à la PCRE pour les périodes 14 et 15. L’agent de deuxième examen a également été désigné pour valider l’admissibilité de M. Asgaraly à la PCRE pour les périodes 2 à 13.

[12] Le 15 juillet 2022, M. Asgaraly a été avisé à l’issu du deuxième examen qu’il était inadmissible à la PCRE pour les périodes 2 à 15 au motif que (i) il n’avait pas gagné au moins 5 000 $ (avant impôts) de revenus d’emploi ou de revenus nets de travail indépendant en 2019, en 2020, ou au cours des 12 mois précédant la date de sa première demande; (ii) les raisons pour lesquelles il ne travaillait pas n’étaient pas liées à la Covid-19; et (iii) il n’a pas subi une réduction d’au moins 50% de ses revenus hebdomadaires moyens par rapport à l’année précédente pour des raisons liées à la Covid-19.

[13] Le 5 août 2022, M. Asgaraly a déposé à la Cour fédérale un avis de demande de contrôle judiciaire de la décision de l’agent de deuxième examen à l’égard des périodes 2 à 13.

[14] Le 18 novembre 2022, M. Asgaraly s’est désisté de sa demande de contrôle judiciaire après un consentement avec le défendeur pour renvoyer le dossier pour un nouvel examen des périodes 2 à 15 par un examinateur indépendant [troisième examen].

III. Décision faisant l’objet du contrôle judiciaire

[15] Le 29 novembre 2022, l’agent de troisième examen [Agent] a rendu une décision selon laquelle M. Asgaraly était inadmissible à la PCRE pour les périodes 2 à 15 [Décision] au motif qu’il n’avait pas gagné au moins 5 000 $ (avant impôts) de revenus d’emploi ou de revenus nets de travail indépendant en 2019, en 2020 ou au cours des 12 mois précédant la date de sa première demande.

[16] L’Agent a considéré les documents soumis par M. Asgaraly, les notes des agents de premier et deuxième examens, ainsi que les informations contenues dans les déclarations de revenus de M. Asgaraly pour les années d’imposition 2019 à 2021 tel qu’enregistrées dans les systèmes de l’ARC.

[17] L’Agent a déterminé que les différents revenus déclarés par M. Asgaraly en 2019 (pension sécurité vieillesse, prestations RPC/RRQ, indemnité d’assurance-emploi, revenu REER, supplément fédéral net) ne sont pas considérés comme des revenus d’emploi et ne sont pas admissibles pour le critère du 5 000 $. L’Agent a constaté qu’en 2020, M. Asgaraly avait déclaré les mêmes types de revenus qu’en 2019 et que ceux-ci étaient donc inadmissibles. L’Agent a également déterminé que le revenu d’entreprise de M. Asgaraly en 2020 (une perte de 14 903 $ fut réclamée dans la déclaration de revenu) n’était pas suffisant pour répondre au critère du 5 000 $.

IV. Question en litige et norme de contrôle

[18] La seule question en litige est à savoir si la Décision de l’Agent de l’ARC concluant que M. Asgaraly est inadmissible pour recevoir la PCRE est raisonnable.

[19] La norme de contrôle appropriée pour la révision d’une décision d’un agent de l’ARC est celle de la décision raisonnable (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 aux para 16-17 [Vavilov]; Maltais c Canada (Procureur général), 2022 CF 817 aux para 18-19). Le rôle de notre Cour est d’examiner le raisonnement suivi par le décideur administratif et le résultat obtenu pour déterminer si la décision est « fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles » (Vavilov au para 85). Le fardeau de preuve de démontrer qu’une décision est déraisonnable incombe à la partie qui conteste la décision (Vavilov au para 100; voir aussi Aryan v Canada (Attorney General), 2022 FC 139 au para 16 [Aryan]; Hayat v Canada (Attorney General), 2022 FC 131 au para 14; Kleiman v Canada (Attorney General), 2022 FC 762 au para 29 [Kleiman]).

V. Analyse

[20] La Loi sur les Prestations canadiennes de relance, LC 2020, c 12, art 2 [LPCRE] est entrée en vigueur le 2 octobre 2020 et a établi la PCRE. Cette prestation était offerte afin de fournir un soutien au revenu pour toute période de deux semaines comprise entre la période commençant le 27 septembre 2020 et se terminant le 23 octobre 2021, aux salariés et aux travailleurs indépendants admissibles qui ont été directement touchés par la pandémie de COVID‑19. Le ministre responsable de la PCRE est le ministre de l’Emploi et du Développement social (LPCRE, art 2, 3 et 4). Cependant, la PCRE est administrée par l’ARC.

[21] Pour y être admissible, un contribuable doit rencontrer les critères cumulatifs prévus à l’article 3 de la LPCRE, notamment:

Le contribuable doit démontrer que ses revenus s’élevaient à au moins 5 000 $ pour l’année 2019 ou 2020 ou au cours des 12 mois précédant la date à laquelle il a présenté sa demande.

Pour chaque période de deux semaines pour laquelle des prestations sont demandées, le contribuable doit avoir été empêché d’exercer un emploi ou d’exécuter un travail pour son compte pour des raisons liées à la COVID‑19, ou d’avoir subi une réduction d’au moins 50 % de ses revenus hebdomadaires moyens d’emploi ou de travail à son compte par rapport à l’année précédente ou au cours des 12 mois précédant la date à laquelle il a présenté sa demande, pour des raisons liées à la COVID‑19.

Pour chaque période de deux semaines pour laquelle des prestations sont demandées, le contribuable doit également démontrer avoir fait des recherches pour trouver un emploi ou du travail à exécuter pour son compte, afin de combler le manque à gagner.

Le contribuable doit démontrer avoir été présent au Canada et en mesure de travailler durant la période de deux semaines pour laquelle des prestations sont demandées.

[22] Le fardeau de la preuve quant à l’admissibilité à la PCRE appartient au contribuable. En vertu de l’article 6 de la LPCRE, le demandeur est tenu de fournir tout renseignement exigé par l’agent relativement à sa demande.

[23] Le fardeau incombe donc à M. Asgaraly de démontrer à l’ARC qu’il satisfait, selon la prépondérance des probabilités, aux critères établis par la LPCRE afin de recevoir une prestation (Walker c Canada (Procureur général), 2022 FC 381 au para 55 [Walker]). Tel que le rappelle le Juge Diner dans la décision Ntuer c Canada (Procureur général), 2022 CF 1596 au paragraphe 24, « les critères d’admissibilité à l’article 3 de la Loi sont cumulatifs, c’est-à-dire qu’un demandeur doit satisfaire tous les critères pour être admissible à recevoir des prestations en vertu de la PCRE et/ou PCMRE. »

[24] Il est important de noter que dans l’analyse de la raisonnabilité de la décision de l’Agent, la Cour peut considérer le rapport de révision de l’ARC ainsi que les notes au dossier interne. Ceux-ci font partie des motifs de l’Agent, comme le sont les notes du Système mondial de gestion des cas utilisés par les agents d’immigration (Aryan au para 22; Kleiman au para 9; Vavilov, aux para 94‑98).

[25] Le système fiscal du Canada est un système d’auto-déclaration. Il part du principe que le contribuable est capable de fournir tous les documents pertinents à l’appui de sa déclaration (Walker au para 37).

[26] M. Asgaraly fait valoir que la Décision est déraisonnable parce qu’il remplissait toutes les conditions requises pour obtenir la PCRE pour chacune des périodes pour lesquelles il a fait demande. M. Asgaraly prétend qu’en 2019, il a déclaré un revenu de 59 739 $, qui comprenait (i) ce qu’il a gagné en tant que travailleur indépendant et (ii) son indemnité d’assurance-emploi. M. Asgaraly souligne que le processus de demande de la PCRE est entièrement automatisé et qu’il n’y avait aucune précision pour différencier entre un revenu brut applicable pour les revenus salariaux et un revenu net applicable pour un travailleur indépendant comme lui.

[27] De plus, M. Asgaraly fait valoir que son indemnité d’assurance-emploi était de 16 833 $, et allègue que cette indemnité d’assurance-emploi est considérée comme une source de revenu admissible en vertu de l’alinéa 3(1)(e.1) de la LPCRE.

[28] Le Procureur général du Canada [PGC] soutient que la Décision est raisonnable et que la prétention de M. Asgaraly qu’il a gagné un revenu d’au moins 5 000 $ en 2019, en 2020 ou au cours des 12 mois précédant la date de sa première demande, est sans fondement parce que (i) son revenu net en tant que travailleur indépendant n’a pas dépassé 5 000 $ ni en 2019, ni en 2020, et que (ii) son indemnité d’assurance-emploi ne provient pas d’une des sources énumérées à l’alinéa 3(1)(d) de la LPCRE.

[29] Le PGC fait valoir que le revenu d’entreprise déclaré par M. Asgaraly en 2020 est un revenu brut alors que le paragraphe 3(2) de la LPCRE prévoit que pour un travailleur indépendant, il est nécessaire de déclarer un revenu net, qui prend en compte les dépenses engagées pour gagner ce revenu.

[30] De plus, le PGC soutient que, contrairement aux prétentions de M. Asgaraly, l’alinéa 3(1)(e.1) de la Loi ne s’applique pas en l’espèce lorsqu’on prend en compte l’alinéa 3(1)(d) de la LPCRE pour calculer le critère du revenu d’au moins 5 000 $. L’alinéa 3(1)(e.1) ne s’applique que pour les périodes de prestations d’indemnité d’assurance-emploi établies le 27 septembre 2020 ou après cette date. Comme les prestations d’assurance-emploi du demandeur se sont terminées en 2019, elles ne sont pas admissibles en l’espèce.

[31] Selon moi, la Décision de l’Agent est raisonnable. Les conclusions de l’Agent par rapport aux revenus de M. Asgaraly sont raisonnables et justifiées compte tenu de toute la preuve au dossier. Il incombait à M. Asgaraly d’établir auprès de l’ARC qu’il satisfait, selon la prépondérance des probabilités, aux critères de la Loi (Walker au para 55), ce qu’il n’a pas fait en l’espèce.

[32] Premièrement, M. Asgaraly n’a soumis qu’une facture et deux confirmations de transferts bancaires de SITATA Inc. pour établir qu’il a gagné un revenu net de plus de 5 000 $ en tant que travailleur indépendant. Ces documents ne contenaient aucune information sur les dépenses engagées par M. Asgaraly pour gagner ce revenu, conformément au paragraphe 3(2) de la LPCRE. Surtout, M. Asgaraly a déclaré une perte nette d’entreprise de 14 903 $ en 2020. Il était donc raisonnable que l’Agent ait conclu que M. Asgaraly n’a pas gagné au moins 5 000 $ de revenus nets en travaillant à son compte en 2020, même en dépit du paiement de SITATA Inc. de 5 668,65 $ (Flock c Canada (Procureur général), 2022 CF 305 [Flock] au para 20).

[33] Deuxièmement, l’Agent a raisonnablement déterminé que les autres sources de revenu déclarés de M. Asgaraly n’étaient pas admissibles conformément à l’alinéa 3(1)(d) de la Loi, incluant l’indemnité d’assurance-emploi (Coscarelli v Canada (Attorney General), 2022 FC 1659 au para 24).

[34] Les alinéa 3(1)(e.1) et 3(1)(g) prévoient :

Prestation canadienne de relance économique

Canada Recovery Benefit

Admissibilité

Eligibility

3 (1) Est admissible à la prestation canadienne de relance économique, à l’égard de toute période de deux semaines comprise dans la période commençant le 27 septembre 2020 et se terminant le 23 octobre 2021, la personne qui remplit les conditions suivantes :

3 (1) A person is eligible for a Canada recovery benefit for any two-week period falling within the period beginning on September 27, 2020 and ending on October 23, 2021 if

e.1) dans le cas d’une demande présentée en vertu de l’article 4, par une personne visée à l’alinéa g) dont la période de prestations a été établie le 27 septembre 2020 ou après cette date, à l’égard d’une période de deux semaines qui débute en 2021, ses revenus provenant des sources mentionnées aux sous-alinéas d)(i), (ii), (iv) et (v) ainsi que des prestations régulières et des prestations spéciales, au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur l’assurance-emploi, s’élevaient, pour l’année 2019 ou 2020 ou au cours des douze mois précédant la date à laquelle elle présente sa demande, à au moins cinq mille dollars;

(e.1) in the case of an application made under section 4 by a person referred to in paragraph (g) whose benefit period was established on or after September 27, 2020 in respect of a two-week period beginning in 2021, they had, for 2019 or for 2020 or in the 12-month period preceding the day on which they make the application, a total income of at least $5,000 from the sources referred to in subparagraphs (d)(i), (ii), (iv) and (v) and from regular benefits and special benefits, as defined in subsection 2(1) of the Employment Insurance Act;

g) aucune période de prestations, au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur l’assurance-emploi, n’a été établie ou n’aurait pu être établie à l’égard de toute semaine comprise dans la période de deux semaines ou, si une telle période de prestations a été établie le 27 septembre 2020 ou après cette date à l’égard d’une telle semaine:

(g) no benefit period, as defined in subsection 2(1) of the Employment Insurance Act, was established or could have been established in respect of the person in respect of any week that falls within the two-week period or, if such a benefit period was established on or after September 27, 2020 in respect of the person in respect of any week that falls within the two-week period,

(i) ou bien la personne a reçu des prestations régulières, au sens de ce paragraphe, pour le nombre maximal de semaines à l’égard desquelles ces prestations peuvent être versées au cours de la période de prestations au titre de la partie I de cette loi,

(i) the person was paid regular benefits, as defined in that subsection, for the maximum number of weeks for which those benefits may be paid in that benefit period under Part I of that Act, or

(ii) ou bien la personne a reçu des prestations régulières et des prestations spéciales, au sens de ce paragraphe, pour le nombre maximal de semaines à l’égard desquelles ces deux prestations peuvent être versées au cours de la période de prestations au titre de la partie I de cette loi;

(ii) the person was paid regular benefits and special benefits, as defined in that subsection, for the maximum number of weeks for which both those benefits may be paid in that benefit period under Part I of that Act;

[Je souligne.]

[Emphasis added]

[35] L’alinéa 3(1)(e.1) fait référence à l’alinéa 3(1)(g) qui explique que pour être éligible à la PCRE, le demandeur ne doit pas avoir été admissible pour obtenir des prestations d’assurance-emploi pendant les semaines qu’il réclame la PCRE ou, si une période de prestation a été établie après le 27 septembre 2020, alors la personne a reçu ces prestations pour le nombre maximal de semaines.

[36] L’alinéa 3(1)(e.1) indique ensuite que pour une personne visée à l’alinéa g) dont la période de prestations a été établie le 27 septembre 2020 ou après cette date, les prestations d’assurance-emploi obtenus (et donc payées après le 27 septembre 2020) peuvent être une source de revenus admissible. L’alinéa 3(1)(e.1) ne vise donc que le deuxième élément de l’alinéa 3(1)(g).

[37] Or, le demandeur est visé par le premier élément de l’alinéa 3(g) (« aucune période de prestations, au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur l’assurance-emploi, n’a été établie ou n’aurait pu être établie à l’égard de toute semaine comprise dans la période de deux semaines »), mais n’est pas visé par le deuxième élément (« ou, si une telle période de prestations a été établie le 27 septembre 2020 ou après cette date à l’égard d’une telle semaine […] »).

[38] Donc, l’alinéa 3(1)(e.1) ne s’applique pas aux prestations d’assurance-emploi du demandeur qui se sont terminées en 2019 (celles-ci n’ont pas été établies et payées le 27 septembre 2020 ou après, tel que requis pas l’alinéa 3(1)(g)). Les prestations d’assurance-emploi de M. Asgaraly ne sont donc pas une source admissible pour lui.

[39] Enfin, le demandeur soumet que le processus pour demander la PCRE était automatisé et qu’il n’y avait aucune précision quant aux sources de revenus admissibles, ni de distinction entre les revenus brut et net. En d’autres mots, M. Asgaraly soutient que les critères n’étaient pas clairs. Il soumet que puisque ses demandes ont été acceptées et payées, il avait une attente légitime d’être admissible aux prestations. Ces arguments ne sont pas fondés en droit. Malheureusement, les critères sont prescrits par la LPCRE et ne sont pas discrétionnaires. Il ne peut donc pas y avoir préclusion face à une disposition explicite de la LPCRE. Malgré que le demandeur ait pu raisonnablement penser qu’il était admissible à la PCRE vu qu’il avait été en mesure d’appliquer pour l’obtenir, la doctrine des attentes légitimes ne garantit pas de résultat particulier (Flock au para 23).

[40] Conséquemment, la conclusion de l’Agent de l’ARC à l’effet que M. Asgaraly ne s’est pas déchargé de son fardeau de prouver avoir gagné un montant admissible suffisant pour être admissible à la PCRE n’est donc pas déraisonnable. À la lumière de la preuve fournie, il était raisonnable pour l’Agent de conclure que le demandeur n’avait pas généré un revenu net d’au moins 5 000$ provenant d’un travail indépendant en 2019, 2020 ou dans les 12 mois précédents ses demandes de prestations. Le raisonnement de l’Agent est cohérent, fondé sur la preuve qui lui a été soumise et se justifie à l’égard de la LPCRE. Ses motifs illustrent une logique interne satisfaisante.

VI. Dépens

[41] La règle 400 des Règles des Cours fédérales, DORS 98/106 [Règles] confère à cette Cour « le pouvoir discrétionnaire de déterminer le montant des dépens, de les répartir et de désigner les personnes qui doivent les payer ». Après avoir pris en considération les facteurs énumérés au paragraphe 400(3) des Règles, ainsi que le montant réclamé par le PGC, et toutes les autres circonstances de cette cause, j’estime qu’il n’est pas approprié d’accorder de dépens en l’espèce. M. Asgaraly n’était pas représenté par un avocat lors de la présente instance, mais ses arguments étaient raisonnés et bien exprimés. Eu égard à l’ensemble des circonstances, j’exerce mon pouvoir discrétionnaire de ne pas adjuger de dépens contre lui.

VII. Conclusion

[42] Après avoir examiné les pièces justificatives de M. Asgaraly et après avoir pris en considération les arguments des parties, je conclus, pour tous les motifs qui précèdent, que la décision de l’Agent est raisonnable. Elle satisfait aux critères énoncés puisqu’elle est intrinsèquement cohérente en plus d’être transparente, justifiée et intelligible.

[43] La demande de contrôle judiciaire est rejetée, sans dépens.


JUGEMENT dans le dossier T-2493-22

LA COUR STATUE:

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée, sans dépens.

«Guy Régimbald»

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER:

T-2493-22

 

INTITULÉ:

ABASSE ASGARALY c LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE:

TORONTO, ONTARIO

 

DATE DE L’AUDIENCE:

LE 21 SEPTEMBRE 2023

 

JUGEMENT ET MOTIFS:

LE JUGE RÉGIMBALD

 

DATE DES MOTIFS:

LE 25 SEPTEMBRE 2023

 

COMPARUTIONS:

Abasse Asgaraly

POUR LE DEMANDEUR

(POUR SON PROPRE COMPTE)

 

Gabriel Caron

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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