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Date : 20240222

Dossier : IMM-4157-22

Référence : 2024 CF 293

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 22 février 2024

En présence de madame la juge Heneghan

ENTRE :

AHMAD HASSAN

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS ET JUGEMENT

[1] Ahmad Hassan (le « demandeur ») demande le contrôle judiciaire de la décision de la Section d'appel des réfugiés (la « SAR ») de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, qui a confirmé la décision de la Section de la protection des réfugiés (la « SPR ») de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Dans sa décision, la SPR avait conclu que le demandeur n'était pas un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger selon l'article 96 et le paragraphe 97(1) respectivement de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la « Loi »).

[2] Le demandeur est un citoyen du Pakistan. Il a allégué craindre d'être persécuté par les talibans et le Tehrik‑e‑Taliban Pakistan (le « TTP »). Il a affirmé que son père avait reçu des appels téléphoniques de menaces au sujet de la participation du demandeur au jeu de squash, ce jeu étant considéré comme une [TRADUCTION] « activité occidentale » par le TTP.

[3] La SPR a conclu qu'une possibilité de refuge intérieur (« PRI ») était à la disposition du demandeur à Hyderabad.

[4] La SAR a procédé à un examen indépendant. Elle a envoyé une lettre d'équité procédurale au demandeur pour l'inviter à présenter des observations sur les contradictions perçues dans son témoignage. Le demandeur a répondu par l'entremise de son avocat.

[5] La SAR n'était pas convaincue que les talibans ou le TTP étaient des agents de persécution. Elle a conclu que le demandeur n'avait pas réfuté l'existence d'une PRI.

[6] La décision de la SAR est susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable, conformément à l'arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) c. Vavilov, [2019] 4 R.C.S. 653, 2019 CSC 65.

[7] Dans son examen du caractère raisonnable, la Cour doit se demander si la décision faisant l'objet du contrôle « possède les caractéristiques d'une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l'intelligibilité, et si la décision est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur celle‑ci » : voir Vavilov, précité, au paragraphe 99.

[8] Le critère applicable à une PRI a été énoncé par la Cour d'appel fédérale dans l'arrêt Rasaratnam c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1992] 1 C.F. 706 (C.A.F.), aux pages 710 et 711 :

  • Premièrement, la Commission doit être convaincue que le demandeur d'asile ne risque pas sérieusement d'être persécuté dans la PRI.

  • Deuxièmement, il doit être objectivement raisonnable de s'attendre à ce que le demandeur cherche refuge dans une autre partie du pays avant de demander l'asile au Canada.

[9] La SAR a examiné les deux volets du critère de la PRI.

[10] Compte tenu de la preuve dans le dossier certifié du tribunal et des observations écrites et orales des parties, je ne suis pas convaincue que la décision est raisonnable.

[11] La principale conclusion de la SAR était que le demandeur n'avait pas établi l'identité de ses présumés agents de persécution.

[12] Pour appuyer son opinion selon laquelle les appels de menaces provenaient des talibans ou du TTP, le demandeur allègue que son frère a été enlevé par l'un de ces groupes.

[13] La SAR a conclu que l'allégation du demandeur n'était pas crédible en raison des incohérences perçues entre son témoignage, la lettre d'appui de son père et l'article de journal décrivant l'événement. À mon avis, il s'agissait d'une conclusion déraisonnable en ce qui a trait à la crédibilité.

[14] À mon avis, il est inintelligible que l'omission par le père du demandeur de mentionner l'utilisation d'une arme dans le présumé enlèvement ait rendu sa description de l'événement incompatible avec le témoignage du demandeur.

[15] De même, la SAR a conclu que l'article de journal était incompatible avec le témoignage du demandeur parce que l'article ne faisait référence qu'à la disparition de son frère et ne faisait pas référence à l'incident comme à un enlèvement. Encore une fois, à mon avis, la façon dont la SAR a conclu que cela était incompatible avec le témoignage du demandeur est inintelligible.

[16] L'analyse faite par la SAR du premier volet du critère de la PRI est donc déraisonnable. Il n'est pas nécessaire d'examiner le deuxième volet du critère.

[17] La demande de contrôle judiciaire sera accueillie, la décision de la SAR sera annulée et l'affaire sera renvoyée à un tribunal différent de la SAR pour qu'il rende une nouvelle décision. Il n'y a aucune question à certifier.


JUGEMENT dans le dossier IMM-4157-22

LA COUR ORDONNE :

  1. La demande de contrôle judiciaire est accueillie.

  2. La décision de la Section d'appel des réfugiés est annulée et l'affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué pour qu'il rende une nouvelle décision.

  3. Il n'y a aucune question à certifier.

« E. Heneghan »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-4157-22

INTITULÉ :

AHMAD HASSAN c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

 

LIEU DE L'AUDIENCE :

TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :

LE 18 JANVIER 2024

JUGEment ET MOTIFS :

LA JUGE HENEGHAN

DATE DES MOTIFS ET DU JUGEMENT :

LE 22 FÉVRIER 2024

COMPARUTIONS :

Djawid Taheri

Pour LE DEMANDEUR

Christopher Ezrin

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Djawid Taheri

Avocat

Toronto (Ontario)

 

Pour LE DEMANDEUR

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

Pour le défendeur

 

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