Dossier : T‑89‑23
Référence : 2023 CF 1405
[TRADUCTION FRANÇAISE]
Ottawa (Ontario), le 23 octobre 2023
En présence de madame la juge Azmudeh
ENTRE :
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SHARON GANESH
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demanderesse
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et
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LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
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défendeur
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JUGEMENT ET MOTIFS
I. Aperçu
[1] La demanderesse, Mme Sharon Ganesh, a déposé la présente demande de contrôle judiciaire à l’égard de deux décisions. La première décision, datée du 2 décembre 2022, est celle dans laquelle la deuxième agente saisie du dossier (l’agente) a confirmé la décision initiale de l’Agence du revenu du Canada (l’ARC) selon laquelle la demanderesse n’était pas admissible à recevoir la prestation canadienne d’urgence (la PCU). La deuxième décision, datée du 4 août 2022, est une décision préliminaire dans laquelle le premier agent de l’ARC saisi du dossier a conclu que la demanderesse n’était pas admissible à recevoir la prestation canadienne pour les travailleurs en cas de confinement (la PCTCC). La demanderesse ne s’est pas prévalue de la procédure interne qui lui permettait de demander qu’un autre agent examine le bien‑fondé de cette décision préliminaire.
[2] L’ensemble des décisions en cause sont fondées sur le fait que les éléments de preuve ainsi que les autres renseignements fournis par le demanderesse n’étaient pas suffisants pour convaincre le décideur que cette dernière satisfaisait à l’exigence minimale en matière de revenus provenant d’un emploi ou d’un travail exécuté pour son compte pour les années 2019, 2020, 2021 ou au cours des 12 mois précédant la date de cette première demande, à savoir 5 000 $ (avant impôt).
[3] Je comprends la situation dans laquelle se trouve la demanderesse et je n’ai aucune raison de douter du fait qu’elle croyait sincèrement être admissible à recevoir la PCU. Je comprends également qu’elle ait éprouvé une certaine frustration à essayer de s’y retrouver dans les nombreux programmes dont elle pouvait se prévaloir et dans l’ensemble des renseignements qui lui étaient fournis par le biais de diverses ressources. Cela dit, je suis d’avis que la seule décision qui intéresse la présente demande de contrôle est celle que l’agente a prise quant à la PCU.
[4] Pour les motifs exposés ci‑après, je conclus que la décision de l’agente selon laquelle la demanderesse n’était pas admissible à toucher la PCU était raisonnable et conforme à l’équité procédurale. Je rejetterai donc la présente demande de contrôle judiciaire.
II. Questions préliminaires
[5] Trois questions préliminaires ont été soulevées dans la présente affaire, à savoir :
l’intitulé de la cause;
la requête en radiation du dossier de la demanderesse déposée par le défendeur;
le dépôt par la demanderesse d’éléments de preuve dont le décideur ne disposait pas.
A. L’intitulé de la cause
[6] La demanderesse, qui agit pour son propre compte, a mentionné dans sa demande que le « ministre du Revenu national »
était le défendeur.
[7] Or, le défendeur soutient que, comme la demanderesse conteste une décision rendue par l’ARC pour le compte du ministre de l’Emploi et du Développement social, le défendeur est plutôt le procureur général du Canada.
[8] La demanderesse est d’accord. Par conséquent, conformément au paragraphe 303(2) des Règles des cours fédérales, DORS/98‑106 (les Règles), j’ordonne la modification de l’intitulé de la cause de sorte que le « procureur général du Canada »
y soit désigné en tant que défendeur :
B. La requête en radiation du dossier de la demanderesse déposée par le défendeur
[9] Le défendeur a déposé une requête en radiation du dossier de la demanderesse au motif que le dossier contenait des communications entre les parties en vue d’un éventuel règlement. Le défendeur demande subsidiairement le retrait des éléments de preuve problématiques.
[10] Pour les motifs ci‑après, je ne retirerai pas l’ensemble du dossier de la demanderesse. Cependant, je suis d’accord qu’il n’y a pas lieu de présenter à la Cour des communications protégées, tels les échanges entre les parties et les éléments de preuve relatifs aux pourparlers menés en vue d’un éventuel règlement, et qu’en conséquence elles ne sont pas admissibles.
[11] Le privilège relatif aux règlements est une règle de preuve de la common law qui protège les communications échangées entre les parties en vue de tenter de régler le différend qui les oppose. Cette règle, fondée sur des considérations d’intérêt public, permet aux parties de mener des discussions au sujet d’un éventuel règlement sans crainte que les renseignements qu’ils communiquent soient utilisés à leur détriment dans un litige. Elle permet aux parties de mener des discussions en toute franchise et favorise une saine administration de la justice alors que les parties tentent de régler elles‑mêmes leur différend avant d’en arriver au litige (Union Carbide Canada Inc. c Bombardier Inc., 2014 CSC 35 (CanLII), [2014] 1 RCS 800 [Union] aux para 23 et 31. Voir également Sable Offshore Energy Inc. c Ameron International Corp., 2013 CSC 37 (CanLII), [2013] 2 RCS 623 [Sable] aux para 11 à 13). Cette règle a été codifiée à l’article 422 des Règles :
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[12] Le défendeur soutient que, comme le dossier de la demanderesse contient des renseignements visés par le privilège relatif aux règlements, il convient de le retirer en entier ou, à défaut, d’en retirer les portions à exclure selon la Cour. Les éléments du dossier que le défendeur cherche à faire exclure sont les suivants :
[traduction]
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Renvoi au dossier de la demanderesse
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Description des renseignements protégés
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1.
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Onglet 4, intitulé « Correspondance écrite du contre‑interrogatoire relatif aux affidavits », pages 88 à 96
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Lettre d’offre de règlement provenant du défendeur, ébauche de procès‑verbal de règlement, ébauche d’avis de désistement, contre‑offre de la demanderesse et échange de courriels entre les parties concernant le règlement de la demande de contrôle judiciaire
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2.
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Onglet 6, intitulé « Mémoire des faits et du droit de la demanderesse », page 111, paragraphe 31
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Description des renseignements partagés dans le cadre de discussions verbales en vue d’un éventuel règlement
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3.
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Onglet 6, intitulé « Mémoire des faits et du droit de la demanderesse », page 112, paragraphes 38 et 39
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Description de la correspondance relative à l’offre de règlement du défendeur et à la contre‑offre de la demanderesse
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4.
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Onglet 6, intitulé « Mémoire des faits et du droit de la demanderesse », page 112, paragraphe 40
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Description de la correspondance relative à l’offre de règlement du défendeur et à la contre‑offre de la demanderesse
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5.
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Onglet 6, intitulé « Mémoire des faits et du droit de la demanderesse », page 113 paragraphe 42.e)
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Description du contenu de la lettre d’offre de règlement
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6.
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Onglet 6, intitulé « Mémoire des faits et du droit de la demanderesse », page 114, paragraphe 43
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Description du contenu de la lettre d’offre de règlement
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[13] Je suis d’avis que tous ces éléments de preuve sont des communications protégées qui ne doivent pas faire partie du dossier. À l’audience, la demanderesse n’a pas fait état de circonstances exceptionnelles justifiant que des documents protégés soient admis en preuve (Association de médiation familiale du Québec c Bouvier, 2021 CSC 54 (CanLII) aux para 96 à 99; Sable, aux para 12 et 18 à 20; Union, aux para 34 et suivants). Elle a fait valoir que la lettre d’offre de règlement pouvait faire partie du dossier parce que, selon elle, cette lettre contenait peu de détails quant au contenu de l’offre.
[14] Je ne souscris pas à cet argument. Par conséquent, je ne tiendrai pas compte des documents protégés énumérés ci‑dessus.
C. Le dépôt par la demanderesse d’éléments de preuve dont le décideur ne disposait pas
[15] Pour ce qui est des nouveaux éléments de preuve dont l’agente ne disposait pas, le défendeur soutient que le dossier de preuve ne doit contenir que les éléments de preuve dont le décideur disposait, tout autre élément de preuve étant inadmissible.
[16] Plus précisément, le défendeur rejette les éléments de preuve suivants que la demanderesse a déposés :
la pièce
« A »
, qui consiste en une copie imprimée d’une page du site Web de l’ARC intitulée « Critères d’admissibilité à la PCU »;la pièce
« B »
, qui consiste en un document publié dans la Gazette du Canada intitulé Décret de remise visant la prestation canadienne d’urgence et la prestation d’assurance‑emploi d’urgence, TR/2021‑19 (le décret de remise);la pièce
« C »
, qui consiste en une copie imprimée d’une page du site Web de l’ARC intitulée « Revenus de travail indépendant (nets ou bruts) »;la pièce
« H »
, qui consiste en une lettre de la demanderesse, datée du 2 janvier 2023, adressée au commissaire Bob Hamilton;la pièce
« I »
, qui consiste en une lettre de la demanderesse, datée du 2 janvier 2023, adressée à S. Constantin;la pièce
« K »
, qui consiste en une copie imprimée d’une page du site Web taxpage.com intitulée [TRADUCTION]« Remboursement de la PCU : que doivent faire les contribuables si les professionnels de l’impôt eux‑mêmes ne le savent pas? »
;la pièce
« M »
, qui consiste en un avis de nouvelle détermination daté du 15 septembre 2022;la pièce
« N »
, qui consiste en une copie imprimée d’une page du site Web de l’ARC intitulée « Critères d’admissibilité à la PCTCC ».
[17] Je conviens que le rôle de la Cour, lorsqu’elle est saisie d’une demande de contrôle judiciaire, consiste à examiner le dossier dont disposait le décideur administratif, et ce afin de déterminer si la décision de ce dernier était raisonnable et conforme à l’équité procédurale compte tenu du contexte juridique et factuel de l’affaire en cause. Par conséquent, la Cour ne doit pas tenir compte des documents auxquels le décideur n’avait pas accès sauf si des circonstances exceptionnelles le justifient (Association des universités et collèges du Canada c Canadian Copyright Licensing Agency (Access Copyright), 2012 CAF 22 [Association des universités] au para 19).
[18] Dans l’arrêt Association des universités, la Cour d’appel fédérale a reconnu, aux paragraphes 19 et 20, qu’il y avait trois exceptions à cette règle générale, à savoir lorsque de nouveaux éléments de preuve : 1) contiennent des renseignements généraux et contextuels; 2) répondent à des manquements à l’équité procédurale; 3) font ressortir le fait que le décideur administratif ne disposait d’aucune preuve.
[19] La demanderesse n’a pas fait d’observations quant à savoir si l’une ou l’autre de ces exceptions s’appliquaient en l’espèce. En outre, notre Cour a déjà statué, dans le contexte de demandes de contrôle judiciaire de décisions de l’ARC en ce qui concerne la PCU, qu’elle ne devait pas tenir compte des documents supplémentaires fournis au soutien de la demande auxquels le décideur administratif n’avait pas lui‑même accès (Datta c Canada, 2022 CF 973 aux para 29 et 30; Lussier c Canada, 2022 CF 935 au para 2, Maltais c Canada (Procureur général), 2022 CF 817 aux para 20 et 21).
[20] En ce qui concerne la pièce B, la Cour peut prendre connaissance d’office du décret de remise, qui a été publié dans la Gazette du Canada, car celui‑ci est visé par l’article 18 de la Loi sur la preuve au Canada.
[21] Ainsi, parmi l’ensemble des documents susmentionnés, je n’ai tenu compte, dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire, que du décret de remise publié dans la Gazette du Canada et que la demanderesse a déposé en tant que pièce B par le biais de son affidavit.
III. Contexte
A. La PCU
[22] La demanderesse travaille pour son propre compte. À ce titre, elle offre divers services à ses clients, tels des services de gestion d’événements et de projets, des services administratifs, du doublage, du chant et des spectacles.
[23] Les parties s’entendent que la demanderesse a demandé la PCU relativement à quatorze périodes de deux semaines du 15 mars 2020 au 26 septembre 2020. Au total, elle a reçu 14 000 $ à ce titre d’avril à septembre 2020. Les parties s’entendent également que la demanderesse a demandé la PCTCC relativement à onze périodes d’une semaine du 19 décembre 2021 au 5 mars 2022. Au total, elle a reçu 2 430 $ à ce titre de décembre 2021 à février 2022.
[24] Le 5 août 2022, l’ARC a fait parvenir à la demanderesse une première lettre d’examen dans laquelle elle confirmait que cette dernière était inadmissible à recevoir la PCU au motif que ses revenus provenant d’un emploi ou d’un travail qu’elle avait exécuté pour son compte ne s’élevaient pas à au moins 5 000 $ (avant impôt) en 2019 ou au cours des douze mois précédant sa première demande (pièce D du dossier de la demanderesse).
[25] Par la suite, l’agente a été saisie du cas de la demanderesse et elle a demandé à cette dernière de lui fournir des documents supplémentaires prouvant ses revenus. En réponse, la demanderesse lui a fait parvenir un certain nombre de factures et de chèques totalisant 5 000,75 $. L’agente a conclu que ces éléments de preuve établissaient que les revenus bruts de la demanderesse avaient été d’au moins 5 000 $.
[26] Toutefois, elle a conclu que les revenus nets de la demanderesse n’atteignaient pas le seuil minimal, à savoir 5 000 $. Le 2 décembre 2022, l’ARC a fait parvenir une deuxième lettre d’examen à la demanderesse dans laquelle elle confirmait à nouveau que cette dernière n’était pas admissible à recevoir la PCU.
B. La PCTCC
[27] Le 4 août 2022, l’ARC a fait parvenir une première lettre d’examen à la demanderesse pour l’informer qu’elle n’était pas admissible à recevoir la PCTCC au motif que ses revenus provenant d’un emploi ou d’un travail exécuté pour son compte ne s’élevaient pas à au moins 5 000 $ (avant impôt) en 2020, en 2021 ou au cours des douze mois précédant sa première demande. Dans la lettre, l’ARC informait également la demanderesse de son droit de demander le réexamen de son dossier dans un délai de trente jours en cas de désaccord avec sa décision (pièce L du dossier de la demanderesse).
[28] La demanderesse ne conteste pas le fait qu’elle n’a jamais demandé le réexamen de sa demande de PCTCC. Le 15 septembre 2022, après l’expiration du délai de trente jours, l’ARC a fait parvenir à la demanderesse un avis de nouvelle détermination des prestations liées à la COVID‑19 dans lequel elle exigeait que cette dernière rembourse la somme de 2 430 $ qu’elle avait reçue au titre de la PCTCC.
IV. Questions de contrôle judiciaire et norme de contrôle
[29] La demanderesse a soulevé plusieurs questions, qui peuvent se résumer ainsi :
l’équité procédurale de la deuxième décision relative à la PCU;
le caractère raisonnable de la deuxième décision relative à la PCU;
le caractère raisonnable et l’équité procédurale de la décision relative à la PCTCC.
V. Norme de contrôle
[30] La norme de contrôle applicable en l’espèce est celle du caractère raisonnable de la décision (Aryan c Canada (Procureur général), 2022 CF 139 aux para 15 et 16). Les parties s’entendent sur ce point.
[31] Dans les cas où la norme de contrôle applicable est celle du caractère raisonnable de la décision, le rôle de la cour de révision consiste à examiner les motifs énoncés par le décideur administratif et à déterminer si la décision de ce dernier était fondée sur « une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle »
et « justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti »
(Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov] au para 85). La cour de révision doit donc se demander « si la décision possède les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité »
(Vavilov, au para 99, citant l’arrêt Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9 aux para 47 et 74). Il incombe à la partie qui conteste une décision administrative de démontrer que celle‑ci est déraisonnable.
[32] L’exercice du contrôle judiciaire d’une décision selon la norme du caractère raisonnable doit comporter une évaluation rigoureuse des décisions administratives. Cependant, en déterminant si la décision qui fait l’objet du contrôle est raisonnable, la cour de révision doit examiner les motifs avec « une attention respectueuse »
et chercher à comprendre le fil du raisonnement suivi par le décideur pour en arriver à sa conclusion (Vavilov, au para 84). La cour de révision fera preuve de retenue, intervenant uniquement « lorsque cela est vraiment nécessaire pour préserver la légitimité, la rationalité et l’équité du processus administratif »
(Vavilov, au para 13). Il ne conviendrait pas que la cour de révision infirme une décision pour la simple raison que celle‑ci contient des erreurs superficielles ou accessoires. La cour de révision doit plutôt être convaincue que la décision souffre de lacunes assez graves comme le manque de logique interne du raisonnement (Vavilov, aux para 100 et 101).
VI. Cadre législatif
[33] La loi qui a institué la PCU est la Loi sur la prestation canadienne d’urgence, LC 2020, c 5, art 8 (la « LPCU »).
[34] Pour être admissible à recevoir la PCU, la personne qui en fait la demande doit être visée par la définition de « travailleur » au sens de l’article 2 de la LPCU :
travailleur Personne âgée d’au moins quinze ans qui réside au Canada et dont les revenus — pour l’année 2019 ou au cours des douze mois précédant la date à laquelle elle présente une demande en vertu de l’article 5 — provenant des sources ci‑après s’élèvent à au moins cinq mille dollars ou, si un autre montant est fixé par règlement, ce montant :
a) un emploi;
b) un travail qu’elle exécute pour son compte;
c) des prestations qui lui sont payées au titre de l’un des paragraphes 22(1), 23(1), 152.04(1) et 152.05(1) de la Loi sur l’assurance emploi;
d) des allocations, prestations ou autres sommes qui lui sont payées, en vertu d’un régime provincial, en cas de grossesse ou de soins à donner par elle à son ou ses nouveau‑nés ou à un ou plusieurs enfants placés chez elle en vue de leur adoption. (worker)
[35] Selon le paragraphe 5(1) de la LPCU, « [t]out travailleur peut, selon les modalités ̶̶̶ notamment de forme ̶̶̶ fixées par le ministre, demander une allocation de soutien du revenu pour toute période de quatre semaines comprise dans la période commençant le 15 mars 2020 et se terminant le 3 octobre 2020 »
.
[36] Le paragraphe 5(3) de la LPCU exige de la personne qui souhaite recevoir la PCU de fournir au ministre de l’Emploi et du Développement social tout renseignement que ce dernier peut exiger relativement à la demande.
VII. Analyse
A. Question A : Absence de manquement à l’équité procédurale de la décision sur la PCU
[37] Bien qu’elle n’ait pas expressément soulevé la question, la demanderesse laisse entendre que l’agente n’a pas respecté l’équité procédurale à son égard, car des renseignements contradictoires lui auraient été fournis au sujet de son admissibilité à divers programmes, par exemple sur la question de savoir si l’ARC tiendrait compte de ses revenus nets ou de ses revenus bruts pour déterminer son admissibilité. Autrement dit, la demanderesse fait valoir que les renseignements qui lui ont été fournis sur l’incidence de ses revenus quant à son admissibilité n’étaient pas clairs et que, par conséquent, il y avait eu un manquement à l’équité procédurale.
[38] Le demanderesse avance également qu’il n’était pas toujours facile de communiquer avec l’agente. Je ne suis pas d’accord. Dans son affidavit, l’agente décrit le processus qu’elle a suivi pour parvenir à sa décision, elle mentionne les documents qu’elle a examinés, elle explique avoir accepté les éléments de preuve fournis par la demanderesse après la décision initiale quant à l’admissibilité de cette dernière à la PCU et s’être fondée sur ces éléments pour prendre sa décision et elle décrit les efforts qu’elle avait faits pour communiquer avec la demanderesse. Elle déclare avoir tenté sans succès de communiquer avec la demanderesse deux fois le 8 novembre 2022 et une autre fois le 9 novembre 2022 pour déterminer si les revenus déclarés par cette dernière étaient exacts. Elle ajoute que la demanderesse n’a pas répondu à ses messages téléphoniques.
[39] La demanderesse a été informée à plusieurs reprises, dans le cadre des deux examens de son cas, de l’exigence relative au revenu. Même à supposer qu’elle avait souhaité s’entretenir avec l’agente, la demanderesse n’a pas mentionné les éléments de preuve supplémentaires qu’elle lui aurait fournis, le cas échéant.
[40] Quoi qu’il en soit, il n’y a aucun désaccord entre les parties quant aux revenus de la demanderesse. La demanderesse ne conteste pas le fait que l’agente a tenu compte de l’ensemble des documents qu’elle a fournis, notamment les factures et les chèques supplémentaires. Elle n’allègue pas non plus qu’elle aurait fourni davantage de documents ou qu’elle aurait modifié certains des documents qu’elle avait présentés si elle avait pu le faire.
[41] La demanderesse a déclaré que la multitude de renseignements contenus dans divers sites Web de l’ARC l’avaient amenée à croire que l’admissibilité à la PCU était fondée sur les revenus bruts et non les revenus nets du travailleur autonome et que cela était frustrant et injuste.
[42] Les membres d’un groupe envisagé de demandeurs dans l’affaire Ryan v Canada (Attorney General), 2021 FC 825 [Ryan] ont exprimé la même frustration. Dans cette affaire, la personne qui avait intenté un recours à titre de membre d’un groupe envisagé de personnes a accepté de se désister de son recours sans dépens. Mme Ryan, la personne qui se proposait de représenter le groupe envisagé de personnes en cause, avait intenté le recours au motif qu’elle s’était fondée sur certains renseignements du ministère des Finances publiés le 25 mai 2020 dans un site Web de l’administration fédérale au sujet de prestations de secours qui seraient versées exclusivement aux travailleurs autonomes durant la pandémie de COVID‑19. Ces renseignements portaient sur les critères d’admissibilité pour recevoir de telles prestations.
[43] Dans sa déclaration, Mme Ryan avait demandé à la Cour de lui accorder les mesures de réparations suivantes :
- d’interpréter l’expression
« revenu provenant d’un travail exécuté pour son compte »
au sens de la LPCU sur le site Web officiel du gouvernement du Canada qui décrit les conditions d’admissibilité à la PCU; - de déclarer que les membres du groupe ayant gagné un revenu (vraisemblablement brut) provenant d’un travail exécuté pour leur compte de 5 000 $ au cours des douze mois précédant mars 2020 ou en 2019 ont droit à la PCU qu’ils ont reçue.
[44] À l’instar de la présente affaire, la question en litige dans l’affaire Ryan était de savoir si l’admissibilité d’un demandeur autonome était examinée en fonction de ses revenus bruts ou de ses revenus nets. Dans cette affaire, l’ARC avait informé Mme Ryan ainsi que les membres du groupe envisagé de demandeurs en question que, selon son interprétation, il fallait tenir compte du « revenu net »
(Ryan, au para 2). L’ARC dit la même chose dans la présente affaire.
[45] Cependant, l’ARC a également introduit un autre programme le 12 mai 2021, à savoir un décret de remise selon lequel les personnes dont les revenus bruts provenant d’un travail exécuté pour leur compte étaient d’au moins 5 000 $ pouvaient conserver la PCU qui leur avait été versée. C’est pour cette raison que la demanderesse dans l’affaire Ryan s’est désistée de son action (Ryan, aux para 7 à 9).
[46] Selon moi, la présente affaire démontre que le gouvernement a introduit plusieurs programmes dont les critères d’admissibilité pouvaient ne pas tous être les mêmes. Dans chaque cas, il incombait au décideur d’examiner l’admissibilité du demandeur compte tenu du cadre juridique du programme en question.
[47] À l’audience du contrôle judiciaire, l’avocat du défendeur a renvoyé aux notes de l’agente pour souligner le fait que cette dernière savait que d’autres programmes auraient permis à la demanderesse de conserver la PCU qui lui avait été versée.
[48] Je n’estime donc pas que la frustration générale de la demanderesse face au processus à suivre ou son désaccord avec les critères légaux pour obtenir la PCU donnaient à penser qu’il y avait eu un manquement à l’équité procédurale dans son cas.
B. Question B : Raisonnabilité de la décision de l’agente selon laquelle la demanderesse n’était pas admissible à la PCU
[49] Les parties s’entendent sur le fait que la norme de contrôle qui s’applique est celle de la décision raisonnable, conformément à l’arrêt Vavilov, aux para 12 et 13. Il s’agit d’un type de contrôle empreint de retenue mais tout de même rigoureux. Pour avoir gain de cause, la demanderesse doit établir que la lacune ou la déficience de la décision est suffisamment capitale ou importante (Vavilov, au para 100). Ce ne sont pas toutes les erreurs ou préoccupations au sujet d’une décision qui justifieront une intervention.
[50] La demanderesse reconnaît que l’agente a pris en considération tous les éléments de preuve qu’elle a présentés avant de conclure que ses revenus bruts provenant du travail qu’elle avait exécuté pour son compte étaient d’au moins 5 000 $. Elle fait seulement valoir que l’agente aurait dû tenir compte de ses revenus bruts et non de ses revenus nets pour décider si elle était admissible à recevoir la PCU. C’est sur ce fondement qu’elle avance que la décision de l’agente était déraisonnable.
[51] La demanderesse fait également valoir que la décision de l’agente n’était pas étayée de motifs et qu’elle était fondée uniquement sur un motif banal, à savoir que les revenus de la demanderesse n’atteignaient pas le seuil minimal de 5 000 $. Je fais remarquer que, outre la lettre, le dossier contient les notes générales de l’ARC dans lesquelles l’agente fait état de ses tentatives (infructueuses) de communication avec la demanderesse, mentionne les documents qu’elle a examinés et déclare avoir tenu compte des nouveaux éléments de preuve de la demanderesse avant de conclure que cette dernière avait bel et bien eu des revenus bruts, mais non des revenus nets, d’au moins 5 000 $.
[52] Je suis d’accord avec le défendeur pour dire que ces notes et la lettre vont de pair. Comme la Cour suprême du Canada l’a dit dans l’arrêt Vavilov, au paragraphe 103 :
[103] Bien que, comme nous l’avons déjà mentionné aux par. 89 à 96, il faille interpréter des motifs écrits eu égard au dossier et en tenant dûment compte du régime administratif dans lequel ils sont donnés, une décision sera déraisonnable lorsque, lus dans leur ensemble, les motifs ne font pas état d’une analyse rationnelle ou montrent que la décision est fondée sur une analyse irrationnelle : voir Wright c. Nova Scotia (Human Rights Commission), 2017 NSSC 11, 23 Admin. L.R. (6th) 110; Southam, par. 56. Une décision sera également déraisonnable si la conclusion tirée ne peut prendre sa source dans l’analyse effectuée (voir Sangmo c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2016 CF 17, par. 21 (CanLII)), ou qu’il est impossible de comprendre, lorsqu’on lit les motifs en corrélation avec le dossier, le raisonnement du décideur sur un point central (voir Blas c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2014 CF 629, par. 54‑66 (CanLII); Reid c. Criminal Injuries Compensation Board, 2015 ONSC 6578; Lloyd c. Canada (Procureur général), 2016 CAF 115; Taman c. Canada (Procureur général), 2017 CAF 1, [2017] 3 R.C.F. 520, par. 47).
[53] Il ressort du dossier que, pour conclure que les revenus de la demanderesse provenant d’un travail qu’elle avait exécuté pour son compte n’avaient pas été d’au moins 5 000 $, l’agente s’est fondée sur le fait que la demanderesse avait déclaré des revenus négatifs en tant que travailleuse autonome, à savoir – 105 $ en 2019 et – 3 950 $ en 2020 et que cette dernière n’avait fourni aucun document établissant le contraire.
[54] L’agente était tenue d’appliquer la LPCU pour décider si la demanderesse était admissible à recevoir la PCU. Son interprétation de l’article 2 de la LPCU, selon laquelle il fallait tenir compte des revenus « bruts »
et non des revenus « nets »
, était conforme au libellé de la disposition et à l’avis de l’ARC sur ce point; elle était donc raisonnable. Le fait que la demanderesse pouvait se prévaloir d’autres programmes, tel le décret de remise qui a été invoqué l’affaire Ryan, n’est pas pertinent dans l’analyse des critères d’admissibilité à la PCU. L’argument de la demanderesse selon lequel le décret de remise avait modifié les critères d’admissibilité à la PCU est dénué de fondement. L’application par l’agente des critères d’admissibilité à la PCU établis par la LPCU était raisonnable (voir Flock c Canada (Procureur général), 2022 CF 305 (CanLII) aux para 18 à 29; appel rejeté : Flock c Canada (Procureur général), 2022 CAF 187 (CanLII)).
C. Question C : La question de savoir si le contrôle judiciaire de la décision au sujet de la PCTCC était prématuré
[55] Bien qu’elle n’ait pas soulevé cette question dans son mémoire, la demanderesse a mentionné à l’audience que l’ARC n’avait pas accepté qu’elle avait satisfait au critère applicable en matière de revenus pour avoir droit à la PCU. Elle a ajouté ne pas croire qu’un autre employé de l’ARC serait parvenu à une autre conclusion quant à son admissibilité à recevoir la PCTCC. Elle a également dit qu’à l’époque où elle a appris que sa demande de PCTCC avait fait l’objet d’un refus préliminaire, elle était en train de recueillir des éléments de preuve en vue du deuxième examen de sa demande de PCU et elle [TRADUCTION] « devai[t] faire vite »
.
[56] Dans la décision Lin c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2021 CAF 81 [Lin], citée par le défendeur, la Cour d’appel fédérale a précisé que, selon la règle générale, « aucun contrôle judiciaire ne devrait être demandé avant que tous les recours administratifs ouverts et adéquats aient été exercés »
(Lin, au para 5).
[57] La Cour a également souligné que l’importance des questions soulevées et des questions de compétence et d’équité procédurale n’a pas pour effet d’en faire des éléments qui, à eux seuls, constituent des circonstances exceptionnelles (Lin, au para 6, citant C.B. Powell Limited c Canada (Agence des services frontaliers), 2010 CAF 61 au para 33).
[33] […] Les meilleurs exemples de circonstances exceptionnelles se trouvent dans les très rares décisions récentes dans lesquelles les tribunaux ont accordé un bref de prohibition ou une injonction contre des décideurs administratifs avant le début de la procédure ou au cours de celle‑ci. Les préoccupations soulevées au sujet de l’équité procédurale ou de l’existence d’un parti pris, de l’existence d’une question juridique ou constitutionnelle importante ou du fait que toutes les parties ont accepté un recours anticipé aux tribunaux ne constituent pas des circonstances exceptionnelles permettant aux parties de contourner le processus administratif dès lors que ce processus permet de soulever des questions et prévoit des réparations efficaces.
[58] Je conclus que la demanderesse n’a pas exercé tous les recours administratifs qui s’offraient à elle avant de présenter devant notre Cour une demande de contrôle judiciaire de la décision de lui refuser la PCTCC.
[59] Je souscris à l’avis du défendeur selon lequel le fait de permettre à la demanderesse de tenter d’établir le bien‑fondé de sa demande de contrôle judiciaire de la première décision statuant sur son admissibilité à recevoir la PCTCC irait à l’encontre des principes fondamentaux du droit public, à savoir la bonne administration de la justice et le principe démocratique. Comme la Cour d’appel fédérale l’a conclu dans l’arrêt Dugré c Canada (Procureur général), 2021 CAF 8 [Dugré] au para 35 :
[…] une demande de contrôle judiciaire à l’encontre d’une décision administrative de nature interlocutoire ne peut être introduite que dans des « circonstances exceptionnelles ». De telles circonstances sont très rares, et exigent que les conséquences d’une décision interlocutoire soient à ce point « immédiates et radicales » qu’elles mettent en question la primauté du droit (Wilson c. Énergie atomique du Canada limitée, 2015 CAF 17, [2015] 4 R.C.F. 467 [Wilson], par. 31 à 33, renversé sur un autre point, 2016 CSC 29, [2016] 1 R.C.S. 770; Budlakoti c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CAF 139, 473 N.R. 283, par. 56 à 60 [Budlakoti]).
[60] La demanderesse n’a pas démontré en quoi son omission de demander un nouvel examen de la décision lui refusant la PCTCC constituait une circonstance exceptionnelle. Par conséquent, je conclus que le contrôle judiciaire de la décision préliminaire lui refusant la PCTCC est prématuré et je ne me pencherai pas sur le bien‑fondé de cette décision.
[61] Plus loin, la Cour d’appel fédérale se penche sur les exceptions à cette règle, les considérant comme étant « très rare[s] »
et ajoutant que « le seuil à atteindre […] est élevé »
afin d’éviter de perturber le déroulement ordonné et efficace des instances administratives.
[62] Je ne crois pas que la demanderesse a démontré que des circonstances exceptionnelles justifient que l’on s’écarte du processus administratif ordinaire. Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire que la demanderesse a présentée à l’encontre de la décision lui refusant la PCTCC est rejetée en conformité avec la jurisprudence (Dugré, au para 38, citant Forest Ethics Advocacy Association c Canada (Office national de l’énergie), 2014 CAF 245, [2015] 4 R.C.F. 75 au para 22 et Alexion Pharmaceuticals Inc. c Canada (Procureur général), 2017 CAF 241 aux para 47 à 56).
VIII. Dépens
[63] L’article 400 des Règles donne à la Cour « le pouvoir discrétionnaire de déterminer le montant des dépens, de les répartir et de désigner les personnes qui doivent les payer »
. Après avoir pris en considération les facteurs énumérés au paragraphe 400(3) des Règles ainsi que les calculs des parties, j’estime, compte tenu de toutes les autres circonstances de la présente affaire, que l’adjudication de dépens ne serait pas justifiée en l’instance.
[64] Les deux parties ont fait valoir que des dépens devraient leur être accordés : la demanderesse, pour les heures qu’elle a consacrées au présent litige et pour les dépenses qu’elle a engagées relativement à celui‑ci, et le défendeur, pour la façon dont la Cour devrait déterminer le montant des dépens selon le tarif B en prenant pour point de départ le moment où il a fait une offre raisonnable à la demanderesse pour régler l’affaire.
[65] La demanderesse n’ayant pas eu gain de cause, elle n’a pas droit aux dépens.
[66] Je souligne que la demanderesse, qui agit pour son propre compte, a dû faire des efforts pour s’y retrouver dans les diverses étapes du processus décisionnel de nombreux programmes de l’ARC, notamment la PCU, la PCTCC et le décret de remise. Cependant, cela en soi ne lui donne pas droit aux dépens.
[67] Dans les circonstances, je refuse également d’accorder des dépens au défendeur.
IX. Conclusion
[68] La demande de contrôle judiciaire sera rejetée, sans dépens.
JUGEMENT dans le dossier T‑89‑23
LA COUR REND LE JUGEMENT qui suit :
La demande de contrôle judiciaire est rejetée, sans dépens.
« Negar Azmudeh »
Juge
Traduction certifiée conforme
Bernard Olivier
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DoSSIER :
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T‑89‑23
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INTITULÉ :
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SHARON GANESH c LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
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LIEU DE L’AUDIENCE :
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AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE
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DATE DE L’AUDIENCE :
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LE 11 OctobrE 2023
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JUGEMENT ET MOTIFS :
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LA JUGE AZMUDEH
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DATE DES MOTIFS :
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LE 23 OctobrE 2023
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COMPARUTIONS :
Sharon GANESH
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POUR SON PROPRE COMPTE
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Chen YU ZHANG
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POUR LE DÉFENDEUR
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AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :
Procureur général du Canada
Ministère de la Justice du Canada
Toronto (Ontario)
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POUR LE DÉFENDEUR
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