Date : 20220511
Dossier : IMM-2599-21
Référence : 2022 CF 689
[TRADUCTION FRANÇAISE]
Ottawa (Ontario), le 11 mai 2022
En présence de monsieur le juge Phelan
ENTRE :
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MARYAM ADOS et MASOUD SAYAHI
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demandeurs
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et
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LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
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défendeur
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JUGEMENT ET MOTIFS
I.
Introduction
[1] La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire de la décision par laquelle la Section d’appel des réfugiés [la SAR] a confirmé la décision de la Section de la protection des réfugiés [la SPR], laquelle avait conclu que les demandeurs n’avaient pas la qualité de réfugié au sens de la Convention ni celle de personne à protéger.
[2] La cause des demandeurs repose principalement sur l’argument selon lequel la SAR a tiré des conclusions déraisonnables concernant l’authenticité de leur foi chrétienne et a manqué à l’équité procédurale en soulevant de nouvelles réserves quant à leur crédibilité sans les en aviser et sans leur donner la possibilité d’y répondre.
II.
Le contexte
[3] Les demandeurs, un mari et sa femme, sont des citoyens de l’Iran. Le fondement de leur demande d’asile est leur conversion au christianisme. Ils prétendent qu’après leur conversion, ils ont été victimes d’intimidation de la part de la police iranienne (le Basij). Ils soutiennent notamment qu’ils ont été suivis alors qu’ils se rendaient à une séance d’étude biblique et que la police s’est présentée à leur travail et aux domiciles de leurs parents. Ils allèguent que leurs pères et des membres de leur groupe d’étude biblique ont été arrêtés et détenus. Ils ajoutent qu’après qu’ils eurent fui l’Iran, les autorités iraniennes se sont de nouveau présentées aux domiciles de leurs parents.
[4] La SPR a tiré une conclusion défavorable quant à la crédibilité en raison de l’incapacité des demandeurs à expliquer certains aspects de leur conversion et de l’incapacité de la demanderesse à démontrer une compréhension suffisante de certains aspects d’un épisode biblique important. Le demandeur a été incapable de démontrer qu’il comprenait ce que signifie être un croyant chrétien.
[5] La SPR a conclu que le témoignage des deux époux ne suffisait pas à établir leur identité en tant que véritables chrétiens convertis.
[6] La SPR a aussi conclu que la preuve des demandeurs concernant leur fréquentation de l’église au Canada ne concordait pas avec le témoignage fait par un témoin de leur église.
[7] La SPR a également rejeté la demande d’asile sur place des demandeurs, une fois de plus pour cause d’insuffisance de la preuve.
[8] En appel, la SAR a conclu que, si elle était en désaccord avec certaines parties de l’analyse de la SPR, elle acceptait les conclusions tirées par celle-ci quant à la crédibilité.
[9] La SAR a jugé que les demandeurs n’avaient pas établi qu’ils étaient des chrétiens pratiquants, qu’ils avaient été poursuivis par les autorités iraniennes ou qu’ils étaient des convertis authentiques au Canada.
[10] Dans le cadre du présent contrôle judiciaire, les demandeurs soulèvent des questions concernant a) le caractère raisonnable de la décision de la SAR; b) le manquement à l’équité procédurale commis par la SAR lorsqu’elle a soulevé une nouvelle question quant à la crédibilité (la délivrance d’un passeport pendant qu’ils vivaient dans la clandestinité); c) l’incompétence de leur avocat précédent.
III.
Analyse
A.
La norme de contrôle applicable
[11] Il ne fait aucun doute que la décision de la SAR doit être examinée selon la norme de la décision raisonnable, conformément à l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65, sauf en ce qui concerne la question d’équité procédurale.
[12] Au sujet de la question d’équité procédurale, je souscris à l’analyse faite par le juge de Montigny au paragraphe 35 de l’arrêt Association canadienne des avocats en droit des réfugiés c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2020 CAF 196, analyse selon laquelle ce qui importe, en fin de compte, est de savoir si l’équité procédurale a été respectée ou non.
B.
Le caractère raisonnable
[13] La conclusion défavorable tirée par la SAR quant à la crédibilité du témoignage du demandeur au sujet de sa foi chrétienne reposait sur l’expertise de la SPR et sur la possibilité qu’avait eue celle-ci d’évaluer la crédibilité. La SAR a raisonnablement conclu que, si la SPR avait commis des erreurs quant à certains aspects de son analyse de la crédibilité, elle n’avait pas commis d’erreur dans sa conclusion quant à la crédibilité générale et il n’était donc pas nécessaire de lui renvoyer l’affaire.
[14] Bien qu’un autre décideur eût pu parvenir à une conclusion différente en se demandant si les questions posées prêtaient à confusion ou si les réponses étaient raisonnables dans les circonstances, la conclusion défavorable reposait sur un fondement valable. Les questions n’avaient rien de déraisonnable ou d’injuste. À cet égard, je souscris à l’analyse du juge Fothergill concernant l’évaluation de la crédibilité fondée sur les connaissances religieuses, qu’il a exposée aux paragraphes 18 à 21 de la décision Kao c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 1204.
[15] On peut raisonnablement dire que les réponses du demandeur étaient vagues et axées sur des principes généraux indéterminés.
C.
L’équité procédurale
[16] Les demandeurs allèguent qu’il était inéquitable, de la part de la SAR, de s’appuyer sur l’avis selon lequel il était invraisemblable qu’un passeport iranien ait été délivré à la demanderesse pendant qu’ils vivaient prétendument dans la clandestinité. Cette question n’avait pas été examinée par la SPR.
[17] La question cruciale consiste à savoir si ce qui s’est produit était inéquitable compte tenu des questions en litige. Si la SAR s’est contentée de confirmer la conclusion de la SPR en se fondant sur des renseignements figurant au dossier dont les demandeurs avaient connaissance, mais que la SPR n’avait pas expressément traités, il n’y a pas eu manquement à l’équité procédurale.
[18] En l’espèce, la question du passeport ne faisait qu’ajouter à la conclusion déjà énoncée par la SAR quant à la crédibilité. Elle n’apportait rien d’important à l’analyse et à la conclusion de la SAR. Dans ces circonstances, il n’était pas inéquitable d’y renvoyer.
D.
L’incompétence
[19] Les demandeurs prétendent que leur appel a souffert du défaut de leur ancien avocat de présenter une nouvelle lettre d’appui de la part de leur église. Ils ne sont toutefois pas en mesure d’établir que le manque de compétence allégué justifie l’annulation de la décision de la SAR.
[20] Premièrement, la lettre est, au mieux, équivoque au sujet des principales questions en litige dans le présent contrôle judiciaire. Deuxièmement, les demandeurs n’ont pas suivi le protocole de la Cour en ce qui concerne les allégations formulées contre les avocats.
[21] Le défaut de suivre ce protocole suffit pour rejeter l’allégation selon laquelle la décision de la SAR devrait être annulée (voir Salaudeen c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 39 au para 21).
[22] Bien que la lettre de l’église puisse expliquer les raisons pour lesquelles les demandeurs ne se sont pas fait baptiser pendant la pandémie de COVID-19, elle n’apporte aucune précision à l’égard des questions importantes concernant leur participation aux activités de l’église ou leur défaut de se faire baptiser entre le moment où ils sont arrivés au Canada, en août 2017, et le moment où la pandémie a commencé, en mars 2020.
IV.
Conclusion
[23] Pour les motifs qui précèdent, la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée. Il n’y a aucune question à certifier.
JUGEMENT dans le dossier IMM-2599-21
LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Il n’y a aucune question à certifier.
« Michael L. Phelan »
Juge
Traduction certifiée conforme
Geneviève Bernier
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER :
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IMM-2599-21
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INTITULÉ :
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MARYAM ADOS et MASOUD SAYAHI c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
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LIEU DE L’AUDIENCE :
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AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE
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DATE DE L’AUDIENCE :
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LE 10 FÉVRIER 2022
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JUGEMENT ET MOTIFS :
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LE JUGE PHELAN
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DATE DES MOTIFS :
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le 11 mai 2022
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COMPARUTIONS :
Dov Maierovitz
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POUR LES DEMANDEURS
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Erin Estok
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POUR LE DÉFENDEUR
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Dov Maierovitz
Avocat
Toronto (Ontario)
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POUR LES DEMANDEURS
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Procureur général du Canada
Toronto (Ontario)
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POUR LE DÉFENDEUR
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