Date : 20220414
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Dossier : T-1442-21
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Référence : 2022 CF 545
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[TRADUCTION FRANÇAISE] |
En présence du juge responsable de la gestion de l’instance, Trent Horne
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ACTION SIMPLIFIÉE
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ENTRE :
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RORY A. VAN SLUYTMAN
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demandeur
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et
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SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA,
LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES, LA COMMISSION DES PLAINTES RELATIVES AUX SERVICES DE TÉLÉCOM-TÉLÉVISION,
SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DE L’ONTARIO,
LE BUREAU DU DIRECTEUR INDÉPENDANT DE L’EXAMEN DE LA POLICE
BELL CANADA, TEKSAVVY SOLUTIONS INC., OVERGROWN HYDROPONICS,
GREEN PLANET NUTRIENTS ET DUTCH NUTRIENT
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défendeurs
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JUGEMENT ET MOTIFS
I.
Aperçu
[1] M. Van Sluytman agit pour son propre compte dans la présente instance. Sa déclaration nomme dix défendeurs. Plusieurs défendeurs ont déposé des requêtes en radiation, qui ont été instruites ensemble, sur dossier.
[2] Pour les motifs que je vais exposer, les requêtes sont accueillies. Dans la mesure où le demandeur a des doléances valables contre les défendeurs, une action devant la Cour fédérale n’est pas la tribune pour les faire valoir.
II.
La déclaration
[3] La déclaration compte 268 pages. Elle est répétitive, alambiquée et lourde.
[4] Comme thème principal, le demandeur allègue qu’il a été gêné par l’incompétence des défendeurs, ce qui, selon lui, fut en partie la cause de son problème de capacité temporaire. La déclaration contient ce que le demandeur décrit comme [traduction] « sept plaintes distinctes »
, et qu’il désigne comme étant des [traduction] « événements »
. Le demandeur allègue que tous les événements mettent en cause la Couronne fédérale, et c’est pourquoi l’action a été intentée devant la Cour fédérale.
[5] Dans l’ensemble, les événements sont les suivants :
Des problèmes de livraison avec la Société canadienne des postes et de nombreuses plaintes au sujet de la livraison du courrier au domicile du demandeur à Gravenhurst, en Ontario.
Des problèmes avec l’Agence du revenu du Canada à propos du remplacement des chèques non encaissés.
Des problèmes liés aux conseils et aux matériaux reçus des magasins de culture hydroponique.
Des difficultés à obtenir un rapport de profil de société ou un document semblable auprès du ministère des Services gouvernementaux et des Services aux consommateurs de l’Ontario ainsi que de Corporations Canada, document qui était nécessaire pour entamer une procédure devant les tribunaux de l’Ontario.
Des problèmes liés à la connexion Internet du demandeur, notamment des plaintes et de nombreux appels de service.
Des problèmes liés aux procédures judiciaires intentées devant les tribunaux de l’Ontario relativement à une agression qui aurait été commise par un agent de la paix en 2019.
Des problèmes liés aux services fournis par la Cour fédérale, plus précisément par le greffe, qui ont mené au dépôt de la présente procédure, y compris les lacunes alléguées dans les directives sur la façon de procéder pour obtenir une dispense des droits.
III.
Le droit applicable aux requêtes en radiation
[6] Les requêtes en radiation sont régies par l’article 221 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 (les Règles) :
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[7] Les principes juridiques qui s’appliquent aux requêtes en radiation sont bien connus. Pour rejeter une action, il faut qu’il soit évident et manifeste, dans l’hypothèse où les faits allégués seraient avérés, que la déclaration ne révèle aucune cause d’action raisonnable. Il faut qu’il soit évident et manifeste qu’en raison d’un vice fondamental, l’action n’a aucune chance d’être accueillie (R c Imperial Tobacco Canada Ltée, 2011 CSC 42, [2011] 3 RCS 45, au para 17).
[8] Il incombe au demandeur de plaider les faits qui constituent le fondement de sa demande ainsi que la réparation demandée. Ces faits sont le fondement en fonction duquel la Cour va évaluer si une demande peut être accueillie. Le demandeur est tenu de présenter les éléments constitutifs de façon suffisamment détaillée de chacun des moyens de droit ou de fait soulevé (Pelletier c Canada, 2016 CF 1356 aux para 8 et 10).
[9] Pour qu’une déclaration révèle une cause d’action valable, elle doit : a) alléguer des faits susceptibles de donner lieu à une cause d’action; b) indiquer la nature de l’action qui doit se fonder sur ces faits; c) préciser le redressement sollicité, qui doit pouvoir découler de l’action, et que la Cour doit avoir la compétence d’accorder (Oleynik c Canada (Procureur général), 2014 CF 896 au para 5).
[10] Pour démontrer qu’il a une cause d’action valable, le demandeur doit soulever dans sa déclaration les faits substantiels qui satisfont à tous les éléments constitutifs des causes d’actions alléguées. Le demandeur doit expliquer au défendeur « par qui, quand, où, comment et de quelle façon »
sa responsabilité a été engagée (Al Omani c Canada, 2017 CF 786 au para 14 (Al Omani)).
[11] Dans le cas d’une requête en radiation, les actes de procédure doivent être interprétés de manière aussi libérale que possible, et la Cour doit permettre l’instruction de toute demande inédite, mais soutenable (Société des loteries de l’Atlantique c Babstock, 2020 CSC 19 au para 19).
IV.
Les principes applicables à toutes les requêtes
[12] Avant d’examiner les faits qui se rapportent à chaque défendeur, la Cour va traiter certaines questions communes à toutes les requêtes.
A.
La preuve par affidavit
[13] Pour une requête en radiation fondée sur l’alinéa 221(1)a), aucune preuve n’est admissible (paragraphe 221(2) des Règles). Je n’ai pas pris en compte des affidavits déposés par Sa Majesté la Reine du chef de l’Ontario et par le Bureau du directeur indépendant de l’examen de la police (le BDIEP), et par le demandeur dans son dossier de la réponse, dans le cadre de mon examen de la question de savoir si la demande devait être radiée. Toutefois, j’ai pris en compte ces éléments de preuve pour décider si l’autorisation de la modifier devait être accordée.
B.
La compétence
[14] L’affirmation du demandeur (déclaration, paragraphe 24) selon laquelle il a soumis sa cause à la Cour fédérale parce que les événements mettent en cause la Couronne fédérale illustre l’incompréhension fondamentale du demandeur à l’égard de la compétence de la Cour fédérale, du genre de causes qu’elle peut entendre, du genre d’ordonnances qu’elle peut rendre, et de sa place dans le système juridique canadien.
[15] La Cour fédérale n’est pas une Cour de dernier ressort pour les parties insatisfaites de l’issue des instances devant les cours de justice provinciales. Elle n’a pas de vastes pouvoirs de surveillance sur les entreprises, sur les gouvernements et organismes provinciaux ou sur les organismes provinciaux d’application de la loi. La Cour fédérale est plutôt un tribunal créé par la loi dont la compétence est limitée et précise.
[16] Les conditions essentielles pour pouvoir conclure à la compétence de la Cour fédérale sont les suivantes : 1) une attribution de compétence par une loi du Parlement fédéral; 2) l’existence d’un ensemble de règles fédérales essentielles à la solution du litige et qui constitue le fondement de l’attribution légale de compétence; 3) la loi invoquée dans l’affaire doit être une loi du Canada au sens où cette expression est employée à l’article 101 de la Loi constitutionnelle de 1867 (ITO-International Terminal Operators Ltd c Miida Electronics Inc., [1986] ACS no 38, [1986] 1 RCS 752) (ITO).
[17] Comme la Cour suprême l’a énoncé dans l’arrêt Windsor (City) c Canadian Transit Co., 2016 CSC 54 aux para 25 et 26, avant d’examiner si le critère à trois volets de l’arrêt ITC est respecté, il faut déterminer la nature ou le caractère essentiel de la demande selon une « appréciation réaliste du résultat concret visé par le demandeur »
. « La compétence ne s’apprécie pas au cas par cas ou au regard d’une question litigieuse à la fois »
. La déclaration ne doit pas être prise au pied de la lettre. Le tribunal doit plutôt « aller au-delà des termes employés, des faits allégués et de la réparation demandée, et il doit s’assurer que la déclaration ne constitue pas une tentative déguisée visant à obtenir devant la Cour fédérale un résultat qui ne peut par ailleurs pas être obtenu de cette cour »
.
C.
L’article 174 des Règles
[18] L’article 174 des Règles exige que les actes de procédures contiennent un exposé concis des faits substantiels. Pour être conforme, un acte de procédure doit satisfaire aux quatre exigences fondamentales suivantes :
a) Chaque acte de procédure doit exposer des faits et non pas simplement des conclusions de droit;
b) Il doit comprendre des faits substantiels qui satisfont à chaque élément de la cause d’action avec suffisamment de détails;
c) Il doit exposer des faits, non les éléments de preuve qui serviront à étayer ces faits;
d) Il doit énoncer les faits avec concision.
(Carten c Canada, 2009 CF 1233 au para 36 (Carten))
[19] Les actes de procédure jouent un rôle important pour aviser les intéressés et définir les questions à trancher. La Cour et les parties adverses n’ont pas à émettre des hypothèses sur la façon dont les faits pourraient être organisés différemment pour appuyer diverses causes d’action (Mancuso c Canada (Santé Nationale et Bien-être Social), 2015 CAF 227 au para 16 (Mancuso).
[20] Il est difficile de tracer une ligne nette qui indique le degré de précision requis pour un acte de procédure en particulier. Il revient au juge de première instance, lequel dispose d’une vue d’ensemble des actes de procédure, de voir à ce que les actes de procédure cernent les questions en litige avec une précision suffisante pour assurer la saine gestion et l’équité de l’instruction et des phases préparatoires à l’instruction. Le demandeur doit énoncer, avec concision, mais suffisamment de précision, les éléments constitutifs de chacun des moyens de droit ou de fait soulevé (Mancuso aux para 18 et 19).
[21] Le demandeur doit connaître cette exigence. Dans la décision Van Sluytman v Orillia Soldiers’ Memorial Hospital, qui se rapporte à une action intentée par le demandeur devant la Cour supérieure de justice de l’Ontario, cette dernière a conclu que [traduction] « la déclaration [était] un document narratif décousu détaillant les nombreuses injustices que le demandeur aurait subies »
(2017 ONSC 692 au para 4). La Cour a conclu que la déclaration n’était pas un exposé concis des faits substantiels pour l’application d’une règle analogue à l’article 174 des Règles de procédure civile de l’Ontario et a rejeté la demande. La déclaration en l’espèce présente également les mêmes vices fondamentaux.
[22] Dans la décision Carten, le protonotaire Lafrenière, maintenant juge à la Cour, a conclu :
[37] La déclaration des demandeurs contrevient en tous points aux règles à suivre pour la rédaction des actes de procédures. Au lieu d’énoncer les faits pertinents permettant d’établir l’existence d’une cause d’action valable, la déclaration renferme de simples affirmations, des déclarations non étayées, une argumentation et des conclusions. Les allégations contenues dans la déclaration ont une portée si vaste et si générale qu’elles sont foncièrement incompréhensibles et qu’il est impossible d’y répondre sérieusement. Il est pareillement impossible de traiter systématiquement de toutes les lacunes que comporte la déclaration dans les présents motifs. C’est pourquoi j’axerai mon analyse sur les principales allégations des demandeurs.
[23] La même analyse et la même conclusion s’appliquent en l’espèce. La déclaration, qui compte 268 pages, est tout sauf un exposé concis des faits. Les paragraphes 28 et 29 de la déclaration, décrits respectivement comme un aperçu des événements et des faits substantiels qui s’y rapportent, comptent 175 pages. Plus important encore, la déclaration ne révèle pas en bonne et due forme une cause d’action. Je ne doute pas que les relations du demandeur avec les défendeurs le frustrent et le mettent en colère. Toutefois, la frustration et la colère seules, même si elles sont justifiées, ne donnent pas ouverture à une réclamation valable.
D.
La Charte
[24] Le demandeur allègue dans sa déclaration que des droits qui lui sont garantis par la Charte canadienne des droits et libertés, partie 1 de la Loi constitutionnelle de 1982, constituant l’annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada, (R-U), 1982, c 11 (la Charte
), ont été violés. Il soutient que l’article 15 de la Charte (droits à l’égalité) est en jeu, à la suite de ses démarches auprès du greffe (déclaration, page 217).
[25] La déclaration ne comprend pas les précisions nécessaires en ce qui concerne les violations de la Charte. Les actions fondées sur la Charte ne déclenchent pas de règles spéciales à l’égard des requêtes en radiation; l’exigence de plaider des faits substantiels s’applique toujours. La Cour suprême du Canada a défini par sa jurisprudence l’essence de chaque droit garanti par la Charte, et un demandeur est tenu d’alléguer des faits substantiels suffisants pour répondre au critère applicable à la disposition en cause. Cette démarche n’est pas une simple formalité; « au contraire, elle est essentielle à un bon examen des questions relatives à la Charte »
(Mancuso au para 21).
[26] Bien que la Cour fédérale puisse être un « tribunal compétent »
aux termes du paragraphe 24(1) de la Charte dans certaines circonstances, cela ne signifie pas que la Cour fédérale a compétence sur toutes les réclamations fondées sur la Charte. Le simple fait de décrire un événement ou une réclamation comme une violation d’un droit garanti par la Charte ne confère pas à la Cour fédérale la compétence qu’elle n’a pas par ailleurs.
[27] Le paragraphe 24(1) de la Charte dispose que « [t]oute personne, victime de violation ou de négation des droits ou libertés qui lui sont garantis par la présente charte, peut s’adresser à un tribunal compétent pour obtenir la réparation que le tribunal estime convenable et juste eu égard aux circonstances »
. Un « tribunal compétent »
est un tribunal qui a (1) compétence sur l’intéressé, (2) compétence sur l’objet du litige, et (3) compétence pour accorder la réparation demandée. Ce n’est que dans les cas où le tribunal judiciaire ou administratif concerné possède les trois attributs qu’il est considéré comme un « tribunal compétent »
pour accorder la réparation fondée sur la Charte (R c 974649 Ontario Inc, [2001] 3 RCS 575, au para 15). Comme il est énoncé dans les présents motifs, la Cour fédérale n’a pas compétence sur l’objet du litige de l’action du demandeur. Par conséquent, la Cour fédérale n’est pas un « tribunal compétent »
pour statuer sur ses réclamations fondées sur la Charte.
E.
La négligence
[28] À plusieurs reprises, le demandeur allègue que les défendeurs ont été négligents ou ont manqué à leur obligation de diligence à son égard.
[29] Les réclamations fondées uniquement sur les principes de négligence de la common law, indépendantes d’une cause d’action sur laquelle la Cour a compétence, ne relèvent pas de la compétence de la Cour fédérale (Kusugak c Northern Transportation Co. Ltd, 2004 CF 1696 au para 36 (Kusugak).
[30] Il ne suffit pas d’utiliser des formulations laconiques et catégoriques telles que [traduction] « délibérément ou négligemment »
ou « indifférence complète »
. Faire des déclarations laconiques ou catégoriques qui ne reposent sur aucun élément de preuve constitue un abus de procédure : (Merchant Law Group c Canada Agence du revenu, 2010 CAF 184 au para 34).
V.
Les requêtes en radiation
A.
TekSavvy Solutions Inc.
[31] Une partie importante de la déclaration porte sur les problèmes du demandeur avec sa connexion Internet et ses fournisseurs de services (l’événement 5).
[32] TekSavvy Solutions Inc. (TekSavvy) est un fournisseur de services Internet indépendant et concurrentiel.
[33] Voici un résumé des allégations à l’encontre de TekSavvy :
TekSavvy a violé [traduction]
« l’attente non écrite de bonnes pratiques commerciales avec bonnes mœurs et bonne conscience »
(déclaration, paragraphe 29(iii)l));les allégations générales de [traduction] l’
« incompétence »
de TekSavvy et les plaintes relatives à la qualité de son service (déclaration, paragraphes 28(v), 29(iii)b), 116 et 121);TekSavvy [traduction]
« a enfreint [sa] politique énonçant [son] obligation de diligence à l’égard des plaintes formulées par le demandeur au sujet des problèmes de service »
(déclaration, paragraphe 123);TekSavvy a fait preuve de négligence [traduction]
« en attendant que le demandeur se fâche avant de régler, de son plein gré et en temps opportun, les plaintes formulées par le demandeur au sujet des problèmes d’Internet […] […] »
(déclaration, paragraphe 124).
[34] Le demandeur réclame une réparation pécuniaire à TekSavvy pour [traduction] « la détresse émotionnelle et les inconvénients inutiles »
(déclaration, paragraphe 129) découlant, selon lui, des faits allégués ci-dessus.
[35] Je suis d’accord avec les observations de TekSavvy selon lesquelles ces allégations ne révèlent aucune cause d’action valable qui relève de la compétence de la Cour fédérale.
[36] Aucune des allégations ne révèle une cause d’action apparente ou des faits qui, s’ils étaient vrais, pourraient appuyer une cause d’action. Le demandeur n’a pas mis en évidence la violation d’une loi; en fait, il concède dans la déclaration qu’une telle loi n’existe pas, et y énonce ce qui suit : [traduction] « il n’y a pas de loi portant sur les questions que le demandeur a soulevées dans la présente action que la Cour doit examiner »
(déclaration, paragraphe 29(iii)c), page 106).
[37] Le demandeur utilise l’expression [traduction] « obligation de diligence »
dans plusieurs allégations, laissant entendre qu’il pourrait invoquer le délit fondé sur la négligence. Comme je l’ai mentionné ci-dessus, en tant que Cour créée par la loi, la Cour fédérale n’a pas de compétence intrinsèque. Toute réclamation en négligence serait fondée sur une cause d’action en common law et ne relèverait donc pas de la compétence de la Cour fédérale (Kusugak).
[38] Bien que les télécommunications relèvent de la compétence fédérale, la Cour fédérale n’a pas compétence, en première instance, à l’égard des réclamations fondées sur la common law du simple fait qu’elles portent sur les télécommunications. Autrement dit, ce n’est pas parce que les télécommunications sont sous réglementation fédérale que la Cour fédérale a compétence sur toutes les plaintes qui touchent les télécommunications de quelque manière que ce soit.
[39] Même si la Cour fédérale avait compétence à l’égard de la réclamation du demandeur, les faits révélés dans la déclaration ne donnent lieu à aucune cause d’action fondée sur la négligence. Pour appuyer une cause d’action fondée sur la négligence, le demandeur doit démontrer l’existence d’une obligation de diligence (Childs c Desormeaux, 2006 CSC 18 au para 13). La prestation de services internet résidentiels par TekSavvy au demandeur ne peut être régie que par un contrat. Le demandeur n’a plaidé aucun fait qui démontre que TekSavvy avait une obligation de diligence au-delà de ses obligations contractuelles.
[40] La Cour fédérale n’a pas compétence pour statuer sur une affaire portant essentiellement sur une violation de contrat entre des parties privées (McCain Foods Limited c J.R. Simplot Company, 2021 CAF 4 au para 63; voir aussi Netbored Inc. c Avery Holdings Inc, 2005 CF 490 au para 24).
[41] J’ai examiné la réponse de 30 pages déposée par le demandeur en réponse à la défense de TekSavvy. Comme la déclaration, elle n’est pas conforme à l’article 174 des Règles et ne contient pas un énoncé concis des faits substantiels. Dans sa défense, TekSavvy (entre autres) nie que la Cour fédérale a compétence sur la déclaration. Le demandeur ne traite pas de cette question de manière substantielle dans sa réponse, il énonce plutôt qu’[traduction] « il n’y a rien sur le site de la Cour fédérale qui explique les limites de la compétence de la Cour fédérale à l’égard d’un membre du public voulant introduire une action visant à demander un examen d’une demande d’indemnisation pécuniaire dans le cadre de plaintes »
(page 23, alinéa 4v)g)). Rien dans la réponse ne permet de conclure que la Cour fédérale a compétence sur les plaintes du demandeur contre TekSavvy.
[42] Je conclus donc qu’il est évident et manifeste que la réclamation du demandeur à l’égard de TekSavvy ne relève pas de la compétence de la Cour fédérale et qu’elle doit être radiée.
B.
Bell Canada
[43] Bell Canada est une société qui offre des services de télécommunications à des clients partout au Canada.
[44] Bell Canada est visée dans l’événement 5 seulement (plaintes du demandeur concernant ses problèmes de connexion internet). Comme il n’était pas satisfait des réponses de Bell et de Teksavvy, il a porté plainte à la Commission des plaintes relatives aux services de télécom-télévision (la CPRST). Dans la déclaration, le demandeur réclame des dommages-intérêts de 2 500 $ pour troubles émotionnels et inconvénients inutiles, ainsi qu’un jugement déclarant notamment que Bell Canada a fait preuve de négligence.
[45] Essentiellement, la réclamation du demandeur contre Bell est la même que celle contre TekSavvy et présente les mêmes vices fondamentaux. Que la réclamation du demandeur contre Bell consiste essentiellement en une plainte liée au service à la clientèle ou une violation de contrat, le résultat est le même que pour celle contre TekSavvy : il est évident et manifeste que la réclamation du demandeur contre Bell Canada ne relève pas de la compétence de la Cour fédérale et qu’elle doit être radiée.
C.
La CPRST
[46] La CPRST est un organisme indépendant qui a pour mandat de régler les plaintes des particuliers et des petites entreprises de détail.
[47] Les allégations formulées contre la CPRST ne visent que l’événement 5, qui concerne les problèmes de connexion internet du demandeur. Comme ce dernier n’était pas satisfait des réponses de Bell et de TekSavvy, il a porté plainte à la CPRST. Le demandeur n’était pas satisfait du règlement de sa plainte par la CPRST, principalement parce qu’il estime que son mandat est trop restreint. Par conséquent, il a inclus la CPRST dans la déclaration.
[48] Plus précisément, selon les allégations formulées contre la CPRST, il s’agit [traduction] « d’un service incompétent, que SMR du chef du Canada autorise à se développer, en ce qui concerne le besoin du demandeur qu’une autorité règle les problèmes liés à Bell et à Tek »
(déclaration, paragraphe 120); de plus, elle a manqué à son obligation de diligence en ne réglant pas les problèmes relatifs à la mauvaise gestion dont TekSavvy a fait preuve à l’égard des plaintes du demandeur (déclaration, paragraphe 126). Le demandeur réclame des dommages-intérêts d’un montant d’au moins 1 000 $ pour l’incompétence alléguée de la CPRST dans le traitement des plaintes du 10 septembre 2020 relatives à ses problèmes de connexion Internet (déclaration, paragraphe 131).
[49] Dans la mesure où la réclamation du demandeur contre la CPRST contient des allégations de négligence, elle présente les mêmes vices fondamentaux que les réclamations contre TekSavvy et Bell.
[50] Il se peut que la CPRST soit un « office fédéral »
, aux termes au paragraphe 18.1(2) de la Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, c F-7, et qu’une décision de la CPRST puisse faire l’objet d’un contrôle judiciaire. Je ne tire aucune conclusion sur ce point, car il n’est pas nécessaire de répondre à cette question pour les besoins de la présente requête. Je ne tire pas non plus de conclusion sur la question de savoir s’il est trop tard pour que le demandeur présente une nouvelle contestation d’une décision antérieure de la CPRST.
[51] Même si le demandeur peut contester une décision de la CPRST par voie de contrôle judiciaire, une telle procédure doit être intentée par une demande, et non par une action (alinéa 300a) des Règles). Quoi qu’il en soit, même si une décision de la CPRST peut faire l’objet d’un contrôle judiciaire, des dommages-intérêts ne peuvent être accordés dans une demande de contrôle judiciaire (Philipps c Canada (Bibliothécaire et Archiviste), 2006 CF 1378 au para 71).
[52] Je souscris aux observations de la CPRST selon lesquelles l’instance introduite contre elle est une demande de contrôle judiciaire qui n’a que superficiellement l’apparence d’un recours délictuel de droit privé à son encontre (Leone c Canada, 2021 CF 409 au para 22).
[53] Il est donc évident et manifeste que la réclamation contre la CPRST doit être radiée.
D.
La Société canadienne des postes
[54] Je suis d’accord avec les observations de la Société canadienne des postes (la SCP) selon lesquelles la nature de la réclamation du demandeur contre elle n’est pas claire, mais semble se rapporter sur les éléments suivants :
a) les boîtes aux lettres de l’immeuble résidentiel du demandeur ne convenaient pas à la livraison du courrier, la SCP aurait dû indiquer aux propriétaires de son immeuble d’habitation comment réparer leurs boîtes aux lettres; en outre, tous les problèmes que le demandeur aurait eus avec la SCP ont été réglés en juillet 2020 (déclaration, paragraphes 10 (page 8), 36 à 38 (pages 198 à 201) et 70 à 77 (pages 219 à 223));
b) tous les problèmes que le demandeur aurait eus avec la SCP ont été réglés; les boîtes aux lettres de l’immeuble résidentiel du demandeur ont été réparées; et il y a eu [traduction]
« de la corruption et de la confusion »
chez les employés de la SCP (déclaration, paragraphe 28 (pages 18 et 19));c) la SCP n’a pas fourni au demandeur les coordonnées de l’expéditeur d’une trousse que le demandeur devait recevoir; il ne savait pas quels articles manquaient à ses commandes d’achats en ligne (déclaration, paragraphes 70 à 77 (pages 219 à 223)).
[55] La réclamation en dommages-intérêts du demandeur contre la SCP ne semble pas porter sur un incident en particulier, mais semble plutôt fondée sur la frustration générale du demandeur et l’incompétence alléguée.
[56] L’article 17 de la Loi sur les Cours fédérales confère à la Cour fédérale la compétence concurrente lorsqu’une réparation est demandée contre la Couronne. Cependant, ce n’est pas la seule condition. La compétence de la Cour ne s’exerce qu’à l’égard des actions présentées contre la Couronne elle-même, et non à l’égard d’une société constituée en vertu d’une loi qui agit à titre de mandataire de la Couronne (Committee for Monetary and Economic Reform c Canada, 2014 CF 380 aux para 87 et 88; confirmée par 2015 CAF 20).
[57] Plus précisément, en ce qui concerne la SCP, notre Cour a jugé que, même si la SCP est une société d’État, elle n’est pas la Couronne en soi, mais plutôt un mandataire de la Couronne. Les paragraphes 17(1) et 17(2) ainsi que l’article 48 de la Loi sur les Cours fédérales ne peuvent être considérés comme des dispositions constituant une attribution légale de compétence à l’égard de la SCP (Lavigne c Société canadienne des postes, 2006 CF 1345 aux para 44 à 49 (Lavigne)).
[58] Dans la décision Lavigne, la Cour a annulé l’acte de procédure du demandeur, car elle n’avait pas compétence. Il n’y a pas d’autre choix que d’en arriver à la même conclusion en l’espèce. Il est évident et manifeste que la demande du demandeur à l’égard de la SCP ne relève pas de la compétence de la Cour fédérale et qu’elle doit être radiée.
E.
Sa Majesté la Reine du chef de l’Ontario et le Bureau du directeur indépendant de l’examen de la police
[59] En ce qui concerne SMR du chef de l’Ontario et le BDIEP, les allégations formulées par le demandeur dans sa déclaration se rapportent à une interaction qu’il avait eue avec un agent de la Police provinciale de l’Ontario (PPO) le 21 novembre 2019, et à sa plainte relative au BDIEP.
[60] Je conviens avec ces défendeurs que le Parlement fédéral n’accorde pas de compétence par une loi à SMR du chef de l’Ontario et au BDIEP, et qu’il n’existe pas non plus d’ensemble de règles de droit fédérales constituant le fondement de l’attribution légale de compétence. Les lois invoquées par le demandeur contre SMR du chef de l’Ontario et le BDIEP sont celles de la province de l’Ontario.
[61] Quant à l’inconduite alléguée d’un agent de la PPO, voir Tonner c Lowry, 2016 CF 230 au para 27, Legere c Canada, 2003 CF 869 au para 11, et Templanza c Canada, 2021 CF 689, au para 20, au sujet de l’absence de compétence de la Cour à l’égard des policiers provinciaux et municipaux.
[62] SMR du chef de l’Ontario et le BDIEP affirment également que la déclaration est nulle parce que le demandeur n’a pas fourni un avis de déclaration, comme il doit le faire conformément à l’article 18 de la Loi de 2019 sur la responsabilité civile de la Couronne et les instances l’intéressant, LO 2019, c 7. Pour les besoins de la présente requête, la question de savoir si le demandeur a donné un avis en bonne et due forme est sans importance; la Cour fédérale n’a pas compétence pour se prononcer sur la déclaration en ce qui concerne SMR du chef de l’Ontario le BDIEP. Même si l’avis avait été donné en bonne et due forme, la déclaration serait tout de même radiée en raison du défaut de compétence.
F.
Sa Majesté la Reine du chef du Canada
[63] Je suis d’accord avec les observations de Sa Majesté la Reine du chef du Canada (SMR du chef du Canada) en ce qui concerne chaque événement décrit dans la déclaration :
a) Événement no 1. La déclaration contient une allégation selon laquelle le courrier n’a pas été livré au demandeur et la SCP a pris trop de temps pour régler le problème. Le demandeur réclame des dommages-intérêts contre la Couronne fédérale pour négligence, parce qu’elle a permis l’incompétence au sein de la SCP. Le demandeur omet de fournir des précisions pour démontrer comment une réclamation en négligence pourrait être formulée contre la Couronne fédérale pour l’incompétence alléguée d’employés de la SCP non désignés. La déclaration, à cet égard, ne contient qu’une simple affirmation de négligence de la part de la Couronne fédérale sans élément de preuve l’étayant ni de faits substantiels, et ne traite pas des éléments requis relatifs à la cause d’action. La déclaration contre la Couronne fédérale à l’égard de l’événement no 1 ne révèle aucune cause d’action valable et constitue un abus de procédure.
b) Événement no 2. La déclaration contient une allégation selon laquelle le demandeur avait accumulé des chèques inutilisés de l’Agence du revenu du Canada (l’ARC) remontant à 2006 et que, lorsqu’il en a fait la demande, l’ARC n’a pu remplacer qu’une partie des chèques inutilisés. Il est allégué dans la déclaration que l’ARC conserve des dossiers insuffisants et qu’un employé de l’ARC a procédé à une opération de
« dissimulation »
. Le demandeur réclame des dommages-intérêts à SMR la reine du Chef du Canada pour négligence, parce qu’elle n’a pas nommé un meilleur ministre et un meilleur député, qu’elle fait preuve d’incompétence dans sa tenue de dossiers et qu’elle ne s’est pas occupée assez sérieusement de la question des chèques inutilisés du demandeur. En ce qui concerne le député, le recours est aux urnes, et non devant les tribunaux. La déclaration ne révèle aucune cause d’action valable à cet égard. Les réclamations du demandeur à l’égard de ses chèques inutilisés s’étendent sur une période de 16 ans. Dans les allégations du demandeur, il est implicite que l’ARC avait dûment émis les chèques du demandeur au cours de la période de 16 ans, mais qu’il a choisi de ne pas les encaisser. Le demandeur admet en outre que l’ARC a néanmoins été en mesure de réémettre bon nombre des chèques non encaissés. En ce qui concerne les chèques non définis que l’ARC aurait été incapable de remplacer, le demandeur n’a pas fourni les faits substantiels ni les précisions nécessaires. Le demandeur invoque également la négligence, sans toutefois traiter des éléments constitutifs de celle-ci. La Couronne fédérale n’a pas d’obligation de diligence envers le demandeur dans les circonstances. Même si la Couronne fédérale avait une obligation de diligence, la norme n’a pas été enfreinte selon les faits allégués. Le demandeur allègue également que l’ARC a usé de« dissimulation »
. La déclaration ne désigne pas le ou les employés de l’ARC qui auraient, allègue-t-il, agi de mauvaise foi. Le demandeur ne fait que de simples allégations, qui sont à la fois scandaleuses, frivoles et vexatoires, et constituent un abus de procédure.c) Événement no 3. La déclaration contient des allégations selon lesquelles les magasins de culture hydroponique ont fourni au demandeur des directives compliquées ou inexactes sur la façon d’utiliser leurs produits, que ce soit verbalement en magasin ou sur les étiquettes des produits. Le demandeur réclame des dommages-intérêts à l’encontre de la Couronne fédérale pour négligence, parce qu’elle a permis que les magasins et les étiquettes de produits fournissent des renseignements inexacts. Le demandeur fait valoir que la Couronne fédérale serait en quelque sorte responsable des directives verbales qui lui ont été données par des employés (dont les noms ne figurent pas au dossier) dans des magasins de culture hydroponique privés, ou des difficultés qu’il a éprouvées pour comprendre les étiquettes des marchandises non précisées. Ce faisant, le demandeur a affirmé que la Couronne fédérale a fait preuve de négligence sans mentionner d’actions précises ou de faits substantiels pertinents. En affirmant simplement que la
« négligence »
constitue une conclusion, le demandeur n’a pas relevé d’action gouvernementale qui pourrait donner lieu à une cause d’action ni traité des éléments des causes d’action plaidées. La Couronne fédérale n’a pas d’obligation de diligence envers le demandeur, compte tenu des faits allégués. La déclaration relative à cet événement ne révèle pas de cause d’action valable et est scandaleuse, frivole et vexatoire.d) Événement no 4. Le demandeur réclame des dommages-intérêts contre la Couronne fédérale pour négligence, parce qu’elle n’a pas fourni au demandeur le rapport de profil de société lorsqu’il en a fait la demande. La déclaration ne fournit aucun fait substantiel pertinent. Le demandeur a de nouveau affirmé qu’il y avait eu
« négligence »
sans préciser la demande ni traiter des éléments du critère. La déclaration ne révèle pas de cause d’action valable et est scandaleuse, frivole et vexatoire.e) Événement no 5. Le demandeur allègue que Bell Canada ou TekSavvy ont mal installé son Internet. Le demandeur admet que le problème a été réglé, mais que cela a pris trop de temps et que le problème n’a pas fait l’objet d’une enquête par la CPRST. Il ne semble y avoir aucune allégation relative à cet événement qui concerne la Couronne fédérale. La CPRST est une société indépendante de la Couronne fédérale.
f) Événement no 6. La déclaration contient une allégation d’inconduite de la part de la PPO et une contestation d’une enquête ultérieure menée par le BDIEP. Le demandeur réclame des dommages-intérêts contre la Couronne fédérale pour négligence et pour avoir demandé et obtenu une ordonnance de déclaration de plaideur quérulent contre le demandeur en vertu de l’article 140 de la Loi sur les tribunaux judiciaires de l’Ontario, LRO 1990, c 43. Les allégations relatives à cet événement sont de nature provinciale et ne concernent pas la Couronne fédérale. Toutefois, le demandeur semble contester l’ordonnance de déclaration de plaideur quérulent rendue contre lui par la Cour supérieure de justice de l’Ontario. La Cour n’a pas compétence pour examiner cette ordonnance. En présentant l’ordonnance de déclaration de plaideur quérulent devant la Cour fédérale, le demandeur cherche soit à remettre en instance cette ordonnance, soit à la contester indirectement : dans les deux cas, il s’agit d’un abus de procédure.
g) Événement no 7. La déclaration contient une allégation selon laquelle le personnel et le site Web de la Cour fédérale n’ont pas suffisamment aidé le demandeur relativement à son dossier de requête au sujet d’une demande de dispense des droits à payer. Le demandeur réclame des dommages-intérêts à la Couronne fédérale pour négligence, parce qu’elle n’a pas fourni de directives adéquates sur le site Web de la Cour fédérale et qu’elle a embauché du personnel incompétent. Le demandeur ne fournit pas de précisions au sujet du critère de la négligence : en fait, il n’en traite même pas. La Couronne fédérale n’a pas d’obligation de diligence envers le demandeur selon les faits allégués et, même si une telle obligation existe, la Couronne fédérale n’a pas enfreint la norme requise. Cet événement n’est qu’un récit du demandeur; il ne satisfait pas aux règles relatives aux actes de procédure et ne révèle pas de cause d’action valable.
[64] Les fonctionnaires judiciaires de la Cour fédérale et les membres du greffe ne peuvent pas fournir de conseils juridiques aux parties. Cela s’explique évidemment par le fait que la Cour doit demeurer absolument impartiale et neutre (Olumide c Canada, 2016 CAF 287).
[65] Les agents du greffe peuvent tenter d’aider les plaideurs à franchir des étapes administratives simples liées au processus et à la procédure, mais ils ne peuvent pas fournir de conseils juridiques aux plaideurs, que ces derniers soient réels ou potentiels (Ralph Thom c Sa Majesté la Reine, 2007 CAF 249 au para 14).
[66] Dans ses documents de réponse à la requête, le demandeur indique qu’il compte sur la Cour pour régler tout malentendu et toute attente déraisonnable qui ont été portés à son attention par les défendeurs, et pour lui permettre de poursuivre son action. Il demande également à ce qu’on lui donne des instructions à savoir où il peut soumettre ses doléances. Bien que j’éprouve de la sympathie envers les non-avocats qui doivent composer avec la tâche parfois difficile de naviguer dans un processus qui leur est peu familier, je suis lié par les lois et les décisions antérieures des tribunaux en matière de compétence de la Cour fédérale. Ces règles s’appliquent également à tous, peu importe leur degré de connaissance en ce qui a trait à la compétence de la Cour et de ses règles de procédure. Je ne peux pas permettre que l’action se poursuive uniquement en me fondant sur des considérations abstraites d’équité. Je ne peux pas non plus fournir au demandeur, ni à quiconque d’ailleurs, des conseils ou des directives sur la façon de faire progresser une action en justice et sur l’instance devant laquelle l’action en question doit être introduite.
[67] Pour les motifs qui précèdent, les réclamations contre SMR du chef du Canada ne révèlent aucune cause d’action à la Cour fédérale et doivent être radiées.
VI.
L’autorisation de modifier
[68] La radiation d’un acte de procédure sans autorisation de le modifier est un pouvoir qui doit être exercé avec prudence. Si une déclaration fait état d’un semblant de cause d’action, elle ne sera pas radiée si elle peut être corrigée par une modification (Al Omani aux para 32 à 35).
[69] Pour les motifs exposés ci-dessous, l’autorisation de modifier ne sera pas accordée.
[70] Pour trancher la question de savoir si je devais accorder l’autorisation de modifier, j’ai tenu compte du fait que le demandeur se représente lui-même. Je n’ai pas envers la déclaration du demandeur et ses documents de requête les mêmes attentes que j’aurais en temps normal envers de tels documents préparés par des avocats expérimentés. Ce qui est plus important encore, c’est que j’ai tenté de passer par-dessus le style de rédaction tortueux de la déclaration pour établir si elle révèle quoi que ce soit pouvant constituer une véritable cause d’action.
[71] En ce qui a trait à l’événement no 5, les problèmes liés à la connexion Internet du demandeur, je ne vois pas comment les réclamations du demandeur contre TekSavvy et Bell Canada pourraient être décrites autrement que des plaintes liées au service à la clientèle et des allégations de violation de contrat, ni comment elles pourraient être présentées d’une manière qui relève de la compétence de la Cour fédérale. Les allégations contre TekSavvy et Bell Canada seront donc radiées sans autorisation de les modifier.
[72] En ce qui a trait à la CPRST, et pour les motifs énoncés ci-dessus, le seul recours possible contre toute décision relative aux plaintes du demandeur concernant son service Internet est une demande de contrôle judiciaire. Je ne vois pas comment le demandeur pourrait modifier la déclaration pour soutenir une action contre la CPRST. Les allégations contre la CPRST doivent donc elles aussi être radiées, sans autorisation de les modifier.
[73] En ce qui a trait à SMR du chef de l’Ontario et du BDIEP, le ou vers le 4 février 2021, le ministère du Procureur général de l’Ontario a reçu un avis de demande du demandeur, par lequel ce dernier sollicitait l’autorisation d’intenter une action à la Cour supérieure de justice de l’Ontario. Le demandeur voulait intenter une action contre SMR du chef de l’Ontario relativement à une interaction qu’il avait eue avec un agent de la PPO le 21 novembre 2019 et à sa plainte subséquente au BDIEP.
[74] Le juge Leibovich a rejeté la demande du demandeur au moyen d’une observation datée du 15 mars 2021 (Van Sluytman v Her Majesty the Queen in Right of Ontario, 2021 ONSC 1947). Le juge Leibovich a fait remarquer que le BDIEP avait conclu que [traduction] « rien n’indique que la police a agi d’une manière qui équivaudrait à une inconduite aux termes de la Loi sur les services policiers »
, et a en outre exprimé ses préoccupations quant au fait que le demandeur puisse chercher à plaider à nouveau certaines des questions plaidées antérieurement qui avaient entraîné sa déclaration de plaideur quérulent (para 4 et 5).
[75] Le ou vers le 22 décembre 2021, le ministère du Procureur général a reçu la déclaration. La déclaration contre SMR du chef de l’Ontario et le BDIEP porte sur la même interaction du 21 novembre 2019 avec un agent de la PPO et sur la plainte subséquente au BDIEP, comme sa demande d’autorisation précédente à la Cour supérieure de justice de l’Ontario.
[76] Le 7 janvier 2022, l’avocat de SMR du chef de l’Ontario et du BDIEP a envoyé une lettre au demandeur pour l’informer de diverses lacunes dans la déclaration. Le demandeur a été informé que si SMR du chef de l’Ontario et le BDIEP étaient contraints de présenter une requête en radiation et obtenaient gain de cause, ils demanderaient que les dépens leur soient adjugés.
[77] Le 22 janvier 2022, l’avocat de SMR du chef de l’Ontario et du BDIEP a reçu une lettre de réponse du demandeur, dans laquelle ce dernier les informait de son refus de se désister de sa déclaration contre ses clients.
[78] Dans ses documents de réponse à la requête, notamment un long affidavit, le demandeur met l’accent sur le manque de ressources que la Cour supérieure de justice de l’Ontario met à la disposition des plaideurs non-représentés. La Cour fédérale n’a pas compétence en matière de surveillance des cours provinciales et ne peut pas donner des directives à un autre tribunal sur les ressources qui devraient être mises à la disposition du public, ni rendre des ordonnances à cet égard.
[79] En plus de l’absence de compétence de la Cour fédérale sur les agents de police provinciaux dont j’ai traité ci-dessus, il est évident que le demandeur cherche à plaider de nouveau les mêmes questions qui ont été rejetées par l’ordonnance du juge Leibovich. Il s’agit d’un abus de procédure. Je ne vois pas comment les allégations du demandeur contre SMR du chef de l’Ontario et le BDIEP pourraient être reformulées d’une manière qui n’est pas abusive et qui relève de la compétence de la Cour fédérale. Les allégations contre SMR du chef de l’Ontario et le BDIEP seront donc radiées sans autorisation de les modifier.
[80] Les défendeurs se sont fondés sur le fait que le demandeur a été déclaré plaideur quérulent par la Cour supérieure de justice de l’Ontario (Van Sluytman v Muskoka (District Municipality), 2018 ONCA 32). Ils affirment que l’action en l’espèce a été intentée devant la Cour fédérale pour contourner l’ordonnance de déclaration de plaideur quérulent en Ontario.
[81] Pour TekSavvy, Bell Canada, la CPRST, SMR du chef de l’Ontario et le BDIEP, cela est certainement pertinent pour les dépens.
[82] En ce qui a trait à SMR du chef du Canada, la déclaration donne l’impression que le demandeur cherche un lien quelconque avec la Couronne fédérale, peu importe la tangente, pour justifier l’introduction de l’instance devant la Cour fédérale.
[83] Je ne vois pas comment le demandeur pourrait rédiger correctement un acte de procédure qui obligerait SMR du chef du Canada à répondre à une action fondée sur le fait d’avoir [traduction] « permis l’incompétence de Postes Canada »
. Elle ne peut non plus assumer la responsabilité quant à la façon dont les boutiques de culture hydroponique vendent leurs marchandises, fournir un rapport sur le profil de société, prendre des mesures en vue de l’installation ou l’entretien du service Internet du demandeur, ni se prononcer concernant les actions ou inactions de SMR du chef de l’Ontario et du BDIEP.
[84] En ce qui a trait aux services fournis par la Cour au public, le demandeur, dans son affidavit en réponse à la requête, invective le personnel du greffe de la Cour fédérale. Il y mentionne notamment que la directive qu’il a reçue était [traduction] « délibérément expliquée de façon incompétente par le gouvernement dans le but de semer la confusion dans l’esprit du public, en le dissuadant de tenter de se représenter lui-même dans une procédure judiciaire »
(paragraphe 24); et il y a eu un manque de [traduction] « courtoisie professionnelle de la part de la Cour quant à la façon dont je devrais formuler mes doléances et à l’endroit où je devrais le faire »
(paragraphe 26). Même si ces allégations colériques et conflictuelles sont présumées vraies, elles ne peuvent constituer une cause d’action.
[85] Je souligne qu’avant de déposer la déclaration, le demandeur a présenté une requête en vue d’obtenir une dispense des droits à payer. Le numéro de dossier de la Cour 21-T-24 a été attribué à cette demande. Dans cette affaire, le protonotaire Aalto a rendu une ordonnance le 20 septembre 2021 dans laquelle il réprimandait le demandeur pour ses interactions avec le greffe :
[traduction]
Il convient également de souligner que le demandeur a appelé régulièrement le greffe de la Cour et que les membres du greffe de la Cour ont trouvé le ton du demandeur intimidant, agressif et abusif. La Cour doit protéger les membres du greffe de la Cour contre les appels abusifs et harcelants. Il est évident que le demandeur utilise le courriel. Par conséquent, toutes les communications entre le demandeur et le greffe de la Cour se feront par courriel, à moins qu’il s’agisse d’une audience de la Cour. De plus, compte tenu de la conduite du demandeur et du nombre de requêtes, il s’agit d’une affaire qui doit faire l’objet d’un contrôle par la Cour, et j’ordonnerai que la présente affaire fasse l’objet d’une gestion spéciale.
[86] La seule question qui concerne SMR du chef du Canada est l’événement no 2 qui porte sur le remplacement de chèques non définis de l’ARC. La raison pour laquelle le demandeur n’a pas encaissé certains chèques de l’ARC sur une période de plusieurs années est inconnue, mais n’a aucune importance. Il n’y a aucune allégation selon laquelle les chèques n’ont pas été livrés correctement au départ. Il est difficile de voir quelle obligation de diligence peut s’appliquer dans ces circonstances, ou comment une réclamation pour négligence pourrait être présentée de façon appropriée. Même si la décision de ne pas fournir un chèque de remplacement est assujettie à la surveillance des tribunaux, il n’est pas du tout évident de déterminer comment cela pourrait faire l’objet d’une action à la Cour fédérale, par opposition à une demande de contrôle judiciaire une fois que toutes les avenues à l’ARC auront été épuisées (en supposant que la Cour canadienne de l’impôt n’aurait pas compétence sur la question de toute façon).
[87] Les réclamations présentées contre SMR du chef du Canada doivent donc elles aussi être radiées, sans autorisation de les modifier.
VII.
Les défenderesses liées au secteur de la culture hydroponique
[88] Overgrown Hydroponics, Green Planet Nutrients et Dutch Nutrient n’ont pas déposé de requête en radiation, pas plus qu’elles n’ont déposé de défense. Compte tenu de ce qui précède, je conclus que les parties de la déclaration visant ces défenderesses devraient être radiées, à l’initiative de la Cour.
[89] Les allégations formulées dans la déclaration contre ces défenderesses ont trait aux achats par le demandeur de nutriments liquides pour la culture de marijuana, et à une allégation selon laquelle les directives affichées sur les étiquettes de ces produits sont fausses et trompeuses.
[90] Comme les allégations relatives à la connexion internet du demandeur, ces allégations sont, au mieux, une plainte liée au service à la clientèle. Pour les allégations contre ces défenderesses, il y a absence : 1) d’attribution de compétence par une loi fédérale; 2) d’ensemble de règles de droit fédérales essentiel à la solution du litige et qui constitue le fondement de l’attribution légale de compétence; 3) de fondement de l’affaire sur des lois du Canada, au sens où cette expression est employée à l’article 101 de la Loi constitutionnelle de 1867. Il est évident et manifeste que la Cour fédérale n’a pas compétence sur cet aspect de la déclaration et que l’allégation ne peut pas être modifiée de façon à ce qu’elle contienne une cause d’action contre ces défenderesses qui relève de la compétence de la Cour.
[91] Les principes généraux des Règles sont énoncés à l’article 3. Il y est notamment prévu que les Règles sont interprétées et appliquées de façon à permettre d’apporter une solution au litige qui soit juste et la plus expéditive et économique possible. Comme je l’ai mentionné ci-dessus, il est évident et manifeste que la Cour fédérale n’a compétence sur aucune des questions soulevées dans la déclaration du demandeur. Exiger d’Overgrown Hydroponics, de Green Planet Nutrients et de Dutch Nutrient qu’elles déposent des requêtes en radiation qui seraient inévitablement accueillies constituerait un gaspillage de ressources.
VIII.
Dépens
[92] La Cour fédérale a le pouvoir discrétionnaire de déterminer le montant des dépens et de les répartir (paragraphe 400(1) des Règles).
[93] Les défendeurs ont obtenu entièrement gain de cause dans leurs requêtes.
[94] Comme Bell et TekSavvy n’ont pas demandé de dépens, aucuns ne seront donc adjugés.
[95] La CPRST n’a pas demandé de dépens dans son avis de requête, mais dans ses observations écrites, elle a demandé qu’on lui accorde le montant de 1000 $ au titre des dépens. Étant donné qu’aucune demande de dépens n’a été présentée dans l’avis de requête, aucuns dépens ne seront adjugés.
[96] Dans leurs avis de requête, SMR du chef de l’Ontario, le BDIEP, SMR du chef du Canada et la SCP ont demandé des dépens.
[97] Dans les documents qu’il a présentés à l’appui de sa demande de dispense des droits relatifs à l’introduction de l’action et dans ses documents de réponse aux requêtes en radiation, le demandeur a insisté sur son faible revenu. Dans de telles circonstances, il faut, au moment de l’examen de la situation, hésiter avant d’imposer des dépens qui seraient, en fait, punitifs. De plus, une adjudication de dépens ne devrait pas empêcher une personne de présenter des réclamations fondées.
[98] Parallèlement, les facteurs pertinents dans l’analyse des dépens comprennent la question de savoir si une mesure était inappropriée ou inutile (sous-alinéa 400(3)k)(i)). L’adjudication des dépens peut également servir à réglementer les procédures et à dissuader l’inconduite (Brace c Canada, 2021 CAF 136 au para 18).
[99] Le demandeur a bénéficié de plusieurs ordonnances « sans frais »
rendues à son encontre. Cela comprend l’ordonnance du juge Leibovich décrite ci-dessus (2021 ONSC 1947) et l’ordonnance de la Cour d’appel de l’Ontario confirmant l’ordonnance de déclaration de plaideur quérulent (2018 ONCA 32).
[100] Devant notre Cour, le demandeur a déposé une série de demandes contre la filiale de l’Association canadienne pour la santé mentale de Muskoka-Parry Sound en 2016 (dossiers de la Cour nos T‑663‑16; T‑665‑16; T‑666‑16; et T‑667‑16). Par ordonnance du 14 septembre 2016, la protonotaire Milczynski a annulé les avis de demande pour défaut de compétence. La défenderesse a demandé, sans toutefois qu’on lui accorde, des dépens d’indemnisation substantielle.
[101] Que le demandeur ait ou non déposé la déclaration à la Cour fédérale pour se soustraire aux conséquences de l’ordonnance de déclaration de plaideur quérulent en Ontario, je ne peux conclure qu’il serait approprié de ne pas adjuger de dépens. La longueur et la nature de la déclaration ont obligé les parties défenderesses ayant présenté les requêtes en radiation à consacrer des ressources considérables à ces requêtes. De nombreuses instances introduites par le demandeur ont été radiées, ce qui ne l’a pas empêché de présenter la déclaration. L’adjudication de dépens est donc justifiée dans une certaine mesure. Agir autrement peut encourager le demandeur et les personnes se trouvant dans une situation semblable à introduire des instances qui n’ont aucune chance de succès, en supposant ou en s’attendant à ce qu’il n’y ait pas de conséquences financières négatives.
[102] Des dépens de 100 $ seront adjugés à SMR du chef de l’Ontario, au BDIEP, à SMR du chef du Canada et à la SCP. Cette somme est beaucoup moins élevée que ce qui serait accordé selon le tarif, mais cela tient compte également de la situation financière du demandeur.
JUGEMENT dans le dossier n° T-1442-21
LA COUR STATUE :
La déclaration est radiée, sans autorisation de la modifier.
Le demandeur paie immédiatement le montant de 100 $ à Sa Majesté la Reine du chef de l’Ontario et au Bureau du directeur indépendant de l’examen de la police au titre des dépens.
Le demandeur paie immédiatement le montant de 100 $ à Sa Majesté la Reine du chef du Canada au titre des dépens.
Le demandeur paie immédiatement le montant de 100 $ à la Société canadienne des postes au titre des dépens.
vide
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« Trent Horne »
|
vide
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Juge chargé de la gestion de l’instance
|
Traduction certifiée conforme
M. Deslippes
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER :
|
T-1442-21
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INTITULÉ :
|
RORY A. VAN SLUYTMAN c SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA ET AUTRES
|
AFFAIRE EXAMINÉE À TORONTO (ONTARIO) SANS COMPARUTION EN PERSONNE DES PARTIES
JUGEMENT ET MOTIFS :
|
JUGE RESPONSABLE DE LA GESTION DE L’INSTANCE, TRENT HORNE
|
DATE DES MOTIFS :
|
LE 14 avril 2022
|
OBSERVATIONS ÉCRITES :
Stephen Littleford
|
Pour la défenderesse
BELL CANADA
|
Andy Kaplan-Myrth
Jessica Rutledge
|
Pour la défenderesse
TEKSAVVY SOLUTIONS INC.
|
Christina Persad
|
Pour la défenderesse
LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES
|
Christian Breukelman
|
Pour la défenderesse
LA COMMISSION DES PLAINTES RELATIVES AUX
SERVICES DE TÉLÉCOM-TÉLÉVISION
|
Alex Redinger
|
POUR LES DÉFENDEURS
SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DE L’ONTARIO et
LE BUREAU DU DIRECTEUR INDÉPENDANT DE L’EXAMEN DE LA POLICE
|
Adam Grotsky
|
Pour la défenderesse
SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA
|
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Service juridique de Bell
Mississauga (Ontario)
|
Pour la défenderesse
BELL CANADA
|
TekSavvy Solutions Inc.
Chatham (Ontario)
|
Pour la défenderesse
TEKSAVVY SOLUTIONS INC.
|
Société canadienne des postes
Services juridiques
Toronto (Ontario)
|
Pour la défenderesse
LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES
|
Stieber Berlach LLP
Avocats
Toronto (Ontario)
|
Pour la défenderesse
LA COMMISSION DES PLAINTES RELATIVES AUX SERVICES DE TÉLÉCOM-TÉLÉVISION
|
Ministère du Procureur général Bureau des avocats de la Couronne – Droit civil
Toronto (Ontario)
|
POUR LES DÉFENDEURS
SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DE L’ONTARIO et
LE BUREAU DU DIRECTEUR INDÉPENDANT DE L’EXAMEN DE LA POLICE
|
Procureur général du Canada
Toronto (Ontario)
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Pour la défenderesse
SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA
|