Date : 20040811
Dossier : IMM-5995-03
Référence : 2004 CF 1102
Toronto (Ontario), le 11 août 2004
EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE LAYDEN-STEVENSON
ENTRE :
FARIBA FARAHMAD MOBAREKEH
demanderesse
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
[1] Mme Mobarekeh, une citoyenne iranienne, allègue être victime de violence sexuelle aux mains de son mari, un citoyen qui possède la double nationalité, iranienne et américaine. La Section de la protection des réfugiés (SPR) de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a conclu qu'elle n'était ni un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger. Mme Mobarekeh me demande d'infirmer la décision et d'ordonner une nouvelle audience.
[2] L'avocat de Mme Mobarekeh conteste la décision de la SPR pour plusieurs motifs alors que pour l'avocat du défendeur, la question en litige en est une de crédibilité. D'abord, dans sa décision, la SPR précise que la question principale en est une de « crédibilité » . Cependant, il m'est impossible de vérifier avec exactitude la conclusion tirée par la Commission relativement à cette question.
[3] L'avocat du défendeur a soumis une liste d'événements classés par ordre chronologique et a méticuleusement relevé une série d'invraisemblances et de contradictions entre le Formulaire de renseignements personnels (FRP) et le témoignage de la demanderesse à l'audience. Il n'en a pas été fait mention dans la décision de la SPR. La Commission a bien conclu que certains aspects de la preuve de Mme Mobarekeh n'étaient pas crédibles, mais elle s'est abstenue de tirer une conclusion en matière de crédibilité malgré le fait qu'elle avait précisé que la crédibilité était la question principale. Au contraire, elle a dit que :
La demandeure a bel et bien semblé être une femme victime d'abus et était très émotive en décrivant les abus sexuels et physiques que son mari lui a fait subir. En fait, il semblait trop difficile pour elle de raconter ces incidents.
Plus tard, dans ses motifs, la Commission a souscrit aux observations de l'avocat selon lesquelles « le comportement et le témoignage de la demandeure démontrent qu'elle était crédible dans sa détresse » et la Commission a ajouté qu'elle-même « compatiss[ait] à la souffrance de la demandeure » .
[4] Il semble que la décision était fondée, du moins en partie, sur une conclusion selon laquelle Mme Mobarekeh pouvait se prévaloir de la protection de l'État aux États-Unis. Cependant, aucune demande n'a été présentée aux États-Unis. Bien que l'agent chargé de la revendication ait avisé qu'une exclusion était possible en vertu de la section E de l'article premier de la Convention, le défendeur a apparemment choisi de ne pas participer à l'audience. Rien n'indique, ni dans la transcription, ni dans la décision que la section E de l'article premier a été pris en compte.
[5] Personne ne conteste que les conclusions en matière de crédibilité doivent être énoncées en termes clairs et explicites et non vagues et généraux : Hilo c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immgration) (1991), 130 N.R. 236 (C.A.F.). Les motifs de la SPR sont ambigus car, malgré qu'elle rejette des éléments précis de la preuve de la demanderesse, elle semble conclure que cette dernière est crédible. Il semble que la Commission rejette la demande de la demanderesse en se fondant sur la disponibilité de la protection de l'État aux États-Unis alors que la demande concerne l'Iran.
[6] Dans Alemu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) 2004 CF 997, j'ai accueilli une demande de contrôle judiciaire au motif que l'analyse des conclusions du décideur était incomplète. Dans les deux cas, l'avocat du défendeur a présenté d'une manière cohérente les diverses options ou explications possibles à l'appui des conclusions de [la Commission]. J'ai conclu que de telles explications doivent se trouver, d'une manière ou d'une autre, dans le raisonnement du décideur. Ni un demandeur ni le tribunal ne devrait être tenu dans l'ignorance ou être obligé de supputer les raisons pour lesquelles une demande a été refusée.
[7] En l'espèce, la SPR est partie du bon pied, mais ensuite elle s'est écartée du chemin. Elle est revenue sur sa décision pour s'en écarter à nouveau et n'est jamais arrivée à établir les liens qu'il fallait. L'analyse était incomplète et les motifs inadéquats. C'est à contrecoeur que je renvoie l'affaire à un tribunal différemment constitué de la SPR pour nouvel examen.
[8] Les avocats n'ont proposé aucune question de certification et aucune question n'est certifiée.
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE QUE la demande de contrôle judiciaire soit accordée et l'affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué de la SPR pour nouvel examen. Aucune question n'est certifiée.
« Carolyn Layden-Stevenson »
Juge
Traduction certifiée conforme
Jacques Deschênes, LL. B.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-5995-03
INTITULÉ : FARIBA FARAHMAD MOBAREKEH
c.
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE
L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE : LE 10 AOÛT 2004
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE : LA JUGE LAYDEN-STEVENSON
DATE DES MOTIFS : LE 11 AOÛT 2004
COMPARUTIONS :
Michael Crane POUR LA DEMANDERESSE
Michael Butterfield POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Michael Crane
Toronto (Ontario) POUR LA DEMANDERESSE
Morris Rosenberg
Sous-procureur général du Canada
Toronto (Ontario) POUR LE DÉFENDEUR
COUR FÉDÉRALE
Date : 20040811
Dossier : IMM-5995-03
ENTRE :
FARIBA FARAHMAD MOBAREKEH
demanderesse
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE