Date : 19990520
Dossier : IMM-1906-98
OTTAWA (Ontario), le 20 mai 1999
EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE ROULEAU
ENTRE :
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,
demandeur,
ET :
JUSTICE NANA AGYEMANG,
défendeur.
ORDONNANCE
[1] La décision en date du 16 avril 1998 de S. Wiebe, membre de la section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié est annulée.
[2] La Cour ordonne la tenue d'une nouvelle audience et le réexamen de l'affaire par un tribunal reconstitué de la section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.
P. Rouleau »
JUGE
Traduction certifiée conforme
Marie Descombes, LL.L.
Date : 19990520
Dossier : IMM-1906-98
ENTRE :
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,
demandeur,
ET :
JUSTICE NANA AGYEMANG,
défendeur.
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
LE JUGE ROULEAU
[1] Il s'agit d'une demande présentée par le ministre en vue du contrôle judiciaire de la décision par laquelle la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (section d'appel) a fait droit à l'appel du défendeur et conclu que sa conjointe, Ruby Janne Hammond, était sa conjointe légitime et, par conséquent, appartenait à la catégorie de la famille. Le demandeur sollicite une ordonnance annulant cette décision et renvoyant l'affaire pour réexamen. Le défendeur n'a pas comparu, bien qu'il ait fait l'objet d'une signification valide.
[2] Le défendeur est originaire du Ghana et a obtenu le droit d'établissement au Canada en 1990. Il s'est marié en 1992 et a divorcé en 1994.
[3] Durant cette période, Ruby Jane Hammond, également originaire du Ghana, est devenue une résidente permanente de l'Angleterre et a épousé un citoyen britannique. Elle a obtenu un visa de visiteur pour voyager au Canada en mai 1995. Durant son séjour au Canada, Mme Hammond a rencontré le défendeur lors d'une fête en juin 1995; ils s'étaient vus pour la dernière fois au Ghana en 1982. Ils ont parlé pendant environ trois heures. Elle lui a dit qu'elle était séparée et qu'elle voulait divorcer d'avec son mari britannique. Le défendeur a demandé Mme Hammond en mariage trois jours plus tard et elle a accepté.
[4] Mme Hammond est retournée en Angleterre. Le couple a poursuivi sa relation par téléphone. Ils ont parlé de leurs origines, de leur travail, de leur famille et de leurs projets d'avenir. Pendant quelque temps, ils se sont téléphoné quotidiennement. Peu à peu, ils ont diminué le nombre d'appels à cause des coûts. La soeur du défendeur, qui vit également en Angleterre, a eu de fréquents contacts avec Mme Hammond.
[5] Le défendeur a présenté une promesse d'aide le 27 juillet 1995 afin de parrainer sa fiancée, même si elle n'avait pas encore obtenu son divorce; il a été prononcé en novembre 1995. En août 1996, le défendeur s'est rendu en Angleterre pour épouser Mme Hammond. Comme il n'avait pas apporté son certificat de divorce avec lui, la cérémonie de mariage a dû être annulée.
[6] Entre-temps, la demande de parrainage a été traitée au Royaume-Uni. Mme Hammond a reçu une lettre en date du 11 septembre 1996 qui l'informait que la demande de parrainage avait été refusée parce que le défendeur et Mme Hammond n'avaient pas convaincu l'agent des visas que leur engagement était véritable. Celui-ci s'interrogeait sur leur décision de se marier seulement trois jours après leur rencontre. Le défendeur n'est jamais allé voir Mme Hammond au Royaume-Uni. L'agent des visas a interrogé Mme Hammond le 10 avril 1996 et a découvert que, malgré les nombreuses conversations téléphoniques qu'elle avait eues avec le défendeur, elle savait très peu de choses de lui. Ainsi, elle ignorait qu'il avait déjà été marié. Elle avait rencontré seulement deux membres de la fratrie du défendeur, mais ignorait comment s'appelaient les autres membres et le père du défendeur, et ne savait pas si ses grands-parents vivaient encore. De plus, Mme Hammond ne savait pas si le défendeur était titulaire d'un diplôme d'études secondaires ou possédait des compétences professionnelles. Elle ignorait quels étaient son occupation et son employeur.
[7] En octobre 1996, le défendeur est retourné en Angleterre. Le couple s'est marié et a vécu pendant trois semaines en tant que mari et femme. Avant que le défendeur ne reparte, Mme Hammond l'a informé qu'elle était enceinte. Comme leur avenir était incertain, Mme Hammond a demandé au défendeur de venir vivre en Angleterre. Il a refusé parce qu'il ne voulait pas vivre loin de sa mère et de sa soeur au Canada.
[8] Le défendeur a interjeté appel de la décision de l'agent des visas auprès de la section d'appel. La présidente de l'audience a fait droit à l'appel le 16 avril 1998. Le ministre a déposé la présente demande de contrôle judiciaire au motif que la conclusion de la présidente n'était pas étayée par l'ensemble de la preuve dont elle avait été saisie. Le ministre a porté à la connaissance de la Cour plusieurs contradictions relevées dans les témoignages que le défendeur et Mme Hammond ont fait devant la section d'appel.
[9] Le paragraphe 4(3) du Règlement sur l'immigration de 1978 est ainsi libellé :
4.(3) The family class does not include a spouse who entered into the marriage primarily for the purpose of gaining admission to Canada as a member of the family class and not with the intention of residing permanently with the other spouse. |
4.(3) La catégorie des parents ne comprend pas le conjoint qui s'est marié principalement dans le but d'obtenir l'admission au Canada à titre de parent et non dans l'intention de vivre en permanence avec son conjoint. |
[10] L'objet du paragraphe 4(3) du Règlement est d'empêcher des parties de contourner, à des fins d'immigration, les critères de sélection auxquels la plupart des immigrants doivent se soumettre en créant artificiellement des liens familiaux au moyen d'une forme quelconque de mariage. Le critère prévu au paragraphe 4(3) a deux volets. Premièrement, la personne doit s'être mariée principalement dans le but d'obtenir l'admission au Canada. Deuxièmement, l'immigrant éventuel ne doit pas avoir l'intention de résider en permanence avec son conjoint parrain. L'agent des visas qui procède à une évaluation doit examiner l'authenticité du mariage en fonction de la perception et des motivations du conjoint parrainé. Il importe peu qu'il s'agisse d'un mariage légitime; voir l'affaire Horbas c. Canada (M.E.I.), [1985] 2 C.F. 359 (C.F. 1re inst.).
[11] Il ressort clairement des motifs écrits fournis par la section d'appel que la présidente n'a pas apprécié les éléments de preuve contradictoires tirés du rapport initial de l'agent des visas en poste au Royaume-Uni qui lui ont été soumis par le ministre. La section d'appel a été saisie de nombreux éléments de preuve indiquant que l'exactitude des affirmations faites par le défendeur aurait pu et aurait dû être évaluée. Elle ne l'a pas fait et a, de ce fait, commis une erreur susceptible de révision.
[12] La demande de contrôle judiciaire est accueillie et l'affaire est renvoyée à un tribunal reconstitué pour réexamen.
« P. ROULEAU »
JUGE
OTTAWA (Ontario)
Le 20 mai 1999
Traduction certifiée conforme
Marie Descombes, LL.L.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
NOMS DES AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
NUMÉRO DU GREFFE : IMM-1906-98
INTITULÉ : M.C.I. c. Justice Nana Agyemang
LIEU DE L'AUDIENCE : Toronto (Ontario)
DATE DE L'AUDIENCE : Le 4 mai 1999
MOTIFS DE L'ORDONNANCE PRONONCÉS PAR LE JUGE ROULEAU
EN DATE DU : 20 mai 1999
COMPARUTIONS :
Me Marissa B. Bielski pour le demandeur
Aucune comparution pour le défendeur
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
M. Morris Rosenberg pour le demandeur
Sous-procureur général du Canada
Aucune comparution pour le défendeur