Ottawa (Ontario), le 31 mai 2005
EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE SHORE
ENTRE :
et
LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL DU CANADA
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
INTRODUCTION
[1] Un agent d'examen des risques avant renvoi ne peut faire ni plus, ni moins que ce qui lui incombe en vertu de la compétence qui lui est attribuée. Si aucun nouvel élément de preuve, ou aucun élément de preuve qui n'était pas normalement accessible au moment de la décision initiale, n'est présenté à l'agent d'examen des risques avant renvoi, le demandeur dont la demande a déjà été rejetée en raison d'un manque de crédibilité ne peut s'attendre à ce que la Cour ordonne un nouvel examen d'une telle décision si les motifs qui fondent cette décision sont suffisants.
LA PROCÉDURE JUDICIAIRE
[2] Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire en application du paragraphe 72(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés[1] (LIPR) visant la décision du 9 février 2004 par laquelle un agent d'examen des risques avant renvoi (ERAR) a rejeté la demande d'ERAR présentée en application des articles 96 et 97 de la LIPR; l'agent a conclu que le demandeur ne peut craindre avec raison d'être persécuté et ne serait pas exposé au risque de la torture, d'une menace à sa vie ou d'un traitement cruel et inusité s'il retournait à la Grenade.
LE CONTEXTE
[3] Le demandeur, M. Paul Mitchell, est un citoyen de la Grenade qui est arrivé au Canada en 1998 à titre de visiteur; les autorités de l'immigration n'ont été avisées de sa présence au pays qu'à la suite de son arrestation le 15 mars 2002. Il a présenté alors une revendication du statut de réfugié fondée sur ses opinions politiques présumées. La Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) a rejeté sa revendication le 18 septembre 2003. La Commission a conclu que la revendication de M. Mitchell n'avait pas un minimum de fondement. M. Mitchell a présenté alors une demande aux termes du programme d'ERAR; cette demande fut rejetée le 9 février 2004. Cette dernière décision fait l'objet du contrôle de la Cour.
LA DÉCISION VISÉE PAR LE PRÉSENT CONTRÔLE
[4] L'agent d'ERAR a conclu que M. Mitchell n'a pas abordé ni réfuté les problèmes de crédibilité soulevés par la Commission dans ses motifs écrits à la suite du rejet de la revendication du statut de réfugié. M. Mitchell n'a présenté aucune preuve de son adhésion ou association au Grenada Union Labor Party. L'agent d'ERAR a signalé que la situation mise de l'avant par M. Mitchell était la même que la Commission avait étudiée, y compris quelques dossiers d'information de 2003 sur la situation à la Grenade; il a signalé aussi que M. Mitchell n'avait pas précisé le lien entre ces dossiers et sa situation personnelle. L'agent d'ERAR estimait que les liens familiaux que M. Mitchell a tissés au Canada et le nombre d'années qu'il a séjourné au Canada ne sont pas des facteurs pertinents dans le cadre d'une ERAR.
LA QUESTION EN LITIGE
1. L'agent d´ERAR a-t-il commis une erreur susceptible de révision?
ANALYSE
[5] Le processus d'ERAR vise à examiner de nouveaux éléments de preuve concernant les risques survenus entre l'audience de la revendication du statut de réfugié et la date du renvoi. M. Mitchell n'a présenté aucun élément de preuve nouveau, c'est-à-dire un élément de preuve qui n'était pas ou ne pouvait pas être à la disposition de la Commission. Il n'a présenté aucune preuve se rapportant à un risque auquel il serait exposé personnellement s'il retournait à la Grenade et les dossiers d'information sur la situation au pays qu'il a soumis remontent à 2003 (la situation à l'époque où il a présenté sa revendication du statut de réfugié). L'agent d'ERAR a examiné comme il se doit la demande de M. Mitchell, ainsi que les dossiers d'information, puis a conclu, avec raison, que M. Mitchell n'avait pas démontré qu'il serait exposé à des risques.
[6] M. Mitchell affirme que l'agent d'ERAR a ignoré des preuves de la persistance de violations des droits de la personne à la Grenade, mais n'a pas précisé quels éléments de preuve avaient été ignorés. La Cour ne se prononcera pas sur des allégations qui ne sont pas étayées sur des preuves.
[7] M. Mitchell prétend également que le régime d'ERAR porte atteinte à la justice naturelle et à l'équité procédurale, ainsi qu'aux principes constitutionnels de la justice fondamentales, car les critères pour qu'une demande soit accueillie dans le cadre du programme d'ERAR ne sont pas précisés ou sont vagues et impossibles à respecter. Faute d'observations additionnelles sur ce point, il est important de rappeler que l'article 113 de la LIPR expose des critères suffisamment précis pour que des décisions soient rendues sur les demandes d'ERAR et, de ce fait, pour que des demandeurs obtiennent des décisions qui leur sont favorables.
CONCLUSION
[8] Pour les motifs exposés ci-dessus, la Cour répond à la question en litige par la négative. Par conséquent, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE :
1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.
2. Aucune question n'est certifiée.
Juge
Traduction certifiée conforme
Julie Poirier, traductrice
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-2582-04
INTITULÉ : PAUL MITCHELL c.
LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL DU Canada
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE : LE 17 MAI 2005
DATE DES MOTIFS : LE 31 MAI 2005
COMPARUTIONS :
M. Munyonzwe Hamalengwa POUR LE DEMANDEUR
Mme Kareena Wilding POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
MUNYONZWE HAMALENGWA POUR LE DEMANDEUR
Mississauga (Ontario)
JOHN H. SIMS, c.r. POUR LE DÉFENDEUR
Sous-ministre de la Justice et
sous-procureur général