Dossier : IMM-6933-03
Toronto (Ontario), le 25 août 2004
EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE von FINCKENSTEIN
ENTRE :
BIN ZHENG
demandeur
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
(Prononcés à l'audience, puis mis par écrit pour plus de précision et de clarté)
[1] Le demandeur est un citoyen de la République populaire de Chine (la RPC) âgé de 21 ans. Il prétend être persécuté par des fonctionnaires du gouvernement chinois parce qu'il est un adepte de la religion Tian Dao.
[2] La Commission a rejeté la demande du demandeur, tirant une conclusion défavorable du fait qu'il n'avait pas mentionné dans son FRP les détails relatifs à la perquisition effectuée par la police à la maison-temple qu'il fréquentait et au domicile de ses parents. En outre, elle a conclu que le récit du demandeur ne s'appuyait pas sur la preuve documentaire portant sur le traitement des adeptes du Tian Dao en Chine.
[3] La conclusion de la Commission relativement aux omissions dans le FRP du demandeur est raisonnable et bien justifiée. La Commission a toutefois commis deux erreurs.
[4] Premièrement, la Commission a conclu à la page 4 que « [s]elon cette même source, même s'il existe des adeptes de cette religion dans la province du Fujian, ceux-ci ne seraient certainement pas en mesure de pratiquer leur religion ouvertement, comme le porte à croire la preuve du demandeur » . Le fait est que nulle part dans le dossier, le demandeur n'a allégué que la religion Tian Dao existait ouvertement dans la province du Fujian.
[5] Deuxièmement, la Commission affirme aux pages 4 et 5 :
Le demandeur a déclaré pendant son témoignage que ses parents lui ont signalé l'arrestation de cinq de ses confrères, dont le propriétaire de la maison-temple où a eu lieu le service interrompu par les autorités. Quatre des adeptes ont été condamnés à une peine d'emprisonnement de deux ans et le propriétaire de la maison-temple a été condamné à une peine de quatre ans. De l'avis du tribunal, ces propos ne sont pas crédibles. La preuve documentaire précise que les autorités chinoises ne dévoilent pas le nombre de personnes arrêtées et détenues. En outre, à cause de la notoriété de la religion Tian Dao, de telles arrestations seraient sans doute tenues secrètes. Néanmoins, le tribunal estime que de telles arrestations et peines attireraient vraisemblablement l'attention des organisations de défense des droits de la personne. La liberté de religion dans la province du Fujian est un sujet abordé dans de nombreux rapports d'organisations de défense des droits de la personne. Selon Amnistie Internationale, une religion non reconnue comme la religion Tian Dao serait considérée comme une organisation hérétique et ses membres s'exposeraient à un risque de persécution. Toutefois, dans un rapport daté de mars 2002 préparé en réponse à une demande portant précisément sur le traitement des adeptes de la religion Tian Dao en Chine, l'organisation Amnistie Internationale soutient ne pas avoir été informée récemment d'incidents de torture ou de mauvais traitements d'adeptes de Tian Dao. À cet égard, le tribunal estime que le présumé incident survenu en juin 2001 aurait probablement attiré l'attention de cette organisation. [Non souligné dans l'original.]
[6] Cette affirmation est illogique. Soit les arrestations sont faites en secret et personne n'est au courant de celles-ci (ce qui inclurait la famille du demandeur et les organisations de défense des droits de la personne), soit, malgré la persécution intense infligée par la police chinoise, il y a des fuites de renseignements. La Commission ne peut miser sur les deux tableaux, c.-à-d. accepter que des arrestations sont faites en secret et donc mettre en doute la crédibilité du demandeur et de ses parents, parce qu'il est par le fait même peu probable qu'ils aient été au courant de ces arrestations, tout en retenant contre le demandeur le fait qu'il n'a pas entendu parler de ces arrestations par les organisations de défense des droits de la personne.
[7] Ces deux erreurs sont des erreurs « manifestement déraisonnables » . Par conséquent, malgré les conclusions solides de la Commission relativement aux omissions du FRP, sa décision ne peut tenir.
[8] En conséquence, la présente demande sera accueillie.
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE que la décision de la Commission datée du 5 août 2003 soit annulée et que l'affaire soit renvoyée à un tribunal différemment constitué pour qu'il procède à un nouvel examen.
« K. von Finckenstein »
Juge
Traduction certifiée conforme
Julie Boulanger, LL.M.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-6933-03
INTITULÉ : BIN ZHENG
c.
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE : LE 25 AOÛT 2004
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE : LE JUGE von FINCKENSTEIN
DATE DES MOTIFS : LE 25 AOÛT 2004
COMPARUTIONS :
Shelley Levine POUR LE DEMANDEUR
Anshumala Juyal POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Shelley Levine POUR LE DEMANDEUR
Avocat
Toronto (Ontario)
Morris Rosenberg POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada
COUR FÉDÉRALE
Date : 20040825
Dossier : IMM-6933-03
ENTRE :
BIN ZHENG
demandeur
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE