Date : 20020117
Dossier : IMM-1264-01
Référence neutre : 2002 CFPI 34
Entre :
Hamid ASHRAF
Partie demanderesse
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
Partie défenderesse
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
LE JUGE PINARD :
[1] La demande de contrôle judiciaire vise une décision rendue le 8 février 2001 par la Section du statut de réfugié statuant que le demandeur n'est pas un réfugié au sens de la Convention, tel que défini au paragraphe 2(1) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2.
[2] Le demandeur est citoyen du Pakistan. Il allègue y avoir été persécuté en raison de sa religion chiite.
[3] La Section du statut de réfugié a refusé de reconnaître au demandeur le statut de réfugié, concluant qu'il n'était pas crédible et, après évaluation de la preuve, qu'il n'était pas raisonnable de craindre qu'il soit persécuté advenant son retour dans son pays de nationalité.
[4] Le demandeur soutient en premier lieu que la Section du statut de réfugié, dans son analyse, a omis de considérer la lettre déposée sous la cote P-5. Après révision de la preuve, il appert que le tribunal n'a ni ignoré ni rejeté sans analyse le document en question, mais a simplement décidé de ne pas lui accorder de valeur probante, ce qui est bien de son ressort.
[5] Plus particulièrement, le demandeur allègue que la Section du statut n'a pas considéré le fait que la lettre P-5 indique qu'un mandat d'arrêt a été émis pour son arrestation et qu'aucun motif n'a été fourni à l'appui du rejet de cette preuve documentaire. Il a été établi dans l'affaire Singh c. Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration (23 juin 1995), IMM-4256-94, et confirmé dans l'affaire Edomsky c. Canada (M.C.I.), [1998] A.C.F. no 1311 (1re inst.) (QL), que lorsque la preuve documentaire est contradictoire sur certains aspects, comme c'est le cas en l'espèce, la Section du statut peut valablement retenir certains éléments et en écarter d'autres. Faut-il aussi rappeler que la perception de la Section du statut que le demandeur n'est pas crédible peut équivaloir en fait à la conclusion qu'il n'existe aucun élément crédible pouvant justifier sa revendication du statut de réfugié (voir Sheikh c. Canada (M.C.I.), [1990] 3 C.F. 238, à la page 244).
[6] De plus, le demandeur soumet que la Section du statut a erré en ne sélectionnant que certains passages non pertinents de la preuve documentaire pour rejeter sa revendication. La Cour d'appel fédérale dans l'affaire Florea c. Canada (M.E.I.), [1993] A.C.F. no 598 (QL), a établi que le tribunal est présumé avoir pesé et considéré toute la preuve dont il est saisi jusqu'à preuve du contraire. En l'espèce, je suis d'avis que les conclusions de la Section du statut sont appuyées par la preuve documentaire qu'elle a jugée la plus appropriée.
[7] Le demandeur prétend enfin que la documentation récente et pertinente qui démontre une situation inquiétante au Pakistan n'a pas été considérée par le tribunal. Le juge MacKay dans l'affaire Tawfik v. M.E.I. (1993), 137 F.T.R. 43, énonce ce qui suit à la page 46 :
. . . It is acknowledged that that decision is not binding on the panel in this case, which was required to make its own decision based on the evidence before it. Yet is it urged that it illustrates that different decision-makers may come to different and inconsistent conclusions in cases which at least on their surface appear to bear similarities. It is unfortunate if members of the Immigration and Refugee Board are left without some current information developed by the CRDD itself about changing country circumstances that would be of assistance to different panels in assessing the broad and underlying circumstances upon which any determination of changes in country circumstances or of the existence of an IFA must inevitably be based. Nevertheless, that does not assist the applicant in this case. The Board in each case must make its determination on the basis of the evidence before it.
[8] En l'espèce, le document auquel se réfère le demandeur ne se trouve pas dans le dossier présenté à la Section du statut. De plus, il me semble que le demandeur demande à cette Cour de substituer son appréciation de la preuve à celle de la Section du statut, ce qui n'est définitivement pas son rôle dans une demande de contrôle judiciaire. Compte tenu des éléments dont elle disposait, la Section du statut pouvait à bon droit en arriver à la conclusion qu'elle a tirée au sujet à la fois de l'allégation de blasphème, de la valeur probante de la preuve documentaire et de la crédibilité du demandeur.
[9] Somme toute, je suis d'avis que le demandeur ne s'est pas déchargé de son fardeau de démontrer que les inférences tirées par le tribunal spécialisé que constitue la Section du statut de réfugié étaient déraisonnables (voir Aguebor c. Canada (M.E.I.) (1993), 160 N.R. 315, aux pages 316 et 317). La Section du statut était libre d'appuyer sa décision sur la preuve documentaire jugée la plus appropriée et je ne suis pas satisfait qu'elle ne pouvait pas raisonnablement conclure comme elle l'a fait (voir Zhou c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration (18 juillet 1994),
A-492-91 (C.A.F.)). À mon sens, ce tribunal s'est acquitté de ses obligations sans commettre d'erreur susceptible de révision. La demande de contrôle judiciaire est donc rejetée.
JUGE
OTTAWA (ONTARIO)
Le 17 janvier 2002
COUR FÉDÉRALE DU CANADA SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
NOMS DES AVOCATS ET DES AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
N º DE LA COUR: IMM-1264-01
INTITULÉ: Hamid ASHRAF c. MCI
LIEU DE L'AUDIENCE: Montréal (Québec)
DATE DE L'AUDIENCE: 4 décembre 2001
MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE L'HONORABLE JUGE PINARD EN DATE DU 17 janvier 2002
COMPARUTIONS
Me Marie-Claude Paquette POUR LA DEMANDERESSE
Me Mario Blanchard POUR LA DÉFENDERESSE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
M. Morris Rosenberg POUR LA DÉFENDERESSE Sous-procureur général du Canada
Me Marie-Claude Paquette POUR LA DEMANDERESSE Montréal (Québec)