Date : 20030110
Dossier : IMM-5163-01
Référence neutre : 2003 CFPI 5
Entre :
JUAN MANUEL CERDA HERNANDEZ
HILDA GABRIELA CASTRO DE CERDA
ANA GABRIELA CERDA CASTRO
TANIA CERDA CASTRO
Demandeurs
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
Défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
LE JUGE PINARD :
Il s'agit ici d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision de la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié(la « CISR » ) rendue le 15 octobre 2001 statuant que les demandeurs ne sont pas des réfugiés au sens de la Convention, tels que définis au paragraphe 2(1) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2 (la « Loi » ).
Le demandeur principal, sa femme et leurs deux filles mineures sont des citoyens mexicains. Ils revendiquent le statut de réfugiés du fait des opinions politiques imputées au demandeur principal et, pour sa femmes et leurs filles, de l'appartenance à un groupe social, soit « la famille » .
La CISR a refusé de reconnaître aux demandeurs le statut de réfugiés, concluant qu'ils « ne se sont pas déchargés du fardeau de preuve qui leur incombe, quant à la justification d'une possibilitéraisonnable de persécution, advenant leur retour au Mexique » .
Les demandeurs soumettent d'abord que la CISR a erré en ne tenant pas compte de l'ensemble de la preuve ou en minimisant la preuve présentée. C'est un principe de droit élémentaire que de présumer qu'un tribunal a tenu compte de l'ensemble de la preuve devant lui (Taher c. ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration (7 septembre 2000), IMM-5255-99; Hassan v. M.E.I. (1992), 147 N.R. 317 (C.A.F.); Florea c. ministre de l'Emploi et de l'Immigration(11 juin 1993), A-1307-91 et Woolaston c. ministre de la Main-d'oeuvre et de l'Immigration, [1973] R.C.S. 102).
Les demandeurs soumettent particulièrement que la CISR a erréen ne tenant pas compte de la situation de répression au Mexique. Ils argumentent qu'il existe un ensemble de circonstances dans ce pays qui devrait créer une présomption de possibilités de persécution pour les personnes comme le demandeur principal, vu les violations de droits humains par les autorités mexicaines. Cependant, une preuve générale sur la situation politique au Mexique ne suffit pas à établir un lien direct avec la situation des demandeurs (Canada (Secrétaire d'État) c. Jules (1994), 84 F.T.R. 161). Étant donnéla nature générale de l'information sur la situation de répression au Mexique, la CISR n'a pas commis d'erreur en la considérant et en l'évaluant comme elle l'a fait, sans la mentionner explicitement dans sa décision.
Les demandeurs soutiennent que la CISR est allée à l'encontre de la jurisprudence de cette Cour en refusant le témoignage du demandeur principal parce qu'il comprenait des éléments qui ne se trouvaient pas dans le Formulaire de renseignements personnels (le « FRP » ).
J'ai eu l'occasion, à ce sujet, d'écrire ce qui suit, au paragraphe 4 de l'affaire Grinevich c. ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration (11 avril 1997), IMM-1773-96 :
[TRADUCTION]
. . . Lorsqu'un demandeur du statut de réfugié omet de mentionner des faits importants dans son FRP, la Commission peut légitimement considérer que cette omission porte atteinte à sa crédibilité. . . .
(Voir aussi Sanchez c. ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration (20 avril 2000), IMM-2631-99.)
En l'espèce, les éléments non inclus au FRP du demandeur principal et introduits au cours de son témoignage ne sont pas que de « petits ajouts » , comme le prétendent les demandeurs. Il s'agit d'allégations significatives pour la détermination de l'existence de la persécution envers eux. La conclusion de la CISR à l'effet que les omissions au FRP portaient atteinte à la crédibilitédu demandeur principal ne m'apparaît pas déraisonnable.
Les demandeurs plaident que la CISR a errédans l'application des critères de réfugiés politiques qui leur sont applicables. Celle-ci a trouvé que leur récit des faits n'a aucun lien avec l'un des cinq motifs de la Convention. Les demandeurs insistent que le motif est le groupe social, soit les victimes de la mafia et des trafiquants de pièces d'automobiles volées au Mexique, qui est une classe défavorisée aux niveaux économique et politique.
Or, la jurisprudence indique que des individus, tels les demandeurs, visés par des actes criminels ne sauraient être considérés membres d'un groupe social au sens de l'arrêt Canada c. Ward, [1993] 2 R.C.S. 689 (voir Rizkallah v. M.E.I. (1992), 156 N.R. 1 (C.A.F.); Karpounin v. M.E.I. (1995), 92 F.T.R. 219; Soberanis c. ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration (8 octobre 1996), IMM-401-96; Vargas c. Canada (M.C.I.), 2002 CFPI 1019, [2002] A.C.F. no 1350 (1re inst.) (QL) et Galvan c. ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration (7 avril 2000), IMM-304-99). La CISR n'a pas commis d'erreur en concluant ainsi, et sa décision àcet égard justifie à elle seule le rejet de la revendication des demandeurs.
Les demandeurs soutiennent enfin que la CISR a errédans l'évaluation de leur crédibilité. En fait, celle-ci a clairement déterminé que le demandeur principal n'était pas crédible et a offert des raisons détaillées dans sa décision, citant les inconsistances ainsi que les invraisemblances dans le FRP du demandeur principal et dans son témoignage oral. Après examen de la preuve, la CISR ne m'apparaît pas avoir tiré d'inférences déraisonnables pouvant justifier l'intervention de cette Cour (voir Aguebor c. M.E.I. (1993), 160 N.R. 315 (C.A.F.)).
Pour toutes ces raisons, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.
JUGE
OTTAWA (ONTARIO)
Le 10 janvier 2003
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
NOMS DES AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-5163-01
INTITULÉ : JUAN MANUEL CERDA HERNANDEZ
HILDA GABRIELA CASTRO DE CERDA
ANA GABRIELA CERDA CASTRO
TANIA CERDA CASTRO
Demandeurs
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
Défendeur
LIEU DE L'AUDIENCE : Montréal (Québec)
DATE DE L'AUDIENCE : Le 19 novembre 2002
MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE : L'honorable juge Pinard
EN DATE DU : 10 janvier 2003
ONT COMPARU :
Me Stewart Istvanffy POUR LES DEMANDEURS
Ella Lokru, stagiaire
Me Ian Demers POUR LE DÉFENDEUR
Me Michel Pépin
PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :
Stewart Istvanffy POUR LES DEMANDEURS
Avocat
Montréal (Québec)
Morris Rosenberg POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada
Ottawa (Ontario)