Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20211021


Dossier : T‑1415‑20

Référence : 2021 CF 1112

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 21 octobre 2021

En présence de la juge en chef adjointe Gagné

ENTRE :

MAGNUM MACHINE LTD., faisant affaire sous le nom d’ALBERTA TACTICAL RIFLE SUPPLY, et RICHARD TIMMINS

demandeurs

et

SA MAJESTÉ LA REINE, F.A. WILLIAM ETTER, MURRAY SMITH, KEN DOBIE ET JENNIFER HART‑MACDONALD

défendeurs

ORDONNANCE ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] La Cour est saisie de deux requêtes qui ont été entendues conjointement.

[2] La première requête a été déposée par les défendeurs afin de demander la radiation d’allégations faites dans la déclaration modifiée des demandeurs, sans autorisation de la modifier. Les défendeurs sollicitent :

[traduction]

a. une ordonnance radiant les allégations formulées contre les défendeurs, William Etter, Murray Smith, Jennifer Hart‑MacDonald et Ken Dobie (les défendeurs poursuivis personnellement) ainsi que les allégations en découlant faisant porter à Sa Majesté la Reine la responsabilité du fait d’autrui sur le fondement desquelles ils sollicitent des dommages‑intérêts pour la faute dans l’exercice d’une charge publique qu’ils reprochent aux défendeurs poursuivis personnellement;

b. une ordonnance radiant les allégations concernant les autres dommages‑intérêts, à savoir :

i. les dommages‑intérêts pour une prétendue « expropriation de fait », « confiscation prévue par la loi » ou « appropriation réglementaire »;

ii. les dommages‑intérêts au titre du paragraphe 24(1) de la Charte des droits et libertés (la Charte) pour des violations alléguées des articles 7 et 8 et de l’alinéa 11g) de la Charte;

iii. les dommages‑intérêts pour une prétendue « atteinte aux rapports économiques »;

iv. les dommages‑intérêts pour manquement à une obligation de diligence que les demandeurs pourraient réclamer.

[3] La deuxième requête a été présentée par les demandeurs, qui sollicitent :

[traduction]

a. une ordonnance enjoignant au procureur général du Canada de cesser d’agir pour les défendeurs […]

b. une ordonnance enjoignant à chacun des défendeurs […] d’être représentés par des avocats distincts;

c. une ordonnance interdisant au procureur général d’occuper pour les défendeurs poursuivis personnellement […]

[4] Les moyens invoqués dans la deuxième requête portent sur l’existence d’un conflit d’intérêts parce que le procureur général représente les défendeurs poursuivis personnellement. J’appellerai donc cette requête la « requête concernant le conflit d’intérêts ».

[5] Pour les motifs qui suivent, j’accueille en partie la requête en radiation des défendeurs, soit les parties qui concernent a) les dommages‑intérêts pour une prétendue [traduction] « expropriation de fait », [traduction] « confiscation prévue par la loi » ou [traduction] « appropriation réglementaire »; b) les dommages‑intérêts au titre du paragraphe 24(1) de la Charte canadienne des droits et libertés, partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R‑U), 1982, c 11 [la Charte], pour des violations alléguées des articles 7 et 8 et de l’alinéa 11g); c) les dommages‑intérêts pour une prétendue [traduction] « atteinte aux rapports économiques »; et d) les dommages‑intérêts pour manquement à une obligation de diligence que les demandeurs pourraient réclamer. De plus, je rejette la requête concernant le conflit d’intérêts.

II. Les faits

[6] Le 1er mai 2020, la gouverneure en conseil a promulgué le Règlement modifiant le Règlement désignant des armes à feu, armes, éléments ou pièces d’armes, accessoires, chargeurs, munitions et projectiles comme étant prohibés, à autorisation restreinte ou sans restriction, DORS/2020‑96 [le Règlement], en prenant le décret CP 2020‑0298.

[7] Le Règlement, pris en vertu du paragraphe 117.15(1) du Code criminel, LRC 1985, c C‑46, désigne neuf principaux modèles d’armes à feu comme étant prohibés. Le Règlement interdit également les armes à feu des mêmes modèles que ceux énumérés « qui comportent des variantes ou qui ont subi des modifications », dont des variantes connues et inconnues.

[8] Parallèlement au Règlement, la gouverneure en conseil a pris le Décret fixant une période d’amnistie (2020), DORS/2020‑97, qui fixe une période d’amnistie de deux ans en cas de possession d’une arme à feu nouvellement prohibée.

[9] Les Services spécialisés de soutien en matière d’armes à feu de la Gendarmerie royale du Canada [la GRC] produisent et publient des évaluations techniques des armes à feu qui ne sont pas nommées dans le Règlement, dans lesquelles ils indiquent si les armes à feu évaluées sont prohibées parce qu’il s’agit de variantes inconnues des armes à feu prohibées énumérées dans le Règlement. Ces évaluations techniques sont reproduites dans le Tableau de référence des armes à feu [le TRAF].

[10] Les demandeurs ont appris que la GRC avait établi que leurs armes à feu de la « série Modern » – à savoir les fusils Modern Varmint, Modern Hunter et Modern Sporter [la série Modern] – étaient des variantes d’armes à feu prohibées selon le Règlement. En réponse, Magnum Machine Ltd. [Magnum] s’est initialement jointe à l’une des instances qui avaient été gérées conjointement par notre Cour et où les parties demandaient le contrôle judiciaire du Règlement.

[11] Le 30 octobre 2020, les demandeurs ont reçu une lettre du Bureau du contrôleur des armes à feu [CAF], qui leur rappelait que certaines armes à feu à autorisation restreinte ou sans autorisation avaient été reclassifiées en tant qu’armes prohibées à la suite de la promulgation du Règlement. Cette lettre faisait également état d’une conversation téléphonique récente entre le demandeur Richard Timmins – fondateur et président de Magnum – et un employé du Bureau du CAF, au cours de laquelle M. Timmins a dit que les demandeurs avaient l’intention de continuer de vendre les armes à feu de la série Modern comme des armes à feu sans restriction même si elles étaient nouvellement prohibées. La raison invoquée par M. Timmins était que ces armes ne sont pas expressément mentionnées dans le Règlement et qu’elles ont simplement été ajoutées au TRAF, qui est [traduction] « un document administratif et n’exprime donc qu’une opinion ». Le Bureau du CAF expliquait ensuite dans cette lettre que, même si elles ne sont pas expressément mentionnées dans le Règlement, les armes à feu de la série Modern ont été évaluées par la GRC, qui a établi qu’il s’agit de variantes d’armes à feu des modèles communément appelés fusils M16, AR‑10 et AR‑15, comme les armes à feu énumérées à l’article 87 du Règlement. Le Bureau du CAF conclut donc que les armes à feu de la série Modern sont prohibées depuis le 1er mai 2020. Il exige que les demandeurs cessent de fabriquer et de vendre les armes à feu de la série Modern et d’en faire la publicité, et leur demande de lui faire parvenir, au plus tard le 10 novembre 2020, un registre complet de toutes les armes à feu qu’ils ont vendues et livrées depuis le 1er mai 2020. Le Bureau du CAF rappelle également aux demandeurs que toute personne ayant acheté une arme à feu de la série Modern après le 1er mai 2020 ne sera pas protégée par le Décret fixant une période d’amnistie et pourrait donc faire l’objet d’accusations criminelles.

[12] Après avoir reçu la lettre du 30 octobre 2020, les demandeurs se sont désistés de leur demande de contrôle judiciaire et ont par la suite intenté la présente action.

[13] Pour appuyer leur action, les demandeurs font valoir que William Etter et Murray Smith ont commis un délit de faute dans l’exercice d’une charge publique, car ils ont excédé leur pouvoir à titre de membres de la GRC en reclassifiant les armes à feu de la série Modern en tant qu’armes prohibées. Ils soutiennent en outre que Ken Dobie et Jennifer Hart‑MacDonald ont également commis un délit de faute dans l’exercice d’une charge publique, car ils ont excédé leur pouvoir à titre de préposé aux armes à feu et de contrôleuse des armes à feu en exigeant que les demandeurs cessent de fabriquer et de vendre les armes à feu de la série Modern et d’en faire la publicité.

[14] De façon générale, les allégations de faute dans l’exercice d’une charge publique reposent sur les rôles qu’ont respectivement joués les défendeurs dans la reclassification des armes à feu de la série Modern et dans la communication des résultats de cette reclassification.

[15] Les demandeurs sollicitent également des dommages‑intérêts pour une [traduction] « confiscation prévue par la loi » ou [traduction] « appropriation réglementaire », une [traduction] « atteinte aux rapports économiques » et un manquement à une obligation de diligence. M. Timmins demande en outre des dommages‑intérêts sur le fondement du paragraphe 24(1) de la Charte pour des violations alléguées des articles 7 et 8 et de l’alinéa 11g).

III. Les questions en litige

[16] La requête en radiation des défendeurs soulève les questions suivantes :

  1. Les allégations de faute dans l’exercice d’une charge publique formulées contre les défendeurs poursuivis personnellement devraient‑elles être radiées au motif qu’elles ne révèlent aucune cause d’action valable, qu’elles sont frivoles et vexatoires, et qu’elles constituent un abus de procédure?

  2. Les autres parties qui concernent les dommages‑intérêts supplémentaires devraient‑elles être radiées?

[17] La requête concernant le conflit d’intérêts présentée par les demandeurs soulève la question suivante :

  1. Y a‑t‑il conflit d’intérêts entre Sa Majesté la Reine et les défendeurs poursuivis personnellement et, dans l’affirmative, les défendeurs poursuivis personnellement devraient‑ils être tenus d’être représentés par des avocats distincts?

IV. Analyse

A. Les allégations de faute dans l’exercice d’une charge publique formulées contre les défendeurs poursuivis personnellement devraient‑elles être radiées au motif qu’elles ne révèlent aucune cause d’action valable, qu’elles sont frivoles et vexatoires, et qu’elles constituent un abus de procédure?

[18] Les défendeurs soutiennent que la déclaration modifiée des demandeurs ne contient pas les allégations de fait pouvant satisfaire aux éléments requis pour les causes d’action invoquées et qu’il est donc évident et manifeste que leur action ne saurait aboutir. Les défendeurs affirment donc que cette déclaration devrait être radiée (Hunt c Carey Canada Inc., [1990] 2 RCS 959 à la p 980; Sivak c Canada, 2012 CF 272 au para 91). Plus particulièrement, lorsqu’il y a des allégations de faute dans l’exercice d’une charge publique, le fait de ne pas fournir de précisions sur ces allégations porte un coup fatal à l’action (Merchant Law Group c Canada (Agence du revenu), 2010 CAF 184 aux para 34‑35 [Merchant]).

[19] Les défendeurs font valoir que : 1) les demandeurs n’ont pas allégué des faits substantiels pour démontrer que les défendeurs poursuivis personnellement avaient une intention malicieuse de leur nuire; 2) les demandeurs ont plutôt allégué des faits indiquant que les défendeurs poursuivis personnellement ont agi conformément aux responsabilités qui leur avaient été confiées; et 3) les demandeurs s’appuient sur des déclarations laconiques et péjoratives, ce qui va à l’encontre de la jurisprudence (voir Merchant au para 34).

[20] Le mémoire des demandeurs est long. Il dépasse la limite de 30 pages imposée par les Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106 (art 70(4)). Il fait 56 pages et 29 de ces pages sont consacrées à la description du contexte et aux allégations de faute dans l’exercice d’une charge publique. Je résume ci‑après les arguments concernant cette faute.

[21] Essentiellement, les demandeurs soutiennent que les actes des défendeurs – c’est‑à‑dire le rôle qu’ils ont joué dans la reclassification des armes à feu de la série Modern et dans la communication des résultats de cette reclassification – ont causé un préjudice financier à Magnum et ont dépouillé les demandeurs des privilèges associés au droit de détention de permis. Les défendeurs ont agi en sachant que leurs actes ne s’inscrivaient pas dans la portée des obligations que leur impose la loi, qu’ils n’avaient pas le pouvoir de déterminer si les armes à feu de la série Modern étaient des armes prohibées, et qu’ils ne pouvaient pas exiger la conformité des demandeurs sur la base d’une simple opinion. Le TRAF n’est pas un document requis par la loi et rien ne prouve que le CAF a le pouvoir d’agir en se fondant sur des opinions énoncées dans ce tableau; plus particulièrement, le CAF n’a pas la compétence ni le pouvoir de mettre fin à l’exécution de contrats de vente.

[22] De plus, les demandeurs ont spécifiquement soulevé un point sur lequel ils ne sont pas d’accord avec les défendeurs. Les demandeurs prétendent que, selon les entrées antérieures du TRAF, les armes à feu du modèle AR‑10 ont été désignées comme des armes à autorisation restreinte avant le 1er mai 2020 même si les défendeurs affirment le contraire. Ils allèguent que la faute dans l’exercice d’une charge publique a été commise car les défendeurs poursuivis personnellement n’ont pas tenu compte de la désignation antérieure des armes à feu du modèle AR‑10 et ont récemment établi que les armes à feu de la série Modern étaient une variante des armes à feu du modèle AR‑10.

[23] Le point de départ de mon analyse est l’article 221 des Règles des Cours fédérales :

221 (1) À tout moment, la Cour peut, sur requête, ordonner la radiation de tout ou partie d’un acte de procédure, avec ou sans autorisation de le modifier, au motif, selon le cas :

 

221 (1) On motion, the Court may, at any time, order that a pleading, or anything contained therein, be struck out, with or without leave to amend, on the ground that it

 

a) qu’il ne révèle aucune cause d’action ou de défense valable;

 

(a) discloses no reasonable cause of action or defence, as the case may be,

 

b) qu’il n’est pas pertinent ou qu’il est redondant;

 

(b) is immaterial or redundant,

 

c) qu’il est scandaleux, frivole ou vexatoire;

 

(c) is scandalous, frivolous or vexatious,

 

d) qu’il risque de nuire à l’instruction équitable de l’action ou de la retarder;

 

(d) may prejudice or delay the fair trial of the action,

 

e) qu’il diverge d’un acte de procédure antérieur;

 

(e) constitutes a departure from a previous pleading, or

 

f) qu’il constitue autrement un abus de procédure.

 

(f) is otherwise an abuse of the process of the Court,

 

Elle peut aussi ordonner que l’action soit rejetée ou qu’un jugement soit enregistré en conséquence.

and may order the action be dismissed or judgment entered accordingly.

[24] Il est évident et manifeste qu’une déclaration ne révèle aucune cause d’action valable lorsque le demandeur n’allègue pas des « faits substantiels suffisants » (voir Merchant, aux para 30‑34; Mancuso c Canada (Santé Nationale et Bien‑être Social), 2015 CAF 227 aux para 16‑20). L’obligation d’invoquer des faits substantiels suffisants s’applique tout particulièrement aux allégations de délit de faute dans l’exercice d’une charge publique, car un demandeur ne peut pas s’appuyer sur des conclusions laconiques pour alléguer qu’il y a eu abus de pouvoir ou mauvaise foi (Merchant, au para 34).

[25] Toutefois, en ce qui concerne le critère applicable aux requêtes en radiation, la Cour suprême du Canada a fait la mise en garde suivante : « Il s’agit là d’un critère rigoureux. Les faits allégués doivent être tenus pour avérés. Ensuite, il faut se demander s’il est “évident et manifeste” que l’action doit être rejetée. Ce n’est que si la déclaration est vouée à l’échec parce qu’elle contient un “vice fondamental” que le demandeur devrait être privé d’un jugement » (Succession Odhavji c Woodhouse, 2003 CSC 69 au para 15 [Odhavji]).

[26] La Cour suprême du Canada a récemment reformulé le critère applicable au délit de faute dans l’exercice d’une charge publique dans l’arrêt Ontario (Procureur général) c Clark, 2021 CSC 18 :

[22] Les éléments constitutifs et la portée du délit de faute dans l’exercice d’une charge publique ne sont pas contestés dans le présent pourvoi. Pour obtenir gain de cause dans son action pour faute dans l’exercice d’une charge publique, le demandeur doit démontrer que le fonctionnaire public a agi en cette qualité de manière illégitime et délibérée et qu’il était conscient du caractère illégitime de sa conduite et de la probabilité qu’elle cause un préjudice au demandeur (Succession Odhavji c. Woodhouse, [2003] 3 R.C.S. 263, par. 23, le juge Iacobucci).

[23] Les actes illégitimes qui donnent ouverture à une action pour faute dans l’exercice d’une charge publique relèvent généralement de l’une de trois catégories, soit : lorsque l’acte outrepasse les pouvoirs conférés à la personne qui exerce une charge publique, lorsque le pouvoir est exercé à une fin irrégulière ou lorsqu’il y a manquement à une obligation prévue par la loi (Odhavji, par. 24). La condition minimale de la connaissance subjective exige que l’auteur de l’acte reproché ait fait preuve de « témérité subjective » ou « sciemment [d’]insouciance » à l’égard de la légitimité de ses actes et de leurs conséquences pour le demandeur (Odhavji, par. 25 et 29; Powder Mountain Resorts Ltd. c. British Columbia (2001), 94 B.C.L.R. (3d) 14 (C.A.), par. 7; Three Rivers District Council c. Bank of England (No. 3) (2000), [2003] 2 A.C. 1 (H.L.), p. 194‑195, le lord Steyn).

[27] En résumé, les éléments constitutifs du délit de faute dans l’exercice d’une charge publique sont les suivants : 1) l’auteur du délit a agi en qualité de fonctionnaire public de manière illégitime et délibérée; et 2) l’auteur du délit était conscient du caractère illégitime de sa conduite et de la probabilité qu’elle cause un préjudice au demandeur.

[28] Dans l’arrêt Odhavji, la Cour suprême a donné des indications utiles pour clarifier l’élément moral de ce délit :

22 Quels sont alors les éléments essentiels du délit — du moins dans la mesure où il est nécessaire de définir les questions que soulèvent les actes de procédure dans le présent pourvoi? Dans l’arrêt Three Rivers, la Chambre des lords a statué qu’il y avait deux façons — que je regrouperai sous les catégories A et B — de commettre le délit de faute dans l’exercice d’une charge publique. On retrouve dans la catégorie A la conduite qui vise précisément à causer préjudice à une personne ou à une catégorie de personnes. La catégorie B met en cause le fonctionnaire public qui agit en sachant qu’il n’est pas habilité à exécuter l’acte qu’on lui reproche et que cet acte causera vraisemblablement préjudice au demandeur. Bon nombre de tribunaux canadiens ont souscrit à cette interprétation du délit : voir par exemple Powder Mountain Resorts, précité; Alberta (Minister of Public Works, Supply and Services) (C.A.), précité; et Granite Power Corp. c. Ontario, [2002] O.J. No. 2188 (QL) (C.S.J.). Il importe cependant de garder à l’esprit que ces deux catégories ne représentent que deux façons différentes pour le fonctionnaire public de commettre le délit; dans chaque cas, le demandeur doit faire la preuve des éléments constitutifs du délit. Il est donc nécessaire de se pencher sur les éléments communs à chacune des formes du délit.

23 Il existe à mon avis deux éléments communs. Premièrement, le fonctionnaire public doit avoir agi en cette qualité de manière illégitime et délibérée. Deuxièmement, le fonctionnaire public doit avoir été conscient du caractère non seulement illégitime de sa conduite, mais aussi de la probabilité de préjudice à l’égard du demandeur. C’est la manière dont le demandeur prouve les éléments propres au délit qui permet de distinguer les formes que prend la faute dans l’exercice d’une charge publique. Dans la catégorie B, le demandeur doit établir l’existence indépendante des deux éléments constituant le délit. Dans la catégorie A, le fait que le fonctionnaire public ait agi expressément dans l’intention de léser le demandeur suffit pour établir l’existence de chaque élément du délit, étant donné qu’un fonctionnaire public n’est pas habilité à exercer ses pouvoirs à une fin irrégulière, comme le fait de causer délibérément préjudice à un membre du public. Dans les deux cas, le délit se caractérise par une insouciance délibérée à l’égard d’une fonction officielle conjuguée au fait de savoir que l’inconduite sera vraisemblablement préjudiciable au demandeur.

[29] Les demandeurs ont décrit les actes illégitimes de Murray Smith et William Etter aux paragraphes 8 à 10 de leur déclaration modifiée :

[traduction]

8. Le paragraphe 117.15(2) [du Code criminel] n’autorise pas le gouverneur en conseil à déléguer le pouvoir de désigner certaines armes à feu comme étant prohibées aux personnes occupant le poste de celui de Murray Smith ou William Etter.

9. Le [Règlement] n’autorise pas ou n’habilite pas les SSSAF ou la GRC à créer ou à imposer des interdictions à l’égard des armes à feu, ou encore à désigner des armes à feu comme étant prohibées en vertu [du Règlement].

10. En agissant de la sorte, William Etter, Murray Smith, les SSSAF et la GRC ont outrepassé leurs compétences.

[30] Au paragraphe 11 de leur déclaration modifiée, les demandeurs précisent que les défendeurs William Etter et Murray Smith savaient que la reclassification des armes à feu de la série Modern comme une variante des armes à feu du modèle AR‑10 – et donc des armes prohibées – leur causerait un préjudice. Les demandeurs décrivent ce préjudice, qui est surtout d’ordre financier, aux paragraphes 93 à 98 de leur déclaration modifiée.

[31] L’allégation de faute dans l’exercice d’une charge publique formulée par les demandeurs contre Jennifer Hart‑MacDonald et Ken Dobie est fort clairement énoncée au paragraphe 14 de la déclaration modifiée :

[traduction]

14. Jennifer Hart‑MacDonald [sic] et Ken Dobie ont commis une faute dans l’exercice de leurs fonctions de fonctionnaires à l’égard de la demanderesse ATRS en demandant des renseignements et en transmettant des communications qui ont mené à l’envoi de la lettre datée du 30 octobre 2020, où l’on exige et ordonne à [ATRS] de cesser la fabrication des armes à feu de la série [Modern] ainsi que de fournir des documents concernant ces armes à feu parce que, selon les fonctionnaires visés, ces armes à feu sont désormais prohibées, comme l’indique le [TRAF] modifié. En soutenant que, d’après le TRAF, les armes à feu de la série [Modern] étaient prohibées, ils ont agi de manière illégitime et ont outrepassé le pouvoir et les obligations qui leur incombent en vertu de la Loi sur les armes à feu et du Code criminel et de ses règlements d’application. D’autres précisions sont fournies dans la présente déclaration.

[32] Les demandeurs font également valoir que la GRC n’a pas le pouvoir d’interdire des armes à feu et que les défendeurs Jennifer Hart‑MacDonald et Ken Dobie ont donc commis une faute dans l’exercice d’une charge publique en utilisant les classifications de la GRC pour exiger leur conformité, comme en fait état la lettre du 30 octobre 2020.

[33] Je souscris certes à l’opinion des défendeurs selon laquelle la déclaration modifiée porte parfois à confusion et est difficile à suivre, mais il en faut davantage pour radier cette déclaration. À mon avis, les éléments fondamentaux du délit de faute dans l’exercice d’une charge publique sont suffisamment bien exposés aux paragraphes 8 à 10 et au paragraphe 14. Par exemple, les demandeurs allèguent que le Code criminel, le Règlement ou la Loi sur les armes à feu ne donnent pas aux défendeurs le pouvoir de modifier la désignation des armes à feu, mais que les défendeurs l’ont tout de même fait, ce qui était illégitime, et qu’ils ont ensuite exigé leur conformité en s’appuyant sur ces nouvelles désignations alors qu’ils savaient qu’elles ne faisaient pas autorité. De plus, les défendeurs Murray Smith et William Etter ont agi de manière illégitime lorsqu’ils ont désigné les armes à feu de la série Modern comme une variante des armes à feu du modèle AR‑10, même si les évaluations antérieures ne les désignaient pas comme telles. Les défendeurs poursuivis personnellement savaient que cette désignation causerait un préjudice aux demandeurs, du moins sur le plan financier, car leurs activités reposaient sur la vente d’armes à feu de la série Modern.

[34] Pour le moment, il importe peu de savoir si cet argument est solide ou exact. De plus, il conviendrait mieux que la Cour tranche le débat actuel sur la classification des armes à feu du modèle AR‑10 avant le 1er mai 2020 à l’instruction au fond. J’estime que les demandeurs ont énoncé des éléments fondamentaux qui correspondent aux éléments constitutifs du délit de faute dans l’exercice d’une charge publique de catégorie B – lorsqu’ils ont affirmé que les auteurs du délit savaient que leur conduite était illégitime et qu’elle leur causerait un préjudice – et que leurs allégations concernant cette faute ne devraient donc pas être radiées au présent stade.

[35] Cependant, le rejet de la requête en radiation ne constitue pas une approbation des allégations des demandeurs et, comme l’a souligné la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Odjavhi, « [l]es demandeurs n’auront certes pas la tâche facile, mais on ne devrait pas pour autant les priver de la possibilité de prouver chacun des éléments constitutifs du délit » (Odjavhi, au para 42).

B. Les autres parties qui concernent les dommages‑intérêts supplémentaires devraient‑elles être radiées?

[36] À mon avis, la Cour peut disposer rapidement de l’allégation d’atteinte intentionnelle aux rapports économiques, lequel délit a été décrit par la Cour suprême du Canada comme « l’infliction intentionnelle par A (le défendeur) d’un préjudice économique à C (le demandeur) par des moyens illégaux contre B (le tiers) » (A.I. Enterprises Ltd. c Bram Enterprises Ltd., 2014 CSC 12 au para 23). Les éléments constitutifs de ce délit ne sont pas décrits aux paragraphes 102 à 104 de la déclaration modifiée. Les demandeurs semblent plutôt y affirmer que les défendeurs ont porté atteinte à leurs rapports économiques en mettant en péril leurs contrats pour la vente d’armes à feu qui avaient été payées avant le 1er mai 2020. Cette allégation ne satisfait pas aux conditions nécessaires pour prouver l’existence d’une atteinte intentionnelle aux rapports économiques et notre Cour peut radier les allégations concernant les dommages‑intérêts pour ce type de délit. De plus, les parties ont informé la Cour que depuis le dépôt de la déclaration des demandeurs, elles ont réglé leur différend concernant les armes à feu qui ont été commandées, payées et fabriquées avant le 1er mai 2020.

[37] Je suis d’avis que les défendeurs avaient également raison de dire que les éléments constitutifs de l’expropriation de fait n’étaient pas suffisamment allégués dans la déclaration.

[38] Les paragraphes 100 et 101 de la déclaration modifiée contiennent des allégations concernant l’expropriation. Les demandeurs y allèguent qu’ils sont privés de la jouissance de leurs biens parce que les armes à feu de la série Modern sont désormais prohibées et qu’ils ne peuvent plus les utiliser pour le tir sportif ou la chasse. Les demandeurs soutiennent en outre que les défendeurs tirent un avantage de la situation, car [traduction] « ces armes à feu ne peuvent maintenant plus être utilisées pour tuer le plus grand nombre possible de personnes dans le plus court laps de temps possible ».

[39] Dans l’arrêt Manitoba Fisheries Ltd. c La Reine, [1979] 1 RCS 101 [Manitoba Fisheries], la Cour suprême a conclu qu’il y avait eu expropriation parce que la société Manitoba Fisheries a perdu un bien qu’un organisme fédéral a acquis (Mariner Real Estate Ltd. v Nova Scotia (Attorney General), 1999 NSCA 98 au para 97; Manitoba Fisheries à la p 110). S’agissant de la requête en radiation, je conviens que les demandeurs ont présenté des faits afin de prouver qu’ils ont été privés de la jouissance de leurs biens – les armes à feu de la série Modern – parce qu’ils ne peuvent plus utiliser leurs armes à feu, sauf si les conditions limitées établies dans le Décret fixant une période d’amnistie sont remplies. Toutefois, les demandeurs n’ont invoqué aucun fait pour étayer la conclusion selon laquelle l’acquisition des biens par le gouvernement résulte du fait que les demandeurs en ont été dépossédés. Dire que les armes à feu en question ne peuvent plus être utilisées à des fins illégales – par exemple pour commettre des fusillades de masse – ne constitue pas une acquisition d’un bien par le gouvernement; il s’agissait plutôt de l’objectif public du Règlement, tel qu’il a été énoncé dans le résumé de l’étude d’impact de la réglementation qui l’accompagnait.

[40] Je conviens également que les allégations des demandeurs fondées sur la Charte devraient être radiées. Comme il a été mentionné dans l’arrêt Mancuso, précité :

[21] Il n’existe pas de règles distinctes visant les actes de procédure dans les affaires relatives à la Charte. L’exigence des faits substantiels vise autant les moyens tirés de violations de la Charte qu’aux moyens tirés de la common law. La Cour suprême du Canada a défini par sa jurisprudence l’essence de chaque droit garanti par la Charte, et le demandeur est tenu d’alléguer des faits substantiels suffisants pour répondre au critère applicable à la disposition en cause. Il ne s’agit pas là d’une simple formalité, « au contraire, elle est essentielle à un bon examen des questions relatives à la Charte » : Mackay c Manitoba, [1989] 2 R.C.S. 357, à la page 361.

[41] L’article 11 de la Charte prévoit que « tout inculpé » a des droits précis. Cette disposition ne s’applique pas en l’espèce, car les demandeurs n’ont pas été inculpés.

[42] L’article 8 dispose que « [c]hacun a droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives ». Il y a violation des droits garantis par l’article 8 lorsqu’une action constitue une fouille, une perquisition ou une saisie en ce qu’elle portait atteinte aux attentes raisonnables au respect de la vie privée d’une personne et que la fouille, la perquisition ou la saisie était elle‑même abusive (R c Jones, 2017 CSC 60 au para 11).

[43] L’article 7 dispose que « [c]hacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être portée atteinte à ce droit qu’en conformité avec les principes de justice fondamentale ». Il y a violation des droits garantis par l’article 7 lorsqu’un individu porte atteinte au droit à la vie et à la liberté d’un autre individu ainsi qu’à la sécurité de sa personne et que cette atteinte ne respecte pas les principes de justice fondamentale (Charkaoui c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CSC 9 au para 12).

[44] Dans leur déclaration modifiée, les demandeurs n’ont formulé aucun argument clair en ce qui a trait à l’article 7 ou 8 de la Charte. En fait, les articles 7 et 8 ne sont mentionnés explicitement qu’au paragraphe 1 (où les demandeurs réclament des dommages‑intérêts pour des violations de la Charte), au paragraphe 128 (où les demandeurs déclarent simplement que leurs droits ont été violés), et au paragraphe 152 (le dernier paragraphe de la déclaration où les demandeurs précisent les sources sur lesquelles ils se fondent). Les demandeurs n’ont parlé d’aucune fouille, perquisition ou saisie dont ils ont fait l’objet. Qui plus est, les demandeurs ne précisent pas de quel droit ils ont été privés en raison de l’application du Règlement ou des actes des défendeurs. Les termes « vie », « liberté » et « sécurité » ne sont pas employés dans la déclaration modifiée, qui ne contient également aucun fait permettant de décrire comment les demandeurs ont été privés de leur droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de leur personne.

[45] Les demandeurs soulignent plutôt, aux paragraphes 129 à 136 de leur déclaration modifiée, qu’ils craignent de faire l’objet de poursuites pénales parce qu’ils possèdent des armes à feu prohibées. Ces craintes sont hypothétiques et ne constituent pas des faits substantiels susceptibles d’appuyer leurs allégations fondées sur la Charte.

[46] En définitive, les allégations fondées sur la Charte doivent être radiées parce que les demandeurs n’ont pas fourni suffisamment de faits substantiels et qu’il est donc évident et manifeste que leur déclaration ne révèle aucune cause d’action valable.

[47] Enfin, je conviens également que toute allégation de négligence formulée par les demandeurs devrait être radiée. Bien que les demandeurs n’utilisent pas le terme « négligence » dans leur déclaration modifiée, ils y affirment, au paragraphe 122, que les défendeurs ont une obligation de diligence.

[48] Selon mon interprétation, fort libérale, du paragraphe 122, je crois comprendre que les demandeurs affirment que le fait pour les propriétaires d’armes à feu de s’appuyer sur le TRAF et les lois en matière d’armes à feu fait naître une obligation de diligence. Aux paragraphes 123 à 125, les demandeurs insistent sur le fait qu’ils n’ont pas été avisés de la reclassification des armes à feu de la série Modern et que les défendeurs étaient tenus de les en informer. Je déduis que ces paragraphes avaient pour but de décrire une norme de diligence et une violation de cette norme, car ils suivent le paragraphe où il est fait mention de l’obligation de diligence. Le préjudice décrit dans l’ensemble de la déclaration modifiée est surtout d’ordre financier; il s’agit de la perte de ventes d’armes à feu de la série Modern.

[49] L’allégation de négligence, si une telle allégation a été formulée, comporte donc d’importantes lacunes. Après avoir lu la déclaration modifiée, il ne m’apparaît pas clairement en quoi l’omission d’aviser les demandeurs – du Règlement et des ajouts au TRAF de la GRC – constituait une cause sine qua non du préjudice subi par les demandeurs. De plus, cette allégation est vague. Comme l’a déclaré le juge Rennie au paragraphe 19 de l’arrêt Mancuso, « [l]’acte de procédure doit indiquer au défendeur par qui, quand, où, comment et de quelle façon sa responsabilité a été engagée ». À mon avis, l’allégation de négligence est trop imprécise et n’est pas assez détaillée. Elle ne communique pas l’information nécessaire aux défendeurs et devrait être radiée.

[50] Dans leur dossier de requête en réponse, les demandeurs semblent avancer d’autres arguments à l’appui de leur allégation de négligence – soit des arguments qui ressemblent à ceux sur lesquels reposaient leurs allégations de faute dans l’exercice d’une charge publique. Cependant, le critère applicable aux requêtes en radiation est que la déclaration modifiée doit révéler une cause d’action valable, ce qui, à mon avis, n’est pas le cas en l’espèce.

C. Y a‑t‑il conflit d’intérêts entre Sa Majesté la Reine et les défendeurs poursuivis personnellement et, dans l’affirmative, les défendeurs poursuivis personnellement devraient‑ils être tenus d’être représentés par des avocats distincts?

[51] Les demandeurs soutiennent qu’il y a conflit d’intérêts parce que les divers défendeurs ont des opinions opposées quant au désaccord qui existe à l’égard des modifications apportées au TRAF et à la classification des armes à feu à la suite de la promulgation du Règlement.

[52] Plus précisément, dans la lettre du 30 octobre 2020, Ken Dobie et Jennifer Hart‑MacDonald informaient les demandeurs qu’ils ne devaient pas exécuter les commandes passées avant la promulgation du Règlement, tandis que Sa Majesté la Reine affirmait le contraire. De plus, Ken Dobie et Jennifer Hart‑MacDonald se sont appuyés sur le TRAF pour ordonner aux demandeurs de se conformer à ces directives, même si Murray Smith, William Etter et Sa Majesté la Reine étaient plutôt d’avis que le TRAF ne faisait pas autorité. De même, Ken Dobie et Jennifer Hart‑MacDonald ont demandé les noms des clients qui avaient acheté les armes à feu en question, mais cette exigence n’émanait pas de Sa Majesté la Reine. Les demandeurs prétendent que, en raison de ces actes, la nature de la responsabilité des défendeurs poursuivis personnellement est différente. Il se peut même que les défendeurs formulent des allégations les uns contre les autres.

[53] Les demandeurs soulèvent d’autres allégations de conflit d’intérêts qui reposent sur les différents moyens que peuvent faire valoir les défendeurs poursuivis personnellement.

[54] Selon les demandeurs, ces difficultés sont accentuées par le fait que Murray Smith et le procureur général ont invoqué la confidentialité des renseignements fondée sur le privilège du Cabinet dans le cadre des demandes de contrôle judiciaire concernant le Règlement actuellement en instance. Par conséquent, ils ne pourront pas transmettre des renseignements pertinents aux autres défendeurs. Les défendeurs subissent donc un préjudice parce qu’ils sont représentés par le même avocat.

[55] La Cour tient d’abord à souligner que les demandeurs ont déposé leur requête avant même de recevoir la défense. À mon avis, cette requête peut être tranchée rapidement au motif qu’elle repose sur des hypothèses. Les demandeurs ont tenté de décrire les différents points de vue des défendeurs et d’expliquer en quoi ils se contredisent. Les défendeurs n’ont toutefois pas présenté de défense et les demandeurs n’ont donc aucun moyen de savoir quels arguments seront avancés. Les conflits d’intérêts entre les défendeurs que les demandeurs allèguent confirment leur propre compréhension des faits. Les défendeurs ont le droit d’adopter un point de vue différent dans leur défense. Cette requête est prématurée tant qu’une défense n’est pas présentée.

V. Conclusion

[56] Pour les motifs énoncés ci‑dessus, je rejette la requête concernant le conflit d’intérêts avec dépens. Je rejette également la requête en radiation des allégations de faute dans l’exercice d’une charge publique, mais j’autorise la radiation des autres allégations concernant les dommages‑intérêts supplémentaires. Compte tenu de ce résultat mitigé, aucuns dépens ne seront adjugés relativement à la requête en radiation.


ORDONNANCE dans le dossier T‑1415‑20

LA COUR ORDONNE :

  1. La requête en radiation des défendeurs est accueillie en partie.

  2. Les allégations concernant a) les dommages‑intérêts pour une prétendue [traduction] « expropriation de fait », [traduction] « confiscation prévue par la loi » ou [traduction] « appropriation réglementaire »; b) les dommages‑intérêts au titre du paragraphe 24(1) de la Charte canadienne des droits et libertés pour des violations alléguées des articles 7 et 8 et de l’alinéa 11g); c) les dommages‑intérêts pour une prétendue [traduction] « atteinte aux rapports économiques »; et d) les dommages‑intérêts pour manquement à une obligation de diligence sont radiées, sans autorisation de les modifier.

  3. Aucuns dépens ne sont adjugés relativement à la requête en radiation.

  4. La requête concernant le conflit d’intérêts présentée par les demandeurs est rejetée.

  5. Des dépens d’un montant global de 1 000,00 $ doivent être versés aux défendeurs relativement à la requête concernant le conflit d’intérêts.

« Jocelyne Gagné »

Juge en chef adjointe

Traduction certifiée conforme

Manon Pouliot

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T‑1415‑20

 

INTITULÉ :

MAGNUM MACHINE LTD., FAISANT AFFAIRE SOUS LE NOM D’ALBERTA TACTICAL RIFLE SUPPLY, ET RICHARD TIMMINS c SA MAJESTÉ LA REINE, F.A. WILLIAM ETTER, MURRAY SMITH, KEN DOBIE ET JENNIFER HART‑MACDONALD

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

PAR VIDÉOCONFÉRENCE

 

DATE DE L’AUDIENCE :

le 29 juin 2021

 

ORDONNANCE ET MOTIFS :

LA juge en chef adjointe GAGNÉ

 

DATE DES MOTIFS :

le 21 octobre 2021

 

COMPARUTIONS :

Edward L. Burlew

 

Pour les demandeurs

 

John J. Lucki

John Provart

 

pour les défendeurs

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

pour les défendeurs

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.