Date : 20030730
Dossier : T-793-02
Référence : 2003 CF 935
TORONTO (ONTARIO), LE 30 JUILLET 2003
EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O'REILLY
ENTRE :
RÉVÉREND FRÈRE MICHEL D. ETHIER
et FRÈRE JAMES R. HOAD
demandeurs
et
SA MAJESTÉ LA REINE
défenderesse
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
[1] Le révérend frère Éthier et le frère Hoad demandent à la Cour d'annuler la suspension de l'action qu'ils ont intentée à Sa Majesté. Dans leur action, ils sollicitent un jugement déclarant que les dispositions législatives concernant la marijuana sont inconstitutionnelles et qu'elles ne peuvent être invoquées contre eux en leur qualité de membres de la « Tarzan's Mission of the Sacred Herb » , une division de l'Assemblée de l'Église de l'Univers. Le protonotaire Lafrenière a suspendu l'instance le 22 juillet 2002 en attendant l'issue d'une action similaire (dossier no T-1805-98) à laquelle les demandeurs avaient déjà été parties et qui est toujours pendante devant notre Cour.
[2] Les demandeurs ont mal compris l'effet de la suspension. Ils ont cru qu'elle empêcherait Sa Majesté d'invoquer les dispositions législatives sur la marijuana contre eux tant que la Cour ne se prononcerait pas sur les points de droit. Toutefois, des accusations ont depuis été portées contre eux et ils doivent bientôt comparaître devant le tribunal.
[3] Les demandeurs sollicitent la levée de la suspension pour pouvoir obtenir une injonction immédiate contre Sa Majesté. Ils estiment que cette mesure leur faciliterait la contestation des charges retenues contre eux et empêcherait le dépôt d'autres accusations. Ils sont d'avis que l'évolution récente de la jurisprudence justifie la poursuite de leur action. Je comprends leur situation mais ne puis leur accorder la réparation qu'ils sollicitent.
[4] La Cour ne peut lever une suspension d'instance que dans des circonstances exceptionnelles qui ne prêtent pas à controverse ou lorsque les faits ont sensiblement changé depuis que la suspension a été ordonnée (Del Zotto c. Ministre du Revenu national, [1996] 2 C.T.C. 22 (C.A.F.). Le protonotaire Lafrenière a accordé la suspension pour éviter que Sa Majesté ait à contester simultanément deux actions en invoquant des moyens identiques. Sur ce plan, rien n'a changé. L'action parallèle est toujours pendante devant la Cour. Les demandeurs ont souligné l'importance de la jurisprudence récente dans laquelle les tribunaux ont émis des doutes au sujet de la capacité des autorités de faire respecter les dispositions législatives actuelles portant sur la marijuana (voir, par exemple, l'arrêt R. c. J.P., [2003] O.J. no 1949 (C.S.J.)). Il ressort de cette jurisprudence que le droit n'est pas encore fixé sur la question. Ces décisions ne remettent cependant pas en cause les motifs sur lesquels le protonotaire s'est fondé pour suspendre l'instance.
[5] Les demandeurs réclament également une injonction contre Sa Majesté. Ils n'ont toutefois pas essayé de satisfaire au critère bien connu posé dans l'arrêt RJR - MacDonald Inc. c. Canada (Procureur général), [1994]1 R.C.S. 311. Ils se contentent d'affirmer qu'il est « incontestable » que leurs droits constitutionnels sont violés lorsque Sa Majesté applique une loi inconstitutionnelle. Le prononcé d'une injonction serait donc justifié selon eux. Toutefois, ainsi que la défenderesse le souligne, une injonction ne peut être prononcée contre l'État (Loi sur la responsabilité civile de l'État et le contentieux administratif, L.R.C. (1985), ch. C-50, par. 22(1); Mundle c. Canada, [1994] A.C.F. no 1342).
[6] Je dois donc rejeter la présente requête. Rien n'empêche évidemment les demandeurs d'invoquer les arguments susmentionnés pour répondre aux accusations portées contre eux.
[7] L'avocat de la défenderesse réclame un montant limité de dépens pour la présente requête. Je ne puis reprocher aux demandeurs d'avoir cherché à obtenir une réparation devant notre Cour, compte tenu de l'évolution récente du droit et de leur situation personnelle. J'estime que les dépens de la présente requête devraient être adjugés à la partie qui obtiendra gain de cause au principal.
ORDONNANCE
LA COUR :
1. REJETTE la requête;
2. ADJUGE les dépens de la requête à la partie qui obtiendra gain de cause au principal.
« James W. O'Reilly »
Juge
Traduction certifiée conforme
Martine Guay, LL.L.
COUR FÉDÉRALE
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : T-793-02
INTITULÉ : RÉVÉREND FRÈRE MICHEL D. ÉTHIER
FRÈRE JAMES R. HOAD
demandeurs
et
SA MAJESTÉ LA REINE
défenderesse
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE : 28 juillet 2003
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE : MONSIEUR LE JUGE O'REILLY
DATE DES MOTIFS : 30 juillet 2003
COMPARUTIONS : Révérend Frère Michel D. Éthier
Frère James R. Hoad
pour les demandeurs
Me Andrea Horton
pour la défenderesse
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Tarzan's Mission of the Sacred Herb
Sturgeon Falls (Ontario)
pour les demandeurs
M. Morris Rosenberg
Sous-procureur général du Canada
pour la défenderesse
COUR FÉDÉRALE
Date : 20030730
Dossier : T-793-02
ENTRE :
RÉVÉREND FRÈRE MICHEL D. ÉTHIER
FRÈRE JAMES R. HOAD
demandeurs
et
SA MAJESTÉ LA REINE
défenderesse
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE