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Date : 20211014


Dossier : IMM-4846-20

Référence : 2021 CF 1073

Ottawa (Ontario), le 14 octobre 2021

En présence de la juge en chef adjointe Gagné

ENTRE :

EFRAIN VAZQUEZ AVILA

LUIS ENRIQUE RODRIGUEZ VALDEZ

CRISTIAN VIANNEY VAZQUEZ RODRIGUEZ

DAMARIS ESTELA RUDECINO SANCHEZ

JESUS ADAN VAZQUEZ RUDECINO

ELIAN YERIK VAZQUEZ RUDECINO

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION DU CANADA

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1] Les demandeurs sont deux couples d’adultes et les enfants mineurs de l’un d’eux. Ils sont liés entre eux par le fait que la dame du premier couple est la demi-sœur de l’homme du second couple.

[2] Les demandeurs sont tous citoyens du Mexique et ils demandent le statut de réfugiés au Canada puisqu’ils disent craindre un membre influent du groupe criminalisé les Zetas, qui menace la demanderesse principale qui a refusé de travailler pour lui.

[3] Leur demande d’asile a été refusée par la Section de la protection des réfugiés [SPR], puis par la Section d’appel des réfugiés [SAR] de la Commission de l’immigration et de la protection des réfugiés. La SPR et la SAR ont conclu que les demandeurs possédaient une possibilité de refuge intérieur au Mexique.

[4] Les demandeurs contestent la décision de la SAR au motif que cette dernière aurait mis trop d’emphase sur le fait que les membres de leurs familles toujours au Mexique n’auraient pas été menacés par les Zetas depuis leur départ. Ils plaident également que la SAR n’aurait pas suffisamment tenu compte de la preuve en concluant que les Zetas n’avaient pas l’intérêt ou la motivation de les retracer dans les villes suggérées, advenant leur retour au Mexique.

[5] Il n’est pas aisé de saisir le raisonnement de la SAR à la simple lecture de sa décision. Toutefois, la décision de la SPR et les mémoires des parties y jettent un éclairage suffisant pour les fins de cette demande de contrôle judiciaire.

[6] Lors de l’audience devant la Cour, les parties ont reconnu que seul le premier volet du test permettant de déterminer une possibilité de refuge intérieur (Thirunavukkarasu c Canada (Ministère de la citoyenneté et de l’immigration), [1994] 1 CF 589 (CAF)) était en cause dans la présente affaire, et qu’il n’était pas contesté que le groupe les Zetas avait la capacité de retrouver les demandeurs où qu’ils se trouvent au Mexique.

[7] L’élément déterminant est donc à savoir si les Zetas auraient l’intérêt ou la motivation de les rechercher dans les villes suggérées comme possible refuge intérieur.

[8] Or, au paragraphe 11 de sa décision, la SAR écrit :

[…] [Les demandeurs] soutiennent que ce cartel étend son influence au nord-est du Mexique, y compris la ville d’Hermosillo (à noter que cette ville se trouve plutôt au nord-ouest du Mexique). Ils reconnaissent que leur profil n’est pas assez important pour qu’une recherche interétatique très développée soit mise en œuvre par le cartel afin de les retrouver. Ils soutiennent que les auteurs de [sic] préjudice possèdent tous les outils nécessaires pour les retrouver.

[je souligne]

[9] Dans ce passage, la SAR semble situer le débat au niveau de la capacité du cartel de retrouver les demandeurs dans les villes suggérées, et non au niveau de leur intérêt ou motivation; les demandeurs reconnaissant qu’ils n’avaient pas le profil pour susciter cet intérêt.

[10] Or, une lecture des observations des demandeurs devant la SAR, tout comme la position qu’ils défendent devant la Cour, me convainquent que les demandeurs n’ont jamais reconnu ne pas avoir le profil susceptible de motiver les Zetas dans les villes suggérées.

[11] Les demandeurs font plutôt valoir que « [leur] récit […] et surtout le fait que le demandeur [E.V.A.] s’est fait attaquer par le cartel pour obtenir des informations sur la demanderesse [C.V.V.R.] en mai 2018, démontre vraisemblablement l’intérêt du cartel de [les] persécuter […]. » C’est donc à tort que la SAR a compris que le débat portait sur la capacité des Zetas à retrouver les demandeurs, et non sur leur motivation.

[12] Cette erreur est suffisante, à mon sens, pour conclure au caractère déraisonnable de la décision de la SAR et pour justifier l’intervention de la Cour.

[13] Les parties ne proposent aucune question d’importance générale pour fin de certification et aucune telle question n’émane de cette cause.

 


JUGEMENT dans IMM-4846-20

LA COUR STATUE que:

  1. La demande de contrôle judiciaire est accordée;

  2. Le dossier est retourné devant la Section d’appel des réfugiés de la Commission de l’immigration et de la protection des réfugiés pour une nouvelle détermination par un autre de ses membres;

  3. Aucune question d’importance générale n’est certifiée.

« Jocelyne Gagné »

Juge en chef adjointe

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-4846-20

 

INTITULÉ :

EFRAIN VAZQUEZ AVILA, LUIS ENRIQUE RODRIGUEZ VALDEZ, CRISTIAN VIANNEY VAZQUEZ RODRIGUEZ, DAMARIS ESTELA RUDECINO SANCHEZ, JESUS ADAN VAZQUEZ RUDECINO et ELIAN YERIK VAZQUEZ RUDECINO c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 13 octobre 2021

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE EN CHEF ADJOINTE GAGNÉ

 

DATE DES MOTIFS :

LE 14 OCTOBRE 2021

 

COMPARUTIONS :

Pierre Emmanuel Girard

 

Pour les demandeurs

 

Isabelle Brochu

 

Pour lE défendeUr

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Blain Avocats

Montréal, QC

 

Pour les demandeurs

 

Procureur général du Canada

Montréal, QC

 

Pour lE défendeUr

 

 

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