Date : 19980408
Dossier : T-1249-89 -T-2733-89
ENTRE :
TOM A. CROSS,
appelant,
- et -
SA MAJESTÉ LA REINE,
intimée.
MOTIFS DE JUGEMENT
LE JUGE ROTHSTEIN :
[1] L'appelant, qui agit en sa propre cause, interjette appel de la décision du juge suppléant R.H. King de la Cour canadienne de l'impôt, qui a rejeté son appel après avoir conclu que les frais de déplacement engagés afin de se rendre à son travail et d'en revenir, étaient des frais personnels qui ne pouvaient être déduits à titre de dépenses dans le calcul de son revenu imposable.
[2] Les preuves et les arguments produits devant la Cour sont pour ainsi dire les mêmes que les preuves et les arguments produits devant la Cour de l'impôt. Il serait superflu d'exposer en détail les faits de cette cause ou des nombreuses affaires dans le cadre desquelles il a été conclu que les frais de déplacement engagés par quelqu'un pour se rendre à son travail et pour en revenir n'étaient pas déductibles. L'affaire qui correspond le mieux aux faits de l'espèce est l'affaire Mifsud c. Le ministre du Revenu national (1978), 78 D.T.C. 1408 et il n'y a aucune raison de ne pas suivre ce jugement dans lequel il a été décidé que les frais de déplacements d'employés syndiqués devant effectuer de longs trajets n'étaient pas déductibles.
[3] L'appelant fait valoir qu'il y a atteinte aux droits de libre circulation que lui garantit le paragraphe 6(2) de la Charte canadienne des droits et libertés, partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.-U.), 1982, ch. 11, du fait qu'il ne peut pas déduire ses frais de déplacement entre Saskatoon et son travail en Ontario ou dans d'autres localités de la Saskatchewan. La simple réponse se trouve dans les remarques incidentes du juge Mitchell de la Cour d'appel de l'Île-du-Prince-Édouard dans l'affaire Walker v. Prince Edward Island (1993), 107 D.L.R. (4th) 69 à la p. 77 :
[Traduction] |
L'alinéa 6(2)b) ne garantit pas un droit distinct au travail. Law Society of Upper Canada Skapinker (1984), 9 D.L.R. (4th) 161 à la p. 181, 11 C.C.C. (3d) 481, [1984] 1 R.C.S. 357. Cette disposition garantit uniquement à tous les citoyens et résidents permanents du Canada le droit d'exercer le métier qu'ils ont choisi dans n'importe quelle province, dans les mêmes conditions que les résidents de cette province.1 |
Le fait que la Loi de l'impôt sur le revenu, S.R.C. (1952), ch. 148, modifiée, n'autorise pas la déduction des frais de déplacement engagés afin d'aller travailler dans une autre province ne constitue pas une violation des droits à la libre circulation garantis par le paragraphe 6(2) de la Charte.
[4] L'appelant estime en outre faire l'objet d'une mesure de discrimination au regard de l'article 15 de la Charte. D'après lui, le paragraphe 6(6) de la Loi de l'impôt sur le revenu prévoit que ne doit pas être incluse dans le calcul du revenu, une allocation raisonnable de pension, de logement et de transport offerte par l'employeur afin de se rendre sur un " chantier en particulier " ou en un " endroit éloigné ". D'après lui, la Loi de l'impôt sur le revenu le traite injustement par rapport aux personnes visées par le paragraphe 6(6). Il prétend que, n'ayant reçu aucune allocation de déplacement ou de subsistance, il devrait être en droit de déduire ses frais de déplacement et ses frais de subsistance. Ce n'est qu'à cette condition-là qu'il bénéficierait d'un traitement égal à celui que prévoit le paragraphe 6(6).
[5] L'argument de l'appelant comporte de nombreuses insuffisances qu'il n'est pas nécessaire d'énumérer intégralement. L'appelant se compare aux personnes concernées par le paragraphe 6(6), mais la comparaison la plus évidente serait avec la vaste majorité d'employés qui ne peuvent pas, selon la Loi de l'impôt sur le revenu, déduire leurs frais de déplacement et leurs frais de subsistance. L'appelant semble croire que la longueur du déplacement qu'il a à effectuer doit être prise en compte, mais ce n'est pas le cas. De plus, l'appelant n'a appliqué à sa situation aucun des motifs énumérés à l'article 15 ni des motifs analogues susceptibles d'être invoqués. Il n'a fait état d'aucun des éléments qui, selon la jurisprudence relative à l'article 15, permettent de conclure à l'existence d'un groupe analogue.
[6] L'appel est rejeté.
" Marshall Rothstein "
J U G E
TORONTO (ONTARIO)
LE 8 MAI 1998
Traduction certifiée conforme :
Christiane Delon, LL.L.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
Avocats et procureurs inscrits au dossier
No DU GREFFE : T-1249-89/T-2733-89
INTITULÉ DE LA CAUSE : TOM A. CROSS
- et -
SA MAJESTÉ LA REINE |
DATE DE L'AUDIENCE : LE 28 AVRIL 1998
LIEU DE L'AUDIENCE : SASKATOON (SASKATCHEWAN)
MOTIFS DE JUGEMENT : LE JUGE ROTHSTEIN
DATE : LE 8 MAI 1998
ONT COMPARU : M. Tom A. Cross
pour le demandeur
M e Rhonda Nahorniak
pour la défenderesse
PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER : M. Tom Cross
1205, McNaughton Ave
Saskatoon (Saskatchewan)
S7M 3X6
pour le demandeur
Me Ronda Nahorniak
Ministère de la Justice
Bureau régional d'Edmonton
211, Banque de Montréal
10199-101ème rue
Edmonton (Alberta)
T5J 3Y4
pour la défenderesse
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
Date : 19980508
Dossier : T-1249-89
T-2733-89
Entre :
TOM A. CROSS, |
demandeur,
- et -
SA MAJESTÉ LA REINE,
défenderesse.
MOTIFS DU JUGEMENT
__________________
1 La Cour suprême du Canada a rejeté un pourvoi formé contre la décision de la Cour d'appel de l'Île-du-Prince-Édouard dans l'affaire Walker v. Prince Edward Island (1995), 124 D.L.R. (4TH) 127.