Dossier : T‑1624‑17
Référence : 2021 CF 890
[TRADUCTION FRANÇAISE]
Ottawa (Ontario), le 27 août 2021
En présence de monsieur le juge McHaffie
ENTRE :
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MCCAIN FOODS LIMITED
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demanderesse
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et
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J.R. SIMPLOT COMPANY ET
SIMPLOT CANADA (II) LIMITED
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défenderesses
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ORDONNANCE ET MOTIFS
I.
Aperçu
[1]
Le présent appel, formé contre une ordonnance rendue le 7 juin 2021 par la juge Aylen, juge responsable de la gestion de l’instance, alors l’une des protonotaires de la Cour, soulève une question capitale : le paragraphe 237(3) des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106, autorise‑t‑il la Cour à ordonner qu’un employé de la filiale d’une société se soumette à un interrogatoire préalable en tant que représentant de la société lorsque la société ne consent pas à ce qu’il intervienne en cette qualité?
[2]
La juge responsable de la gestion de l’instance a conclu que le paragraphe 237(3) des Règles n’autorisait pas la Cour à prononcer une telle ordonnance. Elle a donc refusé d’ordonner qu’un employé de la société McCain Alimentaire SAS [McCain France] soit interrogé au nom de McCain Foods Limited [McCain]. Pour les motifs exposés ci‑après, je suis d’avis que sa conclusion était correcte. Si un employé d’une autre société, fût‑elle une filiale, n’est pas autorisé à agir au nom de la société, il n’est pas un « représentant »
de la société au sens du paragraphe 237(1), et la Cour ne peut donc lui ordonner de se soumettre à un interrogatoire en vertu du paragraphe 237(3).
[3]
J’arrive aussi à la conclusion que la juge responsable de la gestion de l’instance n’a pas commis d’erreur en refusant d’ordonner à McCain de désigner et de proposer un autre représentant pour l’interrogatoire préalable, puisqu’une telle ordonnance n’a pas été demandée par les défenderesses [collectivement Simplot].
[4]
L’appel est donc rejeté. Conformément à l’entente des parties, les dépens de l’appel sont fixés à 5 000 $, somme payable à McCain, la partie qui a obtenu gain de cause, indépendamment de l’issue de la cause.
II.
Points litigieux
[5]
J’examinerai dans l’ordre suivant les points soulevés par les parties :
La juge responsable de la gestion de l’instance a-t-elle commis une erreur en concluant que le paragraphe 237(3) n’autorise pas la Cour à ordonner qu’un employé de la filiale d’une partie soit soumis à un interrogatoire préalable en tant que représentant de ladite partie?
La juge responsable de la gestion de l’instance a-t-elle commis une erreur en refusant d’ordonner à McCain de désigner et de proposer un autre représentant pour l’interrogatoire préalable, et/ou la Cour devrait‑elle rendre une telle ordonnance?
La requête de Simplot visant à faire désigner un remplaçant pour l’interrogatoire préalable est‑elle prématurée?
III.
Analyse
A.
Le paragraphe 237(3) n’autorise pas la Cour à ordonner qu’un employé de la filiale d’une société soit soumis à un interrogatoire préalable
(1)
Historique de la procédure
[6]
Dans son action, McCain allègue que Simplot a contrefait le brevet canadien no 2 412 841 [le brevet 841]. Le brevet 841 concerne un procédé permettant de traiter des légumes ou des fruits avant cuisson à l’aide d’un champ électrique pulsé, pour qu’ils soient plus faciles à couper après la cuisson. Simplot réfute toute contrefaçon et affirme que le brevet 841 est invalide. Selon la preuve, le développement de la technologie à l’origine du brevet 841, qui a été délivré le 22 janvier 2008, a commencé en 1997. Simplot soutient que ce processus de développement intéresse ses allégations d’invalidité, fondées sur l’évidence, la portée excessive et l’absence d’utilité.
[7]
La société McCain a désigné Brian Ruff pour la représenter à l’interrogatoire préalable, en application du paragraphe 237(1) des Règles. M. Ruff, qui a aussi souscrit l’affidavit de documents de McCain, travaille pour McCain depuis 1988 et occupe actuellement le poste de directeur des procédés pour la recherche‑développement. La société Simplot a soumis M. Ruff à un interrogatoire préalable durant deux jours en février 2021, mais elle a estimé qu’il n’avait pas été en mesure de répondre aux questions. Le 30 avril 2021, Simplot a présenté une requête en vertu du paragraphe 237(3) pour que soit rendue une ordonnance enjoignant à Fabrice DeSailly, un employé de McCain France et l’un des inventeurs du brevet 841, de se soumettre à un interrogatoire en tant que représentant de McCain, à la place de M. Ruff. Les dispositions pertinentes des Règles sont ainsi formulées :
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[8]
Simplot a soutenu que l’incapacité de M. Ruff à répondre à des questions pertinentes faisait de lui un « témoin de pacotille »
, selon l’expression employée par le juge Phelan dans la décision Teva Canada Limitée c Eli Lilly Canada Inc, 2016 CF 1131 au para 12. Simplot a fait aussi valoir que M. Ruff avait reconnu que M. DeSailly serait mieux placé pour répondre aux questions qui lui avaient été posées, du moins en ce qui concerne certains domaines, notamment le développement de l’invention.
(2)
La décision de la juge responsable de la gestion de l’instance
[9]
La juge Aylen, responsable de la gestion de l’instance, a rejeté la requête de Simplot. Elle a fait remarquer que la Cour avait énoncé une série de principes applicables aux requêtes présentées en vertu du paragraphe 237(3), et a renvoyé aux décisions suivantes : Liebmann c Canada (Ministre de la Défense nationale), [1996] ACF no 536; Benisti Import‑Export Inc c Modes TXT Carbon Inc, 2004 CF 539 au para 3; Lubrizol Corp c Imperial Oil Ltd, 2000 CanLII 15750 (CF) aux para 2‑7; Angelcare Canada Inc c Munchkin, Inc, 2021 CF 238 au para 65; MediaTube Corp c Bell Canada, 2015 CF 391 aux para 12-13; et Bande indienne Ermineskin c Canada, [1995] 3 CF 544.
[10]
Les parties ne contestent pas les principes généraux tirés de ces précédents, ni la manière dont la juge responsable de la gestion de l’instance les a résumés. Je ne répéterai pas tous ces principes ici, puisque, finalement, ils ne sont pas déterminants pour l’issue du présent appel. À noter cependant le principe selon lequel la partie qui sera interrogée doit présenter un « témoin convenable et bien informé »
, en mesure de répondre « à un interrogatoire préalable général »
(Liebmann, au para 31).
[11]
La juge responsable de la gestion de l’instance a dit avoir passé en revue l’intégralité de la transcription de l’interrogatoire de M. Ruff et avoir conclu qu’il avait [traduction] « une connaissance très limitée des points abordés durant l’interrogatoire préalable »
. Elle a mentionné que l’avocat de McCain avait été en mesure de fournir des informations sur l’entreprise plus souvent que M. Ruff lui-même et qu’un bon nombre des questions auxquelles M. Ruff avait pu répondre étaient des questions qui requéraient de sa part une simple répétition de ce qui se trouvait dans un document. Elle a rejeté la prétention de McCain selon laquelle M. Ruff avait répondu « à un interrogatoire préalable général »
. Elle a plutôt estimé que les connaissances de M. Ruff se limitaient en général à une brève période durant laquelle il avait dirigé des laboratoires où des scientifiques s’affairaient à la technologie et que, même là, son rôle dans le projet avait été négligeable. Elle a conclu ainsi :
[traduction]
Dans la mesure où M. Ruff s’est préparé pour son interrogatoire préalable, je suis d’avis que sa préparation était insuffisante pour faire de lui un témoin convenable et bien informé.
[Non souligné dans l’original.]
[12]
Néanmoins, la juge responsable de la gestion de l’instance a jugé que M. DeSailly ne pouvait pas remplacer M. Ruff. Citant un arrêt de la Cour d’appel fédérale, Anangel Splendour, elle a conclu que le « représentant »
soumis à un interrogatoire préalable doit être un représentant de la personne morale (Anangel Splendour (Navire) c Canada (Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires), 2006 CAF 212 aux para 12-13).
[13]
La juge responsable de la gestion de l’instance a écarté la proposition de Simplot d’appliquer la décision Lubrizol, dans laquelle le juge Hugessen a admis qu’une société mère américaine et sa filiale canadienne pouvaient désigner le même employé de la société mère en tant que leur représentant en vertu du paragraphe 237(1) (Lubrizol, aux para 3, 5, 8). Elle a précisé que, dans cette affaire, la filiale canadienne avait décidé de se faire représenter par ce témoin et que la Cour ne s’était donc pas prononcée sur la question de savoir si elle pouvait la contraindre à se faire représenter par un employé de la société mère dans une requête contestée.
[14]
La juge responsable de la gestion de l’instance a estimé que M. DeSailly n’était pas un représentant de McCain, mais un représentant de McCain France, et que le paragraphe 237(3) n’autorisait donc pas la Cour à ordonner qu’il remplace M. Ruff comme représentant de McCain. Elle a indiqué par ailleurs qu’[traduction] « il serait mal à propos pour la Cour de contraindre une partie à accepter en tant que représentant pour répondre en son nom à un interrogatoire préalable une personne qui n’est pas un employé et sur qui elle n’a ainsi aucune autorité »
.
(3)
La juge responsable de la gestion de l’instance n’a pas commis d’erreur dans son interprétation du paragraphe 237(3)
(a)
Norme de contrôle
[15]
Les parties s’accordent à dire que la norme de contrôle applicable à la décision de la juge responsable de la gestion de l’instance est celle qui est énoncée dans l’arrêt Housen c Nikolaisen, c’est‑à‑dire que les questions de fait et les questions mixtes de droit et de fait sont assujetties à la norme de l’« erreur manifeste et dominante »
, tandis que les questions de droit sont assujetties à la norme de la décision correcte (Corporation de soins de la santé Hospira c Kennedy Institute of Rheumatology, 2016 CAF 215 aux para 64-69; Housen c Nikolaisen, 2002 CSC 33 aux para 7, 8, 10, 36-37; Worldspan Marine Inc c Sargeant III, 2021 CAF 130 au para 48).
[16]
D’après moi, l’interprétation de l’article 237 des Règles est une pure question de droit, et la décision de la juge responsable de la gestion de l’instance doit donc être examinée en fonction de la norme de la décision correcte (Housen c Nikolaisen, au para 8). Selon McCain, il importe de se rappeler que le juge responsable de la gestion d’une instance connaît bien les questions et les faits propres à l’instance et que ses conclusions sur des questions où les faits dominent commandent la retenue (Hughes c Canada (Commission des droits de la personne), 2021 CF 728 au para 37). Or, à une exception près, la conclusion de la juge responsable de la gestion de l’instance sur la question de droit découle de son interprétation du paragraphe 237(3), et non des circonstances, des questions ou des faits propres à l’affaire considérée. L’exception réside dans sa conclusion selon laquelle M. DeSailly n’était pas un employé ou un représentant de McCain. Il s’agit là d’une question qui repose davantage sur des faits et qui commande donc la retenue, encore que, comme on le verra ci‑après, les faits pertinents ne soient eux‑mêmes guère contestés.
(b)
Le sens du mot « représentant » aux paragraphes 237(1) et (3) des Règles
[17]
La société Simplot fait valoir que la juge responsable de la gestion de l’instance a appliqué erronément l’arrêt Anangel Splendour. Elle souligne que, dans cette affaire, la Cour d’appel fédérale devait se prononcer sur un cas où une partie voulait en réalité soumettre à un interrogatoire préalable une personne qui n’était pas une partie (Anangel Splendour, aux para 6‑9, 12-13). Selon Simplot, l’arrêt Anangel Splendour n’empêche nullement l’employé d’une filiale de représenter la société mère dans un interrogatoire préalable. Simplot cite la décision Lubrizol comme exemple.
[18]
Comme le fait remarquer Simplot, l’arrêt Anangel Splendour porte sur un contexte factuel différent. La juge responsable de la gestion de l’instance n’a pas prétendu le contraire. Néanmoins, les principes énoncés dans ce précédent ont leur importance.
[19]
Dans l’affaire Anangel Splendour, le demandeur était l’administrateur de la Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires. Il avait payé une réclamation pour les frais de nettoyage engagés par Pêches et Océans Canada et par la compagnie minière Québec Cartier, et il était donc subrogé dans les droits de ces deux entités contre les défendeurs, les pollueurs présumés. Les défendeurs souhaitaient interroger un représentant de Québec Cartier et un représentant de Pêches et Océans Canada en tant que représentants de l’administrateur. La décision par laquelle la Cour d’appel a rejeté la requête pour interrogatoire préalable présentée en vertu de l’article 237 est brève :
Malgré les arguments de l’avocat des appelants, nous n’avons pas été convaincus que le juge a commis une erreur dans son interprétation du paragraphe 237(3) et de l’article 238 des Règles. Il est évident que « [l’]autre personne [qui peut être] interrogée », mentionnée au paragraphe 237(3), est le représentant de la personne morale, de la société de personnes ou de l’association sans personnalité morale mentionnée au paragraphe 237(1), ou la Couronne, mentionnée au paragraphe 237(2).
En fait, les appelants nous demandent de créer une nouvelle exception à l’article 237 en y ajoutant un paragraphe 8 qui comprendrait, comme personnes représentant les entités mentionnées au paragraphe 237(1), les subrogeants qui ne sont pas parties à l’instance. Si la Cour acceptait de le faire, elle ne ferait pas que contourner et usurper le rôle du Comité des règles, elle ferait aussi abstraction des dispositions précises de l’article 238 édictées par le Comité des règles et approuvées par le gouverneur en conseil au sujet de l’interrogatoire d’un tiers.
[Non souligné dans l’original; Anangel Splendour, aux para 12‑13.]
[20]
En l’espèce, les parties ne contestent pas le premier principe susmentionné, celui selon lequel « [l’]autre personne [qui peut être] interrogée »
, mentionnée au paragraphe 237(3), doit être le même « représentant de la personne morale »
mentionnée au paragraphe 237(1). Dans l’arrêt Anangel Splendour, la Cour d’appel a appliqué ce principe pour conclure que les représentants de subrogeants qui ne sont pas partie à l’instance n’entrent pas, pour l’application de l’article 237, dans le champ de la définition de « représentant de la personne morale »
. La question posée dans le présent appel est de savoir de quelle manière le principe est appliqué dans un autre contexte, celui de l’employé d’une filiale.
[21]
Selon moi, la réponse se trouve dans le mot « représentant »
, au paragraphe 237(1), interprété d’après les règles qui s’appliquent aux interrogatoires préalables. L’interrogatoire préalable est un volet important de la procédure préliminaire, tant devant la Cour fédérale que devant les autres juridictions canadiennes. Il permet à une partie de recueillir des éléments de preuve pertinents, de cerner les arguments de la partie adverse et d’obtenir des aveux qui serviront au procès (voir, p. ex., Hershkovitz c Tyco Safety Products Canada Ltd, 2006 CF 1228 au para 3). La perspective d’obtenir des aveux est renforcée par la possibilité pour une partie de présenter en preuve, à l’instruction, tout extrait des dépositions recueillies durant l’interrogatoire préalable de la partie adverse, même si celle‑ci n’a pas témoigné (art 288 des Règles). Contrairement à certains États, est en général autorisé l’interrogatoire préalable d’un seul représentant de la partie adverse.
[22]
Le fait que la personne morale concernée soit généralement liée par les réponses de la personne interrogée est pertinent pour l’interprétation du mot « représentant »
. Normalement, c’est la personne morale concernée qui choisit son représentant. Elle accepte par le fait même d’être liée par les réponses qu’il donnera, et cette acceptation fait de cette personne le « représentant »
de la personne morale pour l’application du paragraphe 237(1). Puisque la personne morale accepte d’être représentée pour l’interrogatoire préalable, il n’est pas obligatoire que le représentant soit, par exemple, un de ses employés, dirigeants ou administrateurs. Dès lors que les deux parties y consentent, une personne morale peut être représentée par un employé d’une société de son groupe (comme dans l’affaire Lubrizol) ou, selon les circonstances, par quelqu’un d’autre, par exemple un ancien employé. Quand bien même il n’y aurait aucun autre rapport entre les deux parties, c’est l’acceptation elle‑même de la personne morale d’être représentée pour l’interrogatoire préalable qui fait qu’elle est représentée. Ce choix peut être contesté par la partie adverse pour des raisons telles que le niveau de connaissance de l’intéressé, ou simplement parce qu’il ne convient pas, mais la décision Lubrizol confirme que le fait que le représentant ne soit pas un employé de la société ne suffit pas à lui seul pour considérer qu’il n’est pas un représentant idoine, si la société a accepté d’être représentée par lui.
[23]
Qu’en est‑il donc du cas où la partie n’accepte pas d’être représentée par une personne, selon ce qu’envisage le paragraphe 237(3)? Comme la Cour d’appel l’a souligné dans l’arrêt Anangel Splendour, la Cour ordonnera alors à une personne physique de représenter la société, c’est‑à‑dire qu’elle ordonnera que la société soit liée par les réponses données par cette personne à l’interrogatoire préalable.
[24]
Je reconnais avec la juge responsable de la gestion de l’instance Aylen que le paragraphe 237(3) n’autorise pas la Cour à ordonner qu’une personne qui n’est pas un « représentant »
de la personne morale, pour absence de consentement de la personne morale ou absence d’une relation entre elle et la personne morale, soit soumise à un interrogatoire préalable en remplacement de la personne choisie par celle‑ci. La Cour d’appel, dans l’affaire Anangel Splendour, n’examinait pas une relation entre une société mère et sa filiale ou autre société apparentée, mais il reste que, lorsqu’une personne morale ne consent pas à ce que l’employé d’une société apparentée la représente, cet employé n’est pas son représentant, mais uniquement le représentant d’une tierce partie, à savoir la société apparentée. En l’espèce, comme l’a conclu la juge responsable de la gestion de l’instance Aylen, McCain n’a pas consenti à ce que M. DeSailly la représente à l’interrogatoire préalable, et M. DeSailly n’est pas par ailleurs un représentant de McCain; il est un représentant de McCain France, une tierce partie. Je partage aussi l’avis de la juge responsable de la gestion de l’instance Aylen pour qui il serait mal à propos que la Cour contraigne une personne morale à accepter, en vue d’un interrogatoire préalable, un représentant que celle-ci n’a pas approuvé et sur qui, puisqu’il n’est pas son employé, elle n’a aucune autorité.
[25]
Selon Simplot, les nuances qui s’attachent aux sociétés d’un même groupe tiennent à des considérations d’ordre technique, et la réponse à la question de savoir si une personne peut ou non agir comme représentant dépendra plutôt des faits. Je ne suis pas de cet avis. La cloison qui sépare des entités juridiques est davantage qu’une simple considération technique, elle touche un aspect fondamental du droit canadien des sociétés. Une société mère ne peut être considérée comme la même personne que sa filiale, et les employés de la filiale ne sont pas les représentants de la société mère sans que cela ait pour effet de lever le « voile de la personnalité morale »
qui sépare chaque entité. Cela — et la Cour d’appel nous l’a récemment rappelé — ne peut être fait que lorsque le respect du principe de l’existence distincte des sociétés serait « trop nettement en conflit avec la justice »
(Delizia Limited c Nevsun Resources Ltd, 2017 CAF 187 aux para 28-33, autorisation de pourvoi refusée : 2018 CanLII 26073 (CSC)).
[26]
J’observe que, lorsque les Règles autorisent la Cour à faire reposer sur une personne morale des obligations envers ses sociétés affiliées, elles le font en langage clair. L’article 225 des Règles dispose que la Cour peut, sur requête, ordonner à une partie de divulguer dans l’affidavit de documents l’existence de tout document pertinent qui est en la possession, sous l’autorité ou sous la garde d’une filiale, d’une société mère ou d’une société sœur. Aucune formulation du genre n’apparaît dans le paragraphe 237(3) des Règles.
[27]
Simplot a aussi évoqué le risque qu’une partie organise ses affaires dans le but de se dérober à un interrogatoire préalable légitime en prenant soin que les personnes bien informées n’aient aucun lien avec la personne morale qui est partie à l’instance. Si cela devait soulever une difficulté dans un cas donné, la Cour serait à même d’empêcher un tel abus de procédure au moyen d’ordonnances, ce qui pourrait comprendre l’ordonnance élargie prévue au paragraphe 237(3). C’est d’ailleurs là un exemple de situation où le voile de la personnalité morale pourrait être levé. Or, Simplot concède que la présente affaire ne soulève aucune difficulté de cette nature. M. DeSailly a toujours été un employé de McCain France, et il n’est pas prouvé que McCain ou McCain France ont pris des dispositions pour organiser leurs affaires de telle sorte qu’il ne soit pas un employé de McCain, la société propriétaire du brevet 814.
[28]
Néanmoins, Simplot soutient essentiellement que la justice commande le même résultat dans la présente affaire. Elle dit que, si elle n’est pas autorisée à interroger M. DeSailly en tant que représentant de McCain, elle subira un préjudice parce qu’il lui sera impossible d’obtenir, directement d’un témoin bien informé, des aveux contraignants pouvant être produits au procès, un résultat qu’elle qualifie d’injuste et absurde. Je ne puis conclure que, en l’espèce, la justice requiert de la Cour qu’elle fasse abstraction des personnalités morales distinctes de McCain et de McCain France. Certes, l’un de ceux qui se sont investis dans le développement historique de la technologie à l’origine du brevet 841 travaille pour une autre société, quoique celle‑ci fasse partie du groupe McCain, mais cela ne crée pas pour autant une injustice plus grande que ce ne serait le cas si la personne en question avait été l’employé d’une entreprise non apparentée. Dans un tel cas, qui est loin d’être inusité, la partie au litige doit obtenir ses aveux contraignants du représentant de la personne morale, et obtenir de tierces parties, par exemple les inventeurs, sa preuve concernant le développement de la technologie.
[29]
En l’espèce, comme le fait remarquer la juge responsable de la gestion de l’instance, il est loisible à Simplot de soumettre M. DeSailly à un interrogatoire préalable en tant qu’inventeur, c’est‑à‑dire en tant que cédant, aux termes du paragraphe 237(4) des Règles. Ses dépositions ne pourront pas être utilisées contre McCain au sens formel, et elles ne pourront simplement être produites à l’instruction en vertu de l’article 288, mais cet interrogatoire pourra être utile pour déterminer si la justice requiert de la Cour qu’elle fasse abstraction de la personnalité morale. En fait, la raison pour laquelle les dépositions recueillies ne sauraient simplement être produites au procès est que l’inventeur n’est pas partie à l’action (Eli Lilly and Co c Apotex Inc, 2006 CF 282 aux para 14-15). Que l’inventeur soit l’employé d’une filiale ne change rien à cela.
[30]
Simplot cite des modifications apportées à la disposition ayant précédé le paragraphe 237(1), promulguées en 1990. Auparavant, le paragraphe 456(2) des Règles obligeait la personne morale à choisir « un dirigeant, un directeur, un membre ou un employé bien renseigné qui sera interrogé en son nom »
. Simplot soutient que le mot « représentant »
doit être interprété d’une manière qui va au-delà de la liste restreinte des représentants potentiels ci‑dessus énumérés dans la disposition. Comme je l’ai mentionné plus haut, je n’ai aucune difficulté à admettre qu’une partie peut consentir à être représentée par une personne qui n’est pas un dirigeant, un directeur, un membre ou un employé. D’ailleurs, la décision Lubrizol le confirme. Cependant, je ne crois pas que cela signifie que la Cour peut, par ordonnance prise en vertu du paragraphe 237(3), remplacer un représentant par une personne qui n’a ni un rapport préexistant de représentation (par exemple en tant que dirigeant, directeur, employé ou mandataire — il ne m’est pas nécessaire de décider ici si d’anciens dirigeants, directeurs, employés ou mandataires entreraient dans cette catégorie), ni un rapport de représentation résultant du consentement de la personne morale à être représentée par elle.
(c)
Objections de Simplot à la description que fait la juge responsable de la gestion de l’instance de M. DeSailly
[31]
Simplot conteste également deux autres aspects des conclusions de la juge responsable de la gestion de l’instance concernant M. DeSailly et son rapport avec McCain. D’abord, Simplot soutient que la juge responsable de la gestion de l’instance a commis une erreur en affirmant que [traduction] « rien ne prouve ou ne donne à penser qu’il est un employé, un dirigeant ou un directeur de McCain, et McCain n’a pas reconnu qu’il la représentait ou pouvait la représenter ».
Simplot concède que M. DeSailly n’est pas un employé, un dirigeant ou un directeur de McCain. Cependant, elle soutient que McCain a [traduction] « implicitement reconnu »
que M. DeSailly pouvait représenter McCain, et la représentait effectivement, puisque McCain l’a spontanément proposé comme témoin de l’entreprise pour un interrogatoire préalable dans un procès parallèle engagé aux États‑Unis qui portait sur l’équivalent américain du brevet 841. Je suis en désaccord. Sans doute McCain a‑t‑elle proposé M. DeSailly pour qu’il témoigne dans un autre État appliquant d’autres règles en matière d’interrogatoire préalable, mais cela ne signifie pas que McCain a accepté que M. DeSailly soit son représentant à toutes fins utiles, y compris dans une poursuite devant la Cour. La juge responsable de la gestion de l’instance n’a commis à cet égard aucune erreur manifeste et dominante.
[32]
Deuxièmement, Simplot soutient que la juge responsable de la gestion de l’instance a conclu à tort que McCain n’avait aucune « autorité »
sur M. DeSailly. Simplot fait valoir que, dans les faits, les employés des filiales de McCain relèvent ultimement de McCain. Là encore, il m’est impossible de reconnaître qu’il s’agit là d’un principe général, pas plus que d’un fait avéré dans ce cas particulier. Selon ma lecture de sa décision, la juge responsable de la gestion de l’instance parlait d’exercer une « autorité »
au sens du rapport entre un employé et son employeur. Ce rapport diffère du rapport entre un employé et les actionnaires de son employeur, même si les actionnaires contrôlent la société ou constituent une personne morale unique. Quoi qu’il en soit, dans la mesure où un critère quelconque d’« autorité »
intéresserait la question, Simplot n’a pas démontré que McCain exerce une autorité significative sur les employés de McCain France en général ou sur M. DeSailly en particulier, et elle n’a apporté aucun élément portant sur des sujets tels que les décisions d’embauche ou de licenciement, les mesures disciplinaires, la direction ou les tâches exécutées. Encore une fois, je ne vois aucune erreur manifeste et dominante. Et je m’empresse d’ajouter que les observations qui précèdent ne doivent pas être prises pour des vérités en matière de droit du travail ou de relations de travail, objets sur lesquels la Cour n’était pas appelée à se prononcer; la seule question est l’interprétation des règles régissant l’interrogatoire préalable devant la Cour fédérale.
[33]
J’arrive donc à la conclusion que la juge responsable de la gestion de l’instance Aylen n’a pas commis d’erreur en concluant que le paragraphe 237(3) des Règles ne l’autorisait pas à rendre l’ordonnance demandée et en rejetant par conséquent la requête.
B.
La juge responsable de la gestion de l’instance Aylen n’a pas commis d’erreur en refusant d’ordonner la désignation d’un autre représentant
[traduction]
Les requêtes présentées en vertu du paragraphe 237(3) se rapportent à la personne que la partie concernée voudrait que la Cour désigne, par ordonnance, comme nouveau représentant. Comme Simplot n’a pas, à titre subsidiaire, demandé une ordonnance pour que M. Ruff soit remplacé par une autre personne, la Cour ne peut faire droit à la requête de Simplot, en dépit de ses doutes sur l’aptitude de M. Ruff à représenter McCain.
[Non souligné dans l’original.]
[35]
Simplot soutient que, ayant conclu que M. Ruff n’était pas un témoin convenable et bien informé, la juge responsable de la gestion de l’instance Aylen a commis une erreur en n’ordonnant pas qu’il soit remplacé. Plus précisément, selon Simplot, elle aurait dû obliger McCain à désigner et à proposer un autre témoin, convenable et bien informé cette fois.
[36]
Selon moi, cet argument doit être rejeté pour la bonne raison que Simplot n’a pas demandé l’ordonnance que, affirme‑t‑elle maintenant, la juge responsable de la gestion de l’instance aurait dû prononcer. Simplot a demandé une ordonnance remplaçant M. Ruff par M. DeSailly comme représentant de McCain. Elle n’a pas demandé, à titre subsidiaire ou autrement, une ordonnance désignant qui que ce soit d’autre comme représentant de McCain ou — à supposer même qu’une telle ordonnance puisse être prononcée en vertu du paragraphe 237(3) — une ordonnance générale obligeant McCain à désigner un autre témoin.
[37]
L’alinéa 359b) des Règles exige de la partie requérante qu’elle précise dans son avis de requête « la réparation recherchée »
. Comme le fait observer McCain, la règle générale est que, « [à] défaut de circonstances inhabituelles, ou de consentement, la Cour ne peut accorder que la réparation demandée dans l’avis de requête »
(Energizer Brands, LLC c The Gillette Company, 2020 CAF 49 aux para 38-39; Pascal c Canada (Procureur général), 2005 CAF 31 au para 2).
[38]
Dans son avis de requête, Simplot a seulement demandé [traduction] « une ordonnance afin que le représentant de McCain à l’interrogatoire préalable soit remplacé, que Simplot puisse interroger Fabrice DeSailly comme représentant de McCain, et que McCain soit tenue de supporter les frais de cet interrogatoire »
, outre les dépens, et l’habituelle formulation sollicitant [TRADUCTION] « toute autre réparation que la Cour pourra estimer juste »
. La section [traduction] « Ordonnance demandée »
des observations écrites de Simplot ne fait elle aussi référence qu’à l’interrogatoire préalable de M. DeSailly en tant que représentant de McCain, aux frais de McCain.
[39]
Il ne s’agit pas ici d’une question de pure forme. L’obligation de préciser dans l’avis de requête la réparation recherchée a pour objet d’informer la partie intimée de la preuve qu’elle devra réfuter relativement à cette requête. McCain a prétendu dans le présent appel que, en dépit des doutes de la juge responsable de la gestion de l’instance, il n’y avait pas de meilleur représentant de McCain que M. Ruff. Le dossier de la preuve n’était pas très clair sur ce point, mais c’est là précisément la question. Si elle avait su que Simplot souhaitait interroger au préalable un autre représentant que M. DeSailly, McCain aurait pu présenter des éléments de preuve et des arguments en réponse à cette demande, y compris sur la possibilité d’appeler un meilleur témoin.
[40]
Simplot invoque l’inclusion, dans son avis de requête, de ce qu’il est convenu d’appeler la « clause omnibus »
, sollicitant [traduction] « toute autre réparation que la Cour pourra estimer juste »
. De par cette clause, la Cour dispose d’un certain pouvoir discrétionnaire d’accorder une réparation qui n’est pas par ailleurs recherchée (Association des femmes autochtones du Canada c Canada, [1994] 3 RCS 627 aux pp 647-648; SC Prodal 94 SRL c Spirits International BV, 2009 CAF 88 au para 11). Cependant, ce pouvoir discrétionnaire doit être exercé avec circonspection, surtout si une partie sollicite une réparation entièrement nouvelle qui pourrait nécessiter des arguments et des éléments de preuve différents. Autrement dit, la Cour « n’estime pas juste »
d’autoriser Simplot à demander aujourd’hui une ordonnance qui n’a pas auparavant été demandée à la juge responsable de la gestion de l’instance Aylen, et sur laquelle McCain n’a donc pas eu l’occasion de s’exprimer.
[41]
Pour les motifs qui précèdent, l’appel de Simplot sera rejeté.
C.
La requête de Simplot n’est pas rejetée pour cause de prématurité
[42]
Bien qu’il ne soit pas déterminant, j’examinerai brièvement l’argument de la prématurité avancé par McCain, car cet argument comporte des aspects qui pourraient peser sur une requête future.
[43]
Dans le présent appel, McCain dit que la requête de Simplot souffrait d’un [traduction] « vice fatal »
, celui d’avoir été présentée prématurément, et que la juge responsable de la gestion de l’instance Aylen l’a rejetée pour cette raison. McCain va jusqu’à dire que la décision de la juge Aylen n’a pas écarté la possibilité que Simplot présente la même requête et sollicite à nouveau le remplacement de M. Ruff par M. DeSailly.
[44]
À mon avis, rien ne permet d’affirmer que la juge responsable de la gestion de l’instance a rejeté la requête pour cause de prématurité. McCain n’a pas soutenu devant elle que la requête était prématurée, et il ressort clairement des motifs de la juge responsable de la gestion de l’instance Aylen que, si elle a rejeté la requête, c’est parce qu’elle était infondée, et non parce qu’elle avait été présentée à contretemps.
[45]
Pour étayer son argument, McCain signale deux aspects principaux de la décision de la juge responsable de la gestion de l’instance Aylen. Aucun d’eux ne donne à croire que la requête a été rejetée pour cause de prématurité. D’abord, McCain invoque les deux énoncés suivants, au début de la décision :
[traduction]
Les interrogatoires préalables ont eu lieu. McCain a nommé Brian Ruff en tant que représentant pour répondre en son nom à un interrogatoire préalable, et M. Ruff a été interrogé pendant deux jours. Les réponses aux engagements et les positions sur les refus n’ont pas encore été échangées, et la Cour ne s’est donc pas prononcée sur des requêtes relatives aux refus.
Simplot n’a pas encore demandé à interroger les inventeurs du brevet 841 en application du paragraphe 237(4) des Règles des Cours fédérales.
[Non souligné dans l’original.]
[46]
D’après moi, il s’agit simplement d’une description de la procédure telle qu’elle se présentait alors. Pour conclure au rejet de la requête, la juge responsable de la gestion de l’instance Aylen ne s’est nullement fondée sur le fait qu’aucune décision n’avait encore été rendue sur les engagements et sur les requêtes relatives aux refus, ni sur le fait que l’interrogatoire préalable des inventeurs n’avait pas eu lieu. Elle a plutôt fondé ses motifs sur le paragraphe 237(3) et sur le fait que M. DeSailly n’était pas un représentant de McCain, ajoutant que [traduction] « par conséquent, la requête sera rejetée »
. Certes, la juge responsable de la gestion de l’instance Aylen a par la suite répété que M. DeSailly pourrait être interrogé en tant qu’inventeur, mais ce ne semble rien de plus qu’une confirmation du statut de la procédure et des options qui s’offraient, afin de préciser que sa décision ne portait pas atteinte aux droits conférés à McCain par le paragraphe 237(4).
[47]
McCain souligne aussi que la juge responsable de la gestion de l’instance Aylen a rejeté la requête sans préjudice du droit de Simplot de présenter une nouvelle requête :
[traduction]
Par conséquent, la requête de Simplot sera rejetée. Cependant, cette requête est rejetée sans préjudice du droit de Simplot de présenter une requête en substitution de témoin ultérieurement dans la présente instance, après l’échange des réponses aux engagements et des positions sur les refus, et après décision de la Cour sur les requêtes relatives aux refus, pour autant que Simplot soit en mesure de désigner un remplaçant apte à représenter McCain.
[Non souligné dans l’original.]
[48]
Je conviens avec Simplot que cet extrait ne peut être interprété comme rejetant sa requête pour cause de prématurité ni comme autorisant Simplot à présenter la même requête à nouveau pour que M. DeSailly soit désigné en remplacement de M. Ruff. Dans la décision de la juge responsable de la gestion de l’instance, l’analyse, les conclusions et le rejet de la requête sont entièrement axés sur le fait que M. DeSailly n’est pas un représentant de McCain et sur les limites du paragraphe 237(3). L’expression « sans préjudice du droit de Simplot »
est rattachée à la question examinée dans le paragraphe précédent de la décision (reproduit au paragraphe
[34]
ci‑dessus), qui concernait la possibilité qu’un autre représentant de McCain (non un représentant de McCain France) soit proposé à la place de M. Ruff.
[49]
Le fait que la juge responsable de la gestion de l’instance Aylen ait conclu qu’une telle requête, si elle était présentée, devrait attendre l’issue de requêtes relatives aux refus est une appréciation discrétionnaire fondée sur sa connaissance du dossier. Ce n’est pas un aspect sur lequel la Cour devrait intervenir ou interviendra. Il ne saurait être considéré comme un rejet implicite de la requête pour cause de prématurité, d’autant plus que la décision de la juge Aylen ne comporte aucune conclusion en ce sens.
[50]
Je signale aussi que McCain n’a pas soutenu devant la juge responsable de la gestion de l’instance Aylen que la requête de Simplot était prématurée. Et ce n’est qu’après le dépôt de la requête portant sur les refus que McCain a tenté de faire ajourner ou reporter la requête de Simplot. McCain a cité des passages de ses observations écrites présentées à la juge responsable de la gestion de l’instance Aylen où il est question des refus et du droit de Simplot d’interroger M. DeSailly en tant qu’inventeur, mais aucun de ces passages ne fait état d’un argument selon lequel la requête était prématurée ou aurait dû, pour cette raison, être rejetée. Les parties ne sont en général pas autorisées à soulever en appel des questions nouvelles qui n’ont pas été portées à l’attention du juge responsable de la gestion de l’instance : Starr c Canada, 2001 CFPI 338 au para 16, conf par 2002 CAF 95 au para 4; ViiV Healthcare Company c Gilead Sciences Canada, Inc, 2019 CF 1579 au para 50, conf par 2021 CAF 122 au para 9. McCain ne m’a pas convaincu que la présente affaire en est une qui autorise un argument sur la prématurité, et elle n’a pas non plus démontré pourquoi une requête fondée sur le paragraphe 237(3) doit attendre l’issue de requêtes relatives aux refus, ou l’interrogatoire des inventeurs.
IV.
Conclusion
[51]
La requête en appel déposée par Simplot est donc rejetée. Les parties ont convenu que des dépens de la somme de 5 000 $ devraient être adjugés à la partie qui obtiendra gain de cause dans le présent appel, quelle que soit l’issue de la cause. Les dépens sont adjugés à McCain.
ORDONNANCE rendue dans le dossier T‑1624‑17
LA COUR ORDONNE :
La requête en appel est rejetée;
Les dépens sont fixés à 5 000 $, somme payable McCain Foods Limited, quelle que soit l’issue de la cause.
« Nicholas McHaffie »
Juge
Traduction certifiée conforme
Édith Malo
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER :
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T‑1624‑17
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INTITULÉ :
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MCCAIN FOODS LIMITED c JR SIMPLOT COMPANY ET SIMPLOT CANADA (II) LIMITED
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LIEU DE L’AUDIENCE :
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AUDIENCE TENUE PAR VIdéoCONFÉRENCE
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DATE DE L’AUDIENCE :
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LE 18 AOÛT 2021
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ORDONNANCE ET MOTIFS :
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LE JUGE MCHAFFIE
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DATE DES MOTIFS :
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LE 27 AOÛT 2021
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COMPARUTIONS :
Kassandra Shortt
Mark Davis
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POUR LA demanderesse
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Daniel Davies
Matthew Norton
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POUR LES défenderesses
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Norton Rose Fulbright Canada S.E.N.C.R.L. s.r.l.
Toronto (Ontario)
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POUR LA demanderesse
|
Smart & Biggar S.E.N.C.R.L. s.r.l.
Ottawa (Ontario)
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pour les défenderesses
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