Date : 19980203
Dossier : T-2502-93
OTTAWA (Ontario), le mardi 3 février 1998
EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE B. REED
ENTRE :
G.D. HANNA INCORPORATED (HANNA DESIGN),
demanderesse,
- et -
L.S. DISPLAY SYSTEMS INC.,
défenderesse.
JUGEMENT
VU la demande de jugement sommaire qui a été entendue à Toronto (Ontario), le 14 janvier 1998, et la décision de surseoir au prononcé du jugement;
VU les motifs de jugement prononcés ce jour;
LA COUR DÉCLARE QUE :
la défenderesse a contrefait chacune des revendications 1 à 16 inclusivement et 18 à 20 du brevet canadien portant le numéro 1,152,744;
LA COUR ORDONNE CE QUI SUIT :
1) il est interdit à la défenderesse ainsi qu'à ses dirigeants, ses administrateurs, ses préposés, ses mandataires ou ses employés, et à toute autre personne qui relève d'elle, de contrefaire les revendications décrites ci-dessus en fabriquant, en mettant en vente, en vendant, en utilisant, en installant ou en vendant à d'autres pour la revente, l'utilisation ou l'installation au Canada de tout système de panneaux d'exposition comportant les caractéristiques visées par l'une ou l'autre desdites revendications; |
2) la défenderesse doit remettre à la demanderesse tous les systèmes de panneaux d'exposition et leurs éléments contrefaits, ainsi que les documents publicitaires ou promotionnels, comportant les traits caractéristiques couverts par l'une ou l'autre des revendications et qu'elle a en sa possession ou sous son contrôle; |
3) la défenderesse doit payer à la demanderesse la somme de 18 000 $ au titre des profits qu'elle a tirés de la vente des produits contrefaits; |
4) la défenderesse doit payer à la demanderesse l'intérêt avant jugement et l'intérêt après jugement, calculés en fonction du taux d'intérêt préférentiel exigé des banques pendant la période pertinente. |
B. Reed
Juge
Traduction certifiée conforme
Suzanne Bolduc, LL.B.
Date : 19980203
Dossier : T-2502-93
ENTRE :
G.D. HANNA INCORPORATED (HANNA DESIGN),
demanderesse,
- et -
L.S. DISPLAY SYSTEMS INC.,
défenderesse.
MOTIFS DU JUGEMENT
LE JUGE REED
[1] Il s'agit en l'espèce d'une demande de jugement sommaire visant à obtenir une ordonnance portant que les revendications 1 à 16 et 18 à 20 du brevet no 1,152,744 (le brevet 744) sont valides et ont été contrefaites par la défenderesse. Sont aussi demandées une injonction permanente interdisant à la défenderesse toute autre contrefaçon du brevet; une ordonnance exigeant la destruction ou la remise de tout autre produit contrefait existant encore, et une ordonnance enjoignant à la défenderesse de verser à la demanderesse les profits qu'elle a tirés de la vente des produits contrefaits. La demanderesse sollicite aussi le paiement de l'intérêt avant jugement et de l'intérêt après jugement ainsi que les dépens de la requête et de l'action.
[2] La demanderesse a produit deux affidavits au soutien de sa requête à obtenir un jugement sommaire : (1) l'affidavit d'un témoin expert, Ronald Hanna, directeur des opérations de Hanna Design, daté du 22 octobre 1997; (2) un affidavit de Klaus Luddemann, président de Hanna Design, daté du 22 octobre 1997. La défenderesse a produit l'affidavit de L.S. Shalit, daté du 4 décembre 1997. Aucun des déposants n'a été contre-interrogé sur son affidavit.
[3] Le brevet 744 a été délivré à Gary D. Hanna le 30 août 1983. Par un acte de cession confirmatoire daté du 18 octobre 1993 et entré en vigueur le 1er septembre 1983, Garry D. Hanna a transféré tous ses droits, titres et intérêts sur le brevet Hanna à G. D. Hanna Incorporated. Le brevet concerne un système de panneaux d'exposition, du type utilisé par des exposants, par exemple, au cours de foires commerciales.
[4] Le résumé de l'invention divulguée dans le brevet est ainsi rédigé:
[TRADUCTION] |
... la présente invention concerne un panneau d'exposition réalisé à partir d'une feuille sensiblement rigide dont le pourtour présente une gorge continue qui est doublée d'un matériau compressible ou de friction. |
Dans une variante de l'invention, ce panneau peut être composé de panneaux élémentaires articulés sur un ou plusieurs côtés pour former un ensemble repliable. |
L'assemblage de ces panneaux élémentaires se fait au moyen de connecteurs très simples de configuration précise. |
Ces connecteurs ont tous des bouts arrondis qui favorisent leur pénétration dans les fentes, une longueur adaptée à la profondeur des fentes et une épaisseur permettant de réaliser un assemblage en ajustement serré ou comprimé entre les parois adjacentes des fentes. |
Ces connecteurs se présentent sous différentes configurations précises, mais ils ont tous en commun les caractéristiques susmentionnées. |
Comme on peut le constater dans les dessins et le descriptif, les diverses variantes des panneaux élémentaires et des connecteurs peuvent être réalisées à partir de matériaux relativement bon marché et selon un procédé de fabrication simple qui nécessitent une mise de fonds minimale. Il s'imposera également comme une évidence que les réalisations décrites servent essentiellement à illustrer l'invention et que d'autres variantes possibles viendront tout naturellement à l'esprit des personnes versées dans le domaine considéré. |
[5] Les revendications 1, 9 et 16 sont des revendications indépendantes. Elles sont exposées dans l'affidavit de M. Hanna où les éléments individuels de chacune des revendications sont associés aux commentaires explicatifs qui ont été ajoutés. Les commentaires explicatifs sont faits entre parenthèses. Je répète cette description plus loin.
[6] L'invention revendiquée dans la première revendication est la suivante :
[TRADUCTION] |
Un panneau destiné à former une structure d'exposition et se présentant sous la forme d'un : |
élément plan sensiblement rigide comportant au moins une rive dans laquelle est définie une fente de raccordement, |
ladite fente ayant une profondeur prédéterminée, une largeur inférieure à l'épaisseur du connecteur à y être inséré et des parois opposées conçues pour serrer les surfaces correspondantes dudit connecteur. |
[7] La revendication 9 est ainsi rédigée :
[TRADUCTION] |
Un panneau destiné à former une structure d'exposition et qui comprend : |
un premier élément plan délimité par plusieurs rives et présentant une face extérieure et une face intérieure; [une feuille de carton ondulé par exemple] |
un deuxième élément plan délimité par plusieurs rives et présentant une face extérieure et une face intérieure; [une autre feuille de carton ondulé par exemple] |
une première feuille de parement couvrant la face extérieure du premier élément plan (carton), rabattue sur les rives de celui-ci et fixée à sa face intérieure; [le matériau de parement peut être un morceau de tissu doublé plus grand que l'élément plan, collé à la face extérieure de celui-ci et rabattu autour de ses rives, la lisière rabattue étant collée à la face intérieure dudit élément plan] |
une deuxième feuille de parement couvrant la face extérieure du deuxième élément plan (carton), rabattue sur les rives de celui-ci et fixée à sa face intérieure; [le matériau de parement peut être un morceau de tissu doublé plus grand que l'élément plan, collé à la face extérieure de celui-ci et rabattu autour de ses rives, la lisière rabattue étant collée à la face intérieure de l'élément plan] |
lesdits premier et deuxième éléments plans étant fixés l'un à l'autre de manière à définir entre eux et sur au moins une de leurs rives une fente périphérique de profondeur prédéterminée; [les faces intérieures des deux feuilles de carton sont collées l'une à l'autre sauf sur une partie prédéterminée le long d'au moins une des rives susmentionnées de manière à y former une fente ou une gorge] |
ladite fente ayant une largeur inférieure à l'épaisseur d'un connecteur à y être inséré et des parois intérieures opposées conçues pour serrer les surfaces correspondantes dudit connecteur. [la fente délimitée par les faces intérieures des éléments plans revêtus de tissu présente une largeur inférieure à l'épaisseur du connecteur à y être inséré] |
[8] La revendication 16 définit le connecteur utilisé pour assembler deux panneaux élémentaires adjacents comportant une fente de profondeur et de largeur prédéterminées dans leurs rives contiguës. Elle est ainsi rédigée :
[TRADUCTION] |
Un connecteur servant à assembler une paire de panneaux élémentaires adjacents comportant chacun, dans leurs rives contiguës, une fente de profondeur et de largeur prédéterminées, ladite largeur étant variable entre une première position fermée et une seconde position ouverte; ledit connecteur comprenant |
un premier bout, [un bout du connecteur inséré dans la fente de l'un des panneaux] |
un deuxième bout, [l'autre bout du connecteur inséré dans la fente du panneau adjacent] |
et une partie intermédiaire servant à réunir les deux bouts, [la partie intermédiaire servant à raccorder les deux bouts] |
lesdits bouts présentant des rives extérieures arrondies favorisant la pénétration du connecteur dans les fentes opposées desdits panneaux élémentaires adjacents, [les bouts sont arrondis] |
et ayant une épaisseur supérieure à la largeur desdites fentes opposées pour forcer les parois opposées desdites fentes à s'ouvrir de manière à serrer le connecteur y inséré. [le connecteur a une épaisseur supérieure à la largeur des fentes correspondantes des panneaux, forçant ainsi les éléments plans revêtus de tissu à s'écarter l'un de l'autre dans la région de la fente, juste assez pour serrer le connecteur et réaliser l'assemblage desdits panneaux] |
[9] Au cours de 1992, la demanderesse a appris que la défenderesse vendait des systèmes de panneaux d'exposition appelés " Fold-a-Wall ". Elle a acheté l'un de ces panneaux et a conclu que la défenderesse contrefaisait le brevet 744. Dans une lettre datée du 20 janvier 1993, elle a fait part de cette conclusion à la défenderesse. Dans une lettre datée du 5 mars 1993, l'avocat de la défenderesse s'est engagé, au nom de sa cliente, à ne plus fabriquer, mettre en vente, promouvoir ou vendre à l'avenir au Canada des panneaux d'exposition contrefaisant l'une ou l'autre des revendications du brevet 744. La lettre portait ce qui suit : [TRADUCTION] " [c]et engagement est pris par notre cliente sans aucune admission de responsabilité de sa part, mais simplement afin d'obtenir la paix. "
[10] En avril 1993, la demanderesse a appris que des panneaux, provenant de la défenderesse, étaient vendus aux États-Unis. Elle a acheté l'un de ces systèmes de panneaux par l'intermédiaire d'un tiers, Jay's Mailing Service. Une déclaration a été déposée le 22 octobre 1993. Une défense a été produite le 29 novembre 1993. Le 17 mars 1994, la demanderesse a déposé une requête visant à obtenir une injonction provisoire et interlocutoire. Cette requête a été entendue le 28 mars 1994 par le juge Rothstein qui a rendu une ordonnance provisoire. La défenderesse n'a pas comparu pour contester la requête visant à obtenir qu'une injonction interlocutoire soit accordée contre elle. La défenderesse est une entreprise personnelle, M. Shalit en étant le directeur, et elle est située à Montréal. M. Shalit a déclaré à diverses reprises dans les documents déposés que la défenderesse n'avait pas les moyens de retenir les services d'un avocat pour contester l'action intentée contre elle.
[11] Dans une ordonnance datée du 28 mars 1994, le juge Rothstein a indiqué qu'il accueillerait la requête de la demanderesse, qu'il accorderait une injonction interlocutoire et qu'il enjoindrait à la défenderesse de produire immédiatement la comptabilité provisoire de tous les systèmes de panneaux qu'elle a vendus, à moins qu'elle n'indique, avant le 1er avril 1994, qu'elle souhaitait comparaître ou faire des observations pour expliquer pourquoi une telle ordonnance ne devrait pas être rendue. L'avocat de la défenderesse a indiqué à l'avocat de la demanderesse que sa cliente n'avait pas l'intention de présenter des observations au sujet de l'ordonnance sollicitée. Une ordonnance complémentaire confirmant l'ordonnance du 28 mars 1994 accordant une injonction et demandant la production de la comptabilité a été déposée le 5 mai 1994.
[12] Le 10 juin 1994, la défenderesse n'avait pas encore produit la comptabilité provisoire des systèmes qu'elle avait vendus comme l'exigeait l'ordonnance du 5 mai 1994. La demanderesse a donc déposé une requête visant à obtenir une ordonnance enjoignant à la défenderesse de justifier pourquoi elle ne devrait pas être reconnue coupable d'outrage à la Cour. Le 26 juillet 1994, M. Shalit a déposé un affidavit dans lequel il a inscrit, à la main, les chiffres des ventes en question. Cette liste indiquait que les revenus tirés des ventes s'élevaient à 70 563 50 $. Elle indiquait aussi les ventes effectuées en avril 1994, après que le juge Rothstein eut rendu son ordonnance du 28 mars 1994. C'est ce qui a amené la demanderesse à déposer, le 26 août 1994, une requête visant à obtenir une ordonnance enjoignant à la défenderesse de justifier pourquoi elle ne devrait pas être reconnue coupable d'outrage pour avoir violé les ordonnances du 28 mars 1994 et du 5 mai 1994.
[13] Une ordonnance de se justifier a été rendue et l'audience a finalement eu lieu le 6 décembre 1994. En réponse à l'ordonnance de se justifier, M. Shalit a déposé, le 11 octobre 1994, un affidavit dans lequel il affirmait qu'il n'avait pas violé les ordonnances de la Cour du 28 mars et du 5 mai, et qu'en avril, il avait simplement rempli les commandes qui avaient été faites à la défenderesse avant que l'injonction ne soit accordée. Il a dit que la défenderesse n'avait pas d'argent et qu'il avait fait une crise cardiaque. Le 10 février 1995, le juge en chef adjoint a condamné la défenderesse à une amende de 1 000 $ et à des dépens de 2 000 $ pour quasi-outrage de l'ordonnance de la Cour. Appel a été interjeté de cette ordonnance le 27 janvier 1995. La Cour d'appel fédérale a rejeté l'appel pour défaut de poursuivre.
[14] Le 15 juin 1995, la demanderesse a présenté une requête pour faire radier la défense présentée par la défenderesse ou pour obtenir qu'il lui soit ordonné de produire un affidavit de documents et qu'il soit ordonné à M. Shalit de comparaître une nouvelle fois à Toronto, à ses propres frais, pour répondre aux questions restées sans réponse lors de son interrogatoire préalable du 8 novembre 1994. Ni la défenderesse ni son avocat n'ont comparu pour contester cette requête. L'ordonnance demandée a été accordée et les dépens ont été adjugés sur la base procureur-client.
[15] Le 12 juin 1997, la demanderesse a déposé la requête en jugement sommaire qui fait l'objet de la présente audience. Le 3 septembre 1997, le juge Hugessen a rendu une ordonnance de mise au rôle.
[16] Examinons maintenant le jugement sollicité par la demanderesse. Les décisions concernant les critères applicables pour déterminer s'il y a lieu de rendre un jugement sommaire sont Collie Woollen Mills Ltd. c. The Queen, 96 D.T.C. 6146 (C.F. 1re inst.); Feoso Oil Ltd. c. " Sarla " (Le), [1995] 3 C.F. 68 (C.A.); Wall c. Brunell, [1997] F.C.J. No. 608 (C.F. 1re inst.), et Granville Shipping Co. c. Pegasus Lines Ltd.(1994), F.T.R. 77.
[17] Quant à la demande visant à faire reconnaître la validité du brevet, il faut signaler qu'il n'a pas été vraiment question de la validité du brevet dans la présente action. La délivrance d'un brevet comporte une présomption de validité : voir l'article 43 de la Loi sur les brevets, L.R.C. (1985), ch. P-4. Une déclaration de validité n'est pas nécessaire pour trancher le présent litige et, de toute façon, si une telle déclaration était prononcée, elle ne s'appliquerait qu'à l'égard de la défenderesse.
[18] En ce qui concerne la question de la contrefaçon, les témoignages de M. Hanna et de M. Luddemann ont établi les faits suivants. Les panneaux d'exposition de la défenderesse qui font l'objet de la présente action sont formés de feuilles de carton ondulé rigide triple cannelure comportant une fente continue dans leur pourtour. Le tissu de revêtement est collé sur les faces extérieures des panneaux en carton ondulé. Le tissu est rabattu autour des rives des panneaux et inséré dans la fente. Trois ou quatre pattes en plastique sont insérées dans les fentes pour relier un panneau de tête à un panneau principal ou un panneau principal à un autre panneau principal. La défenderesse fabriquait et livrait des panneaux de tête désignés FAW/H et des panneaux principaux désignés FAW/B. Tous les éléments du panneau d'exposition comportent des plis.
[19] La lecture des revendications de la défenderesse révèle que son produit est un panneau destiné à constituer des structures d'exposition et qui se présente sous la forme d'un élément plan sensiblement rigide présentant plusieurs rives. Cet élément plan est une feuille de carton ondulé triple cannelure. La feuille de carton ondulé triple cannelure formant le produit du défendeur se compose de deux feuilles de carton ondulé assemblées au moyen d'une feuille ondulée intermédiaire. La feuille de carton ondulé est entaillée dans l'épaisseur le long de ses rives de manière à y former une fente ou une gorge centrée de 1/2 po à 1 po de profondeur. Un tissu coussiné couvre les faces extérieures de la feuille de carton ondulé, retenu en place au moyen d'un adhésif. Le tissu coussiné est rabattu autour des rives de la feuille de carton et inséré dans la fente périphérique y ménagée. Ainsi, les parois intérieures de la fente sont revêtues de tissu coussiné compressible. La largeur de la fente étant inférieure à l'épaisseur des pattes de raccordement et le tissu coussiné recouvrant les parois intérieures de la fente, les pattes de raccordement se trouvent à être coincées dans la fente par effet de compression et de friction. Les panneaux de la défenderesse sont également articulés ou repliables le long de plis réalisés par écrasement sélectif des cannelures du carton ondulé. Les panneaux de tête et principaux produits par la défenderesse comportent deux zones d'articulation.
[20] Le produit de la défenderesse fait appel à au moins trois pattes de raccordement plates à bouts arrondis faites de plastique rigide. Le connecteur est inséré dans la fente par un premier bout de manière à en laisser exposée environ la moitié. La partie exposée du connecteur est insérée dans la fente d'un second panneau pour réaliser un assemblage en superposition ou juxtaposition de deux panneaux.
[21] Les produits de la défenderesse ont toutes les principales caractéristiques des revendications indépendantes 1, 9 et 16 du brevet 744. Il ne fait aucun doute que le produit de la défenderesse contrefait ce brevet.
[22] Les revenus tirés par la défenderesse de la vente des panneaux de décembre 1992 à avril 1994 s'élèvent à 70 563,50 $.
[23] Il reste à examiner quelle somme devrait être accordée à la demanderesse au titre des profits tirés par la défenderesse de la vente des systèmes de panneaux d'exposition. L'avocat de la demanderesse fait valoir tout d'abord que la somme de 70 563,50 $ devrait être accordée à la demanderesse si la défenderesse ne prouve pas les coûts qu'elle a dû engager pour tirer ces revenus : voir Teledyne Industries Inc. c. Lido Industrial Products Ltd. (1982), 68 C.P.R. (2d) 204, p. 209 (C.F. 1re inst.). Il soutient ensuite que le contre-interrogatoire de M. Shalit a fourni quelques renseignements sur les coûts et qu'à partir de ceux-ci, on peut présumer qu'une évaluation raisonnable des coûts serait de l'ordre de 35 000 $. Les questions posées lors du contre-interrogatoire concernent principalement le coûts des matériaux. Elles ne permettent pas d'en arriver à l'estimation des coûts que propose l'avocat de la demanderesse.
[24] Dans son affidavit du 4 décembre 1997, M. Shalit a déclaré que les profits bruts approximatifs qu'il a réalisés de la vente des panneaux était d'environ 18 000 $. L'avocat de la demanderesse soutient que cette évaluation est trop imprécise et qu'elle n'est pas suffisamment étayée par la preuve pour que la Cour l'accepte. Je ne suis pas d'accord avec cet argument. La demanderesse n'a pas contre-interrogé M. Sahlit sur cet affidavit. Elle n'a pas demandé des renseignements plus détaillés. Bien qu'il s'agisse d'un montant estimatif, le chiffre avancé par la demanderesse est raisonnable.
[25] La défenderesse a sollicité l'autorisation de déposer un affidavit modifié par l'intermédiaire de son avocat à l'audience. Cela ne respectait pas l'échéancier prévu par le juge Hugessen pour le dépôt de la preuve par affidavit. L'avocat de la demanderesse s'est opposé à ce que cet affidavit soit accepté. J'ai permis qu'il soit déposé et j'ai donné la possibilité à l'avocat de la demanderesse de demander plus de temps pour effectuer un contre-interrogatoire sur celui-ci ou pour prendre toutes autres mesures qu'il jugeait nécessaires. L'avocat n'a pas demandé qu'un tel délai additionnel lui soit accordé.
[26] Même si j'ai permis que l'affidavit soit déposé, je n'ai pas considéré qu'il était utile. M. Shalit y déclare que si les profits bruts approximatifs réalisés étaient d'environ 18 000 $, ses profits nets étaient de 9 300 $. L'affidavit n'indique toutefois pas quelles sont les dépenses que la défenderesse ne déduit pas pour calculer les profits bruts mais qu'elle déduit pour calculer les profits nets. L'affidavit semble indiquer que la différence résulte des dépenses relatives au coût des matériaux et aux coûts de production, et les frais généraux. Ce n'est pas ainsi que je conçois la différence entre ces deux concepts.
[27] Même si les parties ne s'entendent pas sur le montant des profits, ni l'une ni l'autre ne désirent que cette question soit plus longuement débattue. Les deux parties veulent que ce différend prenne fin. Le dossier comporte suffisamment d'éléments de preuve pour me permettre de rendre une décision. Je retiens le chiffre de 18 000 $ au titre des profits pour déterminer la somme que la défenderesse devrait verser à la demanderesse.
[28] Examinons maintenant la question de l'intérêt. Il n'y a aucune raison pour laquelle l'intérêt après jugement ne devrait pas s'appliquer. Quant à l'intérêt avant jugement, la question qui se pose est celle de la période, le cas échéant, pour laquelle la défenderesse devrait être tenue de verser un intérêt. La défenderesse fait valoir ce qui suit : la demanderesse avait en grande partie le contrôle du rythme du présent litige; elle savait dès le printemps de 1994 que la défenderesse n'avait pas vraiment l'intention de contester l'action; elle connaissait, dès juillet 1994, le montant des revenus bruts que la défenderesse avait tirés de la vente des panneaux.
[29] Par conséquent, ce n'est pas uniquement par la faute de la demanderesse si le litige n'a pas été réglé plus rapidement. Un examen du dossier de la Cour permet de conclure que la tactique de la défenderesse était ce que j'appellerai l'attitude de " la tête dans le sable " : si elle ne s'occupait pas du litige, celui-ci cesserait d'exister, étant donné en particulier qu'une injonction interlocutoire s'appliquait. Même si la demanderesse aurait pu faire avancer plus rapidement les procédures, la défenderesse aurait pu elle aussi, très tôt dans le litige, mettre fin à celui-ci en déposant un consentement au jugement, où elle n'aurait contesté que la comptabilisation des profits. L'intérêt avant jugement sera par conséquent accordé pour l'ensemble de la période pertinente.
[30] Les dépens seront adjugés une fois que les arguments sur cette question auront été entendus.
B. Reed
Juge
OTTAWA (ONTARIO)
3 février 1998
Traduction certifiée conforme
Suzanne Bolduc, LL.B
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER
NO DU GREFFE : T-2502-93
INTITULÉ DE LA CAUSE : G.D. Hanna Incorporated (Hanna Design)
c. L.S. Display Systems Inc. |
LIEU DE L'AUDIENCE : Toronto (Ontario)
DATE DE L'AUDIENCE : 14 janvier 1998
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MOTIFS DU JUGEMENT DE
MADAME LE JUGE REED
EN DATE DU 3 FÉVRIER 1998
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ONT COMPARU :
Peter F. Kappel pour la demanderesse |
Irwin I. Liebman pour la défenderesse |
PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :
Malcolm Johnston & Associates
Toronto (Ontario) pour la demanderesse |
Liebman & Associés
Montréal (Québec) pour la défenderesse |