Dossier : IMM‑3007‑20
Référence : 2021 CF 833
[traduction française]
Ottawa (Ontario), le 10 août 2021
En présence de monsieur le juge Ahmed
ENTRE :
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REYNAUD EVON HARRIS
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demandeur
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et
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LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
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défendeur
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JUGEMENT ET MOTIFS
I.
Aperçu
[1]
Le demandeur, monsieur Reynaud Evon Harris, sollicite le contrôle judiciaire de la décision d’un décideur principal (l’agent) d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC). Dans sa décision, l’agent a rejeté la demande de résidence permanente fondée sur des motifs d’ordre humanitaire (demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire) présentée par le demandeur au titre du paragraphe 25(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la LIPR). L’agent a toutefois délivré au demandeur un permis de séjour temporaire (PST) au titre du paragraphe 24(1) de la LIPR. Pour cette raison, l’agent a conclu qu’il n’était pas tenu de prendre en compte les conséquences du renvoi du demandeur.
[2]
Le demandeur affirme que l’agent a eu tort d’éviter d’apprécier ses motifs d’ordre humanitaire au motif qu’il lui avait délivré un PST.
[3]
J’estime que la décision de l’agent est raisonnable. Selon la jurisprudence, l’approche adoptée par l’agent est justifiée à moins de circonstances exceptionnelles. Par conséquent, je rejette la présente demande de contrôle judiciaire.
II.
Faits
A.
Le demandeur
[4]
Le demandeur est né en Jamaïque en 1982. Il est entré au Canada en 1992 à titre de résident permanent et réside ici depuis lors, mais il n’a jamais demandé la citoyenneté canadienne. Il est célibataire et n’a pas d’enfants.
[5]
Les membres de la famille immédiate du demandeur, dont sa mère et ses frères et sœurs, résident tous au Canada. Le père du demandeur réside désormais au Royaume‑Uni, mais ils n’ont pas de contacts.
[6]
Le demandeur et son épouse ont divorcé en novembre 2009. En raison du divorce et d’un travail peu valorisant, le demandeur est devenu dépressif. Il s’est alors tourné vers la pornographie comme source de satisfaction, puis vers la pornographie juvénile.
[7]
Le demandeur a été accusé de l’infraction criminelle de possession de pornographie juvénile le 17 décembre 2013. Il a plaidé coupable et a été condamné à une peine d’emprisonnement de dix‑huit mois suivie d’une période de probation d’une durée de trois ans.
[8]
Le demandeur a déployé des efforts considérables en vue de sa réadaptation à la suite de sa condamnation. Pendant son incarcération, il a fait montre d’une bonne conduite et n’a fait l’objet d’aucun avertissement, d’aucune accusation de violation, ou d’aucune accusation portée en établissement. Madame Jocelyn Monsma, travailleuse sociale agréée, a mentionné que le demandeur avait exprimé des regrets sincères pour son comportement et a jugé, dans un rapport daté du 10 avril 2018, qu’il présentait une très faible probabilité de récidive. Le demandeur a entrepris un programme de traitement pour délinquants sexuels, auquel il a pris une part active, en 2018.
[9]
Le demandeur a été jugé interdit de territoire au Canada en raison de sa condamnation, ce qui a rendu imminent son renvoi en Jamaïque. La Section de l’immigration (la SI) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada a conclu le 21 juin 2018 que le demandeur était interdit de territoire pour des raisons de grande criminalité aux termes de l’alinéa 36(1)a) de la LIPR, ce qui a entraîné la perte de son statut de résident permanent.
[10]
Le demandeur a présenté sa demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire le 2 août 2010. Il a demandé que l’agent, a titre de délégué du défendeur, exerce son pouvoir discrétionnaire conféré par le paragraphe 25(1) de la LIPR pour lui accorder le statut de résident permanent malgré son interdiction de territoire.
[11]
La demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire du demandeur reposait sur les motifs suivants :
a) l’établissement du demandeur au Canada;
b) les liens familiaux du demandeur au Canada et l’absence de tels liens en Jamaïque;
c) le diagnostic de [traduction]
« trouble sexuel compulsif »
reçu par le demandeur et les mesures prises activement par celui‑ci pour le traiter, et l’absence de tels traitements en Jamaïque;d) les conditions défavorables en Jamaïque pour les ressortissants qui reviennent dans le pays;
e) les remords manifestés par le demandeur quant à ses agissements;
f) les démarches entreprises par le demandeur en vue de sa réadaptation au Canada.
B.
La décision faisant l’objet du contrôle
[12]
L’agent a rejeté la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire du demandeur dans une décision datée du 10 juin 2020, mais lui a délivré un PST qui était valide pour trois ans. Le demandeur n’a pas demandé de PST dans sa demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire.
[13]
L’agent a délivré un PST au demandeur afin que celui‑ci puisse demeurer au Canada pour poursuivre son traitement médical, à titre de résident temporaire, et,, le cas échéant, de lui permettre de montrer ses efforts de réadaptation, à la suite de quoi il pourra présenter une nouvelle demande de résidence permanente.
[14]
L’agent a conclu qu’il n’était pas nécessaire de prendre en compte les conséquences du renvoi du demandeur du Canada, puisque la délivrance d’un PST au demandeur rendait ces préoccupations conjoncturelles :
[traduction]
J’ai conclu que les motifs d’ordre humanitaire dans cette affaire ne militaient pas en faveur de l’octroi au demandeur, Reynaud Evon Harris, d’une dispense de l’interdiction de territoire pour des raisons de grande criminalité. Cette décision s’accompagne de la délivrance d’un permis de séjour temporaire. En fait, cela neutralise les conséquences du renvoi de l’intéressé dans son pays d’origine et celles de la perte du soutien des membres de sa famille au Canada et de la cessation du traitement qu’il suit ici, lequel vise à contrôler le trouble dont il est atteint. Par conséquent, tous les facteurs invoqués par le demandeur ne sont pas pris en compte dans la présente décision parce que celui‑ci est autorisé à rester au pays à titre temporaire pour une période de trois ans, ce qui rend conjoncturelles les conséquences du départ de l’intéressé du Canada.
[Non souligné dans l’original.]
III.
Question en litige et norme de contrôle
[15]
La question déterminante dans la présente demande de contrôle judiciaire est celle de savoir s’il était raisonnable que l’agent ne prenne pas en compte les conséquences du renvoi du demandeur en raison de la délivrance d’un PST à celui‑ci.
[16]
Les parties conviennent que la norme de la décision raisonnable est la norme de contrôle qui s’applique en ce qui concerne l’examen par l’agent des motifs d’ordre humanitaire au titre du paragraphe 25(1) de la LIPR. C’est aussi mon avis (Rainholz c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 121 (Rainholz) au para 23, citant Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 (Vavilov)).
[17]
La norme de la décision raisonnable est une norme de contrôle fondée sur la déférence, mais aussi rigoureuse (Vavilov, aux para 12 et 13). La cour de révision doit établir si la décision faisant l’objet du contrôle, y compris son raisonnement et son résultat, est transparente, intelligible et justifiée (Vavilov, au para 15). Une décision raisonnable doit être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti (Vavilov, au para 85). Ce qui est raisonnable dépend du contexte administratif pertinent, du dossier dont disposait le décideur et des répercussions de la décision sur les personnes concernées par celle‑ci (Vavilov, aux para 88 à 90, 94, 133 à 135.
[18]
Pour qu’une décision soit jugée déraisonnable, le demandeur doit établir que la décision contient des lacunes suffisamment capitales ou importantes (Vavilov, au para 100). La cour de révision doit s’abstenir d’apprécier à nouveau la preuve examinée par le décideur, et elle ne devrait pas modifier ses conclusions de fait à moins de circonstances exceptionnelles (Vavilov, au para 125.
IV.
Cadre législatif
A.
Motifs d’ordre humanitaire
[19]
Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration peut, en vertu du paragraphe 25(1) de la LIPR, soustraire certains étrangers aux obligations de la LIPR pour des motifs d’ordre humanitaire :
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[20]
Citant l’arrêt Kanthasamy c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CSC 61, entre autres affaires, le juge Little, dans la décision Rainholz, a décrit l’objet des demandes fondées sur des motifs d’ordre humanitaire et les considérations pertinentes:
[14] Les considérations d’ordre humanitaire renvoient à « des faits établis par la preuve, de nature à inciter tout homme raisonnable [sic] d’une société civilisée à soulager les malheurs d’une autre personne – dans la mesure où ses malheurs "justifient l’octroi d’un redressement spécial" aux fins des dispositions de la [LIPR] ». L’objet de la disposition relative aux considérations d’ordre humanitaire a pour objet d’accorder un redressement en equity dans de telles circonstances.
[15] Selon l’interprétation retenue du paragraphe 25(1), l’agent doit évaluer les difficultés auxquelles le ou les demandeurs se heurteront lorsqu’ils quitteront le Canada. Bien qu’ils ne soient pas employés dans la loi elle‑même, la jurisprudence d’appel a confirmé que les adjectifs « inhabituelles », « injustifiées » et « excessives » décrivaient les difficultés susceptibles de justifier une dispense au titre de cette disposition. Ces termes utilisés pour décrire les difficultés sont instructifs, mais pas décisifs, ce qui permet ainsi au paragraphe 25(1) de remplir avec souplesse ses objectifs en equity.
[16] Les demandeurs peuvent soulever une large variété de facteurs pour établir des difficultés dans le cadre d’une demande CH. Les facteurs couramment invoqués comprennent notamment l’établissement au Canada; les attaches au Canada; des considérations liées à la santé; les conséquences découlant d’une séparation d’avec des parents, et l’ISE. La décision prise au titre du paragraphe 25(1) est globale et les considérations pertinentes doivent être soupesées de manière cumulative pour trancher la question de savoir s’il est justifié dans les circonstances d’accorder la mesure.
[17] Le pouvoir discrétionnaire prévu au paragraphe 25(1) doit s’exercer de manière raisonnable. Les agents appelés à se prononcer sur l’existence de considérations d’ordre humanitaire doit véritablement examiner tous les faits et les facteurs pertinents portés à sa connaissance et leur accorder du poids.
[18] Le fardeau d’établir qu’une dispense CH est justifiée incombe aux demandeurs. C’est à leurs risques et péril qu’ils omettent de soumettre des éléments de preuve ou de produire des renseignements pertinents à l’appui d’une demande CH.
[Renvois omis. Non souligné dans l’original.]
B.
PST
[21]
Aux termes du paragraphe 24(1) de la LIPR, un étranger peut recevoir un PST et devenir un résident temporaire même s’il ne satisfait pas aux exigences de la LIPR :
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[22]
Le PST a pour objet de rendre moins sévères les conséquences qu’entraîne dans certains cas la stricte application de la LIPR, comme les cas où il existe des « raisons impérieuses »
pour qu’il soit permis à un étranger d’entrer ou de demeurer au Canada malgré l’interdiction de territoire ou l’inobservation de la LIPR (Farhat c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1275 au para 22). La décision d’accorder un permis de séjour temporaire est une décision hautement discrétionnaire qui commande par conséquent un degré élevé de déférence (Chaudhary c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2018 CF 128 au para 45).
V.
Analyse
[23]
En invoquant le PST délivré au demandeur pour justifier la non‑prise en compte des conséquences du renvoi de celui‑ci, l’agent s’est fondé sur la décision Cardenas c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 263 (Cardenas). La décision faisant l’objet du contrôle dans cette affaire était le rejet par l’agent (le même décideur qu’en l’espèce) des demandes fondées sur des motifs d’ordre humanitaire présentées par deux parents originaires de la Colombie, dont les demandes fondées sur des motifs d’ordre humanitaire présentées par leurs enfants avaient été accueillies.
[24]
Dans la décision Cardenas, l’agent a conclu que les parents étaient interdits de territoire aux termes de l’alinéa 36(1)c) de la LIPR pour avoir utilisé des documents d’identité frauduleux lorsqu’ils résidaient aux États‑Unis et que les motifs d’ordre humanitaire ne justifiaient pas la levée de leur interdiction de territoire dans les circonstances. Toutefois, l’agent a délivré aux parents un PST valide pendant trois ans, en concluant que ce résultat servait au mieux les intérêts de la famille et l’intégrité du programme d’immigration du Canada.
[25]
Comme dans le présent cas, l’agent dans la décision Cardenas a conclu qu’une appréciation des difficultés auxquelles pourraient se heurter les parents en Colombie n’était pas nécessaire à cause de la délivrance d’un PST aux parents, puisque le PST évitait la possibilité du renvoi des parents.
[26]
En contrôle judiciaire, le juge O’Reilly a soutenu que l’agent avait raisonnablement conclu que l’analyse du risque devrait être effectuée plus près du moment où le demandeur serait renvoyé du Canada étant donné que l’analyse des difficultés auxquelles celui‑ci serait exposé, s’il était renvoyé du Canada, « serait de nature spéculative et probablement d’aucune utilité »
puisque le demandeur disposait d’un PST (Cardenas, aux para 7 à 9).
[27]
Compte tenu de ce qui précède, j’estime que la décision de l’agent est fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au regard de la jurisprudence pertinente (Vavilov, au para 85). Comme dans la décision Cardenas, l’agent en l’espèce a établi de façon raisonnable que les conséquences du renvoi du demandeur étaient de nature spéculative puisque le demandeur disposait d’un PST. L’agent n’était pas tenu d’analyser tous les éléments de preuve se rapportant aux motifs d’ordre humanitaire invoqués par le demandeur, puisque le renvoi du demandeur n’était plus imminent (Cardenas, aux para 7 à 9).
[28]
Le demandeur affirme que sa situation est différente de celle dans la décision Cardenas, en dépit du fait qu’il n’a présenté que des observations sommaires pendant les plaidoiries. Plus particulièrement, le demandeur souligne qu’il était un résident permanent depuis plus de 25 ans au moment où il a présenté sa demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire, tandis que les demandeurs dans la décision Cardenas n’avaient pas de statut au Canada. De plus, il souligne que le PST qui lui a été délivré visait à permettre à l’agent d’apprécier son respect de la loi et sa réadaptation au Canada, tandis que, dans la décision Cardenas, les PST délivrés aux demandeurs visaient le maintien de l’unité familiale.
[29]
Je ne suis pas convaincu que les différences soulevées par le demandeur rendent la décision de l’agent déraisonnable. Dans la décision Cardenas, l’agent a délivré un PST pour des raisons similaires à celles dans la présente affaire, soit pour laisser au demandeur « la possibilité de prouver sa fidélité à la loi canadienne »
(Cardenas, au para 9). Bien que la décision Cardenas soit différente pour une question de détails concernant les intérêts de la famille et la durée de la résidence au Canada, j’estime que ces préoccupations se rapportent aux conséquences du renvoi du demandeur à la lumière de ses liens au Canada, analyse que l’agent a de façon raisonnable jugée comme étant de nature spéculative en raison du PST.
[30]
Le demandeur prétend que la présente affaire est analogue à la décision Zazai c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 162 (Zazai), puisque sa demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire représente l’unique mécanisme permettant la prise en compte de son établissement et du traitement en santé mentale qu’il suit au Canada.
[31]
Dans la décision Zazai, le juge O’Keefe a statué qu’une agente des visas avait de façon déraisonnable rejeté la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire du demandeur au motif qu’il disposait d’un PST. Plus particulièrement, l’agente dans la décision Zazai a commis une erreur en omettant de prendre en compte comme il se devait l’intérêt supérieur de l’enfant (l’ISE) et en concluant que le demandeur pouvait demander un examen des risques avant renvoi (ERAR) si son PST n’était pas prolongé, en dépit du fait que l’ISE ne peut pas être pris en compte dans un ERAR (Zazai, aux para 59 et 60).
[32]
Dans la décision Cardenas, le juge O’Reilly a établi une distinction par rapport à la décision Zazai :
[15] Une fois de plus, les circonstances de l’espèce sont différentes. M. Victoria Cardenas a un statut sûr au Canada pendant au moins trois ans. L’intérêt supérieur de ses enfants a été entièrement pris en considération. Tout risque de renvoi du demandeur du Canada peut être examiné dans un prochain ERAR.
[33]
La logique du juge O’Reilly s’applique aussi en l’espèce. Il n’y a pas de considérations liées à l’ISE soulevées par le demandeur que l’agent aurait omis d’apprécier de façon raisonnable; le statut du demandeur, grâce au PST, est relativement sûr, et les conséquences du renvoi du demandeur peuvent être prises en compte dans le cadre d’une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire subséquente ou dans le cadre d’un ERAR. Par conséquent, je conclus que la décision Zazai est différente de la présente affaire.
[34]
De plus, le demandeur affirme que la décision de l’agent est déraisonnable à la lumière du guide opérationnel IP‑5 d’IRCC intitulé Demande présentée par des immigrants au Canada pour des motifs d'ordre humanitaire (le guide opérationnel IP 5), qui prévoit à la section 5.22 que « [l]a demande CH ne peut pas simplement se solder par la délivrance d’un PST. L’agent doit d’abord refuser la demande CH et fournir une justification »
.
[35]
J’estime que la décision de l’agent est justifiée à la lumière du guide opérationnel IP 5. L’agent justifie sa décision de rejeter la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire du demandeur en faisant valoir que l’analyse des conséquences du renvoi du demandeur était de nature spéculative vu la délivrance du PST. Même si le demandeur conteste le bien‑fondé de ce raisonnement, l’agent n’en a pas moins agi conformément au guide opérationnel IP‑5 en délivrant un PST.
[36]
Enfin, je ne suis pas convaincu par l’argument du demandeur selon lequel l’agent a manqué à son obligation d’équité en refusant de prendre en compte des éléments de preuve se rapportant aux motifs d’ordre humanitaire qu’il avait invoqués. Rien ne porte à croire que l’agent a refusé au demandeur la possibilité d’être entendu, ce qui aurait constitué un manquement à l’équité procédurale. Le demandeur affirme plutôt que les motifs de l’agent ne sont pas suffisamment justifiés à la lumière des éléments de preuve pertinents. Lorsque des motifs de décision sont donnés, comme en l’espèce, toute contestation du raisonnement ou du résultat de la décision doit être examinée selon la norme de la décision raisonnable, c’est‑à‑dire en fonction du caractère raisonnable du raisonnement ou du résultat, et non pas en fonction d’un manquement à l’équité procédurale, auquel cas c’est la norme de la décision correcte qui s’applique (Newfoundland and Labrador Nurses’Union c Terre‑Neuve‑et‑Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC aux para 21 et 22). Pour les motifs mentionnés plus haut, j’estime que la décision de l’agent est raisonnable.
VI.
Conclusion
[37]
Je conclus que la décision de l’agent est raisonnable puisque celui‑ci a refusé de façon raisonnable de prendre en compte les conséquences du renvoi du demandeur en raison de la délivrance d’un PST au demandeur. Par conséquent, je rejette la présente demande de contrôle judiciaire.
[38]
Les parties n’ont pas proposé de question aux fins de certification, et je conviens qu’aucune n’est soulevée en l’espèce.
JUGEMENT dans le dossier IMM‑3007‑20
LA COUR STATUE que :
La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.
Il n’y a pas de question à certifier.
« Shirzad A. »
Juge
Traduction certifiée conforme
Line Niquet
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOssier :
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IMM‑3007‑20
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INTITULÉ :
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REYNAUD EVON HARRIS c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
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LIEU DE L’AUDIENCE :
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audience tenue par vidéoconférence
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DATE DE L’AUDIENCE :
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le 8 juin 2021
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JUGEMENT ET MOTIFS :
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le juge AHMED
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DATE DES MOTIFS :
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le 10 août 2021
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COMPARUTIONS :
Jatin Shory
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pour le demandeur
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Meenu Ahluwalia
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pour le défendeur
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Shory Law
Avocats
Calgary (Alberta)
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pour le demandeur
|
Procureur général du Canada
Calgary (Alberta)
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pour le défendeur
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