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         Date : 19980318

     Dossier : IMM-1429-97

Ottawa (Ontario), le 18 mars 1998.

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE MULDOON

ENTRE :

     DEIAN IORDANOV IORDANOV,

     requérant,

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     intimé.

     ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE CE QUI SUIT :

1)      la décision (dossier nE T96-00287) de la Section du statut de réfugié, datée du 6 février 1997 et certifiée le 17 mars 1997 est annulée; en outre, la revendication du statut de réfugié du requérant est, par la présente, renvoyée à un tribunal de la SSR diféremment constitué pour que celui-ci procède à une audition; et

2)      ledit nouveau tribunal de la SSR sera informé des motifs ci-joints de la Cour; il évaluera à nouveau l'ensemble du dossier du requérant, y compris l'importance, s'il y en a, à accorder à la cassette vidéo déjà déposée en preuve en tant que pièce C-3, si le requérant et/ou son avocat décident de la soumettre au nouveau tribunal de la SSR.

                             F.C. Muldoon

                             Juge

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL.L.

     Date : 19980318

     Dossier : IMM-1429-97

ENTRE :

     DEIAN IORDANOV IORDANOV,

     requérant,

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     intimé.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE MULDOON

[1]      Il s'agit d'une demande présentée en vertu de l'article 82.1 de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2 (la Loi) en vue de soumettre à un contrôle judiciaire une décision datée du 6 février 1987 par laquelle la Section du statut de réfugié (SSR) de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a conclu que le requérant n'était pas un réfugié au sens de la Convention.

[2]      Le requérant, citoyen de la Bulgarie, dit craindre avec raison d'être persécuté du fait de sa religion. Il est membre de l'Église bulgare de Dieu, au sein de laquelle il jouait un rôle actif avant de quitter la Bulgarie en 1992. Après avoir terminé son service militaire obligatoire, le requérant a été appelé à servir dans les forces de réserve pendant deux mois, ce qu'il a refusé de faire. Il croit que l'on avait fait appel à lui pour que les militaires puissent surveiller ses gestes et l'empêcher d'exprimer ses opinions. Le requérant déclare que parce qu'il a refusé de servir dans les forces de réserve, il est passible de deux années d'emprisonnement s'il est reconnu coupable de défaut de service.

[3]      En octobre 1992, le requérant a quitté la Bulgarie et, à la suite de nombreux voyages, il est entré au Canada le 7 juillet 1995 et a revendiqué le statut de réfugié au sens de la Convention. Il avait également revendiqué ce statut aux Pays-Bas, en Belgique et en Angleterre, maias avait chaque fois essuyé un refus (le requérant a quitté les Pays-Bas avant que l'on statue sur sa revendication). Les parents et les deux frères du requérant résident toujours en Bulgarie.

[4]      Le formulaire de renseignements personnels du requérant expose les détails de la revendication du statut de réfugié au sens de la Convention de ce dernier, aux pages 22 à 24 du dossier de demande; le texte est le suivant :

     [TRADUCTION]         
     ... Je crains d'être persécuté à cause de mes croyances religieuses. La liberté que j'ai d'exercer ma religion est restreinte, et je crois que le gouvernement de la Bulgarie dissuade activement les membres de ma confession de pratiquer leur religion. J'ai été victime, directement et indirectement, de harcèlement de la part d'individus, de membres de la police et de fonctionnaires de l'État, ainsi que de discrimination, de menaces et d'intolérance générale.         
     ...         
     Je suis considéré comme membre d'un culte, un sectaire, par les autorités bulgares. Celles-ci me connaissent à cause des activités que j'ai accomplies en tant que guide pour jeunes au sein de mon Église, et des franches critiques concernant la discrimination que j'ai décrite ci-dessus. À Vratza, la ville où j'habite, j'ai été battu par des membres de l'Église orthodoxe lors d'une vilaine confrontation. Je n'ai eu aucune aide de la part de la police, et aucune accusation n'a été portée contre les responsables. À Vratza, notre église a été saccagée. Le chiffre 666 a été peint à la bombe aérosol sur l'immeuble, et les vitres ont été fracassées. Je crois que les responsables du saccage étaient des membres orthodoxes.         
     ...         
     En juin 1994 (le 10 juin), l'Église bulgare de Dieu, dont je suis membre, a été la cible d'une attaque violente à l'heure de la messe. Quelques personnes ont été blessées, et un homme âgé a été gravement battu. Je n'ai pas eu de mal mais j'ai été témoin de l'incident [à l'audience, le requérant a déclaré qu'il n'était pas présent au moment où l'attaque a eu lieu, car il se trouvait à l'étranger. (Page 107, dossier de la SSR.)] Le 22 juin de la même année, les membres de notre Église se sont réunis dans une salle privée. À cette occasion, la police a bloqué les portes menant à la salle, et a pris d'autres mesures répressives contre les personnes présentes.         
     ...         
     J'ai été victime de sévices physiques de la part d'officiers de l'armée bulgare lors de mon service militaire. Des officiers étaient au courant de mes croyances religieuses, et ont participé aux raclées et aux actes discriminatoires. On a refusé de me prodiguer des soins médicaux. Durant l'année 1992, après que j'ai terminé mon service militaire obligatoire, j'ai été appelé à servir pendant deux mois dans les forces de réserve. J'ai refusé, car je crois qu'il s'agissait d'un moyen de surveiller mes activités et de m'empêcher d'exprimer mes opinions en veillant à ce que jois surveillé par les militaires. À cause de mon refus, je courais le risque de me voir infliger une peine de deux années d'emprisonnement si j'étais reconnu coupable. Mon père m'a dit que, selon les informations qu'il avait reçues, c'est ce qui m'arriverait à mon retour.         
     Mes activités au sein de l'Église et ma foi envers le protestantisme évangélique ne sont pas tolérées en Bulgarie. Je crains d'être persécuté et que ma famille et moi-même soient victimes de représailles si je retourne dans ce pays. Dans ce dernier, je n'ai pas de liberté religieuse. Je suis parti à la recherche d'un lieu sûr, et je m'adresse au Canada parce que je crois que ce pays offre la liberté dont j'ai été privé antérieurement.         

[5]      Le 27 septembre 1996, le requérant s'est présenté à une audience visant à déterminer la validité de sa revendication du statut de réfugié. Lors de l'audience, le requérant a présenté une cassette vidéo comprenant un entretien avec un pasteur évangélique bulgare, enregistré le 15 novembre 1995. Le requérant a produit cette cassette à l'appui de sa prétention selon laquelle il craignait avec raison d'être persécuté du fait de ses croyances religieuses. Pendant tout l'entretien, le pasteur décrit la situation à laquelle sont confrontés les chrétiens évangéliques en Bulgarie. La cassette décrit la discrimination dont sont victimes les membres de l'Église évangélique de Dieu en Bulgarie ainsi que les membres d'autres Églises évangéliques.

[6]      Le tribunal n'a pas regardé le contenu de la cassette vidéo à l'audience. Le 26 mars 1997, le requérant a obtenu la décision de la SSR, dont les passages pertinents sont les suivants :

     [TRADUCTION]         
     Le tribunal a eu amplement l'occasion d'observer le comportement du requérant durant son témoignage. Il s'est exprimé évasivement et n'a pas répondu aux diverses questions qui lui ont été posées sur ses revendications du statut de réfugié aux Pays-Bas, en Belgique et en Angleterre. Le tribunal a eu l'impression qu'il a exagéré de façon générale son témoignage à propos des responsabilités associées au fait d'être membre de l'Église bulgare de Dieu ainsi que de l'Église évangélique de Dieu en Bulgarie. Il a aussi constamment exagéré l'animosité du gouvernement bulgare et du grand public à l'endroit du mouvement évangélique en général.         
     Se fondant sur les renseignements figurant dans la pièce R-4 établie par un organisme indépendant, le tribunal conclut qu'il s'agit là d'un énoncé exact de la situation en Bulgarie relativement au mouvement évangélique. Ce dernier est toléré, ses églises organisées ont capacité juridique et la police fait bel et bien enquête sur les attaques auxquelles se livrent des voyous contre le mouvement. Le demandeur n'a pas convaincu le tribunal que sa crainte d'être persécuté s'il retournait en Bulgarie est fondée.         

[7]      Le requérant soulève les questions qui suivent dans la présente demande de contrôle judiciaire :

     [TRADUCTION]         
     1.      Si la SSR a commis une erreur en faisant abstraction de preuves documentaires pertinentes qui étayaient la revendication du statut de réfugié du requérant.         
     2.      Si la SSR a manqué à son obligation d'agir de manière équitable en n'examinant pas la preuve fournie par le requérant après qu'elle eut indiqué qu'elle examinerait la preuve et donnerait au requérant la possibilité d'y répondre.         

1. Abstraction faite de la preuve pertinente

[8]      Le requérant fait valoir que la SSR a commis une erreur en faisant abstraction de la cassette vidéo soumise en preuve, qui indique que le gouvernement bulgare répand la haine contre les membres de l'Église bulgare de Dieu et d'autres églises évangéliques en Bulgarie.

[9]      Le requérant se fonde sur deux décisions : Lai c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), (1991), 160 N.R. 156 (C.A.F.), et Padilla c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), A-484-91 (6 octobre 1992) (C.A.F.), dans lesquelles la Section d'appel de la présente Cour a infirmé les décisions de la SSR au motif que celle-ci n'avait pas tenu compte d'éléments de preuve pertinents. Dans ces deux affaires, les éléments de preuve en question visaient à établir la prétention de persécution du revendicateur dans un sens précis, plutôt que général. Ces éléments corroboraient le témoignage fait par chacun des revendicateurs au sujet de sa crainte fondée de persécution. Dans ni l'une ni l'autre affaire y avait-il des conclusions défavorables quant à la crédibilité; dans chaque affaire, la SSR a plutôt conclu simplement qu'il n'existait aucune crainte fondée de persécution dans un sens objectif, sans tenir compte d'éléments de preuve qui corroboraient directement le récit de chaque revendicateur. Dans les deux affaires, la Cour d'appel a statué que la SSR était à tout le moins tenue d'examiner la preuve présentée et d'indiquer pourquoi elle privilégiait certains éléments de preuve plutôt que d'autres.

[10]      Dans Hassan c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), (1992), 147 N.R. 317 (C.A.F.), la Section d'appel de la présente Cour a déclaré, à propos de la preuve documentaire, que la SSR n'est pas tenue de mentionner dans ses motifs chacun des éléments de preuve. S'exprimant au nom de la Cour unanime, le juge Heald a déclaré ce qui suit, à la page 318 du recueil :

     À mon avis, la Commission pouvait raisonnablement tirer les conclusions auxquelles elle est parvenue, compte tenu de l'ensemble de la preuve soumise, et il s'ensuit donc qu'elle n'a pas commis d'erreur de droit. Le fait que la Commission n'a pas mentionné dans ses motifs une partie quelconque de la preuve documentaire n'entache pas sa décision de nullité. Les passages tirés de la preuve documentaire que l'appelant invoque font partie de l'ensemble de la preuve que la Commission est en droit d'apprécier sur le plan de la crédibilité et de la force probante. Après avoir examiné le dossier dont la Commission était saisie, je suis convaincu que celle-ci a effectivement examiné et apprécié l'ensemble de la preuve d'une façon appropriée.         

[11]      Compte tenu de ce qui précède, il est possible de conclure que deux types d'éléments de preuve peuvent être présentés aux audiences de la SSR : les éléments qui sont propres à la prétention du revendicateur et qui corroborent son témoignage, et les éléments de nature générale (documentaires) et sans rapport précis avec la prétention du requérant, mais qui traitent de manière générale de la situation dans le pays en question. La Cour d'appel a clairement établi que lorsque la SSR omet d'examiner les éléments du premier type, et d'y faire précisément référence dans ses motifs, cela peut avoir pour effet de vicier la décision. Toutefois, en ce qui concerne le second type d'éléments de preuve, la SSR n'est pas tenue de les mentionner tous. Il lui suffit d'apprécier l'ensemble de la preuve. Le fait de ne pas examiner la totalité des preuve du second type amènera la Cour à intervenir.

[12]      Le requérant fait valoir que la SSR se trouvait dans l'obligation d'expliquer pourquoi elle préférait la preuve documentaire fournie par l'agent chargé de la revendication (ACR) à la cassette vidéo déposée en preuve. Bien que les obligations de cette nature puissent être imposées dans le cas d'une preuve directe, dans le cas de celles qui se rapportent aux preuves documentaires auxquelles on pourrait peut-être associer la cassette vidéo, les critères sont moins stricts.

[13]      L'affaire dont il est question en l'espèce n'est pas la même que dans Hassan, et son issue devrait être différente. Cependant, il est possible de paraphraser comme suit les propos cités du juge Heald : l'examen qu'a fait la présente Cour du dossier soumis à la SSR la convainc qu'en fait, cette dernière n'a pas examiné et apprécié comme il se doit l'ensemble de la preuve. La conclusion de la SSR aurait peut-être bien été retenue si elle avait dit ce qu'elle pensait de la pièce C-3, la cassette vidéo. Elle aurait pu tirer une brève conclusion quant à la crédibilité, l'intégralité et la pertinence des propos du pasteur George Bakalov, qui était le narrateur. L'impression qui se dégage de la décision de la SSR à propos de la revendication du requérant est que ses membres ont simplement tout oublié au sujet de la cassette, la pièce C-3. Il s'agissait du principal élément de preuve non testimoniale du requérant.

2. Justice naturelle

[14]      Le requérant fait valoir aussi que la SSR ne s'est pas acquittée de son obligation d'agir équitablement en omettant d'examiner la preuve fournie par le requérant après qu'elle eut indiqué qu'elle le ferait et qu'elle donnerait au requérant la possibilité de répliquer. La SSR était-elle tenue de permettre au requérant de répondre au contenu de la cassette vidéo, après s'être engagée à le faire? Pour examiner cette question il importe de déterminer si un tel engagement a été fait ou non, et si la SSR a omis de s'en acquitter.

[15]      À l'appui de cet argument, le requérant, aux paragraphes 5 à 14 de son affidavit (dossier du requérant, p. 11-13), indique quel est le contenu de la cassette vidéo. Il s'agit là d'un point qui intéresse la SSR, mais pas la présente Cour, sauf pour s'assurer que le contenu pourrait être lié à la revendication du statut de réfugié du requérant, ce qui est effectivement le cas.

[16]      Les passages pertinents de la transcription de l'audience qui figurent dans le dossier de la SSR " pagination clairement citée (pages du document indiquées entre parenthèses), sont les suivants :

     [TRADUCTION]         
     LE PRÉSIDENT DE L'AUDIENCE : * * * ensuite, suivant l'heure, nous aurons peut-être, ou peut-être pas, l'occasion de regarder votre cassette cet après-midi. Si cela s'avère impossible, nous ajournerons l'audience, regarderons la cassette, et si nous avons des questions quelconques à son sujet nous -- il se peut que nous réouvrions l'audience. Sinon, nous entendrions ensuite les arguments du -- les observations de l'agent chargé de la revendication, ainsi que ceux que vous voudriez faire. Comprenez-vous?         
     LE REVENDICATEUR : Oui.         
         (page 108 -(10))         

     LE REVENDICATEUR : * * * C'est ce qui se passe en réalité là-bas, et il y en a aussi une preuve dans ma cassette.         
         (page 114 - (16))         
     LE REVENDICATEUR : Je sais que certaines de ces Églises avaient des problèmes. Je ne crois pas que toutes ces Églises sont enregistrées, mais je sais - et la cassette le montre aussi - qu'elles ont des problèmes au moment de l'enregistrement. Ils voulaient mettre fin à toute espèce d'enregistrement, et j'ignore quelle est actuellement la situation, et il est possible de voir sur la cassette de quelle façon on chasse les gens des Églises.         
         ***      ***      ***         
     LE PRÉSIDENT DE L'AUDIENCE : Je n'ai pas d'autres questions. Je vous remercie. Je -- excusez-moi. Très bien, vu le peu de temps dont nous disposons, vous nous avez fourni cette cassette. Nous n'avons pas eu l'occasion de la regarder, mais cela n'est pas inusité car une grande partie des documents que soumettent les revendicateurs, surtout à la date de l'audience, nous n'avons pas l'occasion de les regarder ou de les lire. Vous avez dit aussi aujourd'hui que vous détenez des articles de journal en langue bulgare.         

     LE REVENDICATEUR : Oui.

         (p. 134 - (36))         
     LE PRÉSIDENT DE L'AUDIENCE : Voulez-vous dire que les documents que Mme Stoddart a fournis cette après-midi contiendront les mêmes informations que dans votre --         
     LE REVENDICATEUR : Oui.         
     LE PRÉSIDENT DE L'AUDIENCE : -- article de journal?         
     LE REVENDICATEUR : Oui.         
     LE PRÉSIDENT DE L'AUDIENCE : Si c'est le cas, il sera inutile que vous le traduisiez.         
     LE REVENDICATEUR : Oui.         
     LE PRÉSIDENT DE L'AUDIENCE : Parfait. Il ne serait donc pas déraisonnable, je crois, de vous accorder un délai de 30 jours pour nous faire part de vos arguments quant à la raison pour laquelle il faudrait vous reconnaître le statut de réfugié au sens de la Convention. Vous nous avez dit que vous êtes au courant de la Convention, et il semble, d'après votre témoignage, que vous craignez avec raison d'être persécuté à cause de votre religion ou, subsidiairement, de votre opposition au service militaire, chose qui pourrait être perçue comme une opinion politique. Allez-vous donc nous fournir des arguments sur ces deux points?         
     LE REVENDICATEUR : Oui.         
     LE PRÉSIDENT DE L'AUDIENCE : Si nous ne recevons rien de vous dans les 30 jours qui suivent, il nous sera alors loisible de prendre une décision sans avoir eu de vos nouvelles. S'il y a une bonne raison pour laquelle vous ne pourrez pas nous fournir ces informations dans les 30 jours qui suivent, vous pourriez demander une prorogation. * * *         
         (p. 137- (39))         
     LE PRÉSIDENT DE L'AUDIENCE : Merci, Mme Stoddart. Nous nous attendons donc à recevoir vos éléments de preuve supplémentaires et vos arguments avant, nous sommes le 27 --         
     L'ACR : Oui.         
     LE PRÉSIDENT DE L'AUDIENCE : -- avant le 27 octobre. L'audience est donc terminée, sous réserve de recevoir du revendicateur des éléments de preuve supplémentaires, s'il désire en fournir.         
         (p. 139 - (41))         

[17]      C'est donc dire que si le président d'audience de la SSR a oublié son engagement, enregistré à la p. 108-(10), cela n'a pas été le cas du revendicateur. Il est vrai qu'en tout état de cause, la SSR n'a pas promis d'inviter le revendicateur à faire d'autres observations sur sa cassette vidéo. Cela est sans rapport avec la question. La SSR a promis de regarder la cassette vidéo, le principal élément de preuve du revendicateur, et ensuite le tribunal, agissant d'une manière soit insultante soit négligente, n'a même pas fait mention de cette cassette dans ses motifs de décision où il rejette la revendication, chose que la SSR devait de plein droit au revendicateur. Après tout, la cassette vidéo n'était pas juste un obscur paragraphe enfoui dans une foule de documents : il s'agissait du principal élément de preuve du revendicateur, comme ce dernier l'a clairement établi. Il ne s'agit pas là du genre de preuve à laquelle fait référence le juge Heald dans l'affaire Hassan, précitée. On ne peut même pas savoir, d'après ses motifs, si la SSR a jamais rempli sa promesse de regarder la cassette vidéo. Le tribunal a manqué à son obligation d'agir équitablement et de respecter la justice naturelle en ne mentionnant même pas s'il avait effectivement regardé comme promis la cassette vidéo, voire ce qu'il avait fait de cette dernière. Le président de l'audience a clairement indiqué que si la SSR, après avoir regardé la cassette vidéo, avait [TRADUCTION] " des questions quelconques à son sujet " il se peut que nous réouvrions l'audience ". À l'évidence, la SSR n'aurait pas dû faire carrément abstraction de la cassette vidéo en formulant sa décision de refuser le statut de réfugié au sens de la Convention.

[18]      Il appartient à la SSR, et non à la présente Cour, d'évaluer si la preuve fournie au moyen de la cassette vidéo (la pièce C-3) est d'une grande importance ou non. C'est aussi simple que cela. Cette entorse à la justice naturelle n'est donc pas assimilable à celle qui est survenue dans l'affaire Kaur c. M.E.I., (1993) 21 Imm.L.R. (2d) 301, une décision du juge Noël, de la présente Cour, sur laquelle se fonde le requérant.

Étant donné que la SSR a omis ou négligé même de mentionner la preuve principale du requérant, sa décision datée du 6 février 1997, certifiée plus d'un mois plus tard, soit le 17 mars 1997, dans le dossier nE T96-00287, doit être annulée et la revendication du requérant soumise à un tribunal différemment constitué de la SSR. Ce nouveau tribunal, après avoir été informé des présents motifs, évaluera bien sûr à nouveau l'ensemble du dossier du requérant, y compris l'importance à accorder à la cassette vidéo, si le requérant et/ou son avocat décident de soumettre cette preuve au nouveau tribunal.

                                 F.C. Muldoon
                                 Juge

Ottawa (Ontario)

Le 18 mars 1998

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

NE DU GREFFE :              IMM-1429-97
INTITULÉ DE LA CAUSE :      DEIAN IORDANOV IORDANOV c. MCI     
LIEU DE L'AUDIENCE :          TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :          Le mardi 6 janvier 1998

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

PRONONCÉS PAR :          Monsieur le juge Muldoon

EN DATE DU :              18 mars 1998

ONT COMPARU :

Me Larry Konrad              POUR LE REQUÉRANT

Me Toby Hoffmann              POUR L'INTIMÉ

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Me Larry Konrad              POUR LE REQUÉRANT

Toronto (Ontario)

Me George Thomson              POUR L'INTIMÉ

Sous-procureur général

du Canada

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