Date : 20030226
Dossier : IMM-3472-02
Référence neutre : 2003 CFPI 222
Entre :
ADIL MIRZA HUSSAIN,
MAHJABEEN MOHAMED DHALA,
ZAINAB ADIL HUSSAIN,
FATIMA ADIL HUSSAIN,
partie demanderesse
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
partie défenderesse
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
LE JUGE PINARD :
Il s'agit ici d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision de la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié(la « CISR » ) rendue le 26 juin 2002 statuant que les demandeurs ne sont pas des réfugiés au sens de la Convention, tels que définis au paragraphe 2(1) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2 (la « Loi » ).
Le demandeur principal, Adil Mirza Hussain, est citoyen de l'Irak et allègue craindre la persécution dans son pays en raison de sa religion (musulmane chi'ite), de son appartenance à un groupe social particulier et de ses opinions politiques. La demanderesse principale, Mahjabeen Mohamed Dhala, est citoyenne indienne et l'épouse du demandeur principal. Elle revendique le statut de réfugiée en raison de sa religion chi'ite. Leurs deux filles mineures, Zainab Adil Hussain et Fatima Adil Hussain, fondent leurs revendications sur celles de leurs parents.
En raison de nombreuses contradictions et inconsistances dans le témoignage des demandeurs, la CISR les a trouvés non crédibles. Il lui était alors loisible de ne pas présumer que leur témoignage était vrai.
Les demandeurs soumettent en particulier que la CISR a erré en reprochant au demandeur principal d'avoir utilisé des moyens frauduleux pour se rendre au Canada et en tirant des conclusions négatives quant àsa crédibilité après l'avoir cru lorsqu'il a dit avoir obtenu frauduleusement des passeports pakistanais dans le but d'obtenir une résidence dans les Émirats Arabes Unis ( « EAU » ). Toutefois, la CISR a acceptéle fait que le demandeur principal soit citoyen d'Irak, et ce, malgré les inconsistances et les invraisemblances dans son témoignage, ainsi que les mensonges qu'il a avouéavoir dits pour obtenir ses documents pakistanais. Ceci ne veut pas dire pour autant que le tribunal ne pouvait pas juger que le demandeur principal n'avait pas fourni de preuve crédible à l'appui de sa revendication. En effet, les nombreuses inconsistances dans le témoignage de ce dernier n'ont rien à voir avec son identité irakienne. Il n'était donc pas déraisonnable pour le tribunal de trouver que son récit quant àsa crainte de persécution n'était pas crédible.
Les demandeurs soumettent également que la CISR a erré en trouvant que le demandeur principal n'avait pas prouvé de façon satisfaisante que des Irakiens réfugiés aux EAU avaient été déportés en Irak lorsque les relations entre les deux pays se sont améliorées. En effet, la CISR a trouvé que le demandeur principal n'avait pas prouvé de façon satisfaisante qu'il risquait lui-même d'être renvoyé des EAU, tel qu'il appert de l'extrait suivant, à la page 11 de la décision :
. . . In the panel's opinion, even though some people might have been deported from the UAE, the principal claimant did not produce satisfactory evidence that these people had the same status in the UAE as he did. Asked if he had any evidence that the Emirate authorities deported Iraqi citizens for possessing false passports and having obtained their residence permits through fraudulent means, he stated that many people have false passports but they kept it as a secret, they would not declare it. The principal claimant failed to produce satisfactory evidence that he risked to be deported from UAE for the alleged reasons.
Les demandeurs soumettent que la preuve documentaire et le témoignage du demandeur principal étaient clairs sur ce point. Cependant, ils n'ont fourni ni cité quelque document à l'appui de leur argument. Je n'ai rien trouvé dans les documents du pays d'origine indiquant que des Irakiens réfugiés aux EAU avaient été déportés en Irak. Puisque la CISR n'a pas cru le demandeur principal, le témoignage de ce dernier ne suffit pas pour établir qu'il risquait d'être renvoyé. La conclusion tirée par le tribunal sur ce point n'était donc pas déraisonnable, compte tenu de la preuve devant lui.
Les demandeurs reprochent enfin à la CISR d'avoir fait une utilisation sélective de la preuve documentaire concernant la situation en Inde. Je ne suis pas satisfait que ce soit bien le cas. Il est établi qu'il faut présumer qu'un tribunal a tenu compte de l'ensemble de la preuve devant lui (voir, i.e., Taher c. Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration (7 septembre 2000), IMM-5255-99, Hassan c. Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration (22 octobre 1992), A-831-90, Florea c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration (11 juin 1993), A-1307-91 et Woolaston c. Ministre de la Main-d'oeuvre et de l'Immigration, [1973] R.C.S. 102). En l'espèce la demanderesse principale s'est appuyée sur un incident isolé, soit les menaces faites par un passant dans la rue, ainsi que sur les conditions générales en Inde, pour tenter de convaincre la CISR du bien-fondé de sa crainte. Vu la preuve documentaire indiquant que la situation générale des musulmans en Inde était stable et qu'il y avait des garanties légales de droit à la liberté de religion et de sa pratique, la conclusion du tribunal, à cet égard, n'était certes pas manifestement déraisonnable.
Faut-il rappeler, en conclusion, qu'en matière de crédibilité et d'appréciation des faits, l'intervention de cette Cour n'est justifiée que si la décision en cause est fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont dispose le tribunal administratif (alinéa 18.1(4)d) de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. 1985, ch. F-7). N'étant pas satisfait de l'existence de quelque erreur de fait manifeste et dominante, je dois rejeter la demande de contrôle judiciaire.
JUGE
OTTAWA (ONTARIO)
Le 26 février 2003
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
NOMS DES AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-3472-02
INTITULÉ : ADIL MIRZA HUSSAIN, MAHJABEEN MOHAMED DHALA, ZAINAB ADIL HUSSAIN, FATIMA ADIL HUSSAIN c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE : Montréal (Québec)
DATE DE L'AUDIENCE : Le 15 janvier 2003
MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE : L'honorable juge Pinard
EN DATE DU : 26 février 2003
ONT COMPARU :
Me Styliani Markaki POUR LA PARTIE DEMANDERESSE
Me Roberto Godoy POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE
Assisté par Me Annie Van Der Meerschen
PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :
Styliani Markaki POUR LA PARTIE DEMANDERESSE
Montréal (Québec)
Morris Rosenberg POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE
Sous-procureur général du Canada
Ottawa (Ontario)