Date : 20030326
Dossier : T-779-01
Référence : 2003 CFPI 353
Toronto (Ontario), le mercredi 26 mars 2003
EN PRÉSENCE DU JUGE RUSSELL
ENTRE :
FERO HOLDINGS LTD.
demanderesse
et
BLOK-LOK LTD.
défenderesse
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
LE JUGE RUSSELL
[1] Il s'agit d'une demande en vue d'obtenir une ordonnance infirmant la décision en date du 20 février 2003 dans laquelle le protonotaire Lafrenière a rejeté les demandes de réparation suivantes de la défenderesse :
a) conformément à la Règle 107(1), que toute question concernant l'ampleur de l'atteinte à des droits ainsi que toute question concernant les avantages ou préjudices découlant de l'atteinte à des droits (collectivement les questions reportées) soient jugées séparément après l'instruction relative à la question de la responsabilité qui est soulevée dans la présente instance, s'il semble alors nécessaire que les questions reportées soient tranchées;
b) conformément au paragraphe 107(2) et à l'alinéa 247b) des Règles, qu'aucun interrogatoire préalable ou communication préalable de documents n'ait lieu au sujet des questions reportées avant la conclusion de l'instruction concernant la question de la responsabilité, ladite preuve pouvant être présentée par la suite s'il semble alors nécessaire que les questions reportées soient tranchées;
c) toute autre réparation que la Cour juge à propos d'accorder;
d) les dépens de la défenderesse.
[2] L'arrêt Canada c. Aqua-Gem Investments Ltd., [1993] 2 C.F. 425, [1993] 1 C.T.C. 186, 93 D.T.C. 5080, 149 N.R. 233 (C.A.) permet de dire qu'une ordonnance discrétionnaire du protonotaire ne devrait pas être modifiée en appel, à moins qu'elle ne soit entachée d'erreur flagrante, au sens où l'exercice du pouvoir discrétionnaire était fondé sur un mauvais principe ou sur une mauvaise appréciation des faits, ou à moins qu'elle ne porte sur des questions ayant une influence déterminante sur l'issue de la cause, auquel cas le juge appelé à réviser l'affaire devrait exercer son propre pouvoir discrétionnaire de novo.
[3] La demande que la défenderesse a présentée devant le protonotaire Lafrenière était essentiellement une demande de disjonction des questions en litige et ne portait sur aucune question ayant une influence déterminante sur l'issue de la cause, soit une action en contrefaçon de brevet concernant des carreaux de maçonnerie. Par conséquent, l'ordonnance du protonotaire Lafrenière en date du 20 février 2003 ne devrait pas être infirmée, à moins qu'elle ne soit « entachée d'erreur flagrante » , au sens où elle serait fondée sur un mauvais principe ou sur une mauvaise appréciation des faits.
[4] L'avocat de la défenderesse a soutenu que le critère à appliquer en vertu de la Règle 107 à l'égard d'une demande de disjonction est la question de savoir si la Cour est convaincue selon la prépondérance des probabilités que, compte tenu de la preuve et de toutes les circonstances de l'affaire (y compris la nature de la demande, le déroulement de l'instance, les questions en litige et les redressements demandés), la disjonction permettra fort probablement d'apporter au litige une solution qui soit juste et la plus expéditive et économique possible.
[5] Le principal facteur à examiner à l'égard d'une demande de disjonction fondée sur la Règle 107 est la mesure dans laquelle la disjonction des questions en litige se traduirait par des économies de temps et d'argent importantes.
[6] La défenderesse soutient que la décision du protonotaire Lafrenière était erronée pour les raisons suivantes :
a) le protonotaire a avisé l'avocat de la défenderesse à l'audience que, lorsqu'une partie défenderesse demande la disjonction des questions en litige et que la partie demanderesse refuse, la Cour ne fait habituellement pas droit à la demande. En agissant de la sorte, le protonotaire a mal appliqué le critère relatif à la disjonction en vertu de la Règle 107 actuellement en vigueur et a plutôt appliqué le critère qui existait en vertu de l'ancienne règle 480 et qui est énoncé dans Canamerican Auto Lease et al. c. La Reine, [1985] 1 C.F. 638 (C.F. 1re inst.);
b) l'avocat de la demanderesse ne s'est pas fait demander de présenter des observations à l'audience. En réalité, le protonotaire Lafrenière a appliqué un critère beaucoup plus rigoureux, obligeant la défenderesse à prouver sa cause selon la prépondérance des probabilités;
c) le protonotaire a commis une erreur lorsqu'il a conclu que la demande de disjonction a été présentée trop tard car, en vertu de la Règle 107, une demande de cette nature peut être présentée en tout temps;
d) le protonotaire n'a pas accordé suffisamment de poids à l'ensemble de la preuve portée à l'attention de la Cour et, effectivement, il avait déjà tranché la demande (en se fondant sur l'absence de consentement de la demanderesse) avant que l'avocat de la défenderesse présente ses observations.
[7] Malheureusement pour la défenderesse, les allégations relatives aux erreurs que le protonotaire Lafrenière aurait commises ne reposent sur guère plus qu'une divergence d'opinion concernant le poids à accorder à la preuve et sur les arguments de l'avocat au sujet de ce qui a été dit à l'audience; or, selon l'avocat de la demanderesse, il s'agit là essentiellement d'un compte rendu narratif informel qui ne se prête pas à un examen hors contexte. Je suis d'accord.
[8] Les motifs de l'ordonnance du protonotaire Lafrenière se trouvent dans l'ordonnance elle-même, dans laquelle le protonotaire mentionne en toutes lettres qu'il a examiné les documents déposés et entendu les arguments des avocats et que [TRADUCTION] « la défenderesse n'ayant pas prouvé que la disjonction permettra fort probablement d'apporter au litige une solution qui soit juste et la plus expéditive et économique possible comparativement à la poursuite de l'instance sous sa forme initiale » , il rejette la demande.
[9] En conséquence, les motifs de l'ordonnance du protonotaire Lafrenière ne sont pas entachés d'erreur flagrante ou fondés sur un mauvais principe ou sur une mauvaise appréciation des faits. Je refuse donc de modifier la décision qu'il a rendue en l'espèce.
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE :
1. La demande de la défenderesse est rejetée.
2. Les dépens de la demande, fixés par la présente ordonnance à un montant de 250 $, sont adjugés à la demanderesse à l'instance.
« James Russell »
Juge
Traduction certifiée conforme
Martine Guay, LL. L.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : T-779-01
INTITULÉ : FERO HOLDINGS LTD.
demanderesse
c.
BLOK-LOK LTD.
défenderesse
DATE DE L'AUDIENCE : le lundi, 24 mars 2003
LIEU DE L'AUDIENCE : Toronto (Ontario)
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE PAR : le juge Russell
DATE DES MOTIFS : le mercredi, 26 mars 2003
COMPARUTIONS :
Harjinder Mann POUR LA DEMANDERESSE
Michael George POUR LA DÉFENDERESSE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Serge Anissimoff
Harjinder Mann
Anissimoff & Associates
Avocats
235 North Centre Road, Suite 201
London (Ontario) N5X 4E7 POUR LA DEMANDERESSE
Michael E. Charles
Bereskin & Parr
40th Floor, Scotia Plaza
40 King Street West
Toronto (Ontario) M5H 3Y2 POUR LA DÉFENDERESSE
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
Date : 20030326
Dossier : T-779-01
ENTRE :
FERO HOLDINGS LTD.
demanderesse
et
BLOK-LOK LTD.
défenderesse
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET
ORDONNANCE